L'Echo de la Fabrique : 25 décembre 1833 - Numéro 16

Lyon, le 21 décembre 1833.

Monsieur le rédacteur,

Votre numéro du 7 décembre courant contient une lettre de M. Dailly, fabricant, rue Bouteille, dans laquelle je suis accusé d’avoir, en ma qualité de Mutuelliste, imposé aux membres du conseil, et même à M. le président, un tarif de tâches pour les apprentis. J’aurais dédaigné de répondre à un pareil fait, si M. Dailly n’annonçait qu’il en peut fournir la preuve. Je me borne maintenant à le démentir formellement ; le public jugera entre les assertions. Je n’ai jamais fait partie que de la section destinée, avant le procès des Mutuellistes, à la fixation du prix des façons.

J’attends donc les preuves promises : M. Dailly n’en fournira qu’à la condition de les inventer.

Je vous prie, monsieur, et vous requerrais au besoin, conformément [3.2]à la loi, d’insérer cette réponse dans votre plus prochain numéro. Je l’aurais faite plutôt si votre journal n’était pas ignoré de la plupart des chefs d’atelier.

J’ai l’honneur d’être votre très humble serviteur,

matrod.

Note du rédacteur. – Nous nous empressons d’insérer la lettre de M. Matrod ; il n’avait pas besoin de nous requérir, cela sent trop le parquet et la police : il faut que les hommes qui se respectent n’emploient cette expression que le plus rarement possible. Nous distinguons deux parties dans cette lettre, d’abord celle qui s’adresse à M. Dailly, et à laquelle ce chef d’atelier répondra sans doute, car nous avons soin de ne pas assumer sur nous la responsabilité des lettres que notre fonction de journaliste nous fait un devoir de publier, par ces formules : Nous ne doutons pas, et autres pareilles ; aussi, nous n’avons jamais à nous rétracter… Ensuite une partie qui s’adresse au journal lui-même, et à laquelle nous allons répondre brièvement.

M. Matrod affecte de répondre fort tard à une lettre dont il a eu connaissance dés le lendemain, et il prend pour prétexte que l’Echo des Travailleurs est ignoré de la plupart des chefs d’atelier. L’Echo de la Fabrique, dont M. Matrod préside le comité de rédaction depuis le mois d’août, a cependant eu soin d’annoncer notre entreprise (ce qui nous évita, dans le temps, le tirage et l’envoi d’un grand nombre de prospectus). Est-ce que depuis cette époque, l’Echo de la Fabrique aurait cessé d’être lu par les ouvriers ? On nous l’avait bien dit, mais nous ne voulions pas le croire. Dans tous les cas, M. Matrod connaît et lit notre feuille. Il n’ignore pas non plus que la plupart des actionnaires fondateurs de l’Echo de la Fabrique se sont ralliés à nous et ont en partie rompu avec ce journal ; que d’autres, par des raisons particulières dont ils ne doivent compte à personne, ont voulu rester dans les deux camps ; et enfin que quelques-uns de ces derniers ont même emprunté les colonnes de notre journal pour faire entendre certaines vérités que probablement l’Echo de la Fabrique n’aurait pas admises. Ce patronage est assez nombreux et influent, pour qu’il ne soit pas permis de dire que nous sommes, en quelque sorte, inconnus dans la fabrique. Nous renvoyons donc l’épigramme de M. Matrod, car c’est vraiment une épigramme, une malice qu’il a voulu faire. Ah ! M. Matrod, prenez garde ! on ne vit pas quand on a tant d’esprit.

 

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