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28 juillet 1833 - Numéro 30
 
 

 



 
 
    
JURISPRUDENCE.

question intéressante pour les cliens qui confient de l?argent aux avoués.

Ce n?est pas sans raison que nous nous obstinons, dans l?intérêt général de la société, à ne considérer les avoués, que comme de simples agens d?affaires, et que nous nous élevons contre la loi qui d?abord dans un intérêt d?aristocratie a créé un privilége en faveur de ces mandataires judiciaires, ce qui a amené à les qualifier d?officiers ministériels, de fonctionnaires publics, et ensuite dans le même intérêt, accru d?intérêt fiscal, a permis la vénalité de leurs charges.

Notre opinion vient de recevoir eu quelque sorte l?assentiment du tribunal civil de Paris. Voici comment : Simonet-Rozet avait confié à Me Lacoste, avoué, une somme de? pour faire acte d?offres à sa partie adverse. Me Lacoste étant tombé en déconfiture (les avoués n?en sont pas plus exempts que les agens d?affaires), Simonet-Rozet pensait avoir un privilége sur la charge de cet avoué pour la restitution de son argent. Cette prétention paraît naturelle et devrait être accueillie si les avoués étaient de véritables fonctionnaires auxquels on fût tenu d?accorder une confiance exclusive ; mais le tribunal, par son jugement du 4 juillet courant, a refusé le privilége demandé. Vainement Rozet a-t-il dit (avec raison selon nous) que s?il avait remis son argent à Me Lacoste, c?était par suite de la confiance que la profession exclusive et privilégiée d?avoué lui inspirait ; qu?il s?en était rapporté non pas à Monsieur Lacoste, mais à Me Lacoste. Vous avez eu tort, lui a répondu le tribunal. Vous ne deviez pas vous laisser fasciner les yeux par un titre. Vous vouliez faire acte d?offres, il fallait vous adresser à un huissier. Un avoué n?est qu?un mandataire qui vous représente à l?audience. Si vous avez confiance en l?homme et qu?il vous trompe, tant pis pour vous ; si, au fonctionnaire, encore tant pis pour vous ; vous ne devez confier à un fonctionnaire que ce qu?il est indispensable de lui confier1, autrement vous êtes censé avoir suivi la foi privée. En un mot, Rozet a perdu son argent et paiera les frais du procès. N?aurait-il pas pu répondre au tribunal. Pourquoi m?imposer un mandataire, et dès-lors que je ne suis pas libre dans mon choix, pourquoi? mais les pourquoi ne finiraient pas. Le plus simple est de demander avec nous l?entière suppression des priviléges et des monopoles.

Notes ( JURISPRUDENCE.)
1 Cette jurisprudence n?est pas nouvelle. Un individu avait donné des accomptes à l?avoué de son créancier ; mais il n?avait pas retiré de quittance de ce dernier. L?avoué tomba en déconfiture. Le créancier exige la restitution de ses pièces et fait payer une seconde fois le débiteur. Ce dernier fut condamné à ce second paiement malgré l?aveu de l?avoué d?avoir reçu. Il n?a pas non plus obtenu de privilège sur le prix de la charge de l?avoué. Le tribunal considéra qu?un avoué n?était pas chargé de recevoir pour son client, et que le débiteur n?avait pu valablement se libérer entre ses mains.

 

 

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