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8 janvier 1832 - Numéro 11
 
 

 



 
 
    

Un honnête fabricant nous disait ces jours derniers1, dans notre bureau : « Votre journal est très-utile. Voué aux intérêts de la classe ouvrière, il doit aussi accueillir les réclamations des commerçans et ne point généraliser lorsqu'il attaque un des membres de leur corps. »

Sans doute notre feuille sera toujours une sentinelle vigilante, prête à arrêter les progrès de cette cupidité qui semble vouloir anéantir la classe industrielle de notre ville, et par-là perdre nos manufactures ; mais nous n'avons jamais dit que nous rejetterions les justes plaintes des fabricans ; car, quoique la classe à la défense de laquelle nous sommes voués, soit éminemment vertueuse, il ne s'en suit pas que dans la masse on ne puisse trouver un homme dans le cas de manquer à l'honneur. Eh bien ! qu'on nous le signale ; pour celui-là nous serons moins indulgens, parce qu'il aura déshonoré un corps industriel qui a donné tant de preuves de vertus, de grandeur et de générosité. Mais, Messieurs les négocians sont d'une fierté !… ils ne voudraient point s'abaisser jusqu'à envoyer leurs réclamations au bureau de l’Echo de la Fabrique, et bien moins encore à donner des notes sur ce qui pourrait améliorer le sort des ouvriers. Alors de quoi se plaignent-ils ? que nous généralisons : cela n'est pas dans notre caractère ; et s'ils nous lisaient attentivement, ils verraient que nous faisons la part des bons et des mauvais.

Comme nous commençons une nouvelle année qui, sans doute, ne verra point se renouveler les malheurs de la dernière ; sans faire une profession de foi, nos principes sont assez connus ; nous allons faire un appel à toutes les ames généreuses, à tous les hommes qui pensent que l'ouvrier doit vivre en travaillant, à tous ceux qui ne croient pas que le prolétaire est né pour végéter dans la misère en leur procurant toutes les délices de cette vie. Nos colonnes seront ouvertes à ces hommes vertueux, et nous croirons accomplir l'œuvre à laquelle nous nous sommes voués, en participant avec eux à l'amélioration de leur sort.

Quant au petit nombre d'égoïstes qui nous honorent de leur haine, nous devons les prévenir que rien ne pourra nous faire dévier de notre route ; et si les ouvriers sont assez malheureux pour manquer de moyens pour les poursuivre devant qui de droit, nous nous chargeons par la publicité de faire tomber leur masque [3.1]de les vouer au mépris des honnêtes négocians et de nos concitoyens en général.

Notes (Un honnête fabricant nous disait ces jours...)
1 L’auteur de ce texte est Marius Chastaing d’après la Table de L’Echo de la Fabrique (numéros parus du 30 octobre 1831 au 30 décembre 1832).

 

 

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