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6 octobre 1833 - Numéro 40
 
 

 



 
 
    
Ruisseau produit par un coup de sonde.

Voici quelques détails sur un nouveau puits fore, remarquable par l’abondance des eaux qui en sortent.

La commune de Bages, à deux lieues sud-ouest de Perpignan, se trouve située dans une espèce de bassin naturel qui était peut-être autrefois entièrement occupé par les eaux, et dont le fond a été, jusqu’à une époque récente, occupé par un étang. Les alluvions ayant en partie comblé cet étang, on l’a enfin desséché au moyen d’une coupure qui se rend à la mer.

A mi-côte, sur la paroi ouest du bassin, existent quelques sources jaillissantes d’une eau très bonne à boire, mais dont on a voulu vainement réunir et amener au village les eaux qui se sont bientôt taries ; cependant la présence de ces sources et la forme du bassin offraient des motifs suffisans pour croire qu’un forage pourrait être tenté avec succès pour donner au village les eaux nécessaires.

M. Durand, propriétaire d’une grande partie des terrains bas du bassin, voulut le premier tenter l’essai. M. Fabre, de Perpignan, possesseur d’un appareil de sondage plus simple et plus commode que ceux qu’on emploie ordinairement, fut chargé de la direction des travaux, et l’exécution en fut confiée à son maître-ouvrier, J. Espériquette, qui par son aptitude a puissamment contribué au rapide succès de l’opération.

Le sondage fut d’abord pratiqué sur un point situé à 50 pieds au nord de Bages, A 80 pieds de profondeur, la sonde ayant pénétré à travers plusieurs lits alternatifs de marne et d’argile, perça une couche de marne très sablonneuse de trois pieds d’épaisseur, et alors il jaillit une source peu abondante d’eau claire, avec un goût particulier qui ne la rendait pourtant pas impropre à la boisson. Cette eau, dont la température était de14°,5 Réaumur, pouvait s’élever à 3 ou 4 pieds au-dessus du sol.

Un second sondage, fait à 6 pieds de distance, donna à la même profondeur une source jaillissante, mais le jet de la première diminua, et la masse totale d’eau versée par les deux, était moindre que celle donnée d’abord par la première. On continua de travailler dans le second trou. La sonde, qui continuait à pénétrer avec facilité, rencontra à 142 pieds une couche d’argile noire compacte, à 143 elle commença à s’enfoncer d’elle-même ; [7.2]alors, sans attendre à voir jusqu’à quelle profondeur elle pénétrerait, on la retira précipitamment, et on vit aussitôt jaillir, à près de 5 pieds de hauteur, une source qui étonna tous les assistans par son abondance et sa force. Dès l’instant de son apparition, aucun obstacle n’a pu lui être opposé pour la contenir ; elle s’est élevée à toutes les hauteurs qu’on lui a ménagées au moyen, de tuyaux verticaux. Aucun essai direct n’a encore été fait pour reconnaître le maximum d’élévation auquel elle peut parvenir ; mais, dit l’auteur du compte-rendu inséré dans le Journal des Pyrénées-Orientales1, je crois être au-dessous de la réalité en disant qu’elle s’élèvera à 50 pieds.

Depuis le 28 août 1833, à trois heures et demie du soir, moment de son apparition, cette source a toujours présenté la même abondance, la même violence d’ascension. Il paraîtrait qu’il y a plutôt augmentation que diminution du volume d’eau, ce qui doit tenir à l’agrandissement successif du trou de sonde dans lequel on n’a point encore placé de tuyaux. Cette eau forme dès sa sortie de la terre un courant de 63 centimètres de largeur sur 1 décimètre de profondeur. Dans une minute l’eau parcourt 32 mètres, ce qui donne par conséquent, à peu de chose près, 2,000 litres d’eau par minute, ou 2,880 mètres cubes par jour.

Un poids en plomb de huit livres, soutenu par une corde, ayant été plongé dans le trou de sonde, a été re-jeté rapidement. Dans la nuit qui suivit l’opération, l’eau emportait en sortant des grains de sable et des morceaux d’argile dont quelques-uns avaient presque le diamètre du trou de sonde.

Cette eau est maintenant très claire, très limpide, d’une saveur un peu fade ; sa température au jet est de 15° R.

M. Héricart de Tury fait remarquer que la dépense totale pour les deux forages a été seulement de 263 fr.

(Temps.)

Notes ( Ruisseau produit par un coup de sonde.)
1. Le Journal des Pyrénées-Orientales était publié à Perpignan depuis janvier 1831.

 

 

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