L'Echo de la Fabrique : 5 avril 1835 - Numéro 29

une courte réponse

A LA TRIBUNE PROLÉTAIRE.

La Tribune prolétaire, dans son numéro de dimanche dernier, a dit que l’Indicateur repoussait la libre défense, et que ceux de qui il recevait l’impulsion étaient contrariés par le mandat qui, selon elle, a été imposé généralement à tous les prud’hommes chefs d’atelier ; rien n’est plus controuvé que cette assertion, car l’Indicateur a proclamé la libre défense avant la Tribune prolétaire, et à l’instant même des élections. Il y a plus, au moment où nos antagonistes rédigeaient un article contre nous en faveur de la libre défense, nous nous occupions de la rédaction d’un autre qui en faisait ressortir la justice et tous les avantages. Par là on peut juger de leur bonne foi, en nous accusant d’être en dissidence avec eux sur ce point.

A l’égard du mandat qu’ils annoncent avoir été donné aux prud’hommes, ils disent qu’il y a mauvaise foi à le nier, parce qu’il n’est pas écrit.

Avant de bien juger il faut bien comprendre. Or, nous allons nous expliquer, de manière à ne laisser aucune équivoque.

Ce qui s’est passé dans les sections étant à la connaissance de tous les électeurs, nous sommes dispensés d’en faire le détail ; nous allons seulement établir le point sur lequel nous sommes en dissidence avec la Tribune prolétaire. Elle dit qu’un mandat a été donné aux prud’hommes pour qu’ils exigent la libre défense, et nous, nous disons que des vœux ont été exprimés pour que les prud’hommes la réclament : jusque-là nous sommes à peu près d’accord.

Mais si nous avons contredit la Tribune prolétaire, c’est que la manière dont elle a annoncé que mandat avait été donné, laisse à sous entendre que tous les prud’hommes ont été nommés aux mêmes conditions ; cependant il est [2.2]à notre connaissance que M. Falconnet l’a été à la réserve de se retirer si la libre défense n’était obtenue. Or, c’est dans ce sens que nous comprenons le mandat, et que nous disons qu’il n’a pas été généralement donné.

Nous n’en concluons pas par cela que les sept autres prud’hommes soient affranchis de leurs devoirs ; le mandat dont ils sont investis consiste à donner à ceux dont ils représentent les intérêts, toutes les chances favorables pour assurer à chacun la sécurité de ses droits. Or, la libre défense est une garantie contre le défaut de faculté d’exprimer clairement ses réclamations ; les mandataires des ouvriers doivent donc chercher à l’obtenir.

Il suffit pour les prud’hommes que des vœux se soient manifestés, pour qu’en homme d’honneur ils fassent tous leurs efforts, afin de les réaliser.

Que la Tribune prolétaire cesse ses hypocrites déclamations ; il lui sied mal de parler d’union alors qu’elle prend à tâche de semer la discorde, le mensonge et la calomnie. Si c’est ainsi qu’elle prétend défendre les intérêts des travailleurs, il faut avouer qu’elle emploie de singuliers moyens pour y parvenir.

Que ses craintes cessent sur la désunion future des membres du conseil ; sans la Tribune ils marcheront sous le même étendard. Ce ne sont pas ceux desquels elle a voulu parler, qui voudraient avoir le tort grave d’oublier par esprit d’antagonisme la haute mission de loyaux et fidèles mandataires ; occupés sérieusement des intérêts des travailleurs, ils ne voudront pas que par de misérables questions d’amour-propre, ou de personnes, leurs efforts se détournent du noble but auquel ils tendent. Ni la Tribune prolétaire, ni l’Indicateur ne seront leur organe spécial ; ils considéreront seulement l’un et l’autre journal comme leur conseil et s’en référeront à l’opinion publique qui jugera leurs actes.

Si nous voulions ennuyer encore nos lecteurs de la Tribune prolétaire, nous relèverions les erreurs qu’elle a voulu répandre parmi le peu de travailleurs qui la lisent, et comme le bon sens public ne se laisse pas abuser par ses paroles mensongères et qu’elle n’a pas l’accent d’une conviction profonde, d’un désintéressement pur pour s’acquérir des sympathies, il serait donc inutile de relever toutes ses turpitudes, puisque le public l’a jugée avant nous.

 

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