Audience du 19 octobre,
(présidée par m. goujon.)
[2.2]Nous ne croyons pas devoir entretenir nos lecteurs de diverses affaires entre des maîtres et leurs élèves, dans lesquelles ces derniers ne s’étant pas conformés aux précédentes décisions du conseil qui leur ordonnaient de rentrer dans leurs ateliers, ont été condamnés solidairement avec leurs parens à payer diverses indemnités ; et quand aux affaires qui auront été jugées conformément aux décisions déjà rapportées, et ne présenteront aucun incident remarquable, nous les passerons sous silence.
*** Première question. – Lorsqu’un chef d’atelier, après avoir acheté un métier complet, et dont la bonne qualité des agrès et ustensiles lui a été garantie dans l’acte de vente, est obligé de remplacer un des ustensiles qui se trouve en mauvais état, peut-il, lors même qu’il a soldé son vendeur, réclamer une indemnité pour la perte qu’il éprouve ? – R. Oui : l’acheteur a toujours recours contre le vendeur, lorsqu’il est constant que ce dernier n’a pas rempli les conditions de la vente.
Le sieur Paraton avait acheté un métier du sieur Esterre, ce dernier lui avait garanti le bon état des ustensiles, et de plus, s’était engagé à rendre au sieur Paraton le métier prêt à travailler. Le sieur Paraton se plaint qu’après avoir soldé le sieur Esterre, il ne lui a point donné le métier prêt à travailler, et que lorsqu’il a commencé à le mettre en activité, il a éprouvé beaucoup de difficultés, le peigne étant de plusieurs morceaux coupait les fils. Il demande qu’une somme de seize francs qu’il doit au sieur Esterre, lui demeure acquise, et que de plus, celui-ci soit tenu de reprendre ledit peigne et de lui en rembourser le montant. Le sieur Esterre répond que le peigne qu’il a vendu était celui qui travaillait sur le métier antérieurement à la vente, que de plus, aucune observation ne lui avait été faite par le sieur Paraton, qu’à l’époque où il lui réclama ce qu’il lui était dû ; il ne croit pas devoir reprendre le peigne, ni perdre les seize francs qui lui sont dus.
« Attendu qu’il est constant que le sieur Esterre n’a pas livré le métier dans l’état promis ; attendu que le peigne était de deux morceaux et coupait la chaîne ; les seize francs restent alloués audit Paraton pour toute indemnité, il restera possesseur du peigne ; le sieur Esterre renvoyé d’instance sur ce dernier point. »
*** Deuxième question. – Un ouvrier compagnon, qui a attendu plusieurs jours que sa pièce fût montée, et qui lorsqu’il est pret à travailler est averti par le maître que, sur la nouvelle pièce, il lui sera fait un rabais de cinq centimes par aune, est-il en droit d’exiger le prix précédent ou une indemnité pour son tems perdu ? – R. Le maître doit payer le même prix qu’à la pièce précédente, on une indemnité en raison des jours de travail perdus, faute par lui d’avoir averti en tems utile, c’est-à-dire avant le montage de la nouvelle pièce.
Le sieur Néel, ouvrier mousselinier, chez le sieur Sprecher, expose qu’il fabriquait de l’étoffe au prix de 40 cent. l’aune, et avoir attendu trois jours une nouvelle pièce ; que lorsqu’elle fut montée, le sieur Sprecher ; lui dit, ne pouvoir le payer que 35 cent. l’aune ; il demande le prix précédent, ou une indemnité pour son temps perdu ; le sieur Sprecher répond avoir averti son ouvrier lorsque sa pièce était après se monter.
« Attendu que l’ouvrier n’a été averti que lorsque sa pièce a été montée, le conseil condamne le maître à lui payer le même prix qu’à la précédente, ou une indemnité de trois jours de travail, à raison de 2 francs par jour. »
*** Troisième question. – Le conseil des prud’hommes est-il compétent [3.1]pour juger les différends qui s’élèvent entre un fabricant et un chef d’atelier, lorsqu’il s’agit de transactions, de ventes, et par suite de la reprise des objets vendus ? – R. Non.
L’affaire entre les sieurs Pijol et Ginet, que nous avions cru conciliée, affaire qui a déja paru plusieurs fois au conseil, lequel d’abord s’était cru compétent, puisqu’il avait deux fois renvoyé l’affaire pardevant arbitre, est appelée de nouveau.
Le sieur Pijol dit que par erreur, dans ses réclamations, il a oublié d’y comprendre une somme de 300 francs.
« Attendu, qu’il s’agit de la vente d’un atelier, qui fut ensuite repris par le vendeur, le conseil se déclare incompétent, renvoie les parties pardevant les tribunaux qui doivent en connaître »i.
Un jugement par défaut a condamné le sieur Billon à payer au sieur Moyant, les déchets et tirelles sur trois pièces.