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19 mai 1833 - Numéro 20
 
 

 



 
 
    
CONSEIL DES PRUD’HOMMES.

(présidé par m. goujon.)

Audience du 15 mai 1833.

D. Un maître a-t-il le droit de diminuer le prix de la façon à ses ouvriers, sans les avoir prévenus suffisamment et à l’avance de la diminution ? – R. Non, le chef d’atelier ne peut diminuer le prix convenu, sans en avoir préalablement prévenu les ouvriers.

Calendra et une quarantaine d’ouvriers, travaillant [3.2]dans les ateliers de Séchal, à la fabrication des étoffes Chalis, réclament contre la diminution de cinq centimes par aune, que ce dernier leur a arbitrairement retenus en leur réglant leurs comptes. Indignés d’un tel procédé ils ont suspendu leurs travaux. M. le président vu l’absence de Séchal donnait l’autorisation à ces ouvriers de travailler dans d’autres ateliers, sans avoir besoin de leurs livrets, toutefois leur réservant tout recours contre leur maître, lorsque Séchal arrivant demande à être entendu. Il déclare que la semaine de Pâques, une augmentation de façon de 5 cent, par aune lui fut demandée par un écrit revêtu d’un grand nombre de signatures ; cette espèce de pétition, qui est présentée au conseil, lui fut remise par Calendra et son camarade ; forcé de souscrire à cette demande, il dit avoir complètement adhéré à cette augmentation ; mais qu’un mois après, ne pouvant continuer de la payer, il avertit Calendra de son intention de les diminuer. Au règlement de compte les ouvriers prétendent n’avoir pas été suffisamment avertis, disant que s’ils eussent su que leur maître eut voulu les diminuer, ils l’auraient quitté, et en donnent pour preuve leur cessation immédiate de travailler aussitôt qu’ils en ont été instruits.

Nous devons faire observer qu’il résulte de ces débats que la règle des prix du sieur Séchal diffère essentiellement de celle en usage dans les ateliers ordinaires de soieries. Les ouvriers sont tenus de se loger, de vivre à l’auberge ; le pliage, tordage, et autres frais de préparation de tissage sont à la charge des compagnons. Le chef d’atelier fournit seulement ses harnais et pourvoit à l’ouvrage. Les prix sont débattus entre le maître et ses ouvriers, en prenant pour base les deux tiers du prix de la façon payé au chef d’atelier.

Avant de prononcer son jugement, M. le président demande aux parties si elles consentent à se conformer aux décisions du conseil ; que, dans le cas contraire, l’affaire serait renvoyée à huitaine, le conseil n’étant pas en nombre suffisant pour valider son jugement. Sur leur réponse affirmative, il est statué ainsi :i

« Attendu que Séchal n’a pas suffisamment prévenu ses ouvriers de la diminution qu’il était dans l’intention de leur faire supporter ;

« Attendu que toute diminution de prix dans un grand atelier doit être fait publiquement et non en particulier afin qu’aucun des ouvriers ne puisse prétexter de son ignorance à ce sujet.

« Attendu que dans tous les cas la diminution ne peut être appliquée qu’à l’ouvrage à faire et non à l’ouvrage fait le conseil décide que les ouvriers de Séchal seront payés le même prix que précédemment. »

 

 

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