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9 septembre 1832 - Numéro 46
 
 

 



 
 
    
LYON.
A NOS CONCITOYENS.

[1.1]La même pensée qui présida à l’association des ouvriers en soie donna naissance à l’Écho de la fabrique. Le premier N° de ce journal parut le 30 octobre 1831, il contenait le tarif accordé, cinq jours auparavant, aux besoins de cette classe de travailleurs. M. Falconnet, fondateur gérant s’adjoignit M. Vidal. Environ un mois après les événements de novembre, M. Marius Chastaing prit une part active à la rédaction : l’Echo qui dans l’origine n’avait été créé que pour être l’organe des ouvriers en soie agrandit son cadre ; à son titre de Journal Industriel il ajouta celui de Journal Littéraire : M. Falconnet appelé par ses collègues au conseil des prud’hommes, se démit de la gérance pour éviter toute idée de cumul ou de dépendance, et fut remplacé le 13 mai  suivant par M. Vidal ; ce dernier atteint d’une maladie grave, a cessé de pouvoir s’occuper de la rédaction depuis le huit juillet dernier. Ayant malheureusement succombé, le cinq août, nous avons pris la gérance provisoire et le journal n’a souffert aucune interruption. Cet ordre de choses avait besoin d’être régularisé. L’assemblée des actionnaires qui a eu lieu le 3 septembre courant a confirmé notre nomination, comme gérant. M. Chastaing a été nommé rédacteur en chef, MM. Falconnet, Bouvery, Amédée Roussillac, Eugène Dufaitelle, Benoît et d’autres personnes nous ont promis leur collaboration.

La rédaction de l’Echo continuera par conséquent d’être la même, en ce qui touche les doctrines. Nous chercherons seulement a y donner le plus de variété et d’utilité possible, et pour y parvenir nous faisons un appel à tous les hommes philanthropes qui s’occupent des questions graves d’économie politique et sociale. Nous en faisons un aussi à tous les littérateurs, aux jurisconsultes, aux médecins, aux artistes ; nos colonnes leur seront toujours ouvertes. Le peuple a soif d’instruction, on ne saurait trop multiplier les canaux qui doivent la répandre.

Jeunes hommes, dont l’avenir garde encore le secret de la puissance, venez à nous car nous sympathisons ensemble.
[1.2]Nous ne pensons pas avoir besoin de faire à nos concitoyens une profession de foi. Nos principes, nos opinions sont connus, nous saurons les défendre, de quel côté que vienne l’attaque ; nous ne faillirons pas à la mission qui nous est confiée, nous mettrons au contraire tous nos efforts à en être dignes. Nous regardons en effet la profession de journaliste comme une fonction publique.

Nous pourrions nous arrêter ici, mais quelques explications sont encore nécessaires, nous allons les fournir.

Un journal ne peut être utile, qu’autant qu’il est répandu : il ne peut se répandre, qu’autant qu’il répond à des intérêts divers, qu’autant qu’il sait joindre l’utile à l’agréable. Ainsi nous ne croyons pas devoir être exclusifs, et cela dans l’intérêt même des ouvriers en soie que nous représenterons toujours spécialement. Quoique cette classe soit la plus nombreuse à Lyon, elle n’est pas la seule ; nous voulons appeler les autres au succès de notre entreprise, nous voulons les inviter à en partager le bienfait. Nous serons le journal de la Caste prolétairei, toute entière ; à nous donc, artisans de toutes professions, industriels de toutes les classes ; ouvriers travailleurs de toute la France. Que l’Echo de la Fabrique, soit pour vous un centre de réunion, un point d’appui et de ralliement ; qu’il vous serve de tribune toujours ouverte pour votre défense, si vous êtes attaqués ; qu’il vous serve aussi de tribune, pour attaquer à votre tour, les préjugés, les abus, les monopoles, les privilèges qui de toute part vous étreignent et vous privent de vos droits. La presse est aujourd’ui une puissance supérieure à toutes les forces physiques, nous vous offrons son égide tutélaire. De cette manière, se formera l’association universelle des travailleurs, association qui leur donnera le pouvoir de résister avec avantage, à l’égoisme, à la cupidité, à la tyrannie des oisifs. Par là commencera cette sainte alliance des peuples, que Béranger [2.1]a chanté dans une de ses odes sublimes, et que nous entrevoyons dans un avenir peu éloigné.
Voilà, citoyens, notre programme, nous pouvons vous assurer que ce programme ne sera jamais oublié par nous.
Berger, gérant.

 

 

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