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5 janvier 1834 - Numéro 53
 
 

 



 
 
    
 

Nous recevons de M. Rivière cadet, l’un des disciples de fourier à Lyon, une lettre signée Ravet et publiée dans le journal la Glaneuse du 31, avec prière de l’insérer dans notre journal, en la faisant suivre de sa réponse au nom de M. Berbrugger, absent, et des disciples de Lyon.

Au Rédacteur de la Glaneuse.

Lyon, le 30 décembre 1833.

Monsieur,

Je trouve dans votre estimable journal un article concernant l’association commerciale d’échange, où MM. les disciples de Fourier ont pris plaisir à nous faire une attaque directe, en avançant que nous voulions singer leur société, et leur ravir le glorieux titre de réformateurs sociaux. Veuillez, dans vos colonnes, monsieur, nous prêter la même obligeance, pour y insérer notre réclamation.

Les disciples de Fourier n’ont jamais prétendu, je pense, avoir seuls le droit exclusif de graver sur leurs cartes d’entrée à leurs séances les mots de Réforme industrielle et commerciale ; et, dans tous les cas, nous pourrions réclamer la supériorité ; puisque, bien avant que M. Berbrugger ne vint à Lyon y façonner un prosélitisme, nous avions eu des assemblées qui portaient la même dénomination, et dès-lors, il était bien libre à nous de leur contester aujourd’hui ce petit avantage, à moins que ces MM. n’aient conservé dans leur dictionnaire de réforme sociale le mot : Monopole et ses conséquences.

Non, mille fois non ! nous ne nous sommes pas intitulés disciples de Fourier ; non, mille fois non ! nous n’exhausserons pas l’édifice grêle du Phalanstère. A nous, il nous faut des faits, et non, des utopies… et d’abord, nous rejetons comme un démenti formel, que l’un de nous se soit pavané des ouvrages de M. Fourier, parce qu’on le croyait mort, etc. A de semblables petitesses, nous n’avons fait que sourire.

Le système d’échange, quoi qu’en disent les disciples de Fourier, n’est nullement emprunté à la théorie sociétaire ; et cela est si vrai, que chez eux, la société doit toujours rouler dans le même cercle vicieux, le numéraire, qui a enfanté et produit tous les jours les crimes qui affligent l’humanité.

Ainsi donc, qu’on cesse de s’acharner contre une association qui grandit ; que le nouveau disciple de Fourier se rappelle qu’il est encore disciple du fondateur de l’échange, et qu’il n’ait pas l’ingratitude de venir désavouer aujourd’hui sa noble et ancienne croyance sur cette association.

Agréez, etc.
ravet.

Monsieur le rédacteur,

Au nom des disciples de fourier à Lyon, je viens attester la vérité des faits avancés dans sa lettre du 28 décembre dernier, par notre ami, M. Berbrugger.

Oui ! les membres de la Société d’échanges s’intitulent disciples de Fourier ! et cela est si vrai, que c’est devant moi et en présence du gérant d’un journal de cette ville, que M. Mazel jeune prenait ce titre que je l’ai forcé à quitter !

Oui ! l’un des membres de cette Société d’échanges [7.1]s’est pavané des ouvrages de M. Fourier, le croyant mort ! et celui-là est encore M. Mazel jeune. Et s’il nous fallait comme preuve, faire descendre jusqu’à lui l’autorité du nom de l’inventeur de la théorie sociétaire, nous le ferions, quelle que soit du reste notre répugnance à cet égard.

Non ! M. Berbrugger, disciple de Fourier, n’a jamais été l’apôtre du fondateur de l’échange, et il n’a, par conséquent, nul besoin de désavouer sa noble et ancienne croyance. – Cette assertion est, comme le démenti formel de M. Ravet, une méprisable imposture.

Je ne m’attacherai pas ici à prouver que le système d’échanges est emprunté à la théorie sociétaire ; car mon intention n’est pas de discuter avec M. Ravet, qui ne la connaît pas plus que le cercle vicieux dans lequel roule la société, et qui n’a pas plus appris le dictionnaire des convenances que celui de la réforme sociale, proposée par M. Fourier. – Ainsi je me hâte de terminer cette lettre en émettant de nouveau l’espoir que le public ne nous confondra nullement avec les membres de la Société des échanges, bien que ces messieurs aient cru devoir s’emparer de ce titre (la réforme industrielle et commerciale), qui depuis deux ans est celui du journal publié par notre maître et ses disciples de Paris.

Pour nous, nous nous croyons déjà riches du titre de disciples, nous gardons pour notre maître celui de réformateur social, et nous sommes loin de porter envie à la philantropie assez largement escomptée de MM. de la Société d’échanges.

Agréez, etc.

rivière cadet,
Disciple de Fourier, au nom des disciples de Lyon.1

note du rédacteur.– Nous n’ajouterons rien à ces différentes lettres, elles nous semblent de nature à mettre nos lecteurs dans le cas d’apprécier l’association d’échanges, et de rendre justice à qui elle est due.

Notes (  Nous recevons de M.  Rivière cadet Rivière...)
1. Cet échange que vient clore l’intervention de Rivière cadet (qui prendra en main la direction de L’Écho de la Fabrique peu après le retrait de Bernard) permet d’observer  la présence et l’influence intellectuelle et institutionnelle croissantes des fouriéristes lyonnais dans les orientations du journal des canuts. Le profil éclectique de Rivière cadet, industriel en soierie, républicain converti au fouriérisme, proche des jeunes mutuellistes, résume assez exactement les orientations de cette dernière période du journal

 

 

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