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12 août 1832 - Numéro 42
 
 

 



 
 
    
AU RÉDACTEUR.

Lyon, le 9 août 1832.

Monsieur,

Connaissant les bons sentimens qui vous font désirer l?amélioration du sort de la classe la plus nombreuse et la plus pauvre, j?espère que vous aurez l?obligeance d?insérer la réponse de notre frère Dérion aux calomnies répandues par le Courrier de Lyon, afin de donner à nos actes la plus grande publicité possible, pour que l?on ne se méprenne plus sur notre véritable caractère.

Je vous salue, Monsieur,

Cognat1,

St-Simonien, chirurgien interne de l?Hôtel-Dieu, ex-chirurgien de marine, Place Sathonay, n° 2, au 2me.

Au Redacteur du Courrier de Lyon.

Monsieur,

Dans un article sur l?ordre public et l?industrie, inséré dans votre numéro d?hier, on lit des imputations tellement odieuses contre les saint-simomiens, tellement contraires à la vérité, que je ne peux m?empêcher de vous le faire remarquer. Il a fallu, monsieur, que vous fussiez sous l?empire d?une préoccupation peu excusable ou d?une prévention dont vous reconnaîtrez, je l?espère, toute l?injustice, pour vous être mépris sur notre véritable caractère, au point d?accueillir et publier des calomnies auxquelles ont renoncé depuis long-temps la plupart de ceux qui nous méconnaissent encore.

Oui, nous faisons des enseignemens de la religion nouvelle : nous en faisons non-seulement aux Brotteaux, mais partout où on nous réclame, et chaque jour, sur divers points de notre cité, retentit la parole d?avenir. Nous n?excluons personne, car il n?est personne qui n?ait besoin de savoir ce que nous avons à leur apprendre. Vous n?aimons ni le secret, ni l?ombre ; nous parlons pour tous, et nous parlons haut et clair. Fût-on carliste ou républicain, riche ou pauvre, n?importe, qu?on nous appelle et nous irons, sûrs que quand on saura qui nous sommes et ce que nous enseignons, on aimera et nos personnes et nos doctrines. Et si les persécutions, les tracasseries auxquelles nous sommes en butte nous obligent à limiter le nombre nos auditeurs, la faute n?en est pas à nous.

Qu?on sache que nous ne sommes pas un parti nouveau arrivant dans l?arène, apportant un nouvel élément de discorde, venant faire de la haine contre tous, comme tous en font contre chacun, Non, notre devise à nous est amour à tous les hommes, amour à tous les peuples. C?est pourquoi même envers vous, monsieur, qui nous calomniez nous n?avons point de paroles amères.

Dans nos renseignemens, loin d?augmenter encore l?irritation déjà si grande qui existe entre toutes les classes de la société, loin d?inspirer le dégoût du travail, d?aigrir les douleurs, de flatter les passions, nous ne faisons entendre que des paroles de paix, d?association, de progrès ; car nos principes sont religieux et ont puissance d?unir les hommes par un même sentiment, par une science et un intérêt communs.

Nous initions le peuple aux jouissances des beaux-arts qui adouciront sa rudesse. Nous prêchons le travail pour tous et sa réhabilitation religieuse. Nous offrons aux méditations des hommes le sublime exemple des apôtres à Ménil-Montant. Nous préparons par nos accens conciliateurs la fusion entre tous les partis, entre toutes les classes, entre toutes les sectes. Nous hâtons le moment où les gouvernemens eux-mêmes mieux éclairés sur la destination des peuples, substitueront à la lutte qui tue, à la concurrence qui ruine l?organisation de l?industrie, de la science et des beaux-arts.

Quant à ce qu?il y a d?injurieux dans votre article, nous y répondrons en livrant à tous notre vie entière, notre passé et notre avenir ; nous sommes de jeunes hommes ; le but, l??uvre de notre vie est l?amélioration physique, intellectuelle et morale de tous, particulièrement de la classe la plus nombreuse et la plus pauvre. Jusqu?à ce qu?il soit atteint, ce but, notre vie sera toute de privation et de dévoûment.

Je vous prie, Monsieur, et au besoin vous requiers d?insérer la présente dans votre prochain N° sans en rien retrancher.

Au nom de tous les saint-simoniens enseignans,

Michel Derion, fabricant.

Notes (AU RÉDACTEUR.)
1 Cognat était avec Derrion l?un des deux principaux partisans des saint-simoniens à Lyon, courant 1832. L?Echo de la fabrique mentionnera à l?automne 1832 ( numéros du 16 septembre et du 7 octobre) l?ouverture des cours de Cognat sur la religion saint-simonienne.

 

 

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