L'Echo de la Fabrique : 19 août 1832 - Numéro 43

Nous soussignés, fabricans d?étoffes de soie, habitant la ville de la Croix-Rousse, protestons hautement contre les articles de quelques journaux de Lyon qui tendaient à rejeter le blâme des rassemblemens du clos Casati sur notre population ouvrière.

Non-seulement nous nous sommes prononcés ouvertement contre ces réunions, mais nous avons encore voulu que les personnes employées par nous ne dépassassent pas la barrière, afin d?éviter qu?elles prissent part aux rassemblemens qui avaient lieu dans ledit clos et non pas à la Croix-Rousse, ainsi que quelques journaux l?ont perfidement insinué.

Amis de l?ordre sans lequel l?industrie ne saurait prospérer, nous savons respecter les lois, comme aussi nous savons obéir aux magistrats placés à la tête de l?administration municipale de cette commune, dont la sollicitude toute paternelle nous est connue.

Nous dirons donc, et nous ne cesserons de le répéter : Non, les ouvriers de la Croix-Rousse ne sont pas des anarchistes, des révolutionnaires ; leurs exigences se bornent à vouloir cette liberté sage qui assure la confiance et fait fleurir le commerce. Non, les ouvriers de la Croix-Rousse ne sont pas des séditieux : et qu?auraient-ils à gagner à un bouleversement, eux qui ne trouvent que dans la tranquillité publique les moyens d?assurer à leurs familles le pain qui les nourrit ?

Nous savons que de lâches instigateurs, ennemis acharnés de notre repos, voudraient tenter de troubler le calme dont nous sommes fiers de jouir. Qu?ils apprennent, par la publicité que nous donnons à cette protestation, que nous sommes disposés à en finir avec eux, et que nous serions les premiers à les placer sous la main de l?autorité, s?ils se faisaient connaître par de nouvelles tentatives.

La Croix-Rousse, le 10 août 1832.

(Suivent 145 signatures de chefs d?ateliers.)

Note du Rédacteur. ? Nous insérons cette protestation, quoique nous la jugions inutile. Les ouvriers de la Croix-Rousse ont été attaqués en masse par le Courrier de Lyon qui leur garde rancune. Mais qui est-ce qui croit au Courrier de Lyon ? Nous aurions d?autres réflexions à faire : nous les taisons, parce qu?elles sortent de notre cadre ; le Précurseur les fera pour nous, et rachètera par là certaines expressions contenues dans un de ses derniers Nos et qui ont offusqué la classe ouvrière ; nous sommes convaincus que son patriotisme les lui avait arrachées, et qu?il s?en est aussitôt repenti.

[6.1]Nous pensons faire plaisir à nos lecteurs en leur donnant la note des affaires qui seront portées devant la cour d?assises de Lyon, à dater de demain. Nous les prévenons que le célèbre Odillon-Barrot, avocat à Paris, membre de la chambre des députés, portera la parole pour M. Anselme Petetin. Tout Lyon voudra rendre hommage à cet ami de Lafayette.

Lundi, 20. ? MM. Picard (Pierre), Courty (Joseph), Lafage (Jean), offense publique envers son S. A. R. le duc d?Orléans, prince royal. MM. Tocanier (Auguste), provocation à la rébellion. Badin (Vincent), vol et tentative de vol.

Mardi, 21. ? Rivière (François), meurtre. Flachat (François), attentat à la pudeur sur un enfant de moins de 11 ans, sur laquelle il avait autorité.

Mercredi, 22. ? Calmisi (Jean), Champin (Philippe), faux en écriture authentique et publique par des fonctionnaires et officiers publics. Roman (Jean-Claude), vol avec effraction.

Jeudi, 23. ? Les sieurs Faivre (Adéodat), Charvin (Hyacinthe), Landry (Jean-Denis), Landry (Jean-Benoît), provocation à l?assassinat du roi et offense à sa personne.

Vendredi, 24. ? Crozy dit Barouchy (Etienne), vol. Bernarel (Claude), attentat à la pudeur sur sa fille âgée de moins de 11 ans.

Samedi, 25. ? Rigaud-Chieza (Jules), banqueroute frauduleuse.

Lundi, 27, mardi, 28, mercredi, 29. ? Michallet (François), faux en écritures publiques et soustraction de deniers publics.

Jeudi, 30. ? Couturier (Edouard), tentative de vol avec effraction. M. Petetin (Anselme), rédacteur en chef du Précurseur, 1° excitation à la haine et au mépris du gouvernement ; 2° offenses à la personne du roi.

Vendredi, 31, ? M. Petetin (Anselme), 1° excitation à la haine et au mépris du gouvernement ; 2° excitation à la haine des citoyens contre l?armée ; 3° offenses à la personne du roi ; 4° provocation à la rébellion non suivie d?effet.

Samedi, 1er septembre. ? M. Petetin (Anselme) 1° offense à la personne du roi ; 2° attaque à la dignité royale ; 3° excitation à la haine et au mépris du gouvernement.
MM. Dufaitelle (Eugène), homme de lettres, Petetin (Anselme), 1° excitation à la haine et au mépris du gouvernement du roi ; 2° attaque contre la dignité royale ; 3° attaque contre l?ordre de successibilité au trône et contre les droits du roi.

Lundi, 3 septembre. ? Jambon (Louis), 1° vol avec escalade et effraction ; 2° coups volontaires.
Volage (Jacques), Gannat (François), vol la nuit par plusieurs personnes dans une maison habitée.

Mardi, 4. ? MM. Beuf (Joseph), homme de lettres, ex-rédacteur du Furet, Ayné (Dominique-Laurent), 1° provocation à la désobéissance aux lois ; 2° attaque contre les droits du roi ; 3° trouble à la paix publique, etc. ; 4° offense à la personne du roi ; 5° provocation à la rébellion armée.
Rochet, vols la nuit avec escalade et effraction.

Mercredi, 5. ? Rostaing (Louis), banqueroute frauduleuse. Desroches (Jeanne), 3 assassinats et parricide.

Jeudi, 6, et vendredi, 7. ? MM. Demange, Vuitton, Vignal, Balleydier, complot tendant à exciter à la guerre civile et au renversement du gouvernement.
Brun, proposition non agréée d?entrer dans ledit complot.

 

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