Retour à l'accueil
9 septembre 1832 - Numéro 46
 
 

 



 
 
    

Distribution des prix aux élèves de l’Ecole de St-Pierre et de l’Institution de la Martinière.

Cette cérémonie a eu lieu mardi dernier, 4 septembre, à 2 heures. Elle a été ouverte par un discours de M. Gasparin, préfet, dont nous extrayons les passages suivans :

« Il y a peu de mois un des plus célèbres économistes de l’Angleterre, M. Bowring, visitant notre ville, nous disait : Nous pouvons lutter contre la fabrication unie de Lyon, il ne faut pour cela que de l’adresse, et nos ouvriers n’en manquent pas, mais nous ne parviendrons jamais à l’égaler dans le façonné ; il faut ici du goût, et nous succombons dans la lutte. Ce sont vos artistes qui vous assurent le monopole des façonnés, et nous ne pouvons vous opposer que des ouvriers.
Lyon placé au débouché des Alpes, à la porte de l’Italie, au point culminant de cette vallée qui va finir au milieu des souvenirs de la Grèce et de l’antiquité ; Lyon fait partie de ce bassin où l’inspiration des arts semble être un don de la nature.
Prenez-en la confiance, messieurs, de cette enceinte doivent sortir de nouvelles réputations qui deviendront européennes, et grâces aux efforts de ses enfans, Lyon, si long-temps célèbre par son industrie et son commerce, est aussi appelé à prendre place dans le monde comme un centre de lumières et de goût.
Déjà les travaux de vos magistrats préparent cette nouvelle ère de prospérité et de renommée. Déjà plusieurs écoles s’organisent pour répandre le bienfait de l’instruction dans toutes les classes. Déjà des asiles vont préparer les jeunes intelligences aux bienfaits de l’éducation ; les écoles primaires se multiplient et se perfectionnent ; les écoles normales leur préparent des instituteurs ; la Martinière deviendra le centre des études techniques ; une faculté de médecine demandée par le conseil général, ne tardera pas à recevoir la sanction du gouvernement. Les autres facultés des sciences vous seront rendues ; l’école vétérinaire, long-temps isolée, entrera désormais comme partie intégrante de ce haut enseignement ; une école d’artillerie accroîtra dans vos murs le nombre des hommes éclairés, amis des sciences ; et vous, messieurs, vous couronnerez l’édifice en jetant sur l’austère sévérité de ces études les fleurs des beaux-arts, et le charme de la vie d’artiste.

Dévouons-nous tous avec ardeur à assurer ce bel avenir de la ville de Lyon. »

[3.1]Nous donnerions avec plaisir le programme des prix décernés si l’espace ne nous manquait. Nous nous permettrons une observation relativement à ceux donnés aux jeunes élèves de la Martinière. Indépendamment de la médaille les premiers prix des classes de chimie et d’arithmétique ont été accompagnés d’une inscription de la caisse d’épargnes de 100 fr. ; et au deuxième prix de la classe de chimie a aussi été jointe une inscription de cette même caisse de 60 fr. Nous ne doutons pas que cela n’ait eu lieu dans un but philanthropique, mais nous croyons qu’il n’est pas convenable de familiariser l’idée de jeunes hommes avec le calcul d’une récompense pécuniaire ; la gloire doit payer la gloire. La somme donnée n’est pas suffisante pour assurer un bien-être physique, elle ne peut produire au moral qu’un résultat fâcheux. Nous soumettons cette observation à l’autorité, la priant de la prendre en considération dans l’intérêt des mœurs et des beaux-arts, que notre siècle ne soit pas flétri du sobriquet de siècle d’argent ou des banquiers.

Dans cette solennité toute pacifique, nous avons été étonnés de trouver un luxe militaire auquel les Bourbons eux-mêmes ne nous avaient pas habitués ; il n’y a cependant rien de si beau que le peuple faisant lui-même la police, et se passant de gendarmes, comme il arrive aux fêtes vraiment populaires. D’un autre côté, le désordre le plus complet a régné. Beaucoup de personnes n’ont pu trouver place ; d’autres, notamment un général qui n’était pas dans l’exercice de ses fonctions, n’ont dû qu’à la faveur d’en trouver une. Parmi les personnes qui se plaignaient, nous avons reconnu trois prud’hommes, qui, porteurs de lettres nominatives, et appelés par la nature de leurs fonctions à juger les progrès des élèves, soit de l’école de St-Pierre, relativement à la mise en carte, soit de l’institution de la Martinière, auraient dû trouver une place convenable, dont-ils ont été cependant privés par l’insouciance ou pour mieux dire la brutalité du concierge qui, ce nous semble, n’a pas rempli son devoir en cette occasion.

 

 

Contrat Creative Commons

LODEL : Logiciel d'édition électronique