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30 juin 1833 - Numéro 26
 
 

 



 
 
    

TÉLÉGRAPHES COMMERCIAUX

de jour et de nuit.

Cette entreprise, que nous avons annoncée dans le temps, et qui complète la belle invention de Chape, vient de triompher des obstacles sans nombre qui lui avaient été suscités. Elle a été définitivement constituée le 1er mai dernier sous la raison sociale de A. Ferrier et Compe. M. Ferrier1, inventeur de ce système télégraphique, différent de celui du gouvernement, a obtenu un brevet d’invention pour quinze ans.i

« Appliquer (dit M. Ferrier dans son prospectus) aux relations commerciales et individuelles les communications télégraphiques réservées jusqu’à présent à la politique comme un monopole de fait ; employer ce mode de correspondance perfectionné le jour et la nuit, tel est l’objet de l’entreprise.

« Les développemens toujours croissans de l’industrie exigent dans les communications une plus grande rapidité qui doit elle-même produire une consommation plus active.

« Outre les affaires de commerce, il existe une foule d’événemens publics ou domestiques qui intéressent vivement les familles comme un départ, une arrivée, une naissance, un mariage, une maladie grave, un décès, et mille autres circonstances pour lesquelles les minutes sont quelquefois d’un grand prix. »

Grâce aux progrès que l’homme fait chaque jour dans l’appropriation des lois de la nature pour la dompter et la soumettre, il est permis d’espérer que la découverte des télégraphes ne sera pas inutile à la société, et qu’elle ne restera pas oisive et monopoliste entre les mains du pouvoir, ou d’une société unique. L’imagination se plaît à rêver de longues lignes télégraphiques marchant de jour et de nuit, corollaires obligés des chemins de fer et des bateaux à vapeur et servant à lier dans l’ancien monde les villes de Cadix, Lisbonne, Porto, Barcelone, Bayonne, Bordeaux, Toulon, Marseille, Lyon, Nantes, Orléans, Paris, Rouen, le Havre, Mulhausen, Strasbourg, Lille, Bruxelles, Anvers, Amsterdam, Londres, Liverpool, Birmingham, Manchester, ainsi que les principales cités de l’Italie, de la Grèce régénérée, des peuples allemands, du Danemarck, de la Suède, de la Russie et de la Turquie.

L’on conçoit même, qu’un jour, d’un bout de l’Amérique à l’autre, de Londres à Calcutta, la pensée pourra se transmettre plus rapidement que nous n’allons aujourd’hui de Brest à Paris. Alors l’Europe civilisée pourrait s’épancher à son tour sur les plaines de l’Orient, berceau de nos ancêtres ; alors renaîtraient toutes ces villes fameuses dans l’antiquité, qui servaient d’entrepôt entre les peuples de Grèce, d’Egypte et ceux de l’Inde. Alors le trop plein de nos populations s’échapperait chaque année en essaims civilisateurs. Et ce tableau n’est point chimérique, car il suffirait d’un peu d’intelligence et d’accord entre les chefs des nations pour le réaliser.

Notes (TÉLÉGRAPHES COMMERCIAUX de jour et de...)
1 Mention ici de la brochure d’Alexandre Ferrier, inventeur du télégraphe optique, Établissement de télégraphes publics de jour et de nuit, publiée à Paris en 1832.

 

 

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