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10 mars 1833 - Numéro 10
 
 

 



 
 
    
CONSEIL DES PRUD?HOMMES.

(présidé par m. putinierPutinier.)

Audience du 7 mars 1833.

D. Lorsqu?un négociant promet au chef d?atelier une suite de pièces à fabriquer du même article, afin qu?il continue à travailler pour lui : cette promesse n?étant pas exécutée, le chef d?atelier est-il en droit de réclamer un défrayement pour les journées qu?il aurait perdues, par manque de matières et pour la perte que lui a occasionnée le retrait de l?ouvrage promis ? ? R. Oui, dans ces cas le négociant doit un défrayement.

Le sieur Giraud réclame au sieur Napoly une somme de 144 fr. pour un grand nombre de journées perdues, par le fait de ses employés. Il déclare qu?étant sur le point de régler, parce qu?alors il trouvait de l?ouvrage plus lucratif, on lui promit, s?il voulait continuer l?article, trois pièces de 60 aunes chacune ; et nonobstant cette promesse, il n?en a reçu qu?une et on lui refuse les autres.

Le sieur Napoly répond ne vouloir plus occuper cet ouvrier par suite de sa conduite, et déclare ne pas se rappeler de sa promesse de trois pièces, attendu, dit-il, qu?il n?en avait que deux à faire fabriquer et n?en pouvait promettre davantage ; mais il reconnaît, néanmoins, avoir fait attendre la première pièce très longtemps, et fait perdre plusieurs journées à l?ouvrier depuis cette époque jusqu?à ce jour ; il pense les avoir compensées, soit en portant le prix des mouchoirs à 80 c. au lieu de 75 c., soit par une augmentation de [4.2]10 c. sur l?avant-dernière pièce, et de 20 c. sur la dernière.

Giraud réplique que l?augmentation de 20 c. est fausse ; qu?il est visible que les chiffres ont été refaits. Jamais, dit-il, je n?ai réclamé plus de 90 c. par mouchoir ; cette augmentation, portée sous le titre de bonificationi, n?a été faite que dans l?intention de prouver au conseil que j?avais été satisfait des journées perdues. J?ai payé continuellement mon ouvrier sur le prix de 80 c. les premières pièces, et les dernières à 90 c. ; le prix de la façon n?est donc point pour me défrayer du temps perdu. L?on me refuse de l?ouvrage maintenant, parce que j?ai commis le grand crime, aux yeux de ces messieurs, d?avoir déclaré être payé à 90 c., à un maître qui fabrique le même article au prix de 80 c. Voila le motif pour lequel on me refuse les pièces qu?on m?a promises. Mais je veux poursuivre M. Napoly comme coupable de faux en écriture privée, pour m?avoir refait des chiffres sans mon consentement.

Après une longue délibération, le conseil condamne le sieur Napoly à payer une indemnité de 20 fr. au sieur Giraud.

Le sieur Giraud déclare de suite ne pas se soumettre à ce jugement et en rappeler au tribunal de commerce.

D. Un chef d?atelier qui refuse de continuer la fabrication d?un article, est-il en droit de réclamer pour son temps perdu par attente de pièces et ses frais de montage ? ? R. Non. Le négociant ne doit des défrayemens que lorsqu?il refuse de l?ouvrage.

Le sieur Cavaillier, dont les différends avec M. Dépouilly aîné ont déjà occupé plusieurs audiences, réclame en vain un défrayement, soit pour montage, soit pour avoir attendu une pièce une vingtaine de jours.

« Attendu qu?il est constant, d?après l?audition du témoin réclamé, que c?est de son consentement que le sieur Cavaillier a attendu la dernière pièce ;

« Attendu qu?il refuse de continuer à fabriquer la pièce qui lui est offerte, le conseil le déboute de sa demande. »

 

 

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