|
28 avril 1833 - Numéro 17 |
|
|
|
|
|
De l’exportation de la Fabrique d’étoffes de soie hors la ville de Lyon.1 Suite (Voy. l’Echo, n° 15.) Nous allons dans cet article examiner la thèse importante de l’exportation de la fabrique d’étoffes de soie hors de la ville de Lyon, sous les divers rapports que nous avons indiqués dans le n° 15 du journal. Nous devons faire ressortir en premier lieu les inconvéniens de cette mesure prise ou tentée par un assez grand nombre de négocians que nous pourrions citer, et ce en la considérant 1° dans leur intérêt ; 2° dans celui de la ville de Lyon ; 3° dans celui de la France entière ; 4° dans celui des mœurs en général ; et enfin 5° dans l’intérêt de l’industrie. Dans l’intérêt des négocians : Ce ne serait pas la première fois qu’aveuglés par un esprit de vengeance ou simplement par le démon de l’amour-propre froissé, des hommes sages et estimables d’ailleurs, compromettraient leur propre intérêt. L’histoire de cet individu qui consentait à se laisser arracher un œil pour que son ennemi fût aveugle, est notre histoire à tous dans un cercle plus ou moins étendu et sauf de rares exceptions. L’intérêt des négocians, soit comme industriels, soit comme propriétaires, est de conserver à Lyon les manufactures qu’ils exploitent afin de pouvoir se livrer eux-mêmes à la surveillance qu’exige toute exploitation et [1.2]éviter de s’en rapporter à celle des contre-maîtres auxquels ils seront obligés de donner leur confiance, si ces manufactures sont transportées hors Lyon. Comme propriétaires, la diminution du prix des loyers les aura bientôt avertis du déficit de la richesse publique. Les négocians penseraient-ils trouver une fabrication aussi belle, aussi consciencieuse, si l’on peut s’exprimer ainsi, chez des ouvriers disséminés dans les campagnes, que chez des chefs d’atelier d’une même ville, exerçant en quelque sorte sans le contrôle mutuel de l’émulation. S’ils veulent y réfléchir et être de bonne foi, ils avoueront que non. Mais alors, dira-t-on, ils imiteront l’exemple de M. Berna, et fonderont de grands ateliers où les étoffes seront fabriquées par des ouvriers à façons, travaillant sous l’œil et la conduite de contre-maîtres expérimentés. Ce palliatif ne produira que peu d’effet ; ils éviteront, il est vrai, de passer par l’intermédiaire du chef d’atelier ; mais ils n’échapperont pas, dans un temps donné, aux exigences de l’ouvrier ; ils seront obligés de les subir comme le chef d’atelier les subit aujourd’hui et sans aucune compensation pour l’augmentation de leurs frais. Nous avons dit exigences de l’ouvrier, faute d’avoir pu trouver un mot qui rendît mieux notre pensée ; car ces exigences sont justes, sont le résultat de l’ordre de choses actuel, et doivent être satisfaites, ainsi que nous l’établirons, mais non par l’exportation de l’industrie dont les négocians seront les premières victimes dans leur intérêt pécuniaire, d’abord comme industriels et ensuite comme propriétaires. Sous ce dernier rapport il suffit d’énoncer la proposition, personne ne la contestera. Si la fabrique quitte la ville de Lyon, les loyers diminueront sans aucun doute, non-seulement à raison des logemens de la classe ouvrière restés vacans, mais encore à raison de l’émigration d’un grand nombre d’autres industries alimentées par la classe ouvrière, et qui la suivront dans son exil. Si la consommation diminue, et ce sera un résultat forcé de l’exportation de la fabrique, il faudra bien que le nombre des marchands qui fournissent à cette consommation et vivent de ce trafic diminue, et alors de nouveaux logemens seront encore inoccupés. Il est donc bien facile de prévoir le bas prix forcé des loyers, et partant la dépréciation des propriétés. Si nous voulions des exemples, nous n’irions pas les chercher au-delà de Tarare. La branche d’industrie qui avait paru s’y fixer et qui avait rapidement porté cette ville de second [2.1]ordre à un degré de prospérité qui allait toujours croissant, a cessé d’y habiter par suite de circonstances analogues à celles qui menacent la ville de Lyon ; eh bien ! qu’on compare le prix des propriétés aujourd’hui avec celui qu’il atteignait il y a quelques années ; qu’on fasse à ces mêmes époques le relevé des marchands de comestibles et autres industriels qui avaient accouru et s’étaient groupés autour de l’industrie principale, l’on verra l’énorme différence. La misère succédant à la richesse. Le même sort attend Lyon si l’exportation de la fabrique continue. Qui en souffrira le plus, du négociant propriétaire ou du chef d’atelier prolétaire ? Dans l’intérêt de la ville de Lyon : Ce que nous venons de dire relativement à la dépréciation des propriétés pourrait paraître suffisant. Cependant, laissant de côté l’intérêt des propriétaires, nous voulons dire un mot de l’intérêt de la ville de Lyon, abstraction faite de celui de ses habitans propriétaires. Une ville est un être moral : c’est sous ce point de vue que nous allons considérer la question dans son rapport avec Lyon. Ceux-là seuls pour qui le mot de patrie est un nom vide de sens ne nous comprendront pas. Nous espérons l’être du plus grand nombre. Lyon, comme cité, a intérêt à ne pas décheoir du haut rang qu’elle occupe. Lyon est la capitale du Midi ; ses destinées dans la suite des temps peuvent encore s’agrandir. Sera-t-elle mère infortunée, égorgée par ses propres enfans ! ou plutôt ses enfans ingrats la couvriront-ils de haillons pour la donner en spectacle au monde ! L’histoire flétrira ceux qui auront les premiers donné un exemple aussi funeste. Nous répondra-t-on par le fatalisme ? Oui, Tyr et Carthage, Gênes et Venise sont tombées. Si ce sort-là, ô Lyon, t’est réservé ! malheur à toi ! Mais ce n’est pas à tes fils à accélérer ta ruine ! La volonté d’ailleurs ne peut-elle combattre et vaincre le destin fatidique ? Oui, à l’aide de l’intelligencei, et c’est pourquoi nous jetons un cri de douleur et d’alarme. (La suite au prochain numéro.)
i Nos lecteurs observeront que c’est une réminiscence de la philosophie de l’école nouvelle de Fabre d’Olivet, Ballanche, etc. ; philosophie trop peu connue encore, mais qui a pour elle l’avenir.
Nécrologie. M. Prunot, chef d’atelier, l’un des fondateurs de l’Echo de la Fabrique, citoyen recommandable sous tous les rapports, est décédé le 21 avril dernier, âgé de 53 ans, à Lyon, quai Pierre-Scise, n° 114, par suite d’une fièvre ataxique. Il a été inhumé le lendemain au cimetière de Loyasse ; trois mille personnes environ ont suivi le convoi de cet honorable artisan. M. Charnier, prud’homme chef d’atelier, a prononcé sur sa tombe le discours suivant : « Celui dont nous déplorons en ce jour la mort prématurée, était mon ami. Je viens sur sa tombe exprimer mes sincères regrets, et les vôtres aussi, vous qui l’avez connu ! Il y a quelques années cette démarche de ma part, ce concours d’ouvriers aux funérailles d’un ouvrier, auraient paru ridicules. Grace aux progrès des lumières, à l’émancipation graduelle mais certaine des travailleurs, cela paraît tout naturel. Pourquoi n’honorerions-nous pas les vertus simples et modestes ! Pourquoi refuserions-nous à la cendre du prolétaire le tribut que l’orgueil apporte à celle de l’homme riche et puissant ? Nul ne mérite mieux un souvenir que le citoyen que la mort vient de nous ravir. Né d’une famille très pauvre ; il est devenu l’artisan de sa propre fortune, et lorsque la fortune se fut montrée favorable à ses travaux, [2.2]il sut ne pas rougir de la misère passée, ni s’enorgueillir de la richesse présente. Noble exemple que trop de parvenus oublient ! Laborieux et économe, sévère pour lui, indulgent pour les autres, il était aimé et respecté de chacun. Bienfaisant sans ostentation, le pauvre ne s’éloigna jamais de lui sans être soulagé ; ami de son pays, il porta son offrande à toutes les souscriptions, il figura dans toutes les réunions civiques. Pour tout dire en peu de mots, car ces mots sont le résumé de sa vie, il fut bon citoyen. Je serai compris de vous, Messieurs, en ajoutant qu’il travailla à l’émancipation des prolétaires long-temps avant que le mot émancipation eût pénétré dans nos ateliers. Adieu, mon ami ! reçois le prix de tes vertus. Tu nous laisses un exemple à suivre, celui de tes bonnes actions. Adieu ; repose en paix. » Immédiatement après les nombreux assistans se sont séparés dans le plus grand ordre. Une collecte pour les veuves et blessés de novembre a été faite par MM. Souchet, Blanc, Ferrière et Berger. Elle a produit 71 fr. 15 c. A cette somme il faut ajouter 4 fr. 5 c. recueillis, et 2 fr. 50 c. reçus pour la même destination de 4 chefs d’atelier. Total, 77 f. 70 c. M. Souchet a été chargé de faire la répartition.
SOUSCRIPTION MENSUELLE En faveur des victimes de novembre 1831. MM. les membres de la commission sont convoqués pour le lundi 6 mai prochain, à six heures précises du soir, au bureau de l’Echo, pour prendre connaissance de l’état où se trouve ladite souscription. Le président, Bouvery Le secrétaire, Marius Chastaing.
AU RÉDACTEUR.
Monsieur, Victimes d’une violence que nous croyons illégale et qui devrait, selon nous, attirer sur la tête du fonctionnaire qui l’a autorisée une punition sévère, nous vous prions de la publier, afin que du moins l’opinion atteigne ceux que protègent les lois et le pouvoir, et qui s’en servent pour attenter aux droits des citoyens. Le mardi 9 avril, nous étions ensemble dans un café de la place Confort. Un brigadier de la gendarmerie de Neuville, nommé Rousset, s’y trouvait aussi. Nous parlâmes de différens crimes récemment commis, notamment de l’assassinat d’une jeune femme par l’aide du bourreau. Cette conversation parut-elle suspecte au brigadier ; la police y ajouta-t-elle des mensonges officieux pour grossir ses rapports ? Nous l’ignorons. Mais vendredi soir, 19 courant, l’un de nous (M. Laroze Chédiffer) rentrant chez lui, fut invité par un inconnu à venir visiter un bâtiment où des travaux étaient à faire ; mais arrivé près du pont de la Feuillée, il fut arrêté sans explication et jeté à la cave. Le lendemain, pareille exécution avait lieu contre M. Margolet. Traduits devant M. Prat, commissaire de police, nous eûmes beau observer que nous étions établis, pères de famille, domiciliés et patentés ; expliquer minutieusement l’emploi de notre temps, et répondre aux questions les plus indiscrètes ; on nous fit conduire par le brigadier Rousset et des agens de police sur le bateau à vapeur, et de là à St-Germain-au-Mont-d’Or, devant M. le maire qui déclara à l’instant que nous n’avions pas la moindre ressemblance avec les individus soupçonnés d’un vol dont nous n’avions jamais entendu parler. Nous demandons, M. le rédacteur, s’il est permis de se jouer ainsi de la liberté de deux citoyens ? si les lois autorisent M. le procureur du roi à lancer des mandats d’arrêt contre des chefs d’industrie, à les arracher à leurs occupations, à leur faire subir, sans réparation possible, le déshonneur d’une translation publique dans le contact impur de ses gendarmes et de ses agens de police ? S’il en est ainsi, il faut bien se soumettre, mais on doit convenir que la liberté est encore bien mal assise en France, et que les magistrats usent sans ménagement de l’arbitraire qui leur est laissé. Mais si, comme nous le pensons, M. le procureur du roi est sorti des limites qui lui sont tracées, s’il a témérairement satisfait aux fantaisies de sa police dont il devrait être le souverain et non le valet, ne méritait-il pas plus qu’un blâme moral ? Quoi qu’il en soit, M. le rédacteur, nous voulons attirer la publicité sur ces faits, afin qu’on sache bien comment M. le procureur du [3.1]roi remplit ses devoirs, et que sans motif il incarcère et fait voyager comme criminels des citoyens innocens, domiciliés depuis de longues années à Lyon, et sur la conduite desquels le moindre soupçon ne s’est jamais élevé. Nous avons l’honneur d’être, etc. Margolet, ferblantier, rue Mercière, n° 58, Chediffer, pompier, quai Humbert, n° 2 Note du rédacteur. – Cette lettre, que nous sommes priés d’insérer, a paru mardi dernier dans le Précurseur. M. Chegaray n’a rien répondu. Est-il trop au-dessus des sieurs Margolet et Chediffer pour descendre jusqu’à eux, ou leur plainte est-elle si légère qu’elle ne mérite pas de réponse. Voila les effets de la faculté d’arrestation préventive ? Deux citoyens sans reproches, deux commerçans, deux pères de famille sont arrêtés sur un soupçon, arrachés à leurs affaires, donnés en spectacle à toute une population ; sans égard pour leur crédit, qui aurait pu être ébranlé, pour leur honneur compromis, pour l’anxiété de leurs familles. Ils sont innocens, on les met en liberté. Grand merci ! Mais l’insulte a été publique. On ne leur en demandera pas excuse, ils ne recevront aucune indemnité morale ou pécuniaire ! Oh ! vous avez bien raison vous qui dites : La légalité actuelle nous tue ! Vendredi 26. M. le procureur du roi vient de faire une réponse qui, selon nous, ne répond à rien. Elle est insérée dans le numéro de ce jour du Précurseur qui l’a fait suivre des judicieuses observations de Me Favre. Si nous en sommes requis nous insérerons dans notre prochain numéro la lettre de M. Chegaray que nous ferons suivre en ce cas de la note du Précurseur.
Au gérant. Daignez, Monsieur, apprendre au public que Dominique Prote, ouvrier en soie, assigné par le ministère public, n’a déposé dans mon procès que l’exacte vérité et ne mérite aucun reproche. Je vous salue, Charles Monier.
Nous avons reçu de M. Christophe, chef d’atelier, une lettre contre MM. Mons et Moras, que nous insérerons dans notre prochain numéro, l’ayant reçue trop tard pour qu’elle pût trouver place dans celui-ci.
DESSICATION DES SOIES. Trois mémoires ayant été publiés sur les moyens les plus convenables à employer pour la dessication des soies, opérée à la condition, suivant des procédés des plus avantageux, et ces mémoires, l’un de M. Felissent, directeur de la condition, l’autre de M. Andrieux, qui y a été employé, le troisième par la maison Talabot frères de Paris1, ayant fait l’objet d’un rapport à la chambre de commerce de Lyon, qui l’a soumis au ministre du commerce et des travaux publics, celui-ci a renvoyé le tout au conseil supérieur de l’industrie et des arts. D’après une récente décision de ce conseil, deux de ses membres doivent se rendre en cette ville pour faire l’épreuve des nouveaux appareils, en comparer le résultat avec celui du système actuel de la condition, et prononcer sur le procédé qui doit être adopté en définitive.
On nous annonce qu’un grand nombre de commissions sont arrivées des Etats-Unis.
Commission de Surveillance. La commission trimestrielle qui doit remplacer celle dont les pouvoirs expirent le 1er mai prochain, se compose de MM. Strube, Duchamp, Souchet, Fournier, Bernard, Python et Flachat.
AVIS ESSENTIEL. MM. les abonnés sont prévenus qu’à compter du six mai [3.2]prochain l’envoi du journal sera suspendu à l’égard de ceux qui n’auront pas soldé leur abonnement. Tous les abonnemens doivent se payer d’avance, et partir du 1er ou du 15 de chaque mois.
CONSEIL DES PRUD’HOMMES.
(présidé par m. goujon.) Audience du 25 avril 1833. D. Lorsqu’un apprenti a été maltraité par son maître et a contracté une maladie grave par la faute aussi de son maître, le conseil a-t-il le droit de résilier l’engagement fait entre les parties et de réduire l’indemnité stipulée ? – R. Oui. La demoiselle Baudrand, dévideuse, demande que la demoiselle Meunier, son apprentie, rentre chez elle pour achever son temps, ou lui payer le défraiement convenu. Le père de la demoiselle Meunier expose que sa fille est sortie parce que, d’un côté, elle était maltraitée, et de l’autre elle a contracté, en cohabitant avec la demoiselle Baudrand, une maladie psorique, ce qui est attesté par un certificat de médecin. « Le conseil, vu le certificat produit par la demoiselle Baudrand, et attendu les mauvais traitemens qu’elle a subi, résilie l’engagement passé entr’elle et la demoiselle Baudrand, à la charge de payer à cette dernière 50 fr. à titre d’indemnité, si mieux elle n’aime achever son temps. » D. Un chef d’atelier peut-il interrompre la fabrication d’une pièce commencée pour en faire fixer le prix par le conseil ? – R. Non, il doit attendre d’avoir achevé sa pièce. Crétin faisait appeler Berliat et Sarrazin, et demandait qu’ils lui remboursassent ses frais de montage ou consentissent à porter à 8 fr., ainsi que cela avait été convenu lorsqu’il avait accepté de l’ouvrage pour eux, le prix de la pièce qu’il fabriquait, et qu’ils prétendaient ne lui payer qu’à raison de 6 fr. 50 c. Berliat et Sarrazin déclarent qu’ils ne veulent payer les 8 fr. auxquels les prud’hommes-arbitres les ont condamnés que sur la première pièce et non sur celles qui sont à fabriquer. « Le conseil, tous les droits et moyens des parties leur demeurant respectivement conservés, ordonne que Crétin continuera sa pièce ; dépens réservés. » D. Le conseil a-t-il le droit de réduire une indemnité stipulée dans un acte d’apprentissage ? – R. Ouii. Maçon, apprenti de Cordier, est resté chez lui onze mois, pendant lesquels il s’est enfui treize fois. Lassé de cette conduite, le chef d’atelier demande la résiliation de l’engagement et les 300 fr. d’indemnité stipulés. « Le conseil, attendu que l’élève a travaillé pendant onze mois, résilie l’engagement et le condamne à payer à Cordier 150 fr. pour indemnité, avec intérêts et dépens. » D. Le négociant qui ne peut donner à un chef d’atelier une pièce promise sous un prétexte quelconque, est-il passible d’une indemnité ? – R. Oui. Morfouilloux a reçu un poil pour peluche de 260 aunes pour faite suite à un autre poil achevé. Il a été averti, [4.1]en le recevant, que sa pièce était à l’ourdissage. Allier, négociant, avoue ces faits ; mais il déclare que la nuance a été manquée à la teinture, et que dès-lors il est obligé, malgré lui, de ne pas continuer à Morfouilloux l’ouvrage promis. « Le conseil, attendu que le chef d’atelier a dû compter sur la pièce dont il avait reçu le poil, ordonne que cette pièce lui sera remise de suite, ou qu’Allier lui paiera 20 fr. pour indemnité, avec intérêts et les frais. » D. Un chef d’atelier est-il tenu de prêter son rémisse et son peigne au négociant auquel il rend la pièce qu’il ne veut plus fabriquer ? – R. Non. D. Le chef d’atelier qui refuse de continuer la fabrication d’une pièce doit-il perdre sa main-d’œuvre pour ce qui a été fabriqué ? – R. Oui. Pellet fait appeler Lovet, chef d’atelier, et conclut à ce que le conseil lui enjoigne d’expédier la fabrication de la pièce qu’il lui a confiée. Le sieur Lovet répond que l’ouvrage est si bien payé qu’il ne peut vivre en travaillant, et offre à Pellet de lui laisser lever la pièce. Pellet y consent, mais il demande que Lovet lui prête le rémisse et le peigne. L’ouvrier s’y refuse, alléguant que Pellet a été si obligeant pour lui lorsqu’il a monté le métier, qu’il croit devoir lui rendre la pareille. « Le conseil décide qu’à défaut par Lovet de finir la pièce, elle sera levée par Pellet, et en ce cas il perdra la façon de l’étoffe fabriquée. A l’égard du peigne et du rémisse, Lovet les prêtera si bon lui semble. » Lovet s’est félicité d’être quitte à si bon marché d’un mauvais ouvrage, et Pellet, en entendant qu’il recevrait l’étoffe fabriquée sans rien payer, a dit, avec une joie enfantine qui a fait rire l’auditoire : « C’est tout ce que je demande. » Sur les plaintes portées contre des élèves, plusieurs ateliers ont été mis sous la surveillance d’un membre du conseil. L’affaire de Carrier contre Girard, négociant, a été renvoyée devant quatre prud’hommes. Nous ferons connaître leur décision dans cette affaire importante. Rivière, négociant, a été condamné par défaut sur la demande de Beau, chef d’atelier.
i Boileau a dit dans une satire : « La raison dit oui, et la rime Quinaut. » Nous sommes obligés de dire : « Goujon dit oui, et la loi dit non. » Lorsque les dommages-intérêts sont stipulés, les juges ne peuvent ni les augmenter, ni les diminuer. Mais la loi est-elle faite pour le conseil des prud’hommes qui a permis à son président de violer le droit naturel le plus sacré : « celui de la libre défense » ? Toute convention est désormais inutile.
Banquet Garnier-Pagès. Dimanche prochain, 5 mai, à l’Elysée Lyonnais, aura lieu le banquet offert à M. Garnier-Pagès par l’association lyonnaise pour la liberté de la presse. 200 commissaires ont été choisis dans toutes les classes de citoyens. En cette occasion les ouvriers se souviendront qu’injuriés par M. Fulchiron, ils ont été noblement défendus par M. Garnier-Pagès. Ils viendront en foule lui témoigner leur reconnaissance. On trouve des billets aux bureaux de la Glaneuse, du Précurseur et de l’Echo de la Fabrique. Prix : 2 fr. Nota. Le préfet vient de défendre, par un arrêté basé sur diverses lois de 1791 que nous croyons abrogées ou au moins tombées en désuétude, toute réunion, bal, banquet, etc., pour lesquels on n’aurait pas obtenu la permission de l’autorité municipale. Le comité d’association pour la liberté de la presse ayant de son côté arrêté que le banquet aurait lieu, nous ne croyons pas devoir supprimer l’avis qui précède, par suite de cette maxime sage, dans le doute abstiens-toi, et dans la conviction où nous sommes que l’autorité municipale s’empressera de donner la permission de célébrer par un banquet l’arrivée d’un citoyen aussi recommandable que M. Garnier-Pagès, aussitôt que cette permission lui sera demandée, conformément [4.2]à l’arrêté de M. le préfet, dont nous n’avons pas actuellement à examiner la légalité. Il est probable qu’en ce moment elle est obtenue ; car nous savons que dans les journées d’hier et d’avant-hier un grand nombre de cartes a été distribué. D’ailleurs nous ne voyons pas pourquoi ce qui a été permis en 1832 ne le serait pas en 1833. L’autorité est trop sage, trop amie des lois et du principe de la souveraineté du peuple qui les domine depuis juillet 1830, pour changer ainsi d’une année à une autre. M. Gasparin est trop haut placé comme administrateur (c’est une justice à lui rendre) pour commettre une semblable inconséquence. Aussi avons-nous ferme confiance que le banquet aura lieu.
souscription au profit de la Tribune condamnée à 10,000 f. d’amende par la chambre des députés, sur la dénonciation de M. Viennet, pour avoir dit que cette chambre était prostituée. La souscription est ouverte au bureau de l’Echo. Nous publierons dimanche prochain la première liste des souscripteurs.
DU PEUPLE. 1
Par suite d’habitudes enracinées, nous jugeons encore le peuple avec prévention. Il ne se présente à nous que comme une tourbe grossière, incapable d’impressions élevées, généreuses, tendres. Toutefois, chez nous il y a pis, même en matière de jugemens littéraires, surtout au théâtre. S’il reste de la poésie au monde, c’est, je n’en doute pas, dans ses rangs qu’il faut l’aller chercher. Qu’on essaie donc d’en faire pour lui. Mais, pour y parvenir, il faut étudier ce peuple. Quand par hasard nous travaillons pour nous en faire applaudir, nous le traitons comme font ces rois qui, dans leurs jours de munificence, lui jettent des cervelas à la tête et le noient dans du vin frelaté. Voyez nos peintres : représentent-ils des hommes du peuple, même dans des compositions historiques ; ils semblent se complaire à les faire hideux. Ce peuple ne pourrait-il pas dire à ceux qui le représentent ainsi : « Est-ce ma faute si je suis misérablement déguenillé ? si mes traits sont flétris par le besoin, quelquefois même par le vice ? Mais dans ces traits hâves et fatigués a brillé l’enthousiasme du courage et de la liberté ; mais sous ces haillons, coule un sang que je prodigue à la voix de la patrie. C’est quand mon âme s’exalte qu’il faut me peindre. Alors je suis beau ; » et le peuple aurait raison de parler ainsi. Tout ce qui appartient aux lettres et aux arts est sorti des classes inférieures, à peu d’exception près. Mais nous ressemblons tous à des parvenus désireux de faire oublier leur origine ; ou si nous voulons bien souffrir chez nous des portraits de famille, c’est à condition d’en faire des caricatures. Beau moyen de s’anoblir, vraiment ! Les Chinois sont plus sages : ils anoblissent leurs aïeux. Le plus grand poète des temps modernes, et peut-être de tous les temps, Napoléon, lorsqu’il se dégageait de l’imitation des anciennes formes monarchiques, jugeait le peuple ainsi que devraient le juger nos poètes et nos artistes. Il voulait, par exemple, que le spectacle des représentations gratis fût composé des chefs-d’œuvre de la scène française. Corneille et Molière en faisaient souvent les honneurs, et l’on a remarqué que jamais leurs pièces ne furent applaudies avec plus de discernement. Le grand homme avait appris de bonne heure, dans les camps et au milieu des troubles révolutionnaires, jusqu’à quel degré d’élévation peut atteindre l’instinct des masses, habilement remuées. On serait tenté de croire que c’est pour satisfaire à cet instinct qu’il a tant fatigué [5.1]le monde. L’amour que porte à sa mémoire la génération nouvelle qui ne l’a pas connu, prouve assez combien l’émotion poétique a de pouvoir sur le peuple. Que nos auteurs travaillent donc sérieusement pour cette foule si bien préparée à recevoir l’instruction dont elle a besoin. En sympathisant avec elle, ils achèveront de la rendre morale, et plus ils ajouteront à son intelligence, plus ils étendront le domaine du génie et de la gloire. P. J. de Béranger.
AUX ARISTOCRATES D’AUJOURD’HUI.
C’est merveille de voir avec quelle impertinente audace, quelle fatuité, quelle morgue, certains privilégiés des villes, que le hasard a mis depuis un jour et pour un moment peut-être en haute position sociale, exploitent la crédulité de quelques gros hères de village dont l’importance se mesure à leurs arpens de terre, à peu près comme le mérite des premiers se calcule par leurs écus. Ecoutez ces docteurs, ces renégats du libéralisme qui s’égosillaient à crier à bas les gentillâtres ! à bas les noblions ! à bas la prétraille ! parce qu’ils n’avaient ni privilèges, ni noblesse, ni religion : leur langage a bien changé depuis qu’ils se croient grands ! Ils ont déposé l’envie, mais ils sont dominés par la peur ; usurpateurs d’un pouvoir qu’ils jalousaient, et qui ne va point à leur taille de nains, ils craignent à chaque instant de s’en voir dépouiller comme ils en ont dépouillé les autres. Le génie du nivellement était un dieu quand il servait leur ambition et qu’il abaissait les supériorités qui les dominaient ; c’est un monstre aujourd’hui qu’il tend à élever jusqu’à eux les trente et quelques millions d’hommes qui s’agitent au-dessous, comme si l’esclavage était moins lourd parce que celui qui vous en accable est plus indigne ; comme si l’insolence roturière revêtue d’un peu d’or était plus supportable que l’orgueil aristocratique entouré de blasons ! comme si le soufflet était moins humiliant parce que le petit homme qui nous le donne est monté sur des sacs d’argent ! En vérité, c’est pitié de voir les plates intrigues de ces mirmidons, nés d’hier, qui se croient le pouvoir d’arrêter le mouvement social, quand ils dénient à d’autres, que le prestige de dix siècles environne, la puissance de le faire rétrograder ! Ils se remuent, ils s’agitent en tout sens, et, parce qu’ils font un peu de tapage dans leur chambre ; ils s’imaginent qu’ils ont fait du bruit dans le monde. Parlez à ces heureux du siècle de progrès, d’améliorations sociales, ils vous riront au nez et vous demanderont sérieusement ce qui peut manquer aux autres quand ils regorgent de tout. Si vous insistez, comme ils n’oublient pas qu’ils sont enrichis des dépouilles de la noblesse et du clergé ; et qu’ils ne conçoivent pas d’autre moyen d’avoir pour tous que celui de prendre à quelqu’un, parce que ces hommes de loisir sont tout-à-fait étrangers à la production, que leurs dogmes politiques se résument par un ôte-toi de là que je m’y mette, ils entrent alors en fureur ; ils vous insultent, ils vous injurient, ils crient au vol, au pillage, si vous leur parlez de bien-être pour les travailleurs de la société. Les savans, les artistes, les industriels ne sont à leurs yeux que des manœuvres fort heureux, sans doute, de travailler à leur procurer des jouissances, et de trouver dans le salaire de leurs veilles de quoi payer un morceau de pain trempé de sueurs. La manière de raisonner de ces égoïstes est celle-ci : Nous [5.2]avons tout, les classes laborieuses n’ont rien, vous voulez leur donner quelque chose, donc vous voulez nous piller, il serait bien facile de leur répondre : Voila ce que vous avez fait, et c’est ce que nous ne ferons point. Quarante années de révolutions nous ont trop bien appris que la société ne gagne rien à cette politique de déplacement des fortunes ; qui est toujours une politique d’astuce, de fraude, de violence, de désordre et de haine : c’est par une politique de conciliation, de justice, d’association, qui aura pour résultat une immense augmentation de produits, que nous arriverons aux améliorations, réclamées impérieusement, songez-y bien ! par les exigences sociales. Toutes vos mesquines vues, toutes vos étroites conceptions, tous vos petits projets seraient impuissans et peut-être funestes. Faites-nous grâce, tartufes philantropes, de vos dépôts de mendicité, qui deviendraient bientôt de nouvelles bastilles, où vous trouveriez commode d’enfermer ceux qui vous gênent, lorsque vous seriez las de leur jeter le pain de l’aumône ; les maisons de refuge tueraient la liberté individuelle. Gardez vos caisses d’épargne et de prévoyance, où le malheureux n’a rien à apporter que sa misère ; créez des banques industrielles et agricoles, où il trouvera des ressources, des moyens de crédit, au lieu d’attirer à vous sa dernière obole pour alimenter encore l’agiotage et servir vos dévorantes opérations financières. N’ajoutez pas une amère dérision, une sanglante ironie à votre froide insensibilité, à votre sec égoïsme ; et, puisque votre grande maxime sociale est de laisser faire, jouissez en paix de ce que vous avez, nous ne vous l’envions pas ; mais laissez donc faire ceux qui travaillent à donner aux autres sans rien vous ôter : ne calomniez pas leurs actes ; et, s’il vous restait encore quelques doutes sur la pureté de leurs intentions, rappelez-vous que le coupable ne se montre point, que le crime se cache, et nous nous manifestons tout entiers. Vous nous connaissez, vous savez qui et quels nous sommes. Nous pouvons nous mettre en parallèle avec nos détracteurs ; nous ne redoutons point la comparaison, comme nous ne déclinons pas la responsabilité de nos paroles. Ces paroles, quoique vous fassiez, ont du retentissement ; vous-mêmes vous reconnaissez leur valeur, en vous acharnant à les combattre, car pourquoi s’attaquer à des chimères ? Mais gardez vos éloges et votre blâme, nous n’avons point quêté votre dédaigneux appui, nous ne redoutons guère vos cabales, vos menées, vos intrigues ; l’artifice est trop maladroit, le piège est trop grossier pour que personne puisse s’y laisser prendre. Vous nous servez en cherchant à nous nuire, et lorsque dans votre ridicule et impuissante malveillance, vous, dont l’entêtement aveugle, dont la résistance impie à la loi du progrès peuvent bouleverser le monde, vous allez criant par-dessus les toits, que nous sommes des gens dangereux, des incendiaires ; ceux qui nous connaissent se mettent à rire de vos paroles ; il leur semble entendre cet adroit fripon, qui criait au voleur en retirant sa main de la poche de son voisin, puis ceux qui ne nous connaissent pas ont envie de voir des hommes qu’on leur peint si terribles, et ils viennent à nous : c’est vous qui nous les envoyez, déclamateurs maladroits ; merci ! vos dénigrantes paroles nous feront plus de bien que votre patronage. Jullien.
AVIS AUX FOURRIÉRISTES. M. R...... cadet nous a priés d’ouvrir les colonnes de l’Echo de la Fabrique à l’exposition qu’il se propose de faire de la théorie sociétaire [6.1]de Ch. Fourrier. Persuadés que cette investigation ne peut qu’être utile, et sans en prendre sur nous la responsabilité (voulant comme journalistes rester étrangers à tout système exclusif), nous avons accepté avec empressement. Le numéro prochain et les suivans contiendront les articles que M. R...... nous adressera.
Littérature. Les Contrebandiers.
chanson adressée a m. joseph bernard, député du var, auteur du bon sens d’un homme de rien1. Air : Cette chaumière-là vaut un palais. Malheur ! malheur aux commis ! A nous, bonheur et richesse ! Le peuple à nous s’intéresse : Il est de nos amis. Oui, le peuple est partout de nos amis. Oui, le peuple est partout, partout de nos amis. Il est minuit. Çà, qu’on me suive, Hommes, pacotille et mulets, Marchons, attentifs au qui vive ; Armons fusils et pistolets. Les douaniers sont en nombre ; Mais le plomb n’est pas cher ; Et l’on sait que dans l’ombre Nos balles verront clair. Malheur, etc. Camarades, la noble vie ! Que de hauts faits à publier ! Combien notre belle est ravie Quand l’or pleut dans son tablier ! Château, maison, cabane, Nous sont ouverts partout. Si la loi nous condamne, Le peuple nous absout. Malheur, etc. Bravant neige, froid, pluie, orage, Au bruit des torrens nous dormons. Ah ! qu’on aspire de courage, Dans l’air pur du sommet des monts ! Cimes à nous connues, Cent fois vous nous voyez La tête dans les nues Et la mort sous nos pieds. Malheur, etc. Aux échanges l’homme s’exerce, Mais l’impôt barre les chemins. Passons : c’est nous qui du commerce Tiendrons la balance en nos mains Partout la Providence Veut, en nous protégeant, Niveler l’abondance, Eparpiller l’argent. Malheur, etc. Nos gouvernans pris de vertige, Des biens du ciel triplant le taux, Font mourir le fruit sur sa tige, Du travail brisent les marteaux, Pour qu’au loin il abreuve Le sol et l’habitant, Le bon Dieu crée un fleuve, Ils en font un étang. Malheur ! etc. Quoi ! l’on veut qu’uni de langage, Aux mêmes lois long-temps soumis, Tout peuple qu’un traité partage Forme deux peuples d’ennemis. Non, grâce à notre peine, Ils ne vont pas en vain [6.2]Filer la même laine, Sourire au même vin. Malheur, etc. A la frontière où l’oiseau vole, Rien ne lui dit : Suis d’autres lois. L’été vient tarir la rigole Qui sert de limite à deux rois. Prix du sang qu’ils répandent, Là, leurs droits sont perçus. Ces bornes qu’ils défendent, Nous sautons par-dessus. Malheur, etc. On nous chante dans nos campagnes, Nous, dont le fusil redouté En frappant l’écho des montagnes, Peut réveiller la liberté. Quand tombe la patrie Sous des voisins altiers, Mourante elle s’écrie : A moi, contrebandiers ! Malheur, etc. P. J. de Béranger. (Extrait de ses nouvelles et dernières chansons.) Note du rédacteur. – Cette chanson est la dernière du poète populaire dont la France s’honore, que nous insérerons dans ce journal ; nous croirions commettre une indiscrétion en agissant autrement ; d’ailleurs il nous faudrait transcrire tout Béranger ; car il est difficile avec lui de faire un choix. L’Echo a déjà enrichi ses colonnes de la Prédiction de Nostradamus ou le roi mendiant (n° 7, p. 54) ; de Denys, maître d’école (n° 16, p. 129) ; des Contrebandiers (voy. ci-dessus). Nous recommandons aux lecteurs le Vieux Caporal, Emile Debrauxi2, Conseil aux Belges, le Vieux Vagabond, Jacques ou l’huissier du roi, les Fous, le Suicide sur la mort de Victor Escousse et Auguste Lebras ; les Tombeaux de Juillet. Les chansons nouvelles et dernières de Béranger se composent en tout de 53 chansons et de trois couplets séparés, elles forment un volume in-18 de 250 pag.ii. Elles sont dédiées à Lucien Bonaparte, auquel Béranger a dû en 1803 la protection qui, en le sauvant de la misère, lui a permis de réaliser ce que son génie avait conçu ; Béranger les a fait précéder d’une préface remarquable à plus d’un titre, et dans laquelle il promet une espèce de Dictionnaire Historique, « où, dit-il, sous chaque nom de nos notabilités politiques et littéraires, jeunes ou vieilles, viendront se placer mes nombreux souvenirs et les jugemens que je me permettrai de porter ou que j’emprunterai aux autorités compétentes. Ce travail… remplira le reste de ma vie. » Béranger, dans cette préface, nous révèle un véritable talent comme prosateur ; mais nous devons espérer qu’il chantera encore ; il nous l’a dit lui-même, Chanter, ou je m’abuse, Est ma tâche ici-bas. Pour mettre à même les lecteurs d’apprécier encore plus l’illustre chansonnier, nous avons extrait de sa préface l’article inséré dans ce numéro sous le titre : Du peuple.
i Emile Debraux, auteur des chansons de la Colonne, Soldat, t’en souviens-tu, Fanfan Latulipe, Mon petit Mimile, est mort dans l’indigence au commencement de 1831, à l’âge de 33. ii Chez tous les libraires, prix : 5 fr.
L’espace nous a manqué pour rendre compte, suivant notre promesse (Voy. l’Echo, n° 14), d’un nouveau journal littéraire, le Siècle, revue critique1, paraissant toutes les semaines, lequel se distingue par l’examen à la fois sévère et impartial qu’il fait de toutes les productions [7.1]nouvelles de la littérature et des arts. Nous réparerons cette omission le plus tôt possible. On a déjà remarqué dans ce journal des articles fort intéressans sur la philosophie allemande, sur les littératures étrangères, et sur d’importantes questions sociales. Il est rédigé par plusieurs rédacteurs de l’ancien Globe. (Voy. les Annonces.)
LE CANUT, HISTOIRE CONTEMPORAINE,
(Suite. – Voy. l’Echo, n° 16.) Lorsque Rose revint à la maison elle trouva son mari la tête appuyée sur ses deux mains et tout affligé de l’inutilité de ses courses. Lui, la voyant embarrassée, le teint enflammé, les yeux humides, lui demanda d’où elle venait ; elle lui avoua d’abord sa démarche auprès de Boursault. Jacques lui fit de vifs reproches de ne l’avoir pas consulté avant de s’abaisser à supplier cet homme. Mais que devint-il lorsqu’il apprit la condition que Boursault avait mise à la demande de Rose et l’indigne attaque à laquelle celle-ci avait été exposée. – Il devint pâle tout à coup, comme lorsqu’on apprend un grand malheur, un malheur nouveau et inattendu. Il aurait pu tout supporter, la pauvreté, la faim, des injures ; en pensant à sa famille il aurait pu courber sa tête et se taire sous une humiliation personnelle ; mais être insulté dans ce qu’il avait de plus cher au monde ! être déshonoré dans l’honneur de sa femme ! être regardé comme un homme qui peut manger un pain acheté à ce prix ! Son sang bouillonnait dans ses veines. C’est là l’injure que le pauvre ressent le plus douloureusement ; ces inégalités factices de fortune et de condition que la main des hommes lui a imposées, il les subit par nécessité et par habitude ; mais il est fier de l’égalité des dons que la nature distribue à tous les mortels ; et dès qu’une caste élevée veut encore les attirer à elle et avoir seule le privilège des jouissances qui doivent appartenir à tous ; dès qu’elle porte atteinte au seul bien dont elle ne puisse s’arroger le monopole, alors le pauvre se révolte comme d’une infraction à un traité passé entre lui et Dieu qui a donné cette unique compensation à tant de maux et de misère. Jacques s’en alla sans mot dire. Il court chez Boursault et demande à lui parler. L’Adonis de la fabrique trompé par le nom crut que la jeune femme revenait ; il ordonna à la hâte de faire entrer et prit pour la recevoir un air riant et triomphateur. Mais quel fut son désappointement lorsqu’il vit entrer Jacques. – Vous êtes un malhonnête homme, lui dit celui-ci brusquement et sans préambule. – Hé bien ! Qu’est-ce cela ? s’écria Boursault étonné d’un pareil langage dans la bouche d’un canut. – Comment ! non seulement vous n’avez pas honte de vous engraisser du travail des malheureux ouvriers ! il faut encore que vous vous appropriez leurs femmes et leurs filles ! cela vous arrive souvent, Messieurs les richards ! mais si jusqu’ici vous avez eu affaire à des niais ou à des gens qui préfèrent la honte à la misère, je vous réponds que vous n’aurez plus envie de vous frotter à Jacques Lebras. – Ah ! je comprends ! fit Boursault en souriant bêtement. – Eh ! bien, mon cher Monsieur, si vous comprenez, j’espère que vous ne refuserez pas de me rendre raison… Je manie encore assez bien le briquet pour vous voir cinq minutes en face… – Oh ! oh ! oh ! Finissez donc… J’étouffe ! Il est excellent avec son briquet… ! [7.2]– Vous auriez donc la lâcheté de me refuser satisfaction… – Allons, mon ami, voila assez de plaisanteries comme cela… Maintenant je vais prendre la chose au sérieux… Partez vite où je vous fais jeter à la porte par mes domestiques ! – Me faire jeter à la porte ! Jacques ne voyant plus aucune ressource de vengeance pour lui après ce refus, exaspéré de s’entendre encore insulté, hors de lui, s’élance tout-à-coup sur Boursault, le saisit à la gorge, le renverse et lui mettant un genou sur la poitrine. – Demande-moi pardon de ton injure, criait-il d’une voix forte… Boursault en se débattant sous la pression vigoureuse de son antagoniste, saisit le cordon de la sonnette. Les domestiques accoururent et débarrassèrent leur maître sans toutefois user de violence envers l’ouvrier dont les regards foudroyans leur en imposaient. Boursault, essoufflé, rendu, s’écriant d’une voix entrecoupée : « Ah ! le scélérat ! C’est un vrai guet-à-pens ! Comme il m’a arrangé ! Mais j’ai des témoins et ton affaire est bonne. » Cependant Jacques sortit la tête haute et d’un pas tranquille. Il fut cité par Boursault en police correctionnelle, et grâce au talent d’un jeune avocat qui plaida sa cause de bonne volonté, il ne fut condamné qu’à deux mois de prison, cent francs de dommages et intérêts, et aux frais du procès. C’était déjà trop pour lui. S’il avait été riche peut-être il aurait pu aussi lui aller d’abord demander satisfaction aux tribunaux ! Mais il aurait fallu perdre aux audiences des journées de travail ; il aurait fallu faire de premiers frais et risquer une perte d’argent en cas d’échec ! Et ces journées de travail le faisaient vivre avec sa famille ! Et il n’avait pas de quoi faire ces premiers frais et risquer cette perte d’argent ! Mais Boursault pouvait payer et la justice lui prêtait une oreille plus docile. Ainsi la prétendue égalité des Français en face de la loi tombe et se brise devant l’inégalité des fortunes. Cette lèpre corrompt et mange au cœur les institutions les plus sages, et nos législateurs n’ont pu s’empêcher de jeter un peu d’or dans la balance de Thémis. La justice ne cessera d’être une illusion pour la majeure partie de nous que lorsqu’un gouvernement ami du peuple établira des défenseurs d’office chargés de poursuivre gratuitement la réparation des injures qui auraient été faites au pauvre, et de traîner le coupable devant ses juges en l’arrachant du sein de son opulence qui ne sera plus pour lui un gage d’impunité ! Jusque-là quand on nous parlera d’égalité devant la loi, nous répondrons : amère dérision ! Et cette parole aura de l’écho dans les masses. (La suite à un prochain numéro.)
COUR D’ASSISES DU RHÔNE. ier trimestre de 1833. 12 Mars. – Gagnieux (François). – Jacquet, femme Boiron (Jeanne-Marie). Vol de nuit dans une maison habitée avec effraction intérieure. Le premier 6 ans de prison ; la seconde acquittée. MMes Parelle, Vallery. 13. Second (Louis-Joseph) ; Carlot, veuve Blanc (Marie). Vol et complicité de vol à l’aide d’escalade et d’effraction. Le premier 6 ans de travaux forcés et exposition ; la seconde 5 ans de réclusion sans exposition. MM. Vachon, Parelle. [8.1]13. Demure (Jean-Baptiste). Attentat à la pudeur sur une fille âgée de moins de 11 ans, 3 ans de prison. Me Lurin. 14. Marcé (Pierre). Vol dans une maison où il était ouvrier, acquitté. Me Bonjour. 14. Engler (Georges). Attentat à la pudeur sur une fille âgée de moins de 11 ans, 5 ans de prison. Me Charassin. 15. Bressand (Antoinette). Vol ou complicité de vol la nuit, par plusieurs personnes dans une cave dépendant de maison habitée, avec fausses clés, acquittée. Me Mantellier. 15. Fauvin (Jean-François). Vol dans une maison où il était commis, 3 ans de prison. Me Humblot. 16. Monnier (Charles) ; Serre (Pierre). 1° réunion de plus de 20 personnes à certains jours marqués pour s’occuper de politique ; 2° participation de Monnier comme chef ou directeur ; 3° proposition de renversement du gouvernement non suivie d’effet ; 4° proposition non agréée de complot, acquittés. Mes Chanay, Bacot. 18. Chambon (Aimé). Excitation à la haine et au mépris des citoyens contre une classe de personnes (Affaire renvoyée par la cour de cassation). Aux prochaines assises. 18. Larochette (Philibert). Vol de nuit dans une maison habitée, avec escalade et effraction extérieure, 5 ans de prison. Me Perouze. 19. Detève (Jean) ; Detieune (Pierre-Marie) ; Detieune (Pierre). Faux en écriture privée. Le premier 3 ans de prison ; le second 5 ans id. ; le troisième 4 ans id. Mes Perras, Perouze, Mantellier. 20. Rochette (Antoine). Coups et blessures qui ont produit une incapacité de travail de plus de 20 jours, 5 ans de réclusion sans exposition. Me Margerand. 21. Grataloup (Benoît) dit Martin. Vol avec violence sur un chemin public, par plusieurs personnes, avec armes apparentes, travaux forcés à perpétuité avec exposition. Me Genton. 22. Granier (Adolphe), gérant de la Glaneuse. 1° provocation au renversement du gouvernement non suivie d’effet ; 2° excitation à la haine et au mépris du gouvernement ; 3° offenses envers le roi ; 4° idem envers le prince royal, n° 96, 98, 101, 102, 106 et 110, 2 ans de prison, 5,000 fr. d’amende, par défaut. Id. n° 111, 6 mois de prison et 1,000 fr. d’amende, par défaut. 23. Chanrion (Antoine). Vol sur un chemin public, acquitté. Me Deminjon. 23. Barin (Joseph). Attentat à la pudeur avec violence sur une fille âgée de moins de 15 ans ; idem. Me Perras. 25. Petetin (Anselme). Excitation à la haine et au mépris du gouvernement du roi (Précurseur du 25 février 1833), 2 mois de prison, 3,000 fr. d’amende. Me Jules Favre. 25. Berthaud (Louis-Agathe) ; Perret (Jérôme), imprimeur. Offense publique envers le roi, 4e livraison d’Asmodée (au Roi), acquittés. Mes Michel-Ange Perrier, Charassin. 26. Bouvier (Joseph). Vol domestique, 6 mois de prison. Me Vachon. 26. Gouin (François). Faux en écriture de commerce, 2 ans de prison. Me Lurin. 27. Granier (Adolphe) ; Perret (Jérôme). 1° Excitation à la haine et au mépris du gouvernement, 2° provocation au renversement du gouvernement, n° 120 de la Glaneuse, 6 mois de prison, 1,000 fr. d’amende, par défaut ; M. Perret renvoy. aux proch. assises. Id. id. 1° attaque contre l’autorité royale et l’autorité constitutionnelle du roi ; 2° provocation au renversement du gouvernement (n° 128), id. id. Id. id. 1° Attaque contre l’inviolabilité de la personne du roi ; 2° id. contre les droits que le roi tient du vœu de la nation (n. 145), 8 mois de prison, 1,500 fr. d’amende, par défaut, M. Perret renv. aux proch. assises. 28. Chambon fils (Antoine) ; Dubreuil (Claude) ; Dalhepierre (Gaspard-Dominique) ; Delhorme (Pierre) ; Desroches (Julien) ; Tachon (Antoine) ; Bacuvier (P.-Louis). Faux en écritures privées et complicité ; le premier 10 ans de réclusion et exposition ; le second idem ; le troisième idem ; le quatrième 8 ans et exposition ; les trois derniers acquittés. Mes Cochet, Genton, Bacot, Lurin, Bonjour, Genton, Parelle. 30. Petetin (Anselme). Diffamation envers M. le procureur du roi. Renvoyée aux prochaines assises.
Coups de navette.
[8.2]M. Pelet n’est pas exigeant, qu’un ouvrier lui rende gratis l’ouvrage qu’il a fait, c’est tout ce qu’il veut. Ce n’est pas bien, on nous empêche de vivre et on ne veut pas nous laisser chanter.
AVIS DIVERS.
(188) l’homme rouge, satire politique en vers, paraît tous les dimanches par livraisons de 8 pag. in-4°. Le prix de la souscription est de 8 fr. par trimestre, soit 13 livraisons ; 15 fr. pour 26 livraisons ou deux trimestres ; et 30 fr. pour l’année, 52 livraisons. Par la poste, 1 fr. de plus par trimestre. On souscrit à Lyon au bureau de la Glaneuse ; chez M. Babeuf, libraire, et dans les départemens, chez tous les directeurs des postes. (172) Le Siècle, Revue critique de la littérature des sciences et des arts, paraissant tous les samedis par cahiers de deux feuilles d’impression (32 pages in-8°.) Prix, pour les départemens, 24 fr. pour six mois, 46 fr. par an (3 fr. de plus par trimestre pour l’étranger). On s’abonne à Paris, au bureau du journal, rue du Battoir-St-André, n° 1 ; chez Roret, libraire, rue Hautefeuille, n° 10 ; et chez tous les libraires et directeurs de la poste. (190) napoléon, Journal anecdotique de l’empire, dédié au peuple. Prix : 6 fr. par an. Ce journal paraîtra tous les mois par cahiers de deux feuilles in-8°, papier grand-aigle, du plus grand format connu. – On s’abonne à Paris, rue de Provence, n° 56 ; et à Lyon, dans le cabinet de M. Marius Chastaing, rédacteur en chef de l’Echo de la Fabrique, rue du Bœuf, n° 5, au 2e, de 9 à 11 heures du matin. (199) Tisiphone, satire politique par Léopold Curez1. Le prospectus est en vente chez tous les marchands de nouveautés ; cette satire paraîtra par livraisons de 8 pag. in-12, à des époques indéterminées. Nous en rendrons compte. (198) par brevet d’invention. Machizot ; rue du Chariot d’Or, à la Croix-Rousse, et Molozait, rue Vieille-Monnaie, n. 8, offrent aux chefs d’atelier des mécaniques à cannettes à arrêt sans soterelles ; ils en font d’une dimension beaucoup plus petite que celles faites jusqu’à ce jour. (194) A vendre, un métier 5/4, mécanique en 400 avec tous les accessoires. S’adresser au bureau. (193) A vendre de suite un atelier de 4 métiers, travaillant pour châles satin 6/4, mécaniques en 1,200 et 1,800 ; suite de l’ouvrage et de la location. S’adresser au bureau. (161) A vendre de suite, 3 métiers dont deux en 5/4 et un en 6/4, avec mécanique en 1,200 et suite de loyer si l’acquéreur le désire. S’adresser au bureau. (195) A vendre, mécanique en 400, 700, 1,000, régulateurs de première force, rouleau 5/4, planches d’arcades, 5/4, 6/4, et caisse pour cartons ; le tout en très-bon état, ayant peu travaillé. S’adresser au bureau. (181) A vendre, atelier de 5 métiers en 600 et 900, avec tous les accessoires. S’adresser au bureau du journal ou chez M. Suiffet, rue du Charriot-d’Or, n°11, au 2e, à la Croix-Rousse. (182) A vendre, 2 métiers de crêpe de Chine, 4|4 et 5|4, et 2 mécaniques en 400 et 600. S’adresser rue Juiverie, n° 16, au 1er. (157) A vendre de suite un atelier de 4 métiers d’unis en activité, une mécanique ronde, avec tous les accessoires et suite du loyer. S’adresser au bureau. (159) L’on désire un jeune homme de 14 à 17 ans, pour apprendre un état lucratif. S’adresser chez M. Molard, boulanger, cours d’Herbouville, n° 2. (155) A vendre ensemble ou séparément, un superbe atelier de 5 métiers, articles nouveautés à la Jacquard, et facilités pour le paiement. S’adresser au bureau du journal.
Notes ( De l’exportation de la Fabrique...)
Dans le cours de cette série d’articles, le journaliste, probablement Marius Chastaing, tente une démonstration, sur la base d’arguments économiques, du caractère néfaste d’une telle délocalisation. Lorsqu’il reviendra sur le sujet, quelques mois après l’insurrection sanglante d’avril 1834, et alors même que le Courrier de Lyon proposera de nouveau l’expulsion des tisseurs du cœur de la cité, le commentaire et notamment l’élucidation des raisons exactes d’une telle mesure pour les autorités sera beaucoup plus politique : « Cette classe est nombreuse, elle inquiète, il faut la disséminer ; réunie, sa masse compacte, son indépendance en imposent ; divisée, chacun de ses membres sera livré pieds et poings liés à la cupidité, aux exigences tyranniques et l’exploitation du grand nombre par quelques-uns continuera de plus belle. » (Tribune prolétaire, numéro du 12 octobre 1834).
Notes ( DESSICATION DES SOIES. Trois mémoires ayant...)
Felissent publia en 1831 Mode régulier de dessiccation par toutes les températures et spécialement pour les épreuves dans les établissements de condition de soie, chez Rusand. Les frères Talabot publièrent en 1832 Note sur un procédé nouveau proposé pour la condition publique des soies de Lyon, chez Barret, à Lyon. En 1833, furent publiés par M. d’Arcet les Procès-verbaux des expériences qui ont été faites à Lyon, chez Barret.
Notes ( DU PEUPLE.)
Ce texte de Béranger était un extrait de la préface à ses Nouvelles et dernières chansons (voir la rubrique suivante).
Notes ( Littérature. Les Contrebandiers.)
Joseph Bernard (1792-1864), alors député du Var depuis 1831, avait rédigé un pamphlet libéral, Le bon sens d’un homme de rien, ou la vraie politique à l’usage des simples, d’abord publié en 1829, puis réédité en 1833. Paul-Émile Debraux (1796-1831), chansonnier et poète lyrique populaire.
Notes ( L’espace nous a manqué pour rendre compte,...)
Le Siècle : revue critique de la littérature, des sciences et des arts, va connaître deux livraisons à Paris en 1833.
Notes ( AVIS DIVERS.)
Léopold Curez, Tisiphone, satire politique, publiée à Lyon chez Léon Boitel en 1833.
|
|
|
|
|
|