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11 décembre 1831 - Numéro 7
 
 

 



 
 
    

[3.2]L'autorité militaire a fait placarder les arrêtés suivans, en date des 6 et 7 du courant :

Le maréchal de France, ministre secrétaire-d'état de la guerre,

En vertu des pouvoirs spéciaux qui lui ont été conférés par ordonnance royale du 24 novembre dernier ;

Vu la loi du 12 avril 1803 et l'arrêté du gouvernement du 1erdécembre de la même année ;

Arrête :

Art. 1er Les livrets délivrés aux ouvriers non français par le ministre de l'intérieur, de même que les livrets délivrés aux ouvriers nés français par les maires des communes ou par les commissaires de police, sont et demeurent annulés, pour tous les ouvriers habitant les communes de Lyon, de la Guillotière, de la Croix-Rousse, de Vaise et de Cuire.

Art. 2. Les ouvriers pourvus ou non pourvus de livrets seront tenus de se présenter immédiatement dans les mairies des communes qu'ils habitent, à l'effet d'y obtenir de nouveaux livrets, s'il y a lieu ; lesquels livrets seront toujours délivrés sans frais.

Art. 3. Les chefs de manufactures, fabriques et ateliers quelconques, seront tenus de faire, devant le commissaire de police de leur arrondissement, ou devant le maire de leur commune, la déclaration nominative de tous leurs ouvriers, garçons et compagnons ; cette déclaration devra être faite dans le délai de deux jours, à compter de celui de la publication du présent arrêté.

Art. 4. Les maires des communes ci-dessus désignées seront tenus, sous leur responsabilité personnelle, de faire vérifier la sincérité des déclarations prescrites dans l'article précédent. Ils feront dresser des procès-verbaux de contravention contre les chefs d'ateliers et autres, qui ne se seraient pas conformés aux dispositions de l'article ci-dessus, ou qui auraient fait de fausses déclarations. Les contrevenans seront traduits devant les tribunaux de police pour y être condamnés aux peines portées par la loi.

Art. 5. Les ouvriers, garçons et compagnons qui, dans le délai de trois jours, à compter de la publication du présent arrêté, ne se seraient pas présentés dans leurs mairies respectives, pour obtenir la délivrance de nouveaux livrets, seront réputés vagabonds, arrêtés et punis comme tels, conformément aux dispositions de l'arrêté du gouvernement du 1erdécembre 1803, titre 1er, article 3.

MM. les maires auront le soin de se conformer, pour la délivrance des livrets, à ce qui est prescrit par l'art. 11, titre 3 de l'arrêté du gouvernement précité, et exigeront, en outre, un certificat du commissaire de police du quartier habité par l'ouvrier, constatant sa bonne conduite.

Les ouvriers, garçons et compagnons auxquels les administrations municipales ne jugeraient pas convenable d'accorder de nouveaux livrets, recevront des passe-ports d'indigens, valables seulement pour le temps nécessaire à leur retour dans leur pays natal, ou à leur arrivée à la frontière, s'ils sont nés hors de France.

Art. 7. Le préfet du département du Rhône est chargé de tenir la main à l'exécution du présent arrêté, lequel sera immédiatement imprimé et affiché à Lyon et dans les communes de la Guillotière, de la Croix-Rousse, Vaise et Cuire.

Fait au quartier-général, à Lyon, le 6 décembre 1831.

Le ministre de la guerre,
Signé Maréchal duc de Dalmatie.

[4.1]Le maréchal de France, ministre de la guerre,

En vertu des pouvoirs spéciaux conférés par l'ordonnance royale du 24 novembre dernier ;

Vu l’art. 14 du titre III de la loi du 22 germinal an XI, ainsi conçu :

 « Les conventions de bonne  foi, entre les ouvriers et ceux qui les emploient, seront exécutées. »

Vu le décret du 3 août 1810, titre 1er, art. 1er, où il est dit :

« Les conseils de prud’hommes sont autorisés à juger toutes les contestations qui naîtront entre les marchands-fabricans, chefs d’ateliers, contre-maîtres, ouvriers, compagnons et apprentis, quelle que soit la quotité de la somme dont elles seraient l’objet, au terme de l’art. 23 du décret du 11 juin 1809. »

Considérant que le conseil des prud'hommes de la ville de Lyon est seul appelé à juger d'abord, si les conventions faites entre les ouvriers et ceux qui les emploient, sont, ou non, de bonne foi, et que, d'après les lois, il lui appartient d'en connaître, sauf, s'il y a lieu, le recours devant les tribunaux ;

Considérant que, dès-lors, l'autorité administrative n’avait point à s’immiscer dans les contestations qui s’étaient élevées entre des fabricans et des ouvriers de la ville de Lyon,

Arrête :

Art. 1er Les tarifs relatifs à la fabrication des étoffes de soie et de rubans, publiés à Lyon, sous les dates des 26 et 31 octobre 1831, ainsi que les délibérations du conseil des prud'hommes, en date du 11 du même mois, de la chambre de commerce, en date du 15 octobre, du conseil municipal de Lyon, en date du 1er novembre, et les avis publiés par le maire de Lyon, le préfet du Rhône, et le lieutenant-général Roguet, sous les dates des 22 et 26 novembre, même année, et enfin tous autres actes relatifs à des tarifs quelconques, sur les façons d'étoffes de soie et rubans, qui seraient intervenus pendant cette période, sont déclarés nuls et comme non avenus, sauf aux parties à se pourvoir, au besoin, pardevant leurs juges naturels.

Art. 2. Le présent arrêté sera adressé à M. le préfet du département du Rhône, pour être notifié aux autorités administratives qui doivent en connaître, ainsi qu'à la chambre du commerce et au conseil des prud'hommes de la ville de Lyon.

Au quartier-général, à Lyon, le 7 décembre 1831.

Maréchal duc de Dalmatie.

M. le maréchal-ministre a bien voulu nous citer les articles de différentes lois ou décrets, dont il s’est appuié pour prononcer militairement l'annulation du tarif et de tout ce qui a été publié, sous ce rapport, depuis le 11 octobre jusques et y compris le 26 novembre dernier ; mais il a omis, pour ne les avoir sans doute pas lus, comme étant étrangers à la dignité de maréchal d’empire ou de France : 1 l'arrêté du 28 février 1807, de M. Fay-Sathonnay, maire de Lyon à cette époque, pour l’exécution du tarif alors en vigueur, et dont la réimpression fut sollicitée et demandée par le conseil des prud'hommes ; 2 l'addition faite à ce même tarif en 1811; 3l'ordonnance du 29 décembre 1817, de M. le comte Lezay-Marnésia, alors préfet de notre département, pour en assurer la pleine et entière exécution.

Le tarif est une convention de bonne foi entre les ouvriers et ceux qui les emploient, et convention signée par les deux parties… Sous ce double rapport, on aurait préféré voir affichée la loi du 22 germinal au XI, sur les manufactures, et à la suite l’art. 414 du code pénal, ainsi conçu :

« Toute coalition entre ceux qui font travailler des ouvriers, [4.2]tendant à forcer injustement et abusivement l’abaissement des salaires, suivie d'une tentative ou d'un commencement d'exécution, sera punie d'une amende de cent francs au moins, de trois mille francs au plus ; et, s’il y a lieu, d'un emprisonnement qui ne pourra excéder un mois. »

 

 

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