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6 novembre 1833 - Numéro 2
 
 

 



 
 
    
l?avenir.

En ces jours malheureux de comédie infame,
Beaucoup allaient criant, le désespoir dans l?ame : ?
« Malheur ! malheur à nous !
La sainte liberté n?a point chez nous de temple ;
Quand prête à se lever l?Europe nous contemple,
Nous restons à genoux ?

Nos libertés s?en vont, et nos gloires sont mortes !
Les rois, incessamment, vont frapper à nos portes ;
Le Cosaque maudit
Est prêt à se ruer sur notre belle France :
C?est notre sang qu?il veut pour dérouiller sa lance !?
Alors tout serait dit !?

Peur que de notre sang le Cosaque s?abreuve ??
Peur? mais c?est donc que vous croyez la France veuve
De ses meilleurs enfans,
Pour que le Russe, un jour, bivouaque sur la Seine,
Et que l?histoire, encore, offre pareille scène
A ses pas triomphans ?

Allez ! n?ayez pas peur que le progrès succombe
Sous les coups du passé dont nous creusons la tombe ;
Tout marche à l?avenir !
Le progrès un instant peut reposer son aile,
Mais jamais s?arrêter sur la route éternelle
Des siècles à venir. ?

Eh qu?importe, mon Dieu, que la meute royale
Contre le temps s?insurge, et se jette, immorale,
Au devant de nos pas ?
Qu?importe ? le temps voit sans pitié sa démence,
La repousse du pied, poursuit son ?uvre immense,
Et ne s?arrête pas !

[4.2]Qu?importe que les rois nous aient voué leurs haines ?
Qu?importe que dans l?ombre ils nous forgent des chaînes,
Et de nouveaux malheurs ??
Aujourd?hui, voyez-vous, tous les peuples sont braves ;
On ne les bride plus comme de vils esclaves,
Car ils se font majeurs !

Voyez tomber les rois dans nos vastes tempêtes !
Toutes les nations lèvent enfin leurs têtes,
Sublimes de fierté !
Italie ! Allemagne ! Espagne ! tout remue !
C?est un écho sans fin ! toute la terre émue
Crie à la liberté !

Oh ! l?avenir est beau ! ? C?est la joie infinie !
C?est un vaste concert de divine harmonie !
C?est un rêve de feu !
Des jeunes nations c?est l?arche d?alliance,
C?est un hymne éternel d?amour, de délivrance,
Une louange à Dieu !

Oh ! l?avenir est beau ! ? C?est un ciel sans nuages !
C?est un port vaste et sûr, à l?abri des orages,
Un monde sans douleur !
C?est l?immense banquet auquel Dieu nous convie,
Où l?univers entier viendra puiser la vie,
L?amour et le bonheur ! ?

Frères, en vérité, je dis que voici l?heure :
Réjouissez-vous donc, car la royauté pleure ;
Les temps vont s?accomplir !
Si les rois sont debout, la monarchie est morte ;
La république est là, qui frappe à notre porte :
Frères, courons ouvrir !

Mes frères ! si les grands sont grands et vous dépassent,
C?est que vous inclinez la tête quand ils passent?
Pourquoi donc à genoux ?
Voulez-vous être grands comme furent vos pères,
Et plus grands qu?eux encore, et finir vos misères !
Esclaves ! levez-vous !

E.-J.-F. Desbuards1.

Notes (l?avenir.)
1 E.-J.-F. Desbuards, proche des républicains, auteur en 1831 de La Pologne. Imprécation, venait de participer à l?entreprise, coordonnée par Godefroy Cavaignac, de Paris révolutionnaire.

 

 

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