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16 juin 1833 - Numéro 24
 
 

 



 
 
    

Considérations sur les impôts indirects.

[7.2]Depuis vingt ans que les cartes à jouer sont soumises à un droit considérable, nous ne croyons pas qu?un seul consommateur se soit plaint. Pourquoi ? C?est que les cartes, bien que d?un usage général, sont néanmoins un objet de luxe, et qu?elles ne sont réellement indispensables à personne. Il en est de même des tabacs : c?est moins le haut prix auquel les vend la régie que leur qualité et le monopole de leur fabrication qui excitent les plaintes.

Si donc de nouveaux impôts sont nécessaires pour remplacer ceux du sel et des boissons, c?est au luxe et à l?aisance qu?il convient de les demander, non à la misère et au besoin.

Notre système financier s?est incontestablement amélioré depuis 89, mais il favorise encore trop l?aristocratie et pèse presque exclusivement sur la classe la plus nombreuse et la plus pauvre. Ainsi, tandis que la diligence, les fiacres, l?omnibus paient un droit énorme, la chaise de poste, le landeau, la berline du riche ne paient absolument rien. Serait-ce un impôt si déplacé que celui qui ramènerait tontes les voitures à l?égalité devant la loi ? Croyez-vous que 100 fr., 200 fr. à compter au fisc gêneront ceux à qui leur équipage coûte au moins 6,000 fr. par an. Cet impôt devrait être progressif, en sorte que s?il en coûtait 200 fr. pour le droit d?avoir deux chevaux, il en coûtât six pour celui d?en avoir quatre. Il pourrait de plus atteindre les chevaux de selle aussi bien que ceux de trait. Nos villes sont encombrées d?animaux inutiles. Ne sauriez-vous faire payer aux amateurs le droit de les nourrir.

N?est-ce pas encore par un reste de principes aristocratiques que le gibier le plus recherché passe sans payer à la barrière, tandis que la viande de boucherie a un droit à payer.

Pourquoi n?achèterait-on pas en France comme en Angleterre le droit de faire peindre ses armes sur les panneaux de sa voiture, ou de les faire graver sur les pièces de son argenterie, d?imposer sa livrée à des hommes, de leur écrire sur le dos qu?ils ne s?appartiennent plus, qu?ils sont la propriété d?un maître. Pourquoi ne pas frapper d?un droit chaque domestique mâle, et par ce mot nous n?entendons pas les ouvriers employés à l?année dans les fermes, et qu?on flétrit très improprement, selon nous, du nom de valets ou domestiques.

Il est un autre impôt bien facile à établir, c?est celui des billards que la Sentinelle Picarde1 a proposé. Dans toutes nos villes et presque dans nos moindres bourgs on compte au moins un billard par 1,000 habitans, en tout près de 100,000 en France, frappez-les d?un impôt de 100 fr. par an, vous aurez 10 millions.

(La Tribune du Mouvement, n° 194, 12 juillet 1832.)

Notes (Considérations sur les impôts indirects....)
1 La Sentinelle picarde, publiée à Amiens depuis février 1829.

 

 

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