Retour à l'accueil
31 mars 1833 - Numéro 13
 
 

 



 
 
    
 CONSEIL DES PRUD’HOMMES.

(présidé par m. putinier.)

Audience du 28 mars 1833.

D. Un négociant peut-il diminuer à la seconde coupe ou poil de peluche, le prix dont il est convenu avec le chef d’atelier, lorsque ce dernier a accepté la pièce ? – R. Non. Le négociant ne peut changer le prix convenu pour la pièce, qu’autant que les dernières coupes diffèrent entièrement de réduction.

Le sieur Régnier faisait comparaître les sieurs Pitiot et Gariot, et réclamait contre une diminution qui lui avait été faite sur les dernières coupes de la pièce ; il n’avait, disait-il, pris la pièce que pour la fabriquer au même prix et dans les mêmes réductions, mais il convenait que la seconde coupe était moins réduite que la première et la troisième. MM. Pitiot et Gariot déclarent être dans le droit de changer un prix convenu en donnant la pièce, prétendant que c’est le poil et non la toile qui doit régler les prix, de la peluche dont le cours peut varier pendant le temps que se fabrique la pièce, ils ajoutent même que le sieur Régnier était libre de se refuser à fabriquer la troisième coupe.

« Attendu que lorsque le chef d’atelier a accepté la pièce, il a été stipulé un prix auquel il est convenu de la tisser entièrement ; attendu qu’il n’y a eu de changement que dans la réduction de la seconde coupe, mais attendu que la troisième coupe est de la même réduction que la première, le conseil ordonne que la troisième pièce sera portée au même prix que la première, 2 fr. 75 c. La seconde coupe, seulement du consentement de l’ouvrier, sera payée 2 fr. 50 c. Pitiot et Gariot condamnés aux dépens. »

D. Les décisions du conseil précédent ont-elles force de chose jugée, quoique non enregistrées ? – R. Non. Les décisions ou jugemens du conseil ne sont valables qu’autant qu’il y a enregistrementi.

Les sieurs Mantelier et Neyron étaient les seconds créanciers sur les livrets du sieur Imbert, chef d’atelier. Pendant l’absence de ce dernier, et celle du sieur Cadier, premier créancier inscrit sur les mêmes livrets, et qui avait négligé de retirer ses retenues, intervint une décision du conseil, qui plaça les sieurs Mantelier et Neyron au rang de premiers créanciers, mais cette décision, suivant l’usage abusif de cette époque, ne fut pas enregistrée. Mantelier et Neyron, cependant, réclamaient les retenues qu’avaient dû faire à leur profit les sieurs Rebeyre et Favier, qui occupent le sieur Imbert. Ces négocians s’étaient, du consentement du sieur Imbert, refusés à payer la retenue à Mantelier, et de là l’instance devant le conseil.

« Attendu que le jugement dont excipent Mantelier et Neyron, n’est pas enregistré, que dès-lors il n’y a pas [6.2]de jugement ; attendu que Mantelier et Neyron ne contestent pas que Cadier fût réellement le premier créancier, mais seulement prétendent que par sa négligence à retirer ce qui lui est dû, ils doivent passer premiers créanciers à sa place, le conseil déboute les sieurs Mantelier et Neyron, et déclare que les sieurs Favier et Rebeyre devront payer les retenues au sieur Cadier reconnu premier créancier. Mantelier et Neyron condamnés aux dépens. »

D. Lorsqu’il est constant qu’un ouvrier n’a pas confectionné avec l’habileté requise la pièce qui lui était remise à tisser, cet ouvrier peut-il demander au négociant qui refuse de lui continuer de l’ouvrage : une indemnité pour le montage de son métier ? – R. Non.

Le sieur Pavy fils réclame contre une première décision du conseil, qui avait concilié ses différends avec le sieur Trolliet ; par cette décision il devait payer une somme de huit francs pour défraiement à ce dernier, attendu que le métier n’a fait qu’une pièce de 40 aunes, dont la façon se monte à 48 fr. M. Pavy trouve suffisante la somme de quatre francs pour le remettage de la pièce, et prétend ne rien devoir pour le montage. Il déclare ne pouvoir donner une autre pièce, parce que le sieur Trolliet n’a fabriqué qu’environ une aune et demie par jour, au lieu de trois que peut fabriquer un bon ouvrier.

Le sieur Trolliet dit qu’aucune époque ne lui avait été fixée pour terminer la pièce. Il déclare avoir fait 40 fr. de dépenses pour organiser le métier, il termine en disant qu’il s’en rapporte à la première conciliation, qui lui alloue 8 fr. en sus des 4 fr. offerts par le sieur Pavy.

« Attendu la lenteur du métier, les 4 fr. pour le remettage restent alloués au sieur Trolliet pour toute indemnité. »

Note du rédacteur. Il résulte de ce procès, que ceux qui ont prétendu que la maison Pavy n’avait point de difficultés avec ses ouvriers et les payait généreusement, ont calomnié cette maison.

 

 

Contrat Creative Commons

LODEL : Logiciel d'édition électronique