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24 novembre 1833 - Numéro 47
 
 

 



 
 
    

Au Rédacteur.

La Croix-Rousse, 18 novembre 1833.

Veuillez insérer la présente dans votre prochain numéro, afin d’instruire mes collègues de la mauvaise foi de M. Francoz, négociant.

Il y a quelque temps que ma femme fut chercher chez ce monsieur la trame d’une pièce reçue le 23 octobre. Quand elle fut de retour, je reconnus, selon l’usage, cette trame, au poids de laquelle il manquait 20 grammes. Pour rectifier ce que je ne croyais qu’une erreur, je la renvoyai de suite afin d’éviter tout désagrément.

En arrivant au magasin, M. Francoz, surpris de la revoir, lui dit : Que revenez-vous donc faire ? Je viens, lui répondit-elle, rectifier une erreur sur le poids de la trame que vous venez de me livrer.

A cela M. Francoz répondit insolemment : Je suis sûr de vous avoir fait votre compte, et si vous avez déjà levé la pantime, je ne sais qu’y faire, et il ajouta bien d’autres paroles inconvenantes que je ne me permets pas de rappeler ici. Cependant, tout sûr qu’il était de son affaire, il a rectifié l’erreur.

Je ne suis pas le seul, Monsieur, qui aie lieu de me plaindre de cette maison ; plusieurs chefs d’atelier ont eu, ainsi que moi, bien des reproches à leur faire sur leurs mauvais procédés envers eux.

Agréez ; etc.

P........., Mutuelliste.

Note du rédacteur. – En signalant pareille conduite, M. P......... a bien mérité de ses confrères, et nous l’en remercions en leurs noms.

Ce n’est qu’en rendant publiques les actions révoltantes de ces sangsues des travailleurs, que l’on peut espérer de les corriger, si toutefois ces hommes conservent encore un reste de pudeur.

Où en sommes-nous, grand Dieu ! si le chef d’atelier ne peut plus réclamer contre une erreur, sans s’exposer à recevoir un déluge de sottises et à se voir soupçonner de mauvaise foi ?

Il y a quelques jours, c’étaient MM. B...... et T...... qui écrivaient sur le livre d’un chef d’atelier : En cas d’erreur, les réclamations qui ne seront pas faites de suite seront nulles.

Aujourd’hui, c’est M. Francoz qui ne veut pas de réclamation.

Et sempre bene.

Si les chefs d’atelier sont ainsi laissés à la merci de pareils hommes, dont le caprice fait la règle qu’on doit suivre, qui pourra répondre de l’avenir ?

 

 

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