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14 octobre 1832 - Numéro 51
 
 

 



 
 
    
Lectures prolétaires1

Nous avons reçu des encouragemens à continuer de publier sous ce titre soit des pensées détachées, soit des pièces de vers, soit enfin des histoires diverses. Nous le ferons donc toutes les fois que l?abondance des matières ne nous forcera pas à supprimer ce cours d?instruction. C?est sous ce dernier point de vue qu?il faut considérer ces lectures à l?usage des prolétaires. Chaque pensée doit être lue et méditée avec soin, soit qu?on l?approuve soit qu?on la rejette, afin de se rendre raison des motifs d?approbation ou de blâme. L?Echo de la Fabrique, étant un journal hebdomadaire, qui par conséquent doit se distinguer des autres journaux, et avoir un but d?utilité réelle, aura bien mérité, s?il parvient à répandre dans la classe ouvrière avec le goût de la lecture un enseignement moral aussi éloigné de la pédanterie que de la trivialité.

Aux talens, aux vertus, aux bonnes qualités qu?on exige dans un domestique, quel est le maître qui serait digne d?être valet ?
Beaumarchais2.

Un homme indiscret est une lettre décachetée.
Prov. anglais.

Souvent il ne faut pas tout dire, mais toujours il faut que ce qu?on dit soit vrai.
Charron3.

Et si l?erreur n?est que trop souvent l?apanage de l?homme, il faut bien que l?homme pardonne à l?erreur.
Delandine.

Les lois nouvelles n?ont jamais deux visages. Elles n?ordonnent que pour l?avenir et non pour le passé, parce que selon l?apôtre, il n?y aurait point eu de péché s?il n?y avait point eu de lois.
Omertalon4.

[8.1]Ah Gorgus ! Ce sont les crimes des hommes qui désolent la terre et non la colère des dieux.
Aug. Lafontaine5.

La dernière secousse d?un tremblement de terre est aussi à craindre que la première.
Idem.

Si les triangles faisaient un Dieu ils lui donneraient trois côtés.
Montesquieu.

Les habitans de Mitylène ayant soumis quelques-uns de leurs alliés qui s?étaient séparés d?eux, leur défendirent de donner la moindre instruction à leurs enfans, et ne trouvèrent pas de meilleur moyen pour les tenir dans l?asservissement que de les tenir dans l?ignorance.
J. J. Barthélemy6.

Si vous avez un ami visitez-le souvent : le chemin se remplit d?herbe, si l?on n?y passe pas sans cesse.
Odin.

O vraisemblance ! respect des hommes ! pitié de ses semblables ! règle sacrée de la justice, n?êtes-vous qu?un problème.
Serven.

Le sage est officieux envers tous les hommes, familier dans la société de quelques-uns, intime avec un seul.
Anonyme.

L?ingratitude est le vice de l?homme civilisé.
Delisles de Sales7.

Tout homme use de sa liberté, ensuite il se trouve engagé, mais parce qu?il l?a voulu.
Treilhard8.

Toutes les fois que les hommes s?assemblent, ils s?électrisent, et de la discussion de leurs droits ils passent au désir de les étendre, ou au moins ils forment la résolution de ne pas les laisser perdre.
Mme Guenard9.

Tel qui ne veut pas que sa montre se dérange d?une seconde, est perpétuellement en contradiction avec lui-même.
Anonyme.

L?univers est une espèce de livre dont on a lu que la première page quand on a vu que son pays.
Monbrard.

On ne fusille pas une idée.
Diderot.

Notes (Lectures prolétaires)
1 L?auteur de ce texte est Marius Chastaing d?après la Table de L?Echo de la Fabrique (numéros parus du 30 octobre 1831 au 30 décembre 1832).
2 Cette phrase s?inspire de Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais (1732-1799), Le barbier de Séville ou la précaution inutile, 1775.
3 Cette citation est extraite de : Pierre Charron (1541-1603), De la sagesse, publié en 1601.
4 Il s?agit probablement d?Omer Talon (1595-1652), magistrat et humaniste, dont les Mémoires avaient été republiées à Paris en 1827.
5 August Lafontaine (1758-1831) était l?auteur de nombreux contes et fictions dont les principaux furent traduits de l?allemand et publiés en France dans le premier tiers du XIXe siècle.
6 Cette citation est tirée du chapitre 26 de l?ouvrage de l?abbé Jean-Jacques Barthélemy (1716-1795), Voyage du jeune Anarchasis en Grèce dans le milieu du quatrième siècle avant l?ère vulgaire, publié à Paris, en 4 volumes en 1788.
7 Il s?agit ici de Delisle de Sales (J.-B. Isoard) (1743-1816), dont le De la philosophie de la nature avait été publié en 1804.
8 J.-B. Treilhard (1742-1810), homme politique français, était auteur de nombreux mémoires et comptes rendus lors de la période révolutionnaire.
9 Il s?agit de Mme Guenard, Baronne de Méré (1742-1810), auteur prolifique de très nombreux romans et contes.

 

 

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