L'Echo de la Fabrique : 17 mars 1833 - Numéro 11

 

Association commerciale d’Echanges.1

Nos lecteurs connaissent la base du système de M. Charles Fourrier. Association universelle de tous les hommes par l’attraction du plaisir. On ne peut que lui reprocher d’être trop étendue, suivant le proverbe : « Qui trop embrasse mal étreint. » Mais, quoi qu’il en soit, la société doit de la reconnaissance à ce philosophe, lors même qu’il échouerait. MM. Mazel frères se sont emparés de cette idée féconde pour l’appliquer immédiatement à l’industrie ; convaincus que dans notre siècle agioteur l’intérêt serait un mobile encore plus sûr que le plaisir, ils ont établi par spéculation l’association que M. Fourrier et ses disciples propagent par philantropie [6.1]seulement. Nous nous garderons bien de blâmer une telle spéculation, elle n’a rien que d’honorable. Elle est spécialement utile aux petits industriels, aux prolétaires, que le manque de capitaux empêche d’exploiter d’une manière convenable leur industrie. L’association d’échanges, comme son titre l’indique, répudie l’argent, métal qui, on le sait, n’est pas la richesse, mais seulement le signe représentatif. Elle n’opère que sur des marchandises, et, moyennant une faible prime de 4 p. %, elle met en rapport toutes les classes de producteurs ; elle leur ouvre à chacune un compte courant ; elle leur sert de teneur de livres ; ainsi par exemple, elle fait livrer au bottier de la toile pour la valeur des bottes qu’il a fournies à un boulanger, et ce dernier acquitte en pain au toilier la dette qu’il a contractée, et ainsi de suite. Tous sont successivement crédités et débités, et se libèrent réciproquement au moyen des mandats de paiement que la compagnie délivre aux uns sur les autres, sur le vu de leurs comptes respectifs. Nous engageons nos lecteurs à vérifier par eux-mêmes cette entreprise qui, dirigée avec probité et intelligence, ne peut moins faire que d’augmenter le bien-être des hommes qui ont peu, classe la plus nombreuse au milieu de notre civilisation, et peut-être même à cause d’elle.

MM. Mazel ont fondé sur presque tous les points de la France des succursales de leur maison principale, établie à Paris, rue de la Sourdière, n° 23. La maison de Lyon est sous la direction de MM. Mondon et Ce, ses bureaux sont rue de la Préfecture, n° 5 ; un agent pour la ville de la Guillotière est établi dans cette commune, rue de Chabrol, n° 3.

MM. Mondon et Ce doivent incessamment publier un tableau de leurs adhésionnaires dont le nombre excède aujourd’hui 500. Nous reviendrons sur ce sujet important.

M. C.

Notes de base de page numériques:

1 Cette association proposait un système d’échanges sans argent, dont l’inspiration aurait été en partie fouriériste. Les principaux journaux ouvriers lyonnais (L’Écho de la Fabrique et L’Écho des Travailleurs) vont, à l’extrême fin de l’année 1833, se désolidariser entièrement de cette entreprise.

 

Contrat Creative Commons

LODEL : Logiciel d'édition électronique