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18 août 1833 - Numéro 33
 
 

 



 
 
    
INDUSTRIE LYONNAISE.

libre sortie des soies de france.

Six mois se sont à peine écoulés depuis que les chefs d’atelier et les ouvriers en soie de Lyon adressaient à la chambre des députés une pétition pour demander la libre sortie des soies de France, comme conséquence de la libre entrée des soies étrangères. De sinistres prédictions s’élevèrent alors sur les conséquences qu’entraînerait ce pas hors de l’ornière et dans la voie nouvelle de la liberté commerciale.

MM. de la chambre, après avoir voté avec empressement toutes les lois présentées, repoussèrent par un houra général la loi de douanes, la plus urgente, la plus essentielle, la plus désirée de toutes. Cette répugnance, ce mauvais vouloir contre les intérêts matériels, semblent dire : Arrière les questions positives, elles touchent aux privilèges, aux monopoles dont beaucoup de nous profitent, et ne prêtent ni aux phrases sonores, ni aux longs discours que nous aimons tant ; présentez-nous plutôt des emprunts grec, haïtien, arabe même, nous les voterons ! C’est de la haute politique qu’il nous faut, où tous les élémens puissent parler sans rien dire ; et non de la politique positive de cuisinière, de cette politique des rues, des ateliers, dont ces maudits économistes ont empesté le peuple des travailleurs.

Heureusement que le gouvernement, comprenant l’urgence et usant de son droit, s’est passé de la chambre pour modifier la loi de douanes.

[4.2]Depuis un mois les soies étrangères entrent sans payer de droits, et les producteurs français sont libres d’aller vendre où bon leur semble leurs soies grèges ou ouvrées. Qu’est-il résulté de cette mesure libérale ? C’est que nos fabricans paient aussi bon marché que les fabricans étrangers, les soies d’Italie, et meilleur marché qu’eux les soies de France.

Et quant à la perturbation que beaucoup redoutaient, nous sommes encore à nous en apercevoir, et croyons pouvoir avancer qu’il n’a pas été acheté pour les fabriques étrangères 50 balles de soie de France.

Et de ce que nous ne payons pas plus cher que nos voisins les soies d’Italie, il en résulte que nous pourrons plus facilement soutenir leur concurrence ; que les ouvriers auront donc plus de travail, et que les consommateurs achèteront les soieries à meilleur marché. Aussi sommes-nous plus convaincus que jamais que tous les pas du gouvernement hors du système pourri des prohibitions, tourneront, comme le premier qu’il vient de faire, à l’avantage des travailleurs et des consommateurs.

En terminant cet article, nous donnerons un extrait de la pétition des ouvriers de Lyon dont nous avons parlé en commençant ; les journaux de notre ville en ont à peine parlé dans le temps :

« Il n’est pas un homme dans nos ateliers, disaient les signataires, qui ne comprenne qu’on ne peut vendre sans acheter.

« Vous êtes tous propriétaires ou industriels, alors vous sentez comme nous le besoin de la paix, et vous devez comprendre que les moyens les plus sûrs de la rendre durable, éternelle même, c’est de multiplier les relations d’intérêt matériel d’homme à homme, de ville à ville, de peuple à peuple, et vous ne le pouvez qu’en levant les prohibitions.

« Nous savons que la haute politique absorbe vos momens, mais la question que nous soulevons est de la plus haute politique, car c’est la question de l’échange, du travail, c’est-à-dire de la vie des peuples et de leurs relations comme membres de la grande famille. Notre bon sens nous dit que tout est là, l’ordre ou le désordre, la paix ou la guerre. »

 

 

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