L'Echo de la Fabrique : 5 octobre 1834 - Numéro 3

exposition publique et gratuite

DES PRODUITS DES FABRIQUES ÉTRANGÈRES,

au palais saint-pierre.

Suite. – V. le n° 2.

Nous n’entrerons pas dans le détail des prix des diverses qualités de florences, marcelines et marcelinettes ; nous ferons cependant observer que les trois pièces de lustrines, nos 13, 14 et 15, sont inférieures sous bien des rapports à ce que l’on fabrique à Lyon ; elles sont toutes rayées. Il n’est point de maison ici qui ne considérât cet article comme rossignol. Il n’en est pas de même des gros de Naples de Zurich et de Bâle ; la fabrication en est soignée. Néanmoins nous pouvons assurer les acheteurs qu’ils ne trouveront rien d’inférieur dans les magasins de Lyon ; ils trouveront même des étoffes supérieures sous les rapports de la fabrication comme sous ceux du choix des matières et de la teinture. En général les étoffes de Zurich et de Bâle ont toutes peu d’éclat ; elles sont d’une dureté au maniement que n’ont pas même nos petits gros de Naples tout souples, et qu’on livre encore aujourd’hui à la vente à 3 fr. et au-dessous. Ainsi le n° 17, par exemple, coté à 3 fr. 9 c, sans escompte, revient réellement à 3 fr. 90 c., en y ajoutant ainsi que de raison 15 p. 100 d’augmentation du prix des soies, et 12 p. 100 d’escompte. L’aune de cette étoffe pèse un peu moins de 28 grammes. Le n° 19 porte 52 aunes 3/8 gros de Naples ½ aune de large, à 4 fr. 07 c. sans escompte. Le prix est réellement de 5 fr. 15 c., en y ajoutant l’escompte et l’augmentation de la soie. Elle pèse 40 grammes l’aune. Il y aurait de l’inconséquence à affirmer que l’on peut trouver sur notre place des étoffes semblables, de même poids et au même prix que celles indiquées, mais on y trouve pourtant des étoffes à tout prix et dont la différence n’est pas telle qu’il en puisse résulter une concurrence notable.

Relativement aux prix de façon, nous voyons le n° 17 [2.2]coté de 30 à 35 c., et le n° 19 de 60 à 65 c., la largeur du n° 17 est très étroite. Il y a entre le prix de façons de l’article n° 17 une différence de moitié avec les prix de Lyon. Ici le petit gros de Naples se paie 60 c. Quant aux gros de Naples plus larges, le prix est de 75 c. à Lyon. Il n’y a donc qu’une différence de 10 c. sur cet article et le prix de Zurich, tel qu’il résulte de la cote du n° 19. Ainsi, en admettant que sur le premier article (n° 17) et ceux analogues, le prix de façon puisse être un obstacle à la fabrication lyonnaise, cet obstacle disparaît sur le second (n° 19), et cela avec d’autant plus de raison, qu’il n’est pas rare de voir les prix varier de 10 c. d’une fabrique à l’autre. Nous trouvons encore la même différence sur les gros de Naples 3/4, dont le prix de main-d’œuvre n’est que de 70 à 75 c. Ils se paient à Lyon 35 c. de plus. Mais cette différence devient à peu près nulle sur les articles serge n° 32, 33 et 34. Nous devons en conclure que quelques erreurs ont pu être commises par les acheteurs qui en définitif n’ont pas assisté au réglement des salaires payés par les négocians étrangers à leurs ouvriers.

Nous ne dirons plus qu’un mot sur ce sujet. Le n° 1, gros de Naples 3/4, tramé gros noir, est bien fabriqué. 49 aunes, montant de son aunage, pèsent 2 955 grammes soit 65 grammes l’aune. Le prix de vente est coté 6 fr. 25 c. avec escompte de 12 p. 100 banque. L’augmentation de 15 p. 100, à raison du prix de la pièce, porte le prix à 7 fr. 15 c. Il nous serait impossible de dire si ce prix pourrait être adopté par la fabrique de Lyon, attendu que chaque maison, suivant la nature de ses produits, emploie des matières dont la qualité et la teinture permettent d’élever ou d’abaisser de 50 à 75 centimes. Nous, allons passer aux produits de la prusse rhénane. Les unis de Creveld sont beaux ; le satin de Luxor, n. 50, est remarquable ainsi que le gros d’Orléans, n. 52 ; il n’en est pas de même des gilets façonnés et des philippines ; leur prix comparativement aux nôtres sont plus élevés, et nous n’osons louer la beauté des dessins de crainte qu’on ne prenne nos éloges pour une épigramme, car ces dessins sont absolument copiés sur les nôtres.

Les velours de Creveld sont renommés et font, dit-on, à Lyon une concurrence ruineuse. Sérieusement nous ne le croyons pas, car malgré l’accroissement de la fabrique de Creveld, nos velours ont toujours été recherchés. Le n. 57 mérite de fixer l’attention ; il est côté 14 fr. 26 cent, sans escompte. La façon est portée à 4 fr., nous devons ici faire observer que nos velours différent de ceux de Creveld, par un fond serge et une coupe sur soie, au lieu d’un fond taffetas avec coupe sur drap. Cette différence est notable et doit être appréciée pour la fixation du prix de la façon, mais aussi le velours conserve par ce moyen beaucoup plus d’éclats. En résumé nos velours sont d’un prix peu élevé au-dessus des gros velours de Creveld, et ils leur sont infiniment supérieurs. Cependant comme le bon marché est le seul but auquel on semble viser aujourd’hui, nous devons dire que deux ou trois maisons de notre ville, viennent d’essayer de fabriquer des velours selon le genre de Creveld. Nul doute qu’elles ne réussissent à enlever, au moins pour la consommation française, ce débouché à nos voisins, qui ont plusieurs dépôts à Lyon, lesquels deviendront inutiles, lorsque Lyon pourra fournir les mêmes produits au même prix ; mais pour l’acquit de notre conscience, nous appliquerons toujours à ces étoffes bon marché, françaises où étrangères, le dicton populaire : il n’y a rien de ruineux comme le bon marché.

(La suite au prochain numéro.)

 

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