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27 janvier 1833 - Numéro 4
 
 

 



 
 
    

Impudeur du Courrier de Lyon.

Ce n’est pas pour messieurs du Courrier de Lyon que le poète a dit res sacra miser ; eux ne respectent rien ; ils ne connaissent aucune pudeur, ils n’obéissent à aucun sentiment généreux, jugez-en… Trois patriotes, les généraux Dubourg, Dufour et le chef d’escadron Lennox, sont en prison pour dettes… D’abord nous ne voyons pas la nécessité d’une telle nouvelle, mais au moins le Courrier aurait-il dû se borner à l’annoncer simplement. Oh ! non, l’infortune de quelques patriotes est chose trop friande ; l’honnête Courrier a peine à contenir sa joie, et il termine cette annonce par une pointe qu’il trouve apparemment plaisante, et qui ne fait que déceler la perversité, le caractère bas et haineux de ses cupides patrons : « Il ne valait pas la peine de faire tant de bruit pour arriver là. » Comme on voit bien à ce ton ironique la pensée ignoble qui cherche à se faire jour. En effet, être patriote c’est déjà un tort ; mais un tort bien plus grand aux yeux des aristocrates du Courrier, c’est d’être sans fortune, de ne pas savoir en gagner ou conserver celle qu’on a, c’est de sacrifier tout à son pays, c’est en un mot de ne pas savoir faire ses affaires en faisant celles de la nation. Aussi, nous serions bien étonnés si l’infâme qui écrivit sur son bulletin Jacques Lafaillite, pensant faire injure au vertueux Laffitte (facétie qui révolta Périer et ses amis eux-mêmes), n’avait pas reçu dans le temps cette inspiration des bureaux du Courrier.

Qu’il apprenne donc, le Courrier, que Dubourg, Dufour et Lennox, emprisonnés pour dettes, sont plus grands citoyens que ceux qui le dirigent malgré leur opulence. S’ils avaient voulu se vendre, ils seraient riches et en faveur comme tant d’autres. Qui oserait leur faire un crime de leur noble pauvreté ? La patrie leur en tiendra compte. O banquiers ! ô hommes du Courrier, que vous êtes vils et dégoûtans !

Pour nous, nous n’insulterons jamais au malheur de nos adversaires. Nous aurions pu déjà, si nous avions voulu, attaquer un actionnaire du Courrier, mais nous avons facilement compris que la vie privée devait être murée, et qu’à des chagrins domestiques il ne fallait pas ajouter le poids des haines, des dissentimens politiques. Nous nous sommes tus, et nous attendrons qu’on nous interpelle de parler.

 

 

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