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5 août 1832 - Numéro 41
 
 

 



 
 
    
JURISPRUDENCE USUELLE.1

des locations. (Suite.)

occupation. (Suite, voyez n° 39.)

Garnir les lieux loués de meubles suffisans. Par cette obligation imposée au locataire, la loi a voulu assurer le revenu du propriétaire, et elle a donné à ce dernier un privilège sur tous les effets mobiliers qui garnissent les lieux loués ; elle a donc dû astreindre le locataire à garnir effectivement, autrement le privilége serait devenu illusoire. Pour que le gage soit suffisant, il faut que, non compris les objets déclarés insaisissables et dont nous parlerons plus bas, les effets mobiliers représentent une valeur équivalente à 18 mois de loyer, et au montant des frais éventuels de rente, qu’on porte ordinairement à 150 fr. ; mais par suite de la maxime de droit odia sunt restringenda, les choses odieuses doivent être restreintes ; on ne saurait entendre cette prescription dans un sens judaïque, et pourvu que les appartemens loués soient garnis de meubles proportionnés au prix du loyer sans même l’égaler, le propriétaire n’est pas fondé à demander que le locataire donne plus grande sûreté. Cette disposition ne s’applique qu’au cas où une absence totale de meubles, ou la présence de meubles insignifians et de peu de valeur, donnerait lieu de douter, soit de la solvabitilé du locataire, soit même de la réalité de son intention d’habiter et de payer ; à plus forte raison, si le locataire ayant reçu les clefs, ne garnit en aucune façon. En ces cas, le propriétaire peut présenter requête au juge de paix de l’arrondissement où est située la maison, faire constater l’état des lieux et décrire les meubles trouvés et ensuite assigner devant le tribunal civil, le locataire en résiliation de bail avec dommages-intérêts, faute par le locataire de garnir dans un délai que le tribunal fixe par son jugement.

Le locataire peut résister à cette demande en prouvant que son mobilier est suffisant ou de deux autres manières :

1° En payant un terme d’avance ;

[8.1]2° En donnant caution récéante et solvable ;

3° En justifiant d’une solvabilité telle que le privilége qu’aurait le propriétaire serait complétement inutile.

Le payement d’avance se justifie lui-même. Mais le locataire ne peut pas en ce cas forcer le propriétaire à lui déduire l’intérêt. Seulement, et de bonne foi le propriétaire doit consentir et même offrir cet intérêt.

En donnant caution, le locataire donne sûreté complète au propriétaire : c’est tout ce que ce dernier peut demander. On entend par caution récéante et solvable, l’individu qui par son commerce, son industrie, sa profession, ou sa fonction ne permet pas de suspecter sa solvabilité. Il n’est pas nécessaire, dans ce cas, qu’il soit propriétaire.

Le cautionnement doit être par écrit, et il ne dure que le temps fixé. Après il cesse de plein droit sans qu’il soit besoin d’aucune formalité. Le propriétaire est censé avoir suivi la foi du locataire, en le laissant occuper après l’expiration du bail cautionné.

Payer le prix aux termes convenus. Le payement du prix à l’échéance est une clause de rigueur, car le propriétaire n’ayant loué que pour tirer un revenu, peut avoir contracté lui-même des engagemens pour l’acquittement desquels il a besoin de toucher ses loyers, surtout pour les locations importantes. D’ailleurs il est aussi facile de payer à l’échéance que plus tard, pour peu qu’on soit solvable et qu’on ait pris une habitude d’ordre.

Faute de payement le propriétaire peut, indépendamment des poursuites qu’il a le droit d’exercer et dont nous parlerons dans la suite, demander contre le locataire en retard même d’un seul terme, la résiliation du bail avec dommages-intérêts, lesquels en ce cas sont du montant d’un terme de loyer. On paye de deux manières : 1° en espèces ; 2° par compensation.

Tout payement en espèces doit-être fait en pièces d’or ou d’argent aux titres et cours actuels. La monnaie de cuivre ou billion ne peut-être reçue que pour les appoints et pour une somme minime qui ne peut excéder un quarantième de la somme totale.

Le locataire doit avoir bien soin de faire stipuler sur sa quittance la somme payée et le terme auquel elle s’applique. Il doit l’impôt des portes et fenêtres en sus de son loyer, à moins qu’il n’en soit affranchi par le bail ; il doit de plus une rétribution pour le portier et pour l’éclairage au prorata de son loyer, à moins également que le bail ne l’en affranchisse ; cela ne peut excéder cinq francs pour le portier, et trois francs pour l’éclairage, sauf les cas très-rares de location d’un prix supérieur ; mais alors, pour prévenir toute difficulté, il convient et c’est l’usage d’en faire mention sur le bail.

(La suite au prochain N°.)

Notes (JURISPRUDENCE USUELLE.)
1 L’auteur de ce texte est Marius Chastaing d’après la Table de L’Echo de la Fabrique (numéros parus du 30 octobre 1831 au 30 décembre 1832).

 

 

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