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14 juillet 1833 - Numéro 28
 
 

 



 
 
    

Nous appelons l’attention de nos lecteurs sur le jugement prononcé dans l’affaire des mines d’Anzin. Trop souvent nous avons du blâme à répandre sur une magistrature généralement antipathique à la marche progressive des idées. Nous sommes heureux d’avoir aujourd’hui à rendre un hommage mérité et bien senti d’admiration et d’estime au tribunal de Valenciennes et à son honorable président. Justice a été faite ! Une peine minime a été appliquée aux ouvriers en vertu du code ; une peine terrible a été infligée aux égoïstes capitalistes en vertu des lois de l’humanité. Ce n’est pas là un petit résultat du mouvement social. Entre le jour où l’on a écrit l’article qui punit les coalitions d’ouvriers et le jour où l’arrêt de Valenciennes a été rendu il y a tout un abîme. On commence à reconnaître à des signes nombreux que les questions du prolétariat sont entrées dans la politique bien entendue du jour ; on commence à substituer aux luttes des sommités sociales la recherche du bien-être du pauvre et la reconnaissance des droits du faible. Notre siècle aura donc aussi ses résultats non moins grands que ceux des âges passés.

Au reste, toute cette affaire des mines d’Anzin, comme les trois jours de Lyon, comme le calme héroïsme de juillet, comme la douloureuse levée de boucliers de juin, donne un démenti bien sanglant et bien positif aux hypocrites qui font apparaître le pillage et le bouleversement des propriétés au fond de toutes les questions qui intéressent le peuple. Pauvres gens qui crient sans cesse, contre les utopies et qui ne savent pas voir les faits qui se passent sous leurs yeux ? Où ont-ils jamais vu des masses réunies par l’ardeur du crime ? Où ont-ils l’exemple des calamités qu’ils prédisent ? Nous avons, nous, à leur opposer la moralité de ce peuple, calomnié sans cesse, et qu’on ne trouve jamais réuni sans avoir pour fanal le sentiment du droit. La faim soulève les ouvriers de Lyon et d’Anzin, et, vainqueurs, ils n’abusent pas de leur victoire ; nul n’est par eux lésé dans ses droits, dans ses propriétés ? Le peuple de Paris en armes reste plusieurs jours sur la place publique et consent à souffrir la faim plutôt que de la satisfaire par le crime ? Au milieu de ces mouvemens violens le nombre des délits privés diminue au lieu d’être augmenté. Et l’on feint de regarder un pareil peuple comme avide de pillage : on étale des frayeurs extravagantes dès qu’on parle de lui donner des droits ? En vérité, on ne peut même pas croire à cette inconcevable terreur ; il est plus facile d’expliquer ces manifestations en reconnaissant dans ceux qui les affichent des sentimens égoïstes et une cruelle hypocrisie.

(Patriote de l’Allier.)

 

 

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