Retour à l'accueil
26 janvier 1834 - Numéro 56
 
 

 



 
 
    
 

Nouvelles Diverses.

M. Jean de Bry, ancien député à la Convention nationale, ministre plénipotentiaire à Rastadt, ancien préfet du Doubs et du Bas-Rhin, est mort à Paris, le 6 janvier1. M. Thibeaudeau s’est exprimé ainsi sur la tombe de son collègue :

« Debry, ce matin en m’éveillant j’ai appris à la fois ta courte maladie, ta mort, tes obsèques. Quel triste réveil pour un collègue, pour un ami ! Je bénis le destin qui m’a épargné, puisqu’il me permet de jeter quelques paroles sur ton cercueil. Ma douleur ne sera pas prolixe, mon amitié sera brève.

Membre de l’assemblée législative, tu combattis au premier rang pour l’indépendance de la France contre la coalition des rois, pour la liberté contre ses ennemis.

A la Convention, fidèle à la cause nationale, tu fus un des fondateurs de la république.

Un de ses plénipotentiaires au congrès de Rastadt, tu fus puni par le sabre des Seckler, par la boucherie impériale, de ta fermeté à défendre l’honneur et les intérêts de ton pays.

Au tribunat, tu fis tous tes efforts pour préserver de sa ruine la liberté expirante.

Dans une préfecture importante, tu fis honorer ton administration par ton intégrité, ta fermeté et ta justice.

Tu avais mérité la haine des rois, ils te proscrivirent. Tu supportas quinze ans d’exil avec dignité, ne désespérant jamais de la cause pour laquelle tu souffrais.

Tu revis enfin le sol de la patrie. Tu pouvais encore la servir ; elle se serait honorée de tes services ; on n’en [8.1]voulut pas ; tu te consolas de cet oubli avec la résignation d’un sage.

Voila tes titres aux regrets de tes amis, de tes concitoyens, à une page honorable dans l’histoire. Voila le précieux héritage que tu laisses à une famille qui fut et qui restera toujours digne de toi.

Debry, reçois nos adieux ! repose en paix ! »
(Patriote du Puy-de-Dôme)

– Cinq élèves de l’Ecole polytechnique viennent d’être renvoyés de l’Ecole par une simple décision du ministre de la guerre : Latrade, Rouet, Dubois-Fresney et Caylus, qui avaient été inculpés dans le procès des vingt-sept, et Gressier n’avait figuré aux débats que comme témoin.

On sait que les quatre premiers, après avoir été acquittés par le jury, avaient été traduits, par ordre du ministre, devant un conseil de discipline. Ce conseil se mettant en lutte contre la parole souveraine du jury, avait donné un démenti au verdict d’acquittement. Toutefois ce démenti ne s’appliquait qu’à trois élèves, le conseil avait proposé l’expulsion de Latrade, de Dubois-Fresney et de Caylus. Rouet, acquitté une seconde fois par ses nouveaux juges, devait rester à l’Ecole. Quant à Gressier, son maintien ne paraissait pas devoir faire question.

Mais le ministre a été plus sévère que le jury, plus sévère que la chambre des mises en accusation, qui n’avait pas même trouvé qu’il y eût lieu à suivre contre Gressier, plus sévère que le conseil placé sous sa dépendance, qui n’avait pas proposé de peine contre Rouet. Le conseil n’avait pas compris complètement l’ordre que lui avait dicté le ministre. Il n’était appelé à juger les élèves que pour donner un vernis de justice quelconque à la mesure arrêtée par avance contre eux. Il devait les condamner tous.

A défaut donc de l’obéissance assez complaisante du jury, de la magistrature, et du conseil de discipline, la volonté arbitraire du ministre a seule prononcé. Le ministre a revisé de sa pleine puissance et autorité les arrêts et jugemens qui étaient intervenus.

Cette mesure violente est un outrage à la majesté du jury, en ce qui concerne les quatre élèves qu’il avait acquittés, à la magistrature, relativement à celui qu’elle-même avait mis hors de cause. Quels pouvoirs conserveront contre les ministres une force réelle et utile aux citoyens ?
(Précurseur.)

– On écrit qu’un curé des environs des de St-Avold, se rendit dernièrement chez l’institutrice de la commune et la questionna sur les progrès des jeunes filles qui lui sont confiées, et particulièrement sur ceux de Suzette L...., écolière de 17 ans. Sur la réponse que lui fit l’institutrice, ce curé condamna de Suzette L.... a recevoir le fouet en sa présence, et, qui le croirait ? cette odieuse sentence fut exécutée selon les vœux du prêtre ! – Les parens paraissent disposés à poursuivre cet immoral personnage.
(Patriote du Puy-de-Dôme)

– On lit dans le National :
On nous écrit de Château-Chinon, 3 janvier :
En 1830, 41 ans après cette séance des Etats-Généraux, dans laquelle Louis XVI ôta son chapeau pour mettre tout le monde d’accord ; bien peu de temps avant les journées de juillet, M. Dupin ayant été réélu député par les suffrages de son pays, fit un bref et énergique discours de remercîment. Ce discours, qui a été imprimé et qui est entre les mains de beaucoup d’entre nous encore, se terminait textuellement par ces mots :
« Et je me couvre en signe de liberté. »
M. Dupin mit alors effectivement son chapeau sur sa tête, et tout le monde en fit autant, car il y avait quelque chose d’électrique et d’entraînant, dans les paroles et surtout dans le geste de l’orateur.

[8.2]Je ne sache pas qu’à la séance du 24 décembre dernier, M. Dupin ait suivi l’exemple que lui donnait son royal ami ; le signe était là pourtant. Est-ce que la liberté n’y était plus ?
morvaudais.

Notes (  Nouvelles Diverses. M.  Jean de Bry...)
1. Il s’agit ici du Conventionnel Jean-Antoine Debry (1760-1834).

 

 

Contrat Creative Commons

LODEL : Logiciel d'édition électronique