L'Echo de la Fabrique : 1 avril 1832 - Numéro 23

NOUVELLES DIVERSES.

Paris. - Nous avons regret d'annoncer à nos lecteurs qu'une maladie, qui présente tous les symptômes du choléra, s'est manifestée hier. Trois personnes sont mortes ; parmi elles se trouve le cuisinier du maréchal Lobau. Ce matin, de nouvelles attaques ont eu lieu. A l'heure où nous écrivons, on procède à l'autopsie des cadavres.
(Journal du soir.)1

Chalons-sur-Saône. - Une épidémie, connue sous le nom de mal de cou, ravage le canton de Saint-Martin-en-Bresse, et se manifeste dans plusieurs communes du canton de Verdun. Déjà un grand nombre de victimes ont succombé. M. Canat, médecin, s’est immédiatement transporté sur les lieux.

Rochefort, 21 mars. - Des lettres annoncent qu'une rixe s'est engagée, à six heures du soir, entre les militaires du 57e et du 64e, qui sont allés attaquer les marins jusque dans leurs casernes. A 10 heures, on opposait une vigoureuse résistance aux militaires, pour les empêcher de sortir de leur caserne et de prendre part à ces désordres.

Nîmes. - Notre fabrique est dans la plus grande activité, et le prix des soies se raffermit. Les fabricans ne peuvent se décider à souscrire à une augmentation de façon ; les prix relatifs sont bien au dessous de ceux de Lyon et de St-Etienne.

Rouen, 24 mars. - Il s’est traité hier à la halle d'affaires considérables. La vente des calicots et des cotons filés a été très-active ; les prix n’ont cependant pas éprouvé de mouvement en hausse.

Havre. - Les cotons sont toujours en faveur et se soutiennent bien, principalement ceux d'Amérique.

- On écrit des bords du Var, 19 mars : « La prohibition à l'entrée des blés qui manquent dans nos pays, a occasionné des désordres à la frontière. Les habitans des villages qui bordent la ligne de douane vont, au nombre 150 à 200, chercher du pain à Nice, et en rapportent 4 kil. par personne, sans que la douane puisse s'y opposer, ayant affaire à des gens armés de gros bâtons, et déterminés à ne pas abandonner leur pain qu'ils achètent 2 fr. 95 c. les 8 kil., tandis qu'en France ils le payent 3 fr. 80 c.
(Constitutionnel.)

- Le prix régulateur de l'importation des grains, qui sera publié le 1er avril, est de 25 fr. 18 c. pour la première classe. Ainsi, l'importation sera permise à Marseille et dans les départemens de la Méditerranée.
(Moniteur.)

[5.2]Milan, 13 mars. - La nuit dernière, vers quatre heures et quart, on a senti une secousse de tremblement de terre, qui a duré quatre secondes, dans la direction du nord au sud. L'élévation du baromètre à 27 pouces 8 lignes. Dans la matinée du 11, vers sept heures et demie, on a aussi ressenti une faible secousse dans la direction de l'est à l'ouest, qui s'est répétée vers neuf heures et demie.
(Moniteur du Commerce.)

- Des secousses de tremblement de terre ont eu lieu à Véronne, à Modène, à Parme, à Gènes, à Turin et à Alpigano, sans causer de dommage considérable. A Parme, la population fut cependant très-épouvantée, dans la nuit du 12 mars, par une secousse qui se fit sentir à quatre heures vingt minutes d’une manière terrible, et qui dura dix secondes ; les maisons furent ébranlées à tel point, que les habitans se sauvèrent dans les lieux découverts ; personne cependant n'a été blessé. Dans les lieux élevés, on entendait un mugissement sourd, semblable à la détonnation de plusieurs canons dans le lointain. La nuit était obscure, et vers minuit la lune était entourée d'une auréole de couleur noire et sanguine ; au S. S. E. on vit des feux météoriques.

Bologne. - Deux légères secousses de tremblement de terre se sont fait sentir ici, le 12. La cloche de l'horloge a sonné plusieurs coups ; cette petite révolution souterraine a effrayé les Autrichiens, qui ont couru aux armes pour apaiser le tapage. Ce mouvement du sol s'est fait sentir à Faënza. Depuis que les Français sont à Ancône, la terre tremble sous les pas des Autrichiens.
(Précurseur.)

Naples, 9 mars. - Le Vésuve est superbe ; l'énorme cavité du centre, où se trouve le gouffre, était remplie de lave qui bouillonnait et qui s'est écoulée en trois rivières de feu, deux se dirigeant du côté de la ville, et la troisième du côté opposé (Nola). A sept heures du soir, on a ressenti un léger tremblement de terre, de 2 ou 3 secousses seulement, qui n'ont eu aucun résultat fâcheux.
(Globe.)

jeune en angleterre.

Troubles. - Une réunion des membres de l'union nationale des ouvriers a eu lieu lundi soir à Londres ; elle se composait d'une centaine d'individus ; le but était de délibérer s'il y aurait ou non procession le jour du jeûne ordonné par le roi, pour obtenir du ciel la cessation du choléra et le soulagement des pauvres. Le tout s'est passé dans les règles des assemblées délibérantes ; il y avait un président, lequel s'est déclaré hautement en faveur d'une procession. Son avis a été généralement adopté, et l'on a décidé qu'elle aurait lieu. A ce propos, un des ouvriers présent a fort judicieusement prouvé qu'il était presque de leur intérêt de se faire mettre en prison ; car, de cette manière, les ouvriers seraient au moins sûrs d'avoir du pain et un logement. Un autre motif les a encore engagés à se former en procession : « Ce sera un moyen, se sont écriés plusieurs d'entr'eux, de montrer réunis dans une longue file tous les pauvres de la capitale, et de donner ainsi un démenti public à tous nos égoïstes gorgés d'écus, lesquels ne cessent de répéter que l'Angleterre est un objet d'envie pour tous les peuples voisins et d'admiration pour le monde entier. »

Plusieurs placards, où l'on tournait en ridicule l’ordonnance de jeûne général, et où on recommandait aux riches d'être charitables, avaient été affichés en divers endroits.

Ainsi qu'on le craignait, des troubles et des désordres assez graves ont eu lieu par suite de l'empêchement que l'autorité a voulu apporter à la réunion des pauvres et des ouvriers en procession.

Bientôt après, arriva le comité de l'union, qui se mit à la tête du rassemblement, lequel se forma en procession ; les individus qui le composaient, marchaient sur quatre de front. Les chefs paraissaient jouir d'une autorité sans bornes sur la multitude qui, de vingt mille qu'elle était d'abord, s'était accrue jusqu'au nombre de cent mille ; plus elle avançait, plus elle grossissait, et aucun d'eux n'avait même de bâtons.

Diverses rues étaient barrées par des détachemens de constables, armés de bâtons et de coutelas, marques de leurs fonctions ; ils s'opposaient à ce que la procession allât plus loin ; enfin, ayant atteint Howland-Street, elle surprit le détachement de police qui y était stationné ; une partie de la procession passa outre ; l'autre, voulant la rejoindre, se précipita sur les soldats de police et chercha à faire une trouée. Les constables qui, dans cet endroit, n'avaient que leurs bâtons, en firent usage ; le peuple y répondit par des pierres. Il y eut de part et d'autre plusieurs blessés, quelques individus ont été saisis.

La procession s'est ensuite dispersée ; les chefs leur ont déclaré qu'ils venaient de prouver combien ils étaient forts quand il étaient chez eux. La foule obéit et s'écoula paisiblement. Dans la soirée, la tranquillité était rétablie. Cependant les craintes sont loin d'être calmées.
(Constitutionnel.)

- Le bulletin officiel du choléra publié le 23 mars, porte pour Londres, 63 nouveaux cas, 36 morts, 166 malades restans ; total, depuis le commencement, 1,213 cas et 647 morts. Pour le nord, 47 nouveaux cas, 27 morts, 103 malades restans ; total, depuis le commencement, 6,687 cas, 2,127 morts.
(Moniteur du Commerce.)

Notes de base de page numériques:

1 Il s’agit probablement ici de La révolution de 1830, journal des intérêts populaires (qui devient journal du soir), publié à Paris de 1830 à 1832.

 

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