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23 février 1834 - Numéro 60
 

 




 
 
     

Lyon et les Mutuellistes.

Depuis deux mois environ, et dans presque tous les genres de notre fabrication lyonnaise, se faisait sentir une tendance marquée à la diminution du taux des salaires. – Alors se retracèrent au souvenir des travailleurs, formant aujourd’hui l’association des Mutuellistes, NOVEMBRE et toute sa hideur, et les angoisses du peuple épuisé de misère, réduit à demander, sous le feu des canons vomissant la mitraille, du pain pour vivre en travaillant ! – Ces jours de mort et de deuil, si près de nous encore, pouvaient se renouveler et appeler sur notre cité une tempête plus terrible et plus désastreuse ; et aujourd’hui comme alors, aucune garantie contre une si déplorable alternative n’était là pour la détourner !!! – Telles furent les graves considérations qui déterminèrent les Mutuellistes à frapper les métiers d’un interdit général, et ce fut dans la journée du 14 que cette décision fut unanimement exécutée.1 – Ils avaient aussi (pourquoi le tairions-nous) pensé que cette interdiction générale amènerait un grand nombre de fabricans desquels ils n’avaient aucune plainte à faire, à intervenir comme conciliateurs entre eux et cette autre partie des fabricans qui, forts d’une quasi-disette de travail, ne rougissaient pas d’en profiter pour rendre plus critique encore la situation fâcheuse de l’ouvrier, mais que ces derniers feraient droit à leurs sages représentations. – Qu’aujourd’hui cette prévision n’ait pas été justifiée par le fait, nul parmi nous ne prétend l’imputer à crime à personne d’entr’eux, bien qu’en vingt autres circonstances leur propre intérêt leur eût impérieusement commandé ce qu’exigeait le nôtre dans ce cas

[1.2]Les journaux de cette ville ont assez fait connaître au public les détails et les circonstances de ce débat : les reproduire ici serait chose fort oiseuse ; ainsi nous ne les rappellerons pas. – Qu’il nous soit permis, toutefois, de témoigner ici toute notre gratitude aux écrivains et aux hommes qui se sont intéressés à notre cause. – Pitié et mépris pour les lâches qui, le fiel au cœur et l’insulte à la bouche, ont tenté de nous montrer à nos concitoyens et à la France entière comme des fauteurs de désordre, et comme des hommes avides de dévastation et de pillage : ils ne valent pas la haine…

A ceux qui nous demandent ou qui nous demanderont compte de l’illégalité dont nous avons un instant, et en apparence contre notre propre intérêt, frappé l’industrie de notre cité, nous demandons, à notre tour : Quoi de légal dans notre position, à nous qui, spoliés du plus sacré de nos droits, le travail, et subissant chaque jour la loi de la nécessité, sommes forcés d’accepter, pour prix de nos sueurs, tel salaire qu’il convient à nos seigneurs et maîtres de nous octroyer ? Et puis, si tant est qu’il y ait dans cet acte de notre propre volonté, injustice et illégalité, nous demandons à qui la faute, et si elle n’est pas le fruit du criminel abandon dans lequel nos législateurs nous ont placés ? – Maintenant nos amis nous comprendront, nous en sommes convaincus ; que nos ennemis répondent !!!

Mais ne renferme-t-il pas un grand enseignement, le spectacle offert aux yeux de tous par la physionomie étrange de notre cité, qui, tandis que d’un côté les travailleurs, forts de leurs droits et confians dans la sagesse de tous, souriaient aux lourdes dispositions et aux ridicules et mensongers placards affichés ça et là sur nos murs, et rendaient vains les préparatifs faits pour accueillir VIGOUREUSEMENT leur supplique ; que, de l’autre, s’enfuyaient avec leurs coffres et leurs trésors, leurs timorés despotes, peu jaloux d’assister à la LEÇON ; n’était-il pas, disons-nous, bien étrange, l’aspect de notre cité, calme et immobile comme un rocher au milieu d’une affreuse tempête !

Mais ne reste-t-il pas clairement démontré que les travailleurs sauront désormais rendre impossible toute injustice de la part des maîtres, et infliger, à qui voudrait encore la mériter, sinon une VIGOUREUSE, du moins une sévère leçon.

[2.1]Ecoutez, vous qui déjà chantez victoire, écoutez : – -L’association des Mutuellistes, quelque grands que soient les efforts que vous fassiez pour la détruire, reste debout et jette au loin les rameaux qui doivent unir et resserrer la grande famille des travailleurs. Le triomphe pour elle est certain. – Mais, gardez-vous de croire qu’armé imprudente elle veuille jeter au hasard ses prochaines destinées et engloutir avec elle celles de toutes les associations qui, rangées autour d’elle, étaient là prêtes à l’appuyer de leur concours ! Elle a le choix des armes, à elle aussi de déterminer le lieu et l’heure du combat. – Mais ce combat doit être pacifique : elle récuse l’épée et le canon ; à vous donc, à vous seuls d’appeler la guerre civile ; nous la repoussons, nous, comme le plus épouvantable fléau ; et pourtant, vous le savez, le peuple sut toujours ou mourir ou vaincre ; mais vaincre au sein de son pays ne saurait être qu’une déplorable victoire !!!… Demain, partout les travaux auront recommencé.

Avis

Mu par une idée purement philantropique, notre journal ouvre, à dater de ce jour, dans ses bureaux une souscription permanente en faveur des ouvriers qui demeureraient sans travail par le fait de fabricans qui refuseraient de conserver ou porter les salaires à un taux raisonnable. – Il sera tenu un compte exact des sommes qui seront reçues à cet effet et nous aviserons aux moyens de donner aux souscripteurs bonne garantie de l’emploi de leurs offrandes. – Nous développerons dans notre prochain numéro les motifs de la détermination que nous prenons aujourd’hui.

Du droit de Coalition.

Lorsque nous avons considéré et défendu comme principe inviolable, le droit de coalition pour les classes travailleuses, et fait ressortir toute l’injustice de la loi posée devant elles comme une barrière infranchissable, nous nous étions appuyés, et nos lecteurs l’auront bien compris, non pas sur un sentiment de haine dirigé contre cette autre classe qui dispense le travail quand elle le veut, comme il lui plaît, et s’attribue à elle seule le droit d’en répartir les bénéfices, mais bien sur le droit qu’avant tout dieu a écrit pour l’homme dans l’immuable code de la nature : celui de trouver dans la société au sein de laquelle il est jeté, une fonction qu’il puisse remplir, et qui, lui assurant une existence honorable, à l’abri de la misère et des besoins, le mette en harmonie avec tous les autres hommes appelés comme lui à exploiter le globe pour leur profit particulier et dans l’intérêt de tous en général.

Maintenant, qu’on veuille bien, se dégageant de tout esprit haineux, examiner dans quelle situation se trouve, par rapport à ce droit incontestable, l’innombrable classe des travailleurs, et nous ne craignons pas d’avancer que nul ne conservera l’injuste prétention de s’opposer aux coalitions d’ouvriers. Nous croyons, en outre, que les hommes de bien, amis de l’humanité, applaudiront à cette digue désormais indestructible, opposée au désordre moral et matériel que fait peser sur la grande majorité de la famille humaine une civilisation égoïste et mesquine qui s’en va puisant la vie dans la mauvaise foi, la fraude, la démoralisation, et taille [2.2]cent riches vêtemens avec les débris d’un million de haillons déchirés.

Aujourd’hui, il faut bien le dire, si les travailleurs se sont coalisés, ce n’est pas, comme fait semblant de le croire notre MAIRE-DÉPUTÉ1, qu’ils soient poussés par des hommes politiques qu’il lui plaît d’appeler factieux et avides de dévastation et de pillage ; mais c’est tout bonnement qu’ils n’ont aucune espèce de sympathie pour l’économie sociale que nous vantent si fort lui et les siens, économie qui fait du bas prix des salaires la base première de la richesse commerciale.

Si les travailleurs se sont coalisés, c’est qu’ils ont senti qu’ils étaient quelque chose de plus que des machines à produire ; qu’ils étaient hommes, enfin, et qu’à ce titre ils ont à revendiquer des droits que même aujourd’hui nos législateurs ne s’occupent guère d’écrire dans les codes qu’ils nous fabriquent en certain lieu, et que du reste, ils font payer assez cher pour qu’il soit permis de protester contre leur coupable et dangereux oubli.

Et puis, si les travailleurs se sont coalisés, c’est qu’ils sont las de cette vie de rudes fatigues et d’esclavage perpétuel qui leur amasse à peine un morceau de pain pour leur dernier jour, un linceul pour leur cadavre, et la taxe du prêtre pour une pellée de terre et son requiescat.

C’est qu’ils sont las de voir les héritiers de leurs misères commencer la vie par l’isolement, le vagabondage et l’ignorance, ou un travail excessif au-dessus de leurs forces ; la continuer par la mendicité ou le vol, et l’achever par le bagne que la société destine à ceux qu’elle-même a rendus nuisibles et dangereux pour la société. – C’est qu’ils sont las de voir leurs jeunes filles réduites à acheter de leur honneur le salaire d’un schall à franger ou découper, devenir filles de joie, lorsque d’autres, aux mêmes conditions, arrivent pour les remplacer !!! Voila pourquoi les travailleurs se sont coalisés.

En vérité, il nous en coûte pour remuer ainsi la fange de ce cloaque dégoûtant, et en faire respirer l’air fétide à ceux qui nous entourent et nous entendent ; mais nous vivons dans un temps où il n’est plus permis de voiler la vérité, quelque hideuse qu’elle soit, et de laisser croire que nous vivons dans le meilleur des mondes possible. Le faire, à nos yeux serait un crime, et ce n’est pas nous qui voudrions nous en rendre coupables. – Relever de ses ruines le temple de la justice et de l’humanité, demander pour le peuple garantie de travail et d’existence honorable, saisir enfin tous les moyens qui puissent le plus promptement lui assurer bien-être et instruction, telle est, ce nous semble, la mission que chacun de nous, selon ses facultés et ses forces, doit tendre à accomplir. Ainsi le veulent les lois sacrées de la nature, et malheur à qui demeure aujourd’hui sourd à sa voix.

Certes, il nous serait bien facile de venger les travailleurs des insolentes déclamations de nos très hauts et très puissans moralistes ; de ceux-là qui couvrent de leurs sifflets dorés le tableau si souvent vrai de leurs continuelles orgies, et étourdissent les gens en se faisant impudemment les vengeurs de la morale et de la pudeur publique outragées. – Nous n’aurions pour cela qu’à mettre en saillie quelques-unes de ces prouesses, où bijoux, champagne et cachemires, roulant avec l’or au dessert d’un joyeux festin, éteignent les flambeaux et étouffent toute pudeur. – Alors verraient tomber leurs masques : ici un vertueux magistral, là un marchand de haut bord, ailleurs un respectable [3.1]financier ; et alors aussi le public, qui assiste aux débats du grand procès qui se plaide aujourd’hui, mettant dans l’un des plateaux de la balance toutes les gentillesses de ces graves personnages, de l’autre la grossièreté, l’imprévoyance et l’immoralité du peuple prononcerait entre eux et lui : – : puis nous verrions à qui le bill de haute et sévère condamnation.

Mais nous avons dit, et nous ne saurions trop répéter aujourd’hui, qu’une vaste coalition vient de suspendre en un instant et à travers la cité tout entière les trente mille métiers de soieries qui sont l’une des principales branches de sa richesse commerciale ; nous ne saurions trop répéter, disons-nous, qu’en défendant le droit de coalition pour les travailleurs, aucune pensée de haine, aucun désir de lutte entre les diverses classes de notre population lyonnaise, aucune pensée d’atteinte aux intérêts contre lesquels nous défendons en ce moment l’intérêt du peuple ouvrier, n’est venue nous entraîner à ce combat que nous livrons au despotisme cruel sous lequel les travailleurs ont si long-temps gémi et courbé, et à de vieilles lois qui ne sont plus en rapport avec nos mœurs et nos besoins actuels. – Nous demanderions nous-mêmes que le sceau de l’infamie fût imprimé sur notre front si, dominés par une pensée infernale et lâche, nous demandions pour un seul de nos concitoyens, quel qu’il fût, ce que les écrivains du Courrier de Lyon appellent une VIGOUREUSE LEÇON ! Et ce que nous demanderions pour nous, nous l’écrivons aujourd’hui : Infamie ! INFAMIE pour les hommes qui ont pu tracer ces sanguinaires paroles… Maîs revenons à notre sujet.

Souvent nous entendons dire autour de nous : A quoi bon les coalitions, et pourquoi les travailleurs s’entendent-ils ainsi entre eux pour arrêter ou reprendre leurs travaux, quand ils ont, d’ailleurs toute liberté de débattre avec le maître le taux de leur salaire ? – En vérité, si pour tous deux la chance était égale, nous comprendrions cette proposition, mais comment l’ouvrier serait-il libre de traiter avec le maître et de déterminer avec lui la valeur de son travail, quand il est forcé d’accepter, quelque dures, quelque inhumaines qu’elles soient, les conditions que ce dernier peut lui imposer en toute sécurité, maître qu’il est d’accorder ou refuser le travail, disposant par conséquent de l’existence de l’ouvrier, et étendant sur lui son lourd despotisme jusqu’à violenter et punir toute pensée qui n’est pas la sienne. – N’était-il pas naturel alors que les travailleurs, profitant des longs et nobles efforts constamment faits par des esprits généreux, ayant pour la dignité de l’homme tout le respect qu’elle mérite, en vinssent à comprendre que si leur misère était le fruit obligé de l’abandon auquel les lois humaines semblaient et semblent encore aux yeux de certains hommes les avoir pour toujours condamnés ; elle était aussi du moins le résultat de l’isolement fâcheux dans lequel ils avaient toujours vécu ? – Et doit-on s’étonner encore qu’ils aient cherché et trouvé dans les coalitions un remède passager aux maux qui les oppriment parfois si durement, à l’influence que ces maux exercent sur la société tout entière, aux catastrophes qu’ils produisent à des époques imprévues, et dont le choc ébranle si violemment notre frêle édifice social ? Ne doit-on pas, au contraire, s’en réjouir comme d’un bienfait inespéré ?

Oh ! si les coalitions ne devaient avoir d’autres résultats que celui d’apporter une faible amélioration à la dure condition de la classe des travailleurs ; – si elles n’étaient pas le prélude de la réforme qui, dans l’intérêt [3.2]de tous, riches et pauvres, doit s’opérer bientôt dans notre organisation industrielle et commerciale, puis commencer l’heureuse et pacifique transformation de notre vieux monde en un monde plus conforme au vœu de l’humanité et aux saintes lois de la nature, nous comprenons qu’alors il nous faudrait maudire leur intervention dans les choses de ce monde, et nous cesserions de nous étonner de l’excessive rigueur qu’on met à les poursuivre, des efforts que l’on fait pour les briser. – Mais, pour nous comme pour ceux que domine le pressentiment d’une vie meilleure, pour tous, elles portent une solution dont la crise actuelle hâtera l’accomplissement : tels sont du moins notre pensée et notre espoir. – Mais, en vérité, nous le redisons encore, arrière canons et baïonnettes ! Dans ce grave et solennel débat, ce sont d’autres arbitres qu’il faut appeler.

Au milieu de cette suspension momentanée des riches travaux de notre fabrique lyonnaise, un fait ressort évident, c’est que les forces et les élémens de production ont hâte de sortir de l’état d’anarchie dans lequel ils se trouvent placés ; car cet état, en compromettant la fortune des spéculateurs commerciaux, n’est aussi, nous ne craignons pas de le dire, qu’un faible palliatif apporté aux maux qui pèsent sur la classe des travailleurs, lorsque, d’autre part encore, il exerce une influence désastreuse sur les intérêts de la propriété !

– Ce qui arrive, nous l’avions prévu dès l’instant où nous avons appelé les travailleurs à s’unir et former un corps compact et fort ; mais nous n’en tirons pas, nous, cette niaise et barbare conclusion : que les coalitions doivent être repoussées et mitraillées par une puissance qui ne saurait elle-même trouver pour soi de garantie certaine de conservation que dans une impartiale protection des droits de tous et dans la scrupuleuse représentation et conservation de tous les intérêts. Or voici celle que nous en tirons :

Trois forces également indispensables à la réalisation des destinées humaines : la richesse par les bénéfices accumulés de la production ; la production par le travail ; et la variété, l’abondance des produits, par la puissance du génie de l’homme, qui, en même temps qu’il crée et développe chez lui de nouveaux goûts et de nouveaux besoins, intente aussi de nouveaux moyens de les satisfaire. – En un mot, ce sont ces trois leviers, travail, capital et talent, jusqu’ici en lutte constante et ruineuse pour tous, qui marchent à l’harmonie par l’association, mais qui ne sauraient toucher au terme si le concours de l’un manquait aux deux autres.

– Ainsi donc, on le voit clairement, les travailleurs n’ont aucun intérêt à se faire les éternels ennemis des capitalistes, commerçans, propriétaires, etc. ; et lorsque nous plaidons la cause des coalitions, nous ne sommes mus, nous, ni par la soif du pillage et de la dévastation, ni par le désir d’organiser l’oppression d’une classe par une autre classe : mais nous voulons la liberté pour l’opprimé comme nous entendons la respecter chez l’oppresseur ; c’est pourquoi nous appelons de nos vœux les plus ardens le concours de tous oisifs et travailleurs, riches ou pauvres, à la solution du grand problème de la régénération sociale.

Certes, si au siècle où nous vivons nous ne rencontrions pas (fait qu’il est bien permis de trouver étrange) dans chacun des hommes qui ont accepté la mission de nous régenter, un ennemi acharné de toutes idées tendant à l’amélioration du sort de l’humanité, si tous moyens de se produire ne leur étaient dédaigneusement [4.1]et insolemment interdits ! on ne verrait pas, nous en sommes convaincus, la société ébranlée parfois jusque dans sa base, reculer stupéfaite devant ces mêmes idées prenant avec un épouvantable fracas droit de bourgeoisie, et nous n’aurions certainement pas aujourd’hui à recourir à un mal passager pour détourner le mal plus grand encore que refuse de supporter plus longtemps la grande famille des travailleurs.

De grandes améliorations, d’importans changemens sont à faire dans notre système industriel et commercial, on doit enfin le comprendre. Pour nous, nous espérons bien qu’au milieu de tous nos industriels, se trouveront quelques hommes qui, dépouillés de l’injuste prévention que la plupart nourrissent contre le peuple, voudront, pour la gloire et la prospérité du pays, l’intérêt particulier de notre industrieuse cité et l’honneur de l’humanité si long-temps avilie, planter au milieu de nous le paisible étendard de la réforme sociale en appelant les travailleurs à jouir, chacun selon son apport à l’action sociale, des richesses que la nature porte et nourrit pour tous dans ses fertiles entrailles. – Pour ceux-là l’humanité reconnaissante enfantera des lauriers qui, pour être vierge du sang des champs de batailles et des guerres civiles, n’en seront pas moins glorieux !

Nous éprouvons le plus grand plaisir à livrer à la publicité la lettre suivante, et nous croyons franchement que si un point d’amour-propre, mal-entendu, n’était là pour empêcher l’émanation de leur intime pensée, beaucoup de fabricans suivraient l’exemple qui leur est donné par M. derrion1, signataire de cette lettre.

Lyon, 21 février 1834,

Messieurs les Mutuellistes,

Lorsque MM. vos délégués se sont présentés dans nos magasins, pour obtenir notre adhésion aux prix réclamés par les travailleurs en étoffes de soie, j’ai cru que c’était une signature qu’ils me demandaient, c’est-à-dire un engagement indéfini. J’ai refusé en donnant mes raisons qui peuvent se résumer par ces mots : L’état industriel actuellement existant, est incompatible avec une semblable transaction.

Maintenant que je sais que c’est une adhésion comme témoignage de bonne volonté et une promesse d’efforts que vous demandez, je viens de grand cœur vous donner ma parole pour la maison de mon père, dont je suis le principal gérant sinon le chef. Et je fais cette démarche avec d’autant plus de plaisir, que, aujourd’hui que nulle agitation n’existe, je me sens dans toute ma liberté, et qu’une question d’amour-propre ne me retiendra jamais.

Je saisis aussi cette occasion, pour dire en mon nom particulier, aux travailleurs lyonnais, dont un grand nombre déjà me connaissent, que tous les instans de ma vie seront employés à réclamer ou établir un ordre social nouveau, qui garantisse au producteur de toute richesse une part plus équitable dans le bénéfice social, c’est-à-dire une organisation pacifique de l’industrie. Et, qu’on sache que ce que je viens de dire n’est pas une flatterie, mais l’effet d’une conviction profonde et d’une volonté bien arrêtée.

Agréez, etc.

derrion fils.

P. S. Je vous autorise à donner à cette lettre toute la publicité que vous jugerez convenable.

Au Rédacteur.

[4.2]Monsieur,

C’est une grande et belle cause que celle qui se débat en ce moment solennel… C’est la cause de l’humanité ; c’est le droit au travail, droit sacré du peuple, qu’il est temps à la fin de reconnaître et de sanctifier !!! Honneur à ceux qui, comme vous, se vouent à sa défense ! Honte à ceux qui appellent la guerre pour résoudre une question si riche de paix, d’avenir et de moralité.

C’est une femme qui vient vous payer le tribut de sa sympathie, mêler sa faible voix aux accens de la voix populaire, qui dit : Union et liberté ! La cause de la femme n’est-elle pas tout entière dans le progrès de l’humanité ? – C’est à nous, prolétaires féminins, qu’appartient la large part des misères humaines, des droits faussés, méconnus ; à nous donc aussi la plainte et l’espoir d’un meilleur avenir ! Quel a été notre sort jusqu’à ce jour, quel est notre partage, que sommes-nous, nous, la moitié du genre humain ? Hélas ! le voici : Dans l’état sauvage, des victimes ; dans la barbarie, des esclaves ; et, dans notre civilisation tant vantée, de grands enfans que tour à tour l’on caresse et l’on opprime… Est-ce bien là notre destinée ? – Hommes qui nous répétez sans cesse que la nature fut pour nous prodigue de ses dons, dites, avons-nous bien tout le lot qui fut mis pour nous dans la balance ; vous croyez-vous justes envers nous ? Ah ! vainement voudriez-vous l’être ; dans l’ordre subversif qui gouverne le monde, la femme doit souffrir. – Pour nous rendre nos droits, il faut d’abord conquérir les vôtres, sortir des voies étroites de nos sociétés morcelées, abandonner un misérable édifice qui s’écroule, et fonder par l’association l’œuvre d’harmonie sociale qui peut seule assurer à tous bonheur et dignité. Le temps de la justice ne peut se faire attendre ; c’est au 19e siècle que sa place est fixée… Tout nous dit qu’il s’approche ; courage donc aux hommes de cœur ; la loi providentielle de l’humanité sera leur récompense !

Agréez, etc.

Une de vos abonnées.

Nous avions oublié de dire, dans notre dernier numéro, que nous avions reçu de M. Genot, montée St-Barthélemy, une somme de 3 fr. destinée aux blessés de Novembre.

Nous renvoyons à notre prochain numéro la publication d’une chanson adressée à MM. les ferrandiniers, par un de leurs collègues, l’espace manquant pour la publier aujourd’hui.

AU RÉDACTEUR.

Lyon, le février 1834.

Monsieur,

Forcé de répondre aux assertions du MM. Grillet et Troton, je rappellerai en peu de mots que tout ce que contient ma précédente n’est que l’exposé des exigences dont ils ont usé à mon égard; ils ont fort de recourir à des inventions pour se justifier, je puis affirmer qu’ils ont manqué à la vérité. Il n’est point vrai : 1° que ce soit mon apprenti qui ait donné lieu aux différens survenus entre nous ; 2° que mon livre soit sans rature ; 3° que mon ouvrage ait été reçu sans prévention et que j’aie fixé moi-même les rabais ; 4° que je n’ai que 3 fr. 50 c. de rabais sur 2,500 fr. de façon ; 5° que le mot gratification [5.1]ait été employé par moi ; 6° que j’aie rendu des châles mouillés. Aussitôt que l’ouvrage qui me restait à faire pour ces messieurs a été achevé, je me suis empressé de régler avec eux : ils ont adhéré à recevoir de suite 400 fr. J’ai débattu mes intérêts comme dans une affaire de commerce ; j’ai donc traité avec eux et je n’ai point mendié leurs dons. Quoique ouvrier, je ne suis pas, Dieu merci, dans une position difficile. Quant à l’emploi qu’ils pensent faire de mon argent, n’ayant plus rien à démêler avec eux, je souhaite seulement qu’il ne serve à suborner aucun maître, l’appât serait pour eux un piège. Il suffit, pour juger en définitive MM. Grillet et Troton, de savoir que j’ai fait pour eux six pièces : trois ont été réglées à 45 grammes de déchet par kilogramme, et les trois autres à 30 grammes ; cette différence est-elle légale ? Aussi le dévidage du Thibet pour fond, bien qu’il fût convenu qu’il me serait pavé 3 fr. le kilogramme toutes les fois qu’ils me le donneraient en flotte, il leur a plu de le régler à 2 fr. Si MM. Grillet et Troton sont outragés par les faits et démentis que je reproduis, qu’ils aient à en prouver le contraire, alors ils seront pleinement justifiés aux yeux du public, et le calomniateur sera dévoilé.

J’ai l’honneur, monsieur, d’être votre dévoué,

chapeau (Antide).

Fabricant, rue Grolée, n. 1

Nous avons plusieurs fois déjà recommandé à nos lecteurs l’Ecole Phalanstérienne, parce qu’elle nous a semblé résoudre exactement certains problèmes d’avenir pour lesquels nos populations européennes sont mises en émoi.

Hier, une crise sociale vient d’avoir lieu à vos portes, et doit faire ressortir d’une manière palpable la nécessité de s’occuper pacifiquement de l’organisation industrielle. Combien faudrait-il donc aux hommes du pouvoir d’exemples terribles ?…

Ce principe phalanstérien : Les hommes heureux deviennent des hommes vertueux, est fait pour attirer l’attention de tous les gens de cœur qui en sont venus à suspecter dans notre société l’application de cet axiome antique : Les hommes vertueux sont des gens heureux.

Nul disciple de fourier, mieux que M. berbrugger, ne nous a semblé mettre plus à la portée de chacun les combinaisons organisatrices de ce savant observateur. Par un langage simple, des exemples choisis parmi les fait connus de tous, il rend évidentes les choses que d’autres s’attachent à prouver philosophiquement.

(Voir aux annonces.)

MM. les souscripteurs au journal dont l’abonnement est expiré, sont priés de vouloir bien le renouveler. Le bureau est ouvert tous les jours de neuf heures du matin à huit heures du soir, et les fêtes et dimanches, de huit heures jusqu’à midi.

CONSEIL DES PRUD’HOMMES,

Au Rédacteur.

Lyon, 21 février 1834.

Monsieur,

Veuillez avoir la complaisance d’insérer dans votre journal la note ci-incluse à la présente.

J’ai l’honneur, etc.

seppe.

Les causes portées au rôle du lundi 17 février, et vendredi 21 du même mois, seront appelées à l’audience du vendredi 28 février ; celles renvoyées au jeudi 20courant, seront appelées à l’audience du jeudi 27 février courant.

Au Rédacteur.

[5.2]Lyon, le 18 février 1834.

Monsieur,

J’abuse sans doute de votre complaisance en continuant une lutte désagréable pour tous ; mais que M. Dazon montre dans sa défense plus de franchise et moins de fiel, et tout finira là. Comme vous, monsieur, je pense que l’on peut faire de mauvaises mécaniques et être bon mécanicien, si toutefois on est mécanicien, ce que n’est pas et n’a jamais été M. Dazon. A lui l’enclume, mais jamais le rabot. Mais celui qui a promis de réparer sa faute par une indemnité proportionnée à la perte de temps qu’a pu causer sa mauvaise fabrication, est-il en droit de retirer sa parole ? Croyez-vous qu’avec 20 fr. M. Dazon ait pu me dédommager de vingt-trois journées perdues ? Il est vrai que j’avais demandé cette somme pour toute indemnité, mais sous la condition que ma mécanique serait remplacée sur le champ. J’espérais qu’une aussi faible demande forcerait M. Dazon à hâter le remplacement de ma mécanique. J’avais compté sans mon hôte ; car je n’ai reçu la seconde que dix jours après. La besace sera-t-elle donc toujours au pauvre ? Qui de M. Dazon ou de moi devait supporter cette perte ? Est-ce celui qui a fait la faille, ou celui qui en a été sa victime ? M. Dazon prétend que je refuse de lui rendre cette mécanique. D’abord il n’est pas encore venu la réclamer ; et en second lieu, puisqu’il en nie la garantie, je ne dois la rendre qu’à M. Dubois, premier vendeur qui me l’a garantie lui-même ; je ne peux pas perdre mes droits. Pourquoi M. Dazon n’est-il pas venu à la maison me proposer un arrangement ? Je l’aurais accepté à une perte raisonnable.

S’il croit que l’expression de misérable n’est pas assez forte, qu’il en emploie une autre, non en se faisant un rempart des colonnes de votre journal, mais en s’adressant à moi-même, et je lui répondrai. Le mauvais état de la mécanique ne provient nullement des crochets-aiguilles. La garniture est bonne, mais la mécanique est totalement désajustée et mal fabriquée. Je ne cherche pas à convaincre par des mots, mais par des preuves. M. Dazon demande pourquoi je ne l’ai pas attaqué judiciairement ; c’est que, renvoyé par MM. les prud’hommes par devant la justice de paix, M. Dazon me menaça de me laisser faire des frais et de faire manger de l’argent ; ce sont ses propres expressions. Je crus alors devoir en rester là. Le mot de charlatan a déplu à mon détracteur. Comme lui, j’ai cru devoir me servir de cette expression plutôt que d’une plus forte. S’il veut bien se rendre justice, et jeter un léger coup-d’œil sur ses prospectus, il me saura gré de ma modération. Un mot encore, s’il vous plaît. M. Dazon prétend qu’il n’a pour garantie que ma bonne foi ; je suis fâché de ne pouvoir en dire autant de lui.

Que M. Dazon, maintenant, s’efforce de prouver à vos lecteurs intelligens que ce qui est blanc est noir, et qu’il fait nuit quand il fait jour ; pour moi, satisfait du jugement qu’ont porté sur cette affaire plusieurs chefs d’atelier au moins aussi honorables que M. Dazon, et qui savent très bien que je ne suis pas seul victime de l’incapacité de ce mécanicien, et que bien d’autres dans Lyon ont à se plaindre de ses ouvrages ; satisfait, dis-je, de l’approbation du public, auquel il en a appelé lui-même, je garderai désormais le plus absolu silence, laissant un libre essor aux vexations, injures et calomnies de l’homme solvable.

Je ne terminerai pas cette lettre, la dernière que j’aurai l’honneur de vous écrire à ce sujet, sans vous dire pourquoi de bonnes et mauvaises mécaniques sont sorties du même atelier. Le sieur Dazon ne fut jamais mécanicien ; il n’entreprit cette partie qu’afin de faire concurrence avec les autres mécaniciens, qui refusaient de se servir de ses ferrures qui, dit-on, étaient mal confectionnées. Il prit à cet effet des ouvriers, les uns bons, les autres mauvais, et il leur dit : Voila du bois, faites-en des mécaniques, et leur jeta, comme ou dit, la bride sur le cou. Quelle sûreté pour les acheteurs ! De là les plaintes des chefs d’atelier, de là le renvoi des mécaniques, de là aussi les certificats qui ont paru sur votre N° 56.

Agréez, etc.

A. noyer.

La lettre qu’on va lire nous ayant été adressée trop tard pour être insérée dans notre dernier numéro, force nous a été d’en retarder la publication jusqu’à aujourd’hui.

Au Rédacteur de l’écho de la fabrique.

Lyon, 14 février 1834.

Monsieur,

Le public n’ignore pas que depuis environ 7 mois les ouvriers cordonniers [6.1]et bottiers de la ville de Lyon et de ses faubourgs se sont associés pour arriver à faire augmenter leur salaire, et que cette augmentation était juste et équitable 1° parce que le travail de cette classe d’ouvriers s’est perfectionné et qu’il est devenu plus long à exécuter ; 2° parce que le prix de la façon était devenu si minime, qu’il ne suffisait pas pour procurer aux ouvriers seulement le nécessaire. La concurrence des maîtres qui, en formant leurs établissemens, donnent leurs marchandises au-dessous du cours aux consommateurs, et couvrent ensuite leur déficit en réduisant le salaire des ouvriers, a principalement amené la déplorable situation de ces derniers. Les ouvriers, qui croient avoir le droit, au moins, de vivre et de soutenir ou d’élever leurs familles, ont voulu, en s’associant, détruire d’abord la funeste concurrence que les maîtres-marchands se font entr’eux. Pour cela, ils ont arrêté que tous paieraient les façons suivant deux tableaux qui ont été dressés. Par ce moyen, les ouvriers arrivaient aussi à obtenir une augmentation de salaire qui leur permet de ne pas manquer, du moins, des choses les plus indispensables pour vivre.

Après cette demande d’augmentation, la plupart des maîtres l’ayant trouvée juste nous l’ont accordée en nous engageant à rentrer dans nos ateliers, ce que nous avons fait. Malgré tous nos efforts, nous n’avons pu réussir à rendre l’augmentation absolument générale. De la, est né un abus extrêmement criant et immoral qu’il importe de faire connaître au public, afin de lui démontrer la mauvaise foi d’un bon nombre d’hommes-maîtres.

Dès que les ouvriers eurent parlé de l’augmentation des façons, tous les marchands élevèrent pour le consommateur le prix de la chaussure, et celui-ci dut s’y soumettre ; mais, ce qu’il y a d’inique, c’est que des marchands n’ont vu, dans cette affaire, qu’un nouveau moyen de spéculation, toujours au préjudice de l’ouvrier. En effet, ils reçoivent journellement des consommateurs le prix de la chaussure suivant le taux de l’augmentation, et ils ont l’infamie de contraindre les ouvriers à travailler au taux des anciens prix, c’est-à-dire sans leur donner une partie de cette augmentation qu’ils reçoivent eux-mêmes.

Il y a plus, c’est que par un subterfuge indigne, quelques-uns de ces marchands se sont fait porter sur les listes de ceux qui avaient accordé l’augmentation, listes que la Glaneuse a publiées ; et ils ont refusé ensuite de la payer.

Mais, si nous sommes dupés, le consommateur ne le sera pas ; puisque nous avons publié, dans le temps, les noms de ceux qui donnaient ou promettaient l’augmentation, nous publierons, à présent, ceux des marchands qui la refusent, et nous comptons, M. le rédacteur, sur vous qui avez toujours défendu et soutenu la cause des ouvriers, pour nous aider dans cette circonstance.

Il est de notre devoir de remercier publiquement bien des maîtres qui, reconnaissant la justice de notre demande d’augmentation, se sont empressés d’y adhérer. Ceux-là, aussi, ont tenu conseil il y a environ quinze jours, pour aviser au moyen de s’unir, afin de maintenir la profession et de détruire les excès de la concurrence. Nous, qui nous sommes entendus avec eux, nous étions persuadés qu’à la prochaine réunion nous serions parfaitement d’accord avec tous les maîtres ; que cette haine, qui s’était élevée entre nous, s’effacerait ; qu’enfin, nous touchions au moment de faire cesser toute division, lorsque quelques maîtres, dont nous citerons plus tard, en détail, la conduite, ont semé la discorde pour empêcher tout arrangement. Ceux-là redoutent un accommodement parce qu’ils sont habitués à prospérer en volant le malheureux ouvrier. Ces hommes vils font travailler des pères de famille que la misère force à subir toutes leurs conditions, et c’est au cœur de l’hiver qu’ils ne rougissent pas de leur retenir, chaque jour, le tiers de leur salaire !… Nous laissons à nos concitoyens le soin de les juger comme ils le méritent !

Ce qu’il est important du bien constater, c’est que la discussion industrielle ne provient pas des ouvriers, mais bien de certains maîtres ; que le public se garde de l’oublier !… Afin, donc, qu’il en soit instruit et qu’il connaisse tous les faits que nous avons rapportés, veuillez, M. le rédacteur, insérer la présente dans votre prochain numéro. Recevez nos salutations fraternelles.

Au nom de la Société du Parfait-Accord, MONTPELLIER, délégué.

TRIBUNAUX.
POLICE CORRECTIONNELLE DE PARIS.

L’agent du département des mœurs.

Deux jeunes et jolies personnes cheminaient gaîment, [6.2]bras dessus, bras dessous, le long des boulevards. Elles s’arrêtaient de temps en temps devant une boutique de modes, un magasin de nouveautés, un étalage de gravures, souriaient, causaient, critiquaient, et continuaient joyeusement leur route sans se douter le moins du monde qu’elles passaient pour suspectes. Cependant un gros et petit homme les suivait depuis long-temps ; l’une d’elles s’en aperçoit, en avertit sa compagne, et toutes deux de doubler le pas. Le petit homme les suivait toujours. Ces pauvres enfans ne riaient plus, ne causaient plus, et toutes deux avaient un vague sentiment de peur.

On arrive enfin devant un poste. Là le petit homme les interpelle brusquement et les engage à entrer au poste. Elles entrent. Le petit homme leur demande alors, le plus gravement possible : « Mesdemoiselles je vous y prends ; il y a long-temps que je vous guette, mais il n’y a plus à reculer. Ah ! çà, voyons, êtes-vous en cartes ou êtes-vous en chambres ? » C’était comme s’il eût parlé grec ou latin. Elles tremblaient de tous leurs membres. L’une d’elles, cependant, répondit au petit homme, en fondant en larmes : « Monsieur, je suis chez mes parens, qui demeurent au Marais. – Et moi, répond l’autre, enhardie par la présence d’esprit de sa compagne, je suis la bonne des parens de mademoiselle ; nous étions sorties ensemble pour une commission. – Ça suffit, répond le petit homme, à présent vous pouvez sortir. » Elles ne se le firent pas dire deux fois.

Comme elles sortaient, entre un monsieur qui demande au petit homme ce qu’il fait au poste avec ces deux jeunes personnes. « Je suis du département des mœurs, reprit le petit homme, et vous, monsieur, êtes-vous pour les mœurs ? – Je suis commissaire de police, répond le nouvel interlocuteur. – Sur ce, monsieur, je vous dirai que je viens de prendre le nom et l’adresse de ces deux dames. Mon affaire est faite, et j’ai l’honneur de vous saluer, ajoute le petit homme… Et il se retire.

Or, le petit homme mystérieux était tout simplement le sieur Braillard, ancien agent de police, qui s’était permis, sans aucune qualité, de faire arbitrairement arrêter ces deux jeunes personnes sur le compte desquelles sa trop grande susceptibilité morale lui avait fait porter un jugement téméraire : sentant sa faute, il avait pris auprès de M. le commissaire de police un titre qui ne lui appartenait pas. Une plainte fut portée d’abord par les parens de ces jeunes personnes, qui eurent ensuite la générosité de se désister.

A raison de ces faits, une ordonnance de la chambre du conseil a renvoyé Braillard aujourd’hui devant le tribunal de police correctionnelle. Il convient de tout, et se charge de sa propre défense, qu’il expose en ces termes : « Voyant ces jeunes demoiselles rire et causer ainsi sur la voie publique, j’y reconnus un caractère suspect, et, croyant agir dans l’intérêt des mœurs, je me suis permis de les suivre long-temps et de les faire arrêter : je n’ai pas plutôt reconnu mon erreur, que j’en ai été bien repentant, et les ai remises sur le champ en liberté. »

M. le président : Mais quel titre aviez-vous d’abord pour les arrêter ?

Braillard : Aucun, M. le président ; mais ayant été employé long-temps aux mœurs, et destitué arbitrairement, je voulais chercher à rentrer en place au moyen d’un acte de morale de moi-même et totalement désintéressé.

[7.1]M. l’avocat du roi, en flétrissant justement cette conduite, appelle sur le prévenu toute la sévérité du tribunal, qui l’a condamné à trois mois de prison.

(Gazette des Tribunaux.)

Poésie.
LE COMTE ROBERT.

Un belvédère. – Il fait nuit. – Le comte Robert est assis, près de la croisée, dans une attitude méditative ; tout-à-coup il se lève et parcourt l’appartement à grands pas.i

ROBERT.

Je m’y perds, plus mon œil veut sonder ces ténèbres,
Plus je doute, et ne vois que des ombres funèbres !
Sur ces graves sujets : le temps, l’éternité,
Et l’homme, et l’ame et Dieu, j’ai long-temps médité ;
Tour à tour j’ai maudit l’astre qui nous éclaire,
Ou prosterné mon front au pied du sanctuaire,
Dans ma soif de connaître, invoqué le trépas,
Rêvé, prié, maudit… sans avoir fait un pas
Hors de ce labyrinthe, obscur, inextricable,
Où se perd l’innocent, ainsi que le coupable,
Dont le centre est le doute, et qui par cent détours,
A ce centre fatal nous ramène toujours !

(Il s’arrête et croise les bras sur sa poitrine.)

Serait-il vrai que l’homme, en une nuit profonde,
Jeté nu, comme un ver, sur l’arène du monde,
N’y doit… n’y peut marcher qu’au flambeau de la foi ?

(Une pause.)

Cependant j’ai souffert : je veux savoir pourquoi !
J’ai des désirs, une ame avide de connaître,
Une pensée active, un regard qui, peut-être,
A force de sonder cet abîme profond,
Si le temps ne manquait, plongerait jusqu’au fond !
– Pourquoi donc ce regard, cette active pensée,
Cette âme vers un but chaque jour élancée,
Toutes ces facultés, ces désirs, cet espoir,
Dieu me les donna-t-il ?… si ce n’est pour savoir ! –
La foi ?… Ce n’est qu’un mot qui plaît à l’ignorance !

(Avec emportement.)

Mais je ne fléchirai jamais sous sa puissance ;
Non : avant de bénir le chemin où je vais,
J’ai le droit de savoir s’il est bon ou mauvais !

(Il ouvre la croisée et se penche sur le balcon)

Oh ! que la nuit est belle ! Une clarté plus vive,
Ce soir tombe du ciel et s’épand sur la rive.
Ce long nuage blanc, dans l’espace azuré,
Entre le ciel et moi semble un rideau tiré ;
Mais ainsi qu’il ne peut me cacher les étoiles,
Quand mes yeux de ma nuit perceront-ils les voiles ?
Là-bas, sur le clocher, mon étoile à demi
Déjà brille et sur moi jette un regard ami ;
C’est elle que, parmi ses heureuses compagnes,
Chaque nuit, au milieu des célestes campagnes,
Je distingue et je suis, jusqu’à ce que, fuyant,
Son rayon éclipsé se perde à l’Orient ;
Et lorsque après un jour de longues rêveries,
De stériles souhaits, d’espérances flétries,
Dans mon sein est tombé ce rayon consolant,
Le sommeil à mes yeux est moins lourd et moins lent.

(Une pause.)

Faut-il que des mortels la sacrilège audace
Ait, en l’étudiant, désenchanté l’espace,
Et, sur le piédestal de la réalité,
Pour chaque Dieu détruit mis une vérité ! –
[7.2]Sommes-nous plus heureux en sachant davantage ?
A tous ces froids calculs d’ailleurs quel avantage,
S’il est toujours un point où l’on doit arrêter,
Et si tout ce savoir n’aboutit… qu’à douter ?

(Une pause.)

Ah ! que n’ai-je vécu dans ces temps d’innocence,
Où, dans les feux du ciel, la nuit et le silence,
Le fleuve qui s’écoule à flots mélodieux,
L’Océan qui mugit, l’homme adorait des dieux ?
Le soir, quand je verrais, au rendez-vous fidèle,
Se lever dans l’azur cette étoile si belle,
Et sur le clocher noir, que j’aime à contempler,
S’arrêter un moment, comme pour me parler,
A genoux, sans rougir de mon pieux hommage,
Et croyant d’un vrai Dieu voir en elle l’image :
– O toi qui pour veiller sur un simple mortel,
Lui dirais-je, descends de ton palais du ciel,
Et qui, dès que du jour luira la première heure,
Soudain remonteras à ta haute demeure,
Comme ma mère avant de céder au sommeil,
Jadis, près de ma couche, attendait le soleil ;
Foyer pur que j’adore, astre dont la présence
Ranime dans mon sein l’amour et l’espérance,
Et que rêve mon âme et qu’admirent mes yeux,
Brille toujours sur moi propice et radieux,
Vois mes vœux, mes douleurs ; soutiens moi, si je tombe ;
N’abandonne ton fils que bronchant sur la tombe,
Et daigne alors, pesant ses besoins et ses fers,
Lui faire des vertus des maux qu’il a soufferts !

(Une pause.)

Mais comment adresser une telle prière !
Ne l’ai-je pas appris ? Ces globes de lumière
Ne sont que des soleils, éclairant de leurs feux
D’autres globes de boue, insensibles comme eux !
Dans la lune se meut peut-être tout un monde ;
Et quand notre soleil de flamme nous inonde,
Nous lui réfléchissons, dans son obscurité,
De ce foyer immense, une faible clarté !
Où donc adorer Dieu ? – Partout, dans la nature. –
Ah ! d’un temple si vaste, en secret je murmure !
Ce Dieu, qu’on lit partout, s’il n’était nulle part !
Si l’univers n’était que l’œuvre du hasard !
Si mes yeux me trompaient ! si, de loin, la matière
De prestiges brillans séduisait ma paupière !
S’il n’était ni soleil, ni feux, ni firmament ! –
Des sages n’ont-ils pas nié le mouvement ?
Comment dans ce chaos pouvoir me reconnaître ?
Il faut à l’homme un Dieu, comme aux peuples un maître ;
Mais facile à comprendre, à voir, dont les autels,
L’emblème, le regard, soient moins universels ! –
En voulant trop savoir, j’ai desséché mon âme ;
Je ne crois plus aux dieux : ma faiblesse en réclame ;
Et j’en suis venu, las de chercher un soutien,
Au point de regretter les erreurs d’un païen !

(Une pause.)

Et que sais-je, si l’homme a déchiré le voile !
S’il n’est pas, en effet, dans cette pure étoile,
Quelque penchant d’amour, instinct mystérieux,
Qui l’attache à mon âme, et me rattache aux cieux !
Si tous ces feux errans ne sont que des planètes ;
Des mondes habités qui flottent sur nos têtes,
Et non pas des amis dont l’œil, sur nous ouvert,
Brille, quand le jour fait à l’horizon désert !
Et s’il n’est pas enfin un dieu pour chaque monde,
Dans chacun des soleils dont le char les féconde ;
Dieux créés par un seul, qui, dans l’immensité,
Leur verse à tous la vie et la fécondité !

(Il tombe à genoux en pleurant.)

O toi donc, roi des dieux, un, profond, invisible,
Qu’à peine je conçois dans l’univers sensible,
Dont à peine le ciel me trahit la grandeur,
Mais qui, par la pensée, illumine mon cœur ;
J’ai besoin de savoir, et d’aimer et de croire :
Jusqu’à moi fais descendre un rayon de ta gloire ;
Et toi, bel astre, à qui son œil prête un rayon,
Viens dissiper ma nuit… et m’enseigner son nom.

Auguste chevalier.


i. Ce remarquable fragment de poésie fait partie d’une légende philosophique, intitulée : Le comte Robert, que M. Auguste Chevalier publiera prochainement.

[8.1]La revue britannique, fondée en 1825, est un des recueils périodiques qui, en France, a mis en circulation le plus grand nombre d’idées utiles. Ce n’est pas seulement un recueil littéraire, c’est un immense dépôt dans lequel sont consignées et décrites toutes les inventions nouvelles, toutes les modifications, toutes les conquêtes que chaque jour réalisent la science et les arts. C’est la revue britannique qui, la première, a décrit les ingénieux procédés de Watts et d’Arkwright1, qui, par leur double combinaison, procurent à la Grande-Bretagne une économie de plus de huit millions de liv. sterl. par an. Plus tard, les routes à la Mac-Adam2, à la Stevenson, et enfin ces admirables rails-ways, sur lesquels la vapeur fait circuler les chars avec la rapidité de l’éclair, furent expliqués par elle dans leurs plus petits détails. Mais à côté de ces articles positifs on y lit, exposées dans un style élégant et facile, les savantes théories des Mac-Culloch, des Bentham, des Godwin3, etc., etc., dégagées de tout ce qu’elles ont de trop nébuleux, de trop scolastique. – Dans chaque livraison se trouvent aussi des portraits de nos célébrités contemporaines ; des récits variés de voyages ; des détails statistiques sur les diverses contrées du globe ; des recherches archéologiques ; des morceaux d’étude sur la littérature et la philosophie des divers peuples ; des contes ; des tableaux de mesures empreints de cet humour britannique si original, si poétique. Pour tout ce qui est d’un ordre secondaire, mais qui cependant offre quelque intérêt, les éditeurs de la revue britannique ont consacré une division spéciale qui a pour titre : Nouvelles des Sciences, de la Littérature, des Arts, etc., etc. – Ainsi la revue britannique tient ses lecteurs au courant de tout ce qu’il y a de neuf et d’intéressant dans le monde politique, littéraire, scientifique, commercial et industriel.

On souscrit à la revue britannique au bureau de notre journal.

Nouvelles Diverses.

On chante maintenant la messe aux Tuileries tous les dimanches à onze heures ; il n’y a que les intimes qui soient admis à partager avec la royale famille la nourriture céleste. On assure que Louis-Philippe assiste régulièrement à tous les offices. Sous la restauration, non-seulement il n’y allait jamais, mais il affectait de rire beaucoup des saints mystères.

(Patriote du Puy-de-Dôme.)

Réponse s’il vous plaît ! – Pourquoi la population est-elle toujours en majorité quand il s’agit du convoi d’un membre de la minorité, et, vice versa, pourquoi est-elle toujours en minorité quand il s’agit d’un membre de la majorité ?

(Corsaire.)

Un journal belge rapporte un usage assez curieux ; nous lui laissons la responsabilité de son authenticité :

« Les Kalmoucks ont appliqué la mécanique à la liturgie. Ils ont des cylindres de bois creux remplis de formules en sanskrit ; les caisses sont peintes en rouge et ornées de lettres dorées. Au moyen d’un axe qui traverse le cylindre, on met en mouvement ces espèces de moulins à prières, qui font l’office de chapelets, mais sans que le croyant se donne la peine de les réciter. Les fidèles sont convaincus qu’en agitant et froissant ainsi des prières religieuses écrites, on produit un bruit agréable à Dieu, et qui équivaut au bourdonnement des voix d’une multitude qui prie. Chez plusieurs tribus, les moulins à prières sont de grande dimension, et unis par quatre ailes en forme de cuillers que fait tourner le vent, et de cette manière officient pour toute une population. »

Il y aurait peut-être quelque avantage à importer chez nous, en Espagne et en Italie, cette invention des Kalmoucks, invention digne de la plus haute civilisation. Avec un pareil mécanisme, on arriverait sans peine à la réforme complète du clergé.

(Le Temps.)

M. Romagnoli, Italien, réfugié en Corse, reçut du préfet du département, l’injonction de sortir d’Ajaccio. Sur son refus, deux gendarmes, accompagnés d’un commissaire de police, l’arrêtèrent à son domicile et le conduisirent en prison. Dès que cet acte de brutalité administrative fut parvenu à la connaissance du public, 500 patriotes se réunirent en armes sur la place de Motti, et firent sommer le préfet [8.2]de mettre sur le champ M. Romagnoli en liberté, ce qui eut lieu presque immédiatement.

(Populaire.)

MONT-DE-PIÉTÉ.

Il sera procédé, le mardi 25 février courant, et jours suivans, depuis quatre heures après midi jusqu’à huit, dans la salle des ventes du Mont-de-Piété, rue de l’Archevêché, à l’adjudication, au plus offrant et dernier enchérisseur, de divers objets engagés pendant le mois janvier de l’année 1833, depuis le N° 1 jusque et compris le N° 8157.

Ces objets consistent en linge et hardes, dentelles, toiles, draps, glaces, bijoux, etc.

Les lundis et les jeudis, on vendra les bijoux et l’argenterie, les montres et les dentelles, etc. ;

Les mardis, les draps, percales, indiennes, toiles en pièces et hardes ;

Les mercredis, les matelas, les lits de plume, les glaces, les livres reliés et en feuilles, les vieux papiers, autres objets et hardes ;

Et les autres jours, le linge, les hardes, etc.

AVIS DIVERS.

On a perdu une jeune chienne épagneule, ayant poil gris mélangé de taches puce, oreilles à longs poils, marques de feu au-dessus des yeux, museau pointu, courte queue à longs poils, dessous du ventre blanc soyeux. Elle portait un collier commun cuir noir, avec boucle et anneau de fer. Elle a été perdue à la Mulatière, vers cinq heures du soir, le 12 février dernier.
Récompense à qui la ramènera à M. de la Perrière, à la Mulatière, maison en face du pont.

(319) Un jeune homme de quinze ans environ, désire se placer comme apprenti dans une fabrique de velours. S’adresser, pour les renseignemens, à Mme Enjalbert, lisseuse, quai des Cordeliers, n° 57, 2e montée, au 3me étage.

(318) A LOUER, appartement de 6 ou 9 pièces, si l’on veut, dont un hangar de 60 pieds de longueur sur 20 de largeur, propre à un établissement de soierie. S’adresser sur les lieux, à M. Matrat, propriétaire, route de Vienne, n. 4, en face le fort de La Mothe, à la Guillotière.

(317) A VENDRE une mécanique en 744 courant, corps et remisse en soie, travaillant pour étoffes d’ameublement. S’adresser au bureau.

(314) Le sieur DAVID, inventeur breveté pour les nouvelles mécaniques à dévider et à faire les cannettes, ensemble ou séparément, approuvé par la chambre de commerce de Lyon et la Société de lecture et d’encouragement de la même ville, qui lui a décerné une médaille en séance publique, prévient qu’il construit ces mécaniques à faire les cannettes seulement d’une manière des plus économiques, tant pour les prix que pour l’emplacement. Sur un de ces rouets de la longueur de trois pieds sur un de large, il s’y fait 12 cannettes à la fois ; il les construit selon les besoins de chacun, pour faire 4 cannettes seulement jusqu’à 30 et au-dessus. Il fait des échanges et revend celles de rencontres.

THEORIE SOCIETAIRE
De Charles Fourier.
Les deux dernières leçons de M. berbrugger, sur la théorie sociétaire de Ch. fourier, sont mises en vente chez M. Babeuf, libraire rue St-Dominique, n. 2. – Les 4 livraisons forment 103 pages in-8°. Chaque livraison se vend 50 c.

Notes (Lyon et les Mutuellistes. Depuis deux mois...)
1. À court terme, la grève de Lyon fut un échec, la tentative se heurtant à l’inflexibilité des négociants et des autorités civiles. Les journaux républicains eux-mêmes s’étaient prononcés contre l’opportunité d’une telle manifestation, jugée alors trop risquée. Le mutuellisme en ressortit effectivement exsangue notamment sur le plan financier. Pourtant, l’événement, organisé et longtemps maîtrisé par les mutuellistes, eu une vrai résonance dont un peu plus tard Louis Blanc, par exemple, se fit l’écho : « Considérée dans son principe moral, elle avait quelque chose de singulièrement élevé. Quoi de plus touchant que de voir cinquante mille ouvriers suspendre tout à coup les travaux qui les faisaient vivre et se résigner aux privations les plus dures, pour garantir de toute atteinte douze cents de leurs frères les plus malheureux !… Par rapport à la classe ouvrière, c’était la théorie de l’association appliquée sur une grande échelle et au prix de sacrifices qui en rendaient l’effet plus imposant. Par rapport à la bourgeoisie, c’était une démonstration terrible, mais péremptoire, des vices d’un régime industriel qui, fondé sur un antagonisme de tous les instants, ne vit que par le perpétuel triomphe du fort sur le faible, et entretient une hostilité flagrante entre ces deux éléments de la production : le capital et le travail » (Louis Blanc, Histoire de dix ans, ouvr., cité, vol. V, p. 249).

Notes ( Du droit de Coalition.)
1. Mention, une nouvelle fois ici, de Victor Prunelle.

Notes (Nous éprouvons le plus grand plaisir à...)
1. Michel-Marie Derrion allait publier au lendemain d’avril 1834 un court essai, Constitution de l’industrie et organisation pacifique du commerce et du travail ou Tentative d’un fabricant de Lyon pour terminer d’une manière définitive la tourmente sociale (imprimerie de Mme Durval) dans lequel il présentera son projet coopérativiste de Commerce véridique et social. Il reprendra et développera son programme dans une série d’articles publiés en décembre 1834 et janvier 1835 dans L’Indicateur.

Notes ([8.1] La revue britannique , fondée en...)
1. James Watt (1736-1819) et Richard Arkwright (1732-1792), savants et ingénieurs britanniques dont les innovations furent au cœur de la révolution industrielle en Angleterre.
2. John McAdam (1756-1826), inventeur écossais des premiers revêtements pour les routes et chemins.
3. Mention ici de John Ramsey McCulloch (1789-1864), économiste ricardien, et de William Godwin (1756-1836), utilitariste, considéré comme l’un des fondateurs de la doctrine anarchiste.

 

 

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