sur le plan de vaize, les noms primitifs de la saône, et son ancien cours supposé,
PAR M. BEAULIEU.
Ce qu’on nomme plan de Vaize, c’est ce plateau qui s’étend en forme circulaire, depuis l’extrémité du faubourg de ce nom jusqu’au bas de la colline qui le termine au septentrion (en longeant la rive droite de la Saône). Ce plateau se nommait auparavant le Plat-de-Vaize, d’où est venu celui de plan ; à cause de sa surface plane ; entre ce plateau et la colline qui le borne, est un territoire appelé la Maladière, nom dérivé de celui de Maladrerie, à cause que vers le 14e siècle il existait en ce lieu un hôpital appelé Hospice de la Maladrerie, ou des lépreux, maladie qui, au moyen-âge, était assez répandue en France et ailleursi.
S’il faut en croire Ménestrier1, Clitophon et Plutarque2, la Saône a eu plusieurs noms ; elle a été d’abord nommée Brigulus, depuis Arar ; enfin Sauconna ou Sangona, dont le nom de Saône a été formé, et c’est, dit le premier, le nom Arar, que tous les anciens donnent à la Saône, et qui exprime, dit M. Bochard, sa lenteur. Virgile3, dans sa première églogue, la désigne par ce vers :
Aut Ararim Parthus bibet, aut Germanicus tigrim ;
Ce nom est le même que celui de l’Héraut (Aruris ou Araris), qui passe par Cizeron, d’où sortirent les premiers fondateurs de Lyon, avant les Phéniciens, qui fondèrent Marseille.
Quoi qu’en disent Spon4, Siméoni et autres, je suis de l’avis de ceux qui nient l’existence du passage de la Saône (à l’époque de la conquête des Gaules par Jules César), [8.1]derrière le flanc occidental de la montagne de Fourvières ; pour aller se perdre dans le Rhône près le village d’Oullins. Sans entrer dans aucune conjecture hypothétique, j’observerai qu’un coup de niveau fait en 1818, par des amis et moi, pour savoir l’élévation du Mont-Cindre (qui est de 315 toises du lit de la Saône), nous prouva que pour avoir un courant tant soit peu sensible derrière le territoire de Francheville et des Massues, les eaux de la Saône se seraient élevées au-dessus du Plan-de-Vaize, en supposant que le rocher de Pierre-Scize s’unissait à celui du fort-St-Jean, sans laisser aucune filtration à l’eau à plus de 275 pieds ; alors qu’était donc l’Ile-Barbe par rapport au refluement de la rivière ; cette île, connue plus de 500 ans avant que les Romains vinssent dans les Gaules (Voyez Histoire des Gaules, et Ogigène). Quoi qu’il en soit, le sol du Plan-de-Vaize présente des couches de terrains bien distinctes et qui prouvent les fréquentes irruptions de la Saône, et ceci m’amène naturellement à parler dans un autre article de l’utilité et des désavantages pour le peuple de Lyon, des différentes exploitations et établissemens qui y sont ou achevés ou projetés, tels que le bassin, le pont, etc.
Notes ( NOTICE)
Claude-François Ménestrier (1631-1705), jésuite, historien d’origine lyonnaise.
Plutarque (46-120) dans Des noms des fleuves et des montagnes, et des objets qu’on y trouve aurait emprunté à Clitophon de Rhodes ses idées sur l’origine du terme Lugdunum.
Virgile (70-19 av. J.-C.), poète et écrivain romain ; « Ou bien le Parthe boira dans la Saône ou le Germain dans le Tigre » est tiré de sa première Bucolique.
Jacob Spon (1647-1685), médecin et érudit lyonnais.