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1 septembre 1833 - Numéro 35
 
 

 



 
 
    

RÉPONSE

AU PRECURSEUR, A LA GLANEUSE,

Et à MM. Berger et Chastaing.1

Aujourd?hui que nous avons expliqué d?une manière plus large et plus développée, comment nous comprenons et entendons remplir la mission qui nous a été confiée. ? Aujourd?hui que nous avons fait bonne et loyale justice des éloges d?un journal qui évidemment, n?avait d?autre but que de tromper l?opinion publique à notre égard, et de faire naître la discorde parmi les hommes dont nous sommes ici l?organe ; ? et que nous avons repoussé, comme nous le devions, la honteuse alliance de très humbles sujets autorisés, voir même condamnés à écrire et signer chaque jour de sottes et ridicules impostures, d?absurdes et grossières niaiseries (mission qu?ils accomplissent certainement au souhait de leurs seigneurs et maîtres) ; nous allons répondre aux diverses réclamations qu?ont suggéré aux journaux le Précurseur et la Glaneuse, l?article intitulé LE PEUPLE, par M. A. D., inséré dans notre N° du 18 août.

Certainement, nous le disons avec le Précurseur, une foule des scènes de cours d?assises consignées dans tous les journaux en général, et dans la Gazette des Tribunaux en particulier, s?y déroulent avec des formes auxquelles il serait difficile de nier leur côté plaisant ; nous trouvons cette observation fort juste ; mais il en est une que nous devons ajouter à celle-ci : c?est qu?on a, jusqu?à présent, tiré peu de profit des grandes et utiles leçons qu?elles portent au côté non plaisant.

Ainsi, nous rions de grand c?ur, quand nous voyons déclarer non-coupables deux petits garçons accusés d?avoir voulu voler un CHEVAL ; ? nous rions aussi, de voir assis sur le banc des accusés un jeune homme coupable d?avoir voulu occuper dans le théâtre de Mme Saqui, une place à quatre sous, bien qu?il n?en eût payé que DEUX ; nous rions surtout quand nous voyons 5 ou 6 employés dudit théâtre, perdre 5 ou 6 jours à venir certifier de cette lésion des intérêts de Mme Saqui ; mais devons-nous rire, alors que nous voyons le CRIMINEL jeté pour trois mois dans une prison !?

Et puis, un profond sentiment de tristesse et de dégoût fait place à notre rire, lorsque nous voyons cet homme fuyant la misère et ses montagnes d?Auvergne, venir à PARIS tout exprès pour y être réduit à arracher à la dégradation, à la ruse, LE PAIN qui doit nourrir lui, sa femme et ses sept enfans ; parce que ce pain, LE TRAVAIL le lui refuse ! ? Condamné qu?il est, à un mois de prison, pour avoir exploité la pitié des passans en grimaçant le mal épileptique, que deviendront sa femme et ses enfans pendant sa captivité ??

Après expiation la cause de cette honteuse dégradation de l?homme aura-t-elle cessé pour lui ? ? Trouvera-t-il plus facilement du travail ? ? Et ne sera-t-il pas forcé presque aussitôt de recourir à une ruse nouvelle ? Oh ! combien de tristes pensées s?arrêtent ici avec nos réflexions?

[4.2]Et pourtant il y a tant de palais à PARIS ! tant de brillans et somptueux hôtels ! tant de représentans du PEUPLE ! tant de ministres pour gérer la fortune et l?HONNEUR de la France !? En vérité tout cela fait pitié.

Mais, de ce que de ces scènes si tristement comiques, on n?a pas tiré tous les enseignemens qu?elle renfermaient, ce n?est pas nous qui jetterons des sarcasmes à la presse philantrope.

Toute torturée qu?elle est, elle accomplit noblement sa mission ; et c?est à elle surtout qu?il appartient de faire jaillir cette régénération que LE PEUPLE a si généreusement payé d?avance.

Ainsi, nous sommes entièrement de l?avis du Précurseur, quand il dit que : Les intérêts du PEUPLE ne seront bien défendus que par la représentation de ses droits, et que les philantropes, en les réclamant, demandent implicitement son amélioration matérielle et morale. ? Nous sommes encore de l?avis de la Glaneuse lorsqu?elle dit que : Toute réforme sociale qui ne sera pas basée sur une organisation politique RÉPUBLICAINE, c?est-à-dire juste et harmonisant les intérêts de tous, ne saurait offrir pour l?avenir aucune garantie de stabilité ! car telle est aussi notre croyance.

En un mot, les principes politiques du Précurseur et de la Glaneuse sont les nôtres, et nous remercions sincèrement ces deux journaux de nous avoir mieux compris, et surtout jugé beaucoup moins sévèrement que MM. Berger et Chastaing. ? Et sans chercher à nous expliquer le pourquoi de l?amertume avec laquelle ces messieurs nous ont donné LEURS CONSEILS, nous ne les suivrons pas ; car nous pensons que nos nombreux amis n?ont pas plus hâte d?être rassurés sur la base de nos convictions politiques, que nous de conjurer pour l?avenir les perfides congratulations du COURRIER DE LYON ! C?est nous, nous seuls ! qui taillons notre plume ; pourquoi les redouterions-nous ?

B......

Notes (RÉPONSE AU PRECURSEUR Le Précurseur , A...)
1. « Les principes politiques du Précurseur et de la Glaneuse sont les nôtres », écrit ici Bernard alors que L?Écho de la Fabrique fera figurer dans ses « avis divers » du mois de septembre le Catéchisme républicain d?Antide Martin. Les rédacteurs mutuellistes du journal répondent ici aux accusations de Chastaing et Berger dénonçant dans la nouvelle tutelle du mutuellisme sur le journal des canuts le retour aux vieux codes corporatistes et l?abandon de toute direction démocratique.

 

 

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