L'Echo de la Fabrique : 15 février 1835 - Numéro 7

CONSEIL DES PRUD?HOMMES.

Séance du 12 février 1835.

Président M. Riboud, Membres : MM. Blanc, Bourdon, Chantre, Cochet, Dumas, Micoud, Milleron, Pellin, Perret, Rodet, Vérat, Wuarin.

Vingt-deux causes sont appelées dont huit sur citation, sept sont retiréesi, quatre sont jugées par défaut, une renvoyée à huitaine, une autre au 19 mars, les autres jugées contradictoirement ou renvoyées en conciliation ; au nombre de ces dernières se trouvent celles de 1° Pinot père et filscontre Dupuis, renvoyée devant MM. Rodet et Teissier (section de chapellerie) ; 2° Nugues contre Cavalier, relative à un montage de métier, renvoyée devant MM. Dufour et Milleron.

ebenot c. billon et candy. Les questions à juger étaient celles-ci :

Un négociant peut-il établir, par ses livres, qu?une somme qui ne figure pas sur le livre du chef d?atelier lui a cependant été comptée ? ? Oui.

Le conseil peut-il se déterminer par des considérations telles que l?habitude du fabricant de recevoir de l?argent à la fin de chaque pièce ? ? Oui.

Ebenot soutenait n?avoir pas reçu une somme de 100 fr., laquelle, en effet, n?était pas marquée sur son livre. MM. Billon et Candy prétendaient que c?était une erreur, ils montraient leur livre de caisse où cette somme était portée. A cet égard Ebenot articulait avoir appris qu?une erreur de caisse de 200 fr. avait été faite chez MM. Billon et Candy, et il en concluait qu?on avait voulu la redresser en partie à ses dépens. Le conseil a résolu affirmativement les questions posées [3.1]ci-dessus et a condamné le fabricant à tenir compte de cette somme de 100 fr.ii.

Les autres causes avaient trait à des contestations entre des chefs d?atelier et des apprentis et ne présentent aucune question nouvelle. Trois affaires entre des graveurs (Pelletier c. Copier ; Lazarre c. Corme ; mariés Poizat c. Verdier) ne présentent également, aucun intérêt. Deux causes relatives à des contraventions doivent aussi être passées sous silence.

Notes de fin littérales:

i. M. CharnierCharnier qui était dans l?auditoire, ayant adressé à M. le président quelques mots au sujet de l?une d?elles (RémondRémond c. MouronMouron) a reçu une réponse un peu brusque. Nous dirons franchement : M. le président aurait pu avoir des paroles plus douces envers un collègue ; mais M. CharnierCharnier était dans son tort en interpellant publiquement le président ; il avait encore tort sous un autre rapport : les prud?hommes ne peuvent cumuler leurs fonctions avec l?office de défenseur, même gratuit. Ils sont appelés à conseiller, concilier et juger les parties et non à les défendre. Le zèle de M. CharnierCharnier l?a emporté trop loin.
ii. Au premier aspect, ce jugement paraît juste et cependant il y a de graves objections à faire La première est celle-ci, et nous désirerions grandement avoir la réponse de M. le président et de ses collègues négocians. Un chef d?atelier a-t-il le droit d?exiger en cas de contestation, la représentation des livres du négociant ? nous répondra-t-on par l?affirmative ? Nous en doutons, cependant pour être conséquent le conseil devra, toutes les fois qu?un fabricant le demandera, ordonner l?apport des livres du négociant. On sent toute l?injustice qu?il y a d?accorder à l?un ce qu?on est disposé à refuser à l?autre, et cependant il serait plus rationnel de donner cette satisfaction au chef d?atelier, car ce n?est pas lui qui écrit sur son livre. Son livre est donc bien un titre pour lui ; mais à l?égard des livres de commerce des négocians, il est de principe qu?ils ne font jamais foi pour eux, mais bien contre eux. Le conseil a violé ce principe contenu dans les art. 1329 du code civil et 12 du code du commerce : il aurait dû au moins déférer d?office le serment à BillonBillon et CandyCandy en exécution de l?art. 1366 du code civil.

 

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