L'Echo de la Fabrique : 2 décembre 1832 - Numéro 58

 AU MÊME.

Monsieur,

Ainsi que je l’ai promis dans ma précédente lettre, je vais remplir mes engagemens, puisque vous pensez que ces observations peuvent jeter quelques éclaircissemens utiles.

Je commencerai donc, comme je l’ai indiqué, à parler de l’importance de l’étymologie des noms, en me renfermant cependant dans le sujet dont il est question, et en n’en donnant qu’une idée générale, et sous le rapport du mot qui nous occupe.

Etymologie : ce mot est dérivé du grec ; ses racines sont : ety, qui dépend, mologie, parole, c’est-à-dire parole dépendante d’une autre, ou analogue à une autre d’un même sens.

L’étymologie est fille de l’origine ; et pour établir combien sa conservation peut être utile, on remarquera que c’est elle qui est la clé qui nous ouvre l’histoire des siècles passés ; puisqu’elle nous conduit jusqu’à découvrir l’origine, comme on le verra en parlant des mots orientalis, byssus ou satin, qui sont les mots dont les anciens se servaient pour indiquer la soie et sa fabrication.

L’étymologie des noms s’établit de trois manières. La première, fondée sur la nature même des choses, se crée par l’effet que produit sur nos sens l’apparence de cet objet même exprimé d’après la signification du langage dont on se sert, pour établir ce nom, tels que brute, naïf, etc.

La deuxième manière, par l’analogie ou ressemblance avec quelque autre objet primitif, tels que printemps de la vie, glace de miroir, etc., et tout ce qui rentre dans l’explication des tropes.

La troisième, par une dénomination fantastique, venant souvent du nom de celui qui crée la forme de l’objet, tels que quinquet (de Jean Quinquet, inventeur de ces sortes de lampes.)

Souvent, du nom d’un pays, d’une ville, etc., tels qu’un Elbeuf, un Sedan, un Florence, pour des étoffes fabriquées primitivement dans ces villes, etc.

D’après l’aperçu de ces citations, on voit que l’étymologie, prise dans sa signification primitive, a un sens dont la conservation est d’autant plus essentielle qu’elle sert à maintenir un rapport dans nos idées, ce qui est le moyen de transmettre d’âge en âge des expressions intelligibles, qui, si elles étaient changées arbitrairement, causeraient un désordre dans l’interprétation, dont le résultat pourrait nuire à l’intérêt de chaque individu, ou à ceux de la société.

[4.1]Quant aux noms collectifs, généraux ou partitifs, que la grammaire définit, ils sont originaires d’une langue dont le caractère était d’exprimer beaucoup de choses en peu de mots. Telle est la langue grecque, la langue chinoise, et presque toutes les langues orientales. Par exemple, le mot armée, du mot armes réunies, ce mot, dont l’origine se perd dans la nuit des temps, a dû être le mot primitif d’un peuple qui, le premier, s’était réuni pour sa défense.

Monsieur le rédacteur, si vous jugez ces citations suffisantes sur l’étymologie, dans un autre article j’aborderai celles indiquées dans le troisième sujet de ma précédente.

Agréez, etc.

BEAULIEU,

professeur de français.

 

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