L'Echo de la Fabrique : 26 avril 1835 - Numéro 17

CONSEIL DES PRUD’HOMMES.

Séance du 23 avril 1835.

Président M. Riboud, Membres : MM. Bender, Chantre, Dufour, Dumas, Jubié, Micoud, Perret, Roux, Vérat, Wuarin.

22 causes sont appelées dont trois sur citation. 5 ont été arrachées ; 1 jugée par défaut, une ajournée sans indication de jour. Voici le détail des autres susceptibles de présenter de l’intérêt.

barrafort et Ce c. veyre père et fils. Question à juger :

Le conseil a-t-il le droit d’augmenter le prix du moulinage d’une balle de soie, nonobstant celui fixé dans la convention, s’il est reconnu que ce prix est trop minime à raison de l’infériorité de la soie ? – Oui.

Barrafort et Ce avaient remis à Veyre père et fils une balle de soie à mouliner au prix de 6 f. 50 c. le kilo, déchet compris. Le conseil a porté ce prix à 7 francs, vu la mauvaise qualité de la soie, à la charge par Veyre père et fils de rendre ledit ballot à l’époque convenue, fin avril couranti.

bofferding c. gelot et ferrière. Question à juger :

Le délai pendant lequel un négociant doit occuper un métier de châles, court-il du jour où la disposition est remise au fabricant, ou seulement du jour où le métier commence à travailler ? – Ce délai court du jour où la disposition est remise.

Les lecteurs connaissent les difficultés existantes entre MM. Bofferding et Gelot et Ferrière (v. 1834 n. 14 et 15 ; 1835 n. 6). Par convention du 9 avril 1833, Gelot et Ferrière convinrent avec Bofferding d’occuper deux métiers de châles au 1/4 pendant deux ans. Ils lui remirent les dispositions. Le premier métier a commencé à travailler le 1er juin, et le 2e le 15 août ; un intervalle de deux mois a été nécessaire pour le montage de chacun d’eux. Bofferding soutenait que le délai stipulé dans la convention n’était pas à échéance le 9 avril courant, mais seulement le 1er juin prochain pour l’un des métiers, et le 15 août pour le second. Gelot et Ferrière prétendaient qu’ils n’avaient entendu stipuler qu’un délai de deux ans pur et simple, que c’était à Bofferding à accélérer le montage de ses métiers, et que dans tous les cas, le délai nécessaire avait dû être prévu par lui. Le conseil a débouté Bofferding de sa demande, et dégagé Gelot et Ferrière de leur convention.ii

burlant (Dlle) c. goiffon (Dlle). Cette dernière étant sortie sans motif de l’atelier de sa maîtresse, après y être restée huit mois, a été condamnée, attendu qu’il n’y avait point de convention écrite, à lui payer 120 f. d’indemnité et à ne se replacer que comme apprentie.

Caisse de prêts c. viallet et guillard. Question à juger :

Y a-t-il contravention contre un négociant, lorsqu’il est constant qu’il est de bonne foi ; le chef d’atelier débiteur lui ayant remis, après avoir déchiré le frontispice, le livret qu’il doit garder par devers lui, au lieu du livret destiné à être déposé chez les négociants ? – Non.

La veuve Montabert au lieu de remettre à Viallet et Guillard le livret d’usage, et sur lequel étaient inscrites ses dettes envers la caisse, et M. Laquin, leur avait remis le sien propre, après avoir déchiré le frontispice pour éviter qu’on put reconnaître la fraude. L’agent de la caisse avait fait dresser contravention. Le conseil l’a annulée et ordonné le changement du livret.

pernollet c. st-olive. A été renvoyée au 25 courant, devant MM. Joly et Labory qui feront leur rapport.

sachet et Ce c. buffard. Renvoyée au 24 courant, devant MM. Micoud et Perret qui feront leur rapport.

sechon c. crestin. Question à juger :

Lorsqu’il est constant qu’un apprenti a mené une conduite scandaleuse [3.2]par son insubordination ; que le maître refuse de le garder et consent à ne point exiger d’indemnité ; le conseil peut-il ordonner qu’il sera tenu de faire un autre apprentissage, sans pouvoir déduire celui qu’il a déjà fait ? – Oui.

Sechon avait fait 18 mois, et sa conduite était devenue si insupportable que Crestin refusait de le garder. Le conseil a ordonné que Sechon ferait un nouvel apprentissage de trois ans, sans égard aux dix-huit mois déjà faits, et dans le cas où il serait constaté qu’il travaillerait, avant ce temps, comme ouvrier, Crestin aura droit à une indemnité.

vernois c. rivière. Le conseil a maintenu la jurisprudence établie par le jugement rendue en faveur de SivouxSivoux (voyez n. 15), et déclaré que Rivière avait eu le droit de retenir 5 f. à l’apprenti Vernois pour avoir absenté un jour. Il a autorisé l’affiche du jugement dans l’atelier.iii

Notes de fin littérales:

i. Ce jugement est remarquable par le précédent qu’il crée en faveur des fabricans d’étoffes de soie. La justice n’a pas deux poids et deux mesures.
ii. Ce jugement nous paraît susceptible de critique. Le conseil n’a pas, selon nous, fait suffisamment attention au mot occuper ; évidemment le métier n’a pas travaillé pendant le temps du montage, donc il n’était pas occupé. En cas de doute GelotGelot et FerrièreFerrière ayant écrit la convention elle devait être interprétée contre eux aux termes de la loi.
iii. Nous pensons que le conseil ne se refusera pas à l’application de cette jurisprudence envers les chefs d’atelier des autres professions.

 

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