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14 avril 1833 - Numéro 15
 
 

 



 
 
    
 CONSEIL DES PRUD’HOMMES.

(présidé par m. goujon.)

Audience du 11 avril 1833.

D. Un maître peut-il prendre en contravention toute personne occupant son apprenti, même après 15 mois que ce dernier est sorti de son atelier, et a exercé depuis plusieurs professions ? – R. Oui. Le maître ne peut perdre ses droits.

Lyonnet, fabricant d’étoffes, réclame à Charles, traiteur, 300 fr. qui lui sont dus par le garçon attaché à son service, et qui était son apprenti, pour le montant de l’indemnité fixée par les conventions en cas de non-exécution.

Charles ne nie point avoir pris le jeune homme à son service, mais il déclare que toutes les informations prises lui ont seulement prouvé qu’il avait précédemment travaillé aux fortifications, et avait été employé par la compagnie Seguin à l’entreprise de la Gare ; que de bons renseignemens lui ayant été donnés, il avait cru devoir l’accepter sans autre difficulté, que même il s’était pourvu, auprès du commissaire, en demande d’un livret, qu’il ne put obtenir que le lendemain de la visite de Lyonnet. – Depuis il a su que le sieur Lyonnet avait eu connaissance que son élève était employé à la Gare, allait même le voir, et que jamais il n’avait fait aucune démarche pour se faire payer. Il conclut à ce qu’il soit déchargé de la demande en contravention.

« Le conseil déclare la contravention bonne et valable contre Charles, et le condamne à payer à Lyonnet la somme de 300 fr. avec intérêts et dépens, sauf son recours contre ledit garçon. »

D. Lorsqu’un élève s’enfuit de chez son maître, et que par sa mauvaise conduite il est impossible à ce dernier de le reprendre, les parens de l’élève peuvent-ils l’y contraindre et lui refuser l’indemnité convenue pour pareil cas ? – R. Non ?

Reynaud demande à Chipier le défraiement convenu entr’eux dans le cas où son neveu, qu’il a reçu pour élève, ne terminerait pas son apprentissage. Sa mauvaise conduite est constatée par le rapport du prud’homme chargé de la surveiller. Chipier déclare n’avoir été instruit de l’absence de son neveu de chez son maître, que par une invitation à comparaître au conseil. Il présente un long écrit, et qui contient sa demande que son neveu rentre et finisse son apprentissage, dans le cas contraire, une indemnité de 1,200 fr. Après de longs débats, desquels il résulte que le dernier paiement convenu pour l’apprentissage a été payé par anticipation, le conseil statue ainsi : « Attendu qu’il est constant que l’élève du sieur Reynaud s’est conduit de manière à ce que ce dernier ne puisse le reprendre ; mais, attendu que Chipier a [5.2]compté par anticipation à Reynaud, la somme de 125 fr. qui n’était échue qu’à la Saint-Jean 1833, le conseil, sans s’arrêter à la demande reconventionnelle, faisant droit à la demande du chef d’atelier, résilie les engagemens, et condamne Chipier, tuteur de l’élève, signataire desdites conventions, à payer la somme de 125 fr. d’indemnité au sieur Reynaud, avec intérêts et dépens. »

D. Un maître peut-il renvoyer son ouvrier sans lui donner la huitaine ? – R. Non. Dans le cas où il refuse à l’ouvrier de continuer la pièce qu’il a commencée, il lui doit payer la huitaine, soit la valeur de six jours de travail.

Cardinal, ouvrier chez M. Berthier, expose au conseil qu’après avoir commencé une pièce qu’il avait attendue plusieurs jours, il a eu des difficultés avec son maître, qui a refusé de lui laisser continuer la pièce en lui soldant son compte. Berthier dit que les différens survenus entre lui et son ouvrier proviennent d’un retard de paiement qu’il a été forcé de lui faire, étant lui-même retardé par le négociant, que cet ouvrier lui a manqué grossièrement, que, d’un autre côté, ne trouvant pas qu’il fût assez habile, il lui avait payé tout l’ouvrage fabriqué, ce qui avait été accepté. Pensant être dans son droit, il ne s’est pas présenté à la première invitation.

« Attendu que l’ouvrage a été retiré à l’ouvrier, au commencement d’une pièce, sans le prévenir, Berthier est condamné à lui payer en indemnité la valeur de six jours de travail, et les frais. »

 

 

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