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16 juin 1833 - Numéro 24
 
 

 



 
 
    

Tous les besoins du pauvre sont imposés sans pitié et les jouissances du riche épargnées.

[8.1]Le pain, par les lois sur les céréales, faites au profit de la grande propriété, et vous venez de les proroger.

Le vin, imposé d?abord au profit de l?état, puis du fisc municipal, est dans une répartition tellement vicieuse que la boisson du peuple paie le double et même le triple de sa valeur réelle, tandis que celle du riche n?est imposée qu?au dixième et parfois au vingtième de son prix.

La viande, taxée à l?introduction et à l?entrée des villes par des droits d?octroi aussi exorbitans que mal répartis : dernièrement encore l?augmentation qui a eu lieu à Paris n?a frappé que les basses viandes, le b?uf a été excepté.

Le loyer, par suite de la taxe sur les portes et fenêtres, qui reste à la charge du locataire.

Le chauffage, au profit des possesseurs de forêts, qui sont les plus riches propriétaires du pays, par suite de la législation sur les charbons de terre et les fers.

Le sel, imposé à raison de trente fois sa valeur réelle, et le sucre non-seulement affranchi, mais favorisé par des primes au détriment des contribuables.

Le tabac, dont l?usage est presque un besoin de première nécessité pour l?artisan et le journalier.

Sur quelle partie de la société pèse la taxe des 25 c. perçue par les maîtres de poste ? N?est-ce pas sur les voyageurs les moins favorisés de la fortune ! Cette taxe n?est-elle pas d?une injustice révoltante ? Le riche qui voyage en poste ou avec son équipage en est affranchi ; le pauvre, obligé de se servir d?une voiture commune, y est assujéti. Il ne manquerait plus que d?imposer le voyageur à pied ; ce serait aussi juste.

N?est-ce pas un abus révoltant de faire payer à l?artisan, qui n?a que son travail pour subvenir à sa nourriture et à celle de sa famille, la même cote personnelle qu?au grand propriétaire et à l?opulent banquier ?

Est-il juste d?imposer l?ouverture par laquelle l?habitant de nos campagnes se glisse dans sa cabane, et qui, dans la langue fiscale, est désignée sous le nom de porte, de lui faire payer jusqu?à l?air et la lumière qui pénètrent imparfaitement dans cette même cabane, de l?assujétir au même impôt qui frappe les grilles dorées et les balcons de marbre d?un palais, et qui, dans certaine position sociale, en sont même exempts.

Est-il enfin conforme à l?égalité de répartition de l?impôt exigé par la charte, de faire payer au journalier qui ne possède qu?un arpent de terre, la même somme proportionnelle que paie celui qui en possède mille. L?impôt ne devrait-il pas s?accroître progressivement en raison de l?accumulation des propriétés dans les mêmes mains ?

La répartition égale de cet impôt est une injustice : la répartition progressive peut seule la faire disparaître. Il faut qu?elle soit calculée de manière à ce qu?insensiblement et le plus promptement possible, le nécessaire cesse d?être frappé, que le superflu soit seul imposé et ne puisse s?étendre d?une manière abusive.

(Extrait du discours prononcé à la chambre des députés par le général Thiard, dans la séance du 15 avril.)

 

 

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