Retour à l'accueil
4 mai 1834 - Numéro 68
 
 

 



 
 
    
Faits Divers.

La cause nationale vient de perdre un de ses organes les plus énergiques et les plus indépendant M. Vierne1, rédacteur du Patriote de Lizieux, a péri victime d’un déplorable accident, écrasé par un arbre. Son talent d’écrivain et la loyauté de son caractère lui avaient concilié au plus haut point estime et affection de tous les partis ; aussi, le plus grand nombre de ses concitoyens s’était donné rendez-vous sur sa tombe, où des discours empreints d’une touchante simplicité ont été prononcés. A l’exemple des habitans de Moulins, qui naguère ont adopté la famille d’Achille Roche, les concitoyens de M. Vierne ont manifesté la résolution d’alléger la malheureuse position de sa veuve et de ses enfans. On a ouvert à cet effet une souscription dans laquelle viendront se [rejoindre] toutes les opinions, car ce n’est point une manifestation de parti, mais une œuvre toute d’humanité, un hommage rendu à la conscience et à la probité politique que l’on accordait unanimement au généreux citoyen dont la tombe s’est fermée trop tôt.

(Le Patriote du Puy-de-Dôme.)

La question déjà agitée il y a deux ans devant les tribunaux dans l’affaire de l’abbé Dumonteil, la question du mariage d’un individu engagé dans les ordres religieux, mais n’exerçant plus le sacerdoce, va se présenter, assure-t-on, devant le tribunal civil de Pont-l’Evêque.

Un ecclésiastique d’un âge mûr, tombé dans la disgrace de l’évêque et suspendu ou interdit de ses fondions de de desservant, voulant sortir de la fausse position où il se trouve, isolé entre la vie civile et l’état religieux, a dû, depuis un ou deux jours, commencer l’instance tendant à obtenir la faculté de s’engager dans les vœux du mariage.

(Le Précurseur.)

[8.1]camille2, général romain, assiégeant Falère, un maître de pension qui espérait une récompense, lui livra les enfans des principaux habitans, convaincu que par ce moyen il lui livrait la ville. – Camille le renvoya et lui dit : « Nos armes ne sont destinées que contre ceux qui sont armés contre nous, et non contre des enfans que l’on épargne même à la prise des villes ! »

Henri III, voulant faire Charles de Larochefoucault chevalier du Saint-Esprit, à la première promotion, le 31 décembre 1578, lui demanda un état de ses services3. Il en remit un. « Je ne vois là, dit ce prince, que les sièges et les batailles où vous vous êtes trouvé sous les règnes de mon père et de mon grand-père. » – Sire, répondit Larochefoucault au monarque, nous combattions alors contre les Espagnols et les Anglais. Contre qui avons-nous combattu depuis ? Contre des Français. Quelles batailles et quels ennemis ? A Saint-Denis, à Dreux, à Jarnac, à Moncontour ; j’y ai vu quatre-vingt mille Français séparés en deux armées, sous les plus braves et les plus habiles chefs de l’Europe, s’élancer les uns contre les autres et s’égorger. Ah ! peut-on mettre au rang de ses services le massacre de ses pareils, de ses compatriotes, des Français !…

En 1380, le connétable duguesclin4, au siège de Château-Neuf-de-Randon Châteauneuf-de-Randon, était malade et sentait sa fin approcher. Il baisa son épée de connétable et affirma par serment n’avoir jamais rien fait contre l’honneur. Ses capitaines fondant en larmes l’environnaient. « Souvenez-vous, leur dit-il, en quelque lieu que vous fassiez la guerre, que les femmes, les enfans et le pauvre peuple ne sont pas vos ennemis ! »

Un des sous-officiers du 2e régiment, qui tient garnison dans notre ville, le jeune Petetin, frère du rédacteur du Précurseur de Lyon, de ce courageux écrivain qui devant les masses ameutées ne craignait pas d’appeler sur lui la haine des partis, en prêchant le respect pour les décisions de la justice, stigmatisant de toute l’énergie de son âme la scène déplorable qui le 5 avril préluda aux sanglans événemens du 9, vient d’être cassé, par ordre du jour de M. le maréchal-de-camp commandant par intérim la 6e division militaire, de son grade de fourrier, pour, porte cet ordre, avoir professé ici et à Dijon des sentimens républicains pour lesquels il a déjà été réprimandé et puni, pour avoir reçu le journal de Lyon le précurseur, feuille hostile au gouvernement. (M. le maréchal de camp aurait dû ajouter : Et que son frère rédige.)

Cet ordre du jour, auquel nous ne voudrions pas croire si nous n’en avions vu une copie dont l’exactitude nous a été certifiée par des hommes dignes de la plus grande foi, se termine ainsi : « Le sieur Petetin est prévenu, de la part du général, que, s’il continue à recevoir cette feuille au 1er mai, il sera désigné pour une compagnie de discipline. »

En publiant ce fait, nous nous abstiendrons de toute réflexion ; notre amitié pour le jeune Petetin, pour son frère notre courageux collègue, les rendrait peut-être trop acerbes, et d’ailleurs de tels faits parlent trop haut pour qu’il soit nécessaire de les qualifier.

(Le Patriote Franc-Comtois.)

Hier a eu lieu au cimetière du Mont-Parnasse l’enterrement d’un jeune étudiant mort, disait-on, par suite de blessures reçues dans les journées du 13 et du 14. Au moment de l’inhumation dans la fosse commune, les nombreux amis du défunt ont réclamé une fosse à part, et sur l’observation que la demande n’en avait point été faite, une collecte a eu lieu sur-le-champ, et une députation a été envovée à la Préfecture pendant que les assistans gardaient le corps. Un homme dont l’extérieur a inspiré quelques soupçons s’est vu entouré et questionné. Sommé avec menaces de déclarer qui il était, il a avoué sa qualité d’agent de police. On l’a fouillé, et on a trouvé sur lui une liasse de mandats d’arrêt en blanc. Cette découverte a failli lui devenir fatale. Ce malheureux s’est précipité aux genoux de ces jeunes gens, et leur a demandé la vie en pleurant. Ils se sont contentés de le chasser du cimetière. La gendarmerie est accourue un moment après, mais le tumulte avait complètement cessé.

(Bon Sens).

[8.2]La sympathie est si grande pour les malheureuses victimes de la rue Transnanian, et le nombre des visiteurs bienfaisans est toujours si considérable, que les troncs qui ont été placés aux portes sont remplis plusieurs fois chaque jour.

On lit sur l’un de ces troncs : « Offrandes pour le jeune Breneau, âgé de 13 ans, blessé très dangereusement, neveu de la portière. Il est sans ressources. »

Sur un second : « Offrandes pour la veuve Pajo, portière dans la maison, dont le fils unique, âgé de vingt ans, a été tué. Il était son seul appui. »

(Le Temps).

On parle de révélations sinistres qui seront produites à l’enquête ouverte par la décision qui saisit la cour des pairs. Une dame respectable, échappée seule de sa famille au désastre de la maison, rue Transnenain, doit par sa déposition porter la plus grande lumière sur ce fatal incident de la plus lugubre journée.

Un garde national veut aussi faire éclaircir un fait dans lequel il a été a été acteur. Le détachement dont il faisait partie arrive près d’une barrière en construction, près de laquelle on ne voyait personne en armes. Il proposa la destruction de ces travaux. Non pas, répondit le commandant ; demain matin nous y retrouverons les factieux, et nous en ferons bonne justice. Est-ce que l’on renoncerait à réprimer le mal pour s’en réserver la punition.

(Messager.)

Notes ( Faits Divers.)
1. Référence ici à Louis-Charles Vierne (1804-1834).
2. Il s’agit ici du général Camille (vers 446-365 av. J.-C.).
3. Mention d’un épisode fameux entre Henri III (1551-1589) et Charles de la Rochefoucault (1520-1583).
4. Bertrand Duguesclin (1320-1380).

 

 

Contrat Creative Commons

LODEL : Logiciel d'édition électronique