L'Echo de la Fabrique : 20 novembre 1833 - Numéro 6

Parallèle du bon d’échange

avec la lettre de change et le billet a ordre.

L’échange est basé sur un principe de vérité : dans les premiers âges du monde, sous l’âge d’or, l’échange était seul le commerce, et c’est à la mauvaise foi des [4.1]hommes, à la cupidité des potentats, dit l’histoire, que nous devons le règne du système monétaire, complété plus tard par l’établissement du billet à ordre et de la lettre de change.

Certes, nous sommes loin de nier l’avantage qu’a sur l’échange primitif le système monétaire, né de la civilisation ; mais ce que nous pensons aussi, c’est qu’alors que tout marchait vers le progrès, lui seul est resté stationnaire et devient insuffisant aujourd’hui.

C’est à ce système de déception, étayé, il est vrai, des lois prohibitives et des entraves mises à la liberté industrielle, que nous devons attribuer ces crises affreuses qui, en 1827, en Angleterre, et en 1830 en France, ont plongé le commerce dans une espèce d’atonie dont il a peine à se relever.

Plébéïens, nous avons senti les souffrances du peuple, et porté sans hésitation une main hardie, mais sûre, sur la plaie dangereuse de notre époque,

Nous avons comparé l’échange primitif avec le système monétaire, et de cette comparaison a surgi l’échange combiné, ou l’échange par association.

Là n’était cependant pas toute la difficulté ; bien des économistes avant nous, les Owen, les Say, les Tracy, avaient prôné ce même système, mais tous s’arrêtaient interdits devant les moyens d’exécution. Il fallait rendre l’échange malléable, si nous pouvons nous exprimer ainsi, il fallait lui donner surtout cette facilité de circulation, seul mérite du numéraire.

Ainsi donc, nous devions trouver un signe qui pût représenter facilement l’échange, et le grand problème était résolu.

Ce signe n’est autre chose que le bon d’échange qui résume en lui toutes les qualités du billet à ordre et de la lettre de change, sans en avoir les vices ou les inconvéniens.

En effet, dans l’échange par association, le bon d’échange qui ne peut être émis que par l’effet d’un travail déjà exécuté pour la société, repose sur l’association tout entière ; tandis que le billet à ordre et la lettre de change ne sont souvent que l’œuvre d’une convention entre deux individus, pour en escroquer un troisième.

En outre, le bon d’échange n’est pas une valeur accidentelle, fugitive, et telle que le numéraire, mais bien une marchandise ayant une valeur et une utilité réelles ; et poussant notre raisonnement à l’extrême, n’est-il pas vrai que si l’argent venait à être démonétisé et remplacé par un métal plus précieux ou un signe plus commode, le détenteur en serait fort embarrassé, tandis qu’il n’en serait pas de même avec un bon d’échange représentant un objet de consommation qui est toujours nécessaire ? Cette comparaison n’est du reste que pour faire ressortir l’avantage du bon d’échange sur la lettre de change ou le numéraire.

Ainsi donc, le bon d’échange est le pivot du système d’échange ; mais était-il suffisant pour faire tourner la machine ? Non, certes, il lui fallait encore le lien d’une association légale dont nous reconnaissons tous chaque jour la puissance et la force. C’est donc pour parvenir à notre but que nous avons fait souscrire des actes d’adhésions à nos statuts, c’est-à-dire, recherché des associés.

Jules dubroca.

 

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