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3 novembre 1833 - Numéro 44
 
 

 



 
 
    
 AU RÉDACTEUR.

Lyon, le 31 octobre 1833.

Monsieur,

Ce n’est pas sans une grande surprise que nous avons lu, dans le n° du Précurseur du 31 octobre, la lettre de MM. les marchands tailleurs. – Tout en prétendant rétablir les faits, ils les ont dénaturés d’une étrange manière. Cela ne nous étonnerait pas s’ils n’étaient pas intéressés à mentir.

Nous allons tâcher de relever ces erreurs volontaires le plus brièvement possible. Vous devez sentir, M. le rédacteur, combien il est intéressant pour nous de prouver que nous n’avons ni violenté la liberté de nos camarades, ni manqué à la justice envers les marchands.

Nous nous garderons de signaler quelques expressions de mépris employées pour nous désigner ; nous savons bien que pour cela, il ne faut pas nous en prendre à ces messieurs, qui, nous dit-on, ont fait rédiger leur [3.2]lettre par un ex-homme de lettres, aujourd’hui magistrat.

Il n’est pas vrai que nous ayons déserté les ateliers avant que l’ouvrage commencé ait été achevé. – Il n’est pas vrai que nous ayons contraint nos camarades par des menaces ou par la force à quitter leurs ateliers. – Il n’est pas vrai que la façon d’un habit soit payée aujourd’hui de 18 à 20 fr. Le terme moyen, comme nous le prouvons par la note ci-jointe, est de 15 à 18 fr.

Celui de nous qui se permettrait d’aller se présenter dans un atelier où il serait inconnu, pour tarifier les prix, serait à l’instant renvoyé de notre société.

Nous le répétons, les façons sont diminuées pendant la morte-saison. Demandez plutôt à MM. Rigner et Odin.

On nous accuse de nous être coalisés ! Et quand cela serait, n’est-ce pas un droit juste et naturel ; et la loi qui s’y oppose devrait-elle être invoquée lorsque l’on ne craint pas de faire en faveur des marchands, évidemment coalisés aussi, une révoltante exception ?

N’est-ce pas en effet une preuve de coalition, que cette espèce de comité composé de 17 raisons de commerce, écrivant au nom de leurs confrères ?

Les fera-t-on emprisonner comme nos douze camarades, dont sept ne sont sortis de Roanne que sous la caution de MM. Girardon et Flasseur ?

Est-ce notre faute, à nous, si nous sommes forcés de nous associer pour lutter contre l’esprit de rapacité qui exploiterait notre misère si nous restions isolés ?

Non, monsieur, les ouvriers tailleurs n’ont jamais eu l’intention, qu’on leur prête perfidement, d’entraver une industrie qui les fait vivre, et de ruiner les marchands qui les occupent ; et, soit dit en passant, il est difficile qu’une légère augmentation de 2 fr., et non de 4, prise sur les bénéfices énormes que font ces messieurs, puisse amener un résultat aussi fâcheux.

Ce que nous voulons, c’est la pleine et entière jouissance du droit de discussion entre le marchand et l’ouvrier ; c’est, enfin, quoi qu’on en dise, de pouvoir VIVRE EN TRAVAILLANT !

Agréez, etc.

marigné, ramel, dombet et gobert,

Pour leurs camarades.

P. S. Note des prix qui sont payés par les signataires de la lettre à laquelle nous répondons.

MM. Joubert et Duvier, 17 fr. le plus ; Pfeiffer, 16 fr. ; Gay et Didier, 16 à 18 fr. ; Rigner et Odin, de 15 à 17 fr. ; et à tous prix pendant la morte-saison ; Duport, 17 fr. ; Delorme, 16 fr. ; Albert frères, 15 à 17 fr. ; Reynaud aîné, 18 fr. ; Ayasse, 17 à 18 fr. ; Manger, 17 à 18 fr. ; Perrotau, 16 à 17 fr. ; Reynaud jeune, avant l’augmentation, 17 fr. ; Gay et Brisseau, 16 fr. ; Morelon et Chanal, 16 à 17 fr. ; Leture, 16 à 17 fr. ; Verdat et Ce, 17 fr. – Les ouvriers à la journée gagnent le plus de 3 fr. à 3 fr. 50 c.

 

 

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