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27 janvier 1833 - Numéro 4
 
 

 



 
 
    
 ACTE
DE SOCIETE D’ASSURANCE MUTUELLE
CONTRE LA PRIVATION DE TRAVAIL,

En faveur des Ouvriers Imprimeurs,

Sous la raison sociale Galien, Musch et Ce.

Les ouvriers imprimeurs de Lyon viennent de faire faire à la cause de l’émancipation des prolétaires un pas immense par cet acte vraiment original que nous avons annoncé dans notre dernière Revue quindécimale (Voir l’Echo, n° 2). Pour échapper aux prescriptions d’une législation acerbe, toute en faveur de la classe propriétaire, [3.1]ils ont demandé au code de commerce un moyen légal de sortir de leur ilotisme. L’art. 291 du code pénal est anéanti de fait ; il faut actuellement rayer de ce même code le long chapitre qui concerne les coalitions d’ouvriers. Plus ingénieux que leurs confrères, ou pour mieux dire instruits par l’expérience, les ouvriers imprimeurs se sont coalisés au nom de la loi, et ont mis sous son égide leur coalition. Cet acte de société renferme donc en lui seul le germe d’une révolution sociale. Nous devons en féliciter son auteur, M. Gruardet ; il a rendu un service signalé à la classe prolétaire. Grâces lui soient rendues. Honneur aussi à MM. Galien et Musch qui n’ont pas craint d’entrer les premiers dans cette voie d’amélioration.

Il y a des compagnies d’assurance contre l’incendie, contre le feu du ciel, les naufrages, etc. De toutes manières, et sous toutes les formes, le contrat d’assurance est venu prêter son appui tutélaire à la propriété. Sublime découverte, institution vraiment juste et libérale qui nous appelle tous à réparer les malheurs de quelques-uns ! pensée républicaine éclose sous la monarchie : par elle la civilisation marche ; par elle seule le but de la société se trouve rempli. Mais dans le nombre des propriétés à assurer, on avait jusqu’à ce jour omis la plus sacrée, celle du travail. On avait oublié que le salaire est la propriété du prolétaire, c’est-à-dire de l’immense majorité ; lui seul avait été soustrait aux avantages, aux bienfaits de l’assurance. Cette lacune est remplie. Espérons que ce nouveau système s’étendra rapidement à toutes les professions ; alors plus de crainte pour l’ouvrier laborieux ; il travaillera lorsqu’il trouvera du travail ; mais le labeur manquant, il aura recours à l’assurance devenue, moyennant une légère prime, sa débitrice. Combien cela est préférable à tout ce que nous avons vu jusqu’à ce jour sous les noms de société de bienfaisance, caisses de prêts, etc. Le salaire sera maintenu au taux convenable pour que l’ouvrier vive en travaillant, et dès lors plus de concurrence ruineuse entre les maîtres, partant, plus d’émeutes ni de coalitions. Maîtres et ouvriers doivent s’en applaudir.

Ouvriers imprimeurs, vous avez donné à tous les prolétaires un bel exemple ; il sera suivi n’en doutons pas ; encore quelques jours, et les assurances mutuelles de travail seront entrées dans nos mœurs.

M. c.

 

 

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