Retour à l'accueil
1 janvier 1834 - Numéro 18
 

 




 
 
     

ÉPHÉMÉRIDES LÉGISLATIVES.

[1.1]Chambre des Députés. ? 26 décembre. ? M. Bérenger est proclamé vice-président ; il a obtenu 165 voix, et M. Persil, 98. ? La chambre nomme pour secrétaires MM. Ganneron, 189 voix ; Martin du Nord, 181 voix ; Cunin Gridaine, 176, et Félix Réal, 158. ? M. Clément du Doubs est nommé l?un des questeurs de la chambre en remplacement de M. Dumeilet, décédé, à la majorité de 139 voix. M. Viennet, son concurrent, n?en a obtenu qu?une ; M. Aimé Dubois, 68 ; etc.

27 décembre. ? M. Gras-Préville cède le fauteuil de la présidence à M. Dupin aîné. ? La commission de l?adresse au roi en réponse au discours d?ouverture, est composée de MM. Martin du Nord, Dumont, Etienne, Gillon, Jacqueminot, Viennet, Duffault, Bignon et Odier. On tire au sort la députation qui ira complimenter le roi à l?occasion du 1er jour de l?an1.

1er janvier 1834.

ADIEU à l?année qui finit : BONJOUR à celle qui commence.

Nous ne vous répéterons pas, citoyens, les v?ux que nous vous adressions, il y a un an aujourd?hui, dans l?Echo de la Fabrique. Ils sont encore les mêmes? bonheur et santé !? Ce doit être là le but de la vie humaine.

Nous vous dîmes alors que l??uvre commencée par le démocrate de Galilée approchait de sa fin. Nous osâmes proclamer pour 1833 l?émancipation physique et morale des prolétaires en émettant ce v?u :

Plus de priviléges, plus de monopoles, plus d?impôts abusifs et onéreux !

Les priviléges, les monopoles, les impôts abusifs et onéreux subsistent encore, malgré la rude guerre qui leur a été faite ; mais la victoire n?est que retardée? Battue avec force par le bélier de la presse, la brèche est praticable et nous entrevoyons déjà le jour où il sera possible de monter à l?assaut.

Prolétaires ! votre émancipation physique et morale n?est pas complètement obtenue, mais vous êtes sur la route? Ne vous laissez pas décourager et vous arriverez.

Soyons donc joyeux. Mille huit cent trente-quatre recueillera sans doute la moisson que ses frères ont semée.

ADIEU à l?année qui finit : BONJOUR à celle qui commence.

Du 1er jour de l?an.

Un écrivain d?un talent supérieur et auquel la presse lyonnaise rend les armes, M. anselme petetin, a émis dernièrement dans le Précurseur le v?u que les étrennes du jour de l?an fussent supprimées et converties en une souscription patriotique et de bienfaisance. Nous ne sommes [1.2]pas de cet avis ; nous allons donner les raisons pourquoi, et le public jugera. La déférence que nous avons pour les lumières du rédacteur en chef du Précurseur, n?a jamais été un obstacle à l?indépendance de nos opinions.

D?abord nous prions qu?on ne se laisse pas séduire par l?idée de philantropie qui a guidé la plume de M. Petetin. On doit être convaincu, pour peu qu?on se rappelle l?égoïsme des hommes, que cette souscription ne durerait pas trois années de suite. Sous un prétexte ou sous un autre, chacun s?en dispenserait, et 1?usage actuel qui lui aurait été immolé ne renaîtrait certainement pas : il en résulterait qu?on aurait détruit une institution sans la remplacer par rien d?utile. Voyons si cette institution mérite d?être conservée.

Nous ne produirons en faveur de cette institution ni une habitude immémoriale, ce qui, nous le savons, n?est qu?une preuve négative, ni même la parole de napoléon, législateur, qui doit être cependant de quelque poids dans la balance ; nous voulons juger cette institution en elle-même, sans nous étayer d?aucune autorité.

Le premier jour de l?an doit être considéré sous les divers rapports de l?industrie, de la famille et de la civilisation.

Sous le premier rapport que nous venons d?indiquer, on ne niera pas que le premier janvier apporte chaque année une secousse à l?industrie, sur laquelle nombre de marchands comptent avec raison. Est-il rationnel de fermer un pareil débouché à l?industrie ? Nous ne voyons pas quelle objection sérieuse on peut nous faire, et même si les souscriptions dont on a parlé, en supposant qu?elles fussent toujours remplies (ce qui ne serait pas), équivaudraient à cette immense activité d?une foule, ou pour mieux dire de toutes les professions industrielles à l?époque du jour de l?an.

Sous le deuxième rapport, celui de la famille, nous dirons sans crainte d?être démentis : L?enfance et la Jeunesse voyent avec délices arriver le premier janvier ; la vieillesse y recueille quelques souvenirs agréables ; enfin la domesticité n?est pas étrangère à ses joies. N?y a-t-il pas de l?inhumanité à rompre cet enchantement qui tient pour quelques jours tant d?êtres sous un charme indicible ? Et pourquoi ?? Laissons de côté les fades complimens des inférieurs à leurs supérieurs, des courtisans à leurs maîtres, peu nous importe à nous? Pourquoi donc ?? Parce que quelques raccommodemens opérés en ce jour ne seront pas sincères? de traîtres baisers auront été échangés? Mais nous dirons : L?hypocrisie est encore un hommage rendu à la vertu? Nous dirons : plus d?une famille réunie en ce jour a abjuré des haines non pas invétérées, mais frivoles? Des époux, des frères se sont rapprochés, les liens de famille ont enfin, quoiqu?on dise, reçu une [2.1]nouvelle force. Cette force sera-t-elle durable ? Peut-être oui, peut-être non ; mais était-il inutile de tenter un essai, et si deux êtres seulement lui doivent le bonheur, le premier janvier ne sera pas stérile. O hommes ! le bonheur est-il donc si commun, que quelques heures ne méritent pas d?être retenues !

Le premier janvier considéré comme fête civile doit encore, selon nous, être conservé. Ne l?oublions pas : les peuples ne sauraient vivre sans morale, les fêtes sont le couronnement de la morale. Nos idées ne sont plus religieuses : il n?y a plus pour nous que des ogives et des vitraux dans les temples que la piété de nos pères éleva. C?est un fait accompli ; nous n?avons plus de foi. La religion n?est plus ; un seul sentiment lui survit : celui de religiosité, qui n?est autre que le rapport de la morale à la divinité ; ne laissons pas éteindre ce sentiment précieux. Gardons-nous de matérialiser davantage l?espèce humaine, et puisque nous n?avons plus, puisque sans foi nous ne saurions avoir de fêtes religieuses, conservons au moins nos fêtes civiles. Le premier janvier en est une importante : que ce jour soit donc consacré à autre chose qu?aux travaux de la vie ; qu?il soit consacré aux visites, il ne sera pas perdu? Qu?une pensée profonde le distingue des autres jours ; car, il enseigne aux hommes qu?ils ont à peine quelques heures pour s?aimer et se le dire, et il se précipite à son tour dans l?abîme du néant. Nous reviendrons un jour certainement aux sublimes conceptions de Sylvain Maréchal et de la Convention. Un jour nous aurons des fêtes civiles qui n?offenseront personnei ; le premier janvier en sera une. Heureux celui qui reçoit et qui donne en ce jour de simples étrennes ! Plaignons celui qui n?aurait personne à visiter.


i. Le 21 janvier était une fête abominable, même en la considérant avec nous comme acte de justice. Les fêtes de juillet ne sauraient non plus être éternelles. Nous voulons des fêtes civiles applicables à tous les peuples : Dieu, la vertu, l?amour, la vieillesse, etc? voila ce qu?il nous faut fêter par des jours solennels.

De l?Election des Prud?hommes

Des sections de dorure, rubanerie, guimperie, passementerie, bonneterie et chapellerie.

C?est dans cette semaine que doivent avoir lieu les nominations de trois prud?hommes, dont deux ont donné leur démission, représentant les fabriques de dorure, rubanerie, guimperie, passementerie, bonneterie et chapelleriei. Autant celles des prud?hommes de la fabrique de soieries ont quelque chose de solennel et de démocratique, autant celles-ci sont faites incognito et dans un complet oubli des droits des travailleurs. Quelle étrange anomalie? Ne dirait-on pas que le gouvernement a voulu donner une prime à l?insurrection heureuse, et qu?il n?attend qu?une démonstration armée des autres professions pour leur accorder les mêmes droits que la fabrique de soieries a obtenus ? En effet, nous ne voyons pas pourquoi un même mode de nomination n?existe pas pour toutes les classes de fabrique ; pourquoi les noms des électeurs de toutes les sections ne sont pas également affichés. Nous l?avons dit ailleurs ; il en résulte un grave inconvénient. Les prud?hommes ne siégeant pas tous au même titre, n?obtiennent pas du public la même autorité ; de leurs collègues, la même considération. Il y a plus, il en est résulté une espèce d?hostilité permanente qui a neutralisé les bonnes intentions que les prud?hommes fabricans de soieries avaient, nous n?en doutons pas, apporté au commencement de leurs fonctions. Nos réflexions étant pour le moment inutiles, nous nous bornons à ces quelques mots, et nous terminerons en disant :

L?organisation du conseil des prud?hommes demande donc une réforme complète ; d?abord dans les membres, et ensuite dans le mode d?élection. Toutes les professions doivent être appelées à concourir à leur nomination, et non pas quelques-unes ; elles doivent [2.2]y concourir avec les formes légales, adoptées pour la fabrique de soieries. La classe des cordonniers, si nombreuse, n?a pas un seul représentant au conseil. Est-ce là de la justice.

Nous reviendrons sur ce sujet important ; nous n?avons voulu aujourd?hui que constater un fait déplorable : l?insuffisance du mandat donné aux prud?hommes représentant les sections autres que celle de la fabrique de soieries. Mais cette question est trop grave pour que nous n?en fassions pas l?objet d?une série d?articles. Nous appelons aussi l?investigation et les lumières de tous les travailleurs de ces classes privées de leurs droits. Notre tribune leur est ouverte ; leurs efforts doivent se joindre aux nôtres.


i. Voy. le tableau officiel inséré dans notre n. 16.

Au Rédacteur.

Monsieur,

Je viens vous remercier de l?accueil que vous avez fait à notre première, et vous prier d?avoir l?obligeance d?insérer cette seconde dans votre patriotique journal.

M. Brisson a été contraint de payer à Martin, 1 fr. l?aune d?étoffe armure qu?il ne voulait payer que 85 cent., et par la publicité donnée à cette affaire, il s?est vu forcé de payer un même prix à tous les maîtres sans distinction. Etant du nombre de ces derniers, j?ai reçu les confidens reproches de M. Brisson, lors de notre réglement de compte, pour lesquels il m?a fallu, suivant l?usage, droguer fort long-temps. M. Brisson me dit : Vous m?avez rendu un joli service en avertissant vos confrères que cet article valait 1 fr. Si vous m?eussiez réclamé ce prix en particulier, je vous aurais accordé ce que vous demandiez. Toutefois ! il n?oublia pas d?ajouter : pourvu que vous m?eussiez promis le secret. C?est à vous à qui j?en veux personnellement. Que M. Brisson exhale sa mauvaise humeur, tant qu?il lui plaira, il ne me forcera jamais à travailler pour lui au-dessous du cours ; mes confrères avaient tous droit au même salaire, et je ne crois pas que le titre de membre du conseil des prud?hommes, que possède M. Brisson, lui confère le privilége de faire travailler au-dessous du cours. Ce cours est déjà trop bas, et la faible somme de 15 cent. par aune que M. Brisson voulait retenir à son profit, est à peu près le seul bénéfice sur lequel les chefs d?atelier pouvaient compter : le leur ravir est une injustice.

Je m?applaudis des reproches qui m?ont été adressés par M. Brisson, et je crois devoir les rendre publics ; la publicité est la sauvegarde des travailleurs : chacun son droit, et le droit pour tous, telle doit être notre maxime.

VACHET, Fabricant, rue Massonrue Masson, n° 21.

Note du rédacteur. ? MM. Vachet et Martin se sont montrés dans leur affaire avec M. Brisson honnêtes et généreux ; ils ont rendu un véritable service à leurs confrères, qui allaient être exploités à qui mieux mieux. Eclairer chacun sur ses véritables intérêts, les appuyer dans leurs justes réclamations, est un devoir pour tout bon citoyen ; et si tous remplissaient ce devoir sacré avec zèle, l?exploitation des travailleurs ne pouvant subsister, le malaise actuel cesserait bientôt. Dès-lors, il n?existerait point de divisions parmi les hommes d?une même profession, qui ne doivent avoir qu?un but, celui d?améliorer leur sort, de se soulager dans les malheurs communs, et de réclamer leurs droits presque toujours méconnus.

On doit se convaincre chaque jour que plus on cède, moins on a de force pour défendre ensuite ce qu?il est impossible de céder, et que la multiplicité des réclamations, le nombre des réclamans, rendent impossible toute vengeance qu?on testerait d?exercer contre les ouvriers.

Nota.? On nous assure, mais nous ne voulons pas le croire, que quelques chefs d?atelier auraient accepté à 70 cent, ce qui est payé à leurs confrères 1 fr. ? Nous, ne pouvons pas le croire. Ces chefs d?atelier, en se nuisant à eux-mêmes, compromettraient les intérêts de leurs camarades.

Au Rédacteur.

Monsieur,

En réponse à la lettre de M. Matrot, qui s?est cru offensé de ce que je l?ai cité comme faisant partie d?un comité pour la fixation des tâches, cela ne m?étonne pas ; lorsqu?on a commis des erreurs on ne veut pas les avouer.

En démentant le fait de sa coopération au tarif des tâches, M. Matrot ne dément pas le fait principal ; il ne saurait le nier, car j?ai vu ce tarif illégal entre les mains de plusieurs personnes. Toutes ont nommé M. Matrot comme faisant partie du comité, toutes ont déclaré être soumises à son influence. Dans une entrevue que j?eus avec M. Matrot, [3.1]il fut question de ce réglement de tâches, et alors il ne niait pas le fait ; pourquoi vient-il donc le démentir aujourd?hui, et après 15 jours de réflexions ? Est-ce parce que cette fixation arbitraire a été couverte d?une unanime réprobation, que ni le conseil, ni le comité, ne veulent maintenant s?en reconnaître les auteurs ? Quelle preuve M. Matrot veut-il que je lui cite, si ce n?est qu?un exemplaire de ce tarif était entre les mains de M. Bourdon, lorsqu?il est venu chez moi avec M. le président. M. Matrot sait bien que je n?ai pas à ma disposition les procès-verbaux de la formation de ce comité.

Il est bon aussi que le public sache qu?avant de vous écrire, M. Matrot est venu chez moi, accompagné de M. Dumas, pour me menacer et me provoquer, disant que je l?avais attaqué dans son honneur, et qu?il lui fallait une réparation. Je dois donc répondre à M. Matrot que sa susceptibilité sur le point d?honneur n?est pas concevable ; je ne crois pas que ce soit un déshonneur d?être mutuelliste, non plus que de faire partie d?un comité quelconque. Je n?ai donc point de réparation a donner à M. Matrot, car je ne l?ai pas offensé.

En me plaignant de la conduite arbitraire de M. le président, il m?était bien permis de dévoiler les causes qui ont produit son erreur, erreur dont je suis assez la victime pour avoir acquis le droit de me plaindre.

Dailly, Fabricant, rue Bouteille.

M. lefèvre, commissaire de police à St-Clair, fait, dit-on, le petit Gisquet1. Il a voulu dernièrement, suivant ce qu?on nous écrit, apporter des obstacles à la réunion paisible d?une loge de Mutuellistes. Il aurait eu, disait-il, des ordres de M. le préfet. Nous en doutons, et dans tous les cas, que M. le commissaire réfléchisse avant que d?agir. Il pourrait se repentir de ses velléités d?arbitraire.

M. reverchon, prud?homme négociant, ayant donné sa démission, les électeurs nommeront trois titulaires au lieu de deux. Il n?est rien changé au surplus à l?arrêté du préfet.

Samedi 4, les listes des électeurs négocians et des électeurs chefs d?atelier des quatrième et septième section seront définitivement closes.

Six nouveaux électeurs ont été inscrits à la quatrième section. On dirait vraiment que cette section a aussi son tourniquet.

On nous affirme, mais nous nous en assurerons nous-mêmes, qu?aucune liste d?électeur n?a été affichée dans la septième section (Croix-Rousse). Si ce fait est vrai, M. le maire de cette commune commettrait là un véritable acte de forfaiture. Serait-ce pour assurer la réélection de M. Martinon ou celle de M. Bernard ?

Nous avons annoncé que MM. Souchait et Bernard se portaient pour candidats, le premier à la quatrième section ; et le second à la septième. On nous écrit que M. Souchait n?est pas éligible, et que la conduite de M. Bernard, soit à l?époque des événemens de novembre, soit récemment dans l?affaire de la Maison St-Olive, et d?autres motifs encore, lui ôtent toute chance de succès.

Nous relèverons, dans le prochain n. les inexactitudes du compte-rendu que l?Echo de la Fabrique a fait de l?affaire Dailly c. ses apprentis, mais nous pouvons dès à présent assurer nos lecteurs qu?aucune attaque n?a été dirigée contre la société des mutuellistes.

Association commerciale d?échange.

Le Précurseur a inséré une lettre par laquelle M. Berbrugger se plaint que M. Mazel jeune se serve sur ses circulaires des mots Réforme industrielle et commerciale, et l?accuse de s?être attribué les ouvrages de Fourier, le croyant mort. En l?absence de M. Mazel, M. ravet, l?un de ses disciples, nous adresse ; une lettre que l?espace nous empêche d?insérer, et dans laquelle il soutient que les disciples de Fourier ne sauraient avoir seuls le droit d?inscrire sur les cartes d?entrée à leurs séances, Réforme industrielle et commerciale, et que dans tous les cas les disciples de Mazel peuvent revendiquer l?antériorité de cette devise, au moins à Lyon. M. Ravet repousse par un démenti formel l?allégation de M. Berbrugger, que M. Mazel se soit attribué les ouvrages de M. Fourier. Il lui demande d?en fournir la preuve. Il termine sa lettre en rappelant à M. Berbrugger qu?il est encore disciple du fondateur de l?échange, et s?étonne qu?il désavoue aujourd?hui ses nobles et anciennes croyances sur cette association.

athénée de femmes.

Mme Eugénie Niboyet, directrice du Conseiller des Femmesi, poursuit avec zèle et talent l??uvre d?émancipation de son sexe qu?elle a courageusement entrepris. Le N° 8 de ce journal contient plusieurs bons articles entr?autres un excellent qui a pour titre : Education, et dans lequel cette dame propose la création de quatre salles d?enseignement gratuit pour les enfans de l?âge de sept à douze ans. Deux salles seraient affectées aux garçons et deux aux filles. Nous applaudissons à cette idée sur laquelle nous reviendrons dans un prochain [3.2]numéro ; nous nous occuperons seulement aujourd?hui de l?Athénée de femmes que madame Niboyet propose également.

« Après avoir recueilli, dit-elle, les voix des femmes les plus avancées, nous avons conçu le projet de fonder à Lyon, à dater des premiers jours de janvier, un Athénée spécial aux femmes, et consacré à leur développement? Ce sera une tribune morale et intellectuelle ouverte à toutes les femmes? Il sera fait à l?Athénée des cours de morale, à la portée des femmes auxquelles la nature et le sort ont fait petite part. Il y aura aussi de hauts enseignemens où toutes celles qui se sentent force et puissance sont appelées? Les dames membres de la société auront ensuite des réunions particulières pour lire les travaux qui leur seront soumis, ou discuter les questions qui leur seront adressées.

« Chaque sociétaire payera annuellement, et d?avance aux mains de la trésorière la somme de 20 francs. On recevra jusqu?au 15 janvier les noms des femmes qui, par leur influence ou leur capacité, doivent s?inscrire les premières sur la liste ouverte dans les bureaux du Conseiller des Femmes. A cette époque, il sera procédé à la nomination des présidentes, etc. »

Nous souhaitons à cette fondation morale le succès qu?elle mérite. Si elle réussit, comme nous avons lieu de le croire, ce sera un grand pas vers l?émancipation de la femme. Le nom de Mme Niboyet sera grand entre tous les noms de femmes ; il faut que cette dame ne se laisse pas rebuter par les obstacles nombreux qu?elle rencontrera et dont elle ne se doute peut-être pas, jugeant la société avec candeur et amour.

Nous nous permettons un reproche dont Mme Niboyet voudra bien ne pas s?offenser ; car il est fait dans son intérêt et dans celui de sa belle entreprise. L?annonce de l?Athénée de femmes ne nous a pas paru convenablement faite sous le rapport de la forme. Ce sujet était assez grave et important pour mériter un article spécial au lieu d?être rejeté à la suite d?un autre. Chaque chose doit-être traitée en son temps et en à son tour ; on nous dira que c?est du charlatanisme littéraire possible, mais le monde est ainsi fait : il faut frapper fort, si l?on veut frapper juste.

Mme Niboyet nous permettra-t-elle une dernière observation ? Comme nous n?assisterons pas à la séance où les dames sociétaires décideront si les hommes doivent être admis à professer certaines sciences encore bien ignorées des femmes, nous croyons pouvoir prendre sur nous de donner notre avis, quoiqu?on ne nous le demande pas ; bon ou mauvais, nous le donnons en conscience. Nous croyons que le but de l?Athénée de femmes serait manqué si professeurs et disciples n?appartenaient tous à ce sexe, lors même que la partie scientifique devrait provisoirement en souffrir ; mais ce sexe aimable doit-il craindre d?être au-dessous d?aucun enseignement, lui qui a produit la savante Hypacieii, et de nos jours, Mmes Genlis, Staël, etc.


iLe Conseiller des Femmes paraît tous les : samedis en 16 pages in-12. ? Prix : 10 fr. par an. ? On s?abonne au bureau, rue Royale, n. 14 ; à l?imprimerie de Léon Boitel, quai St-Antoine, n. 36 ; et à Paris, chez Louis Colas, libraire, rue Dauphine, n. 32.
iiHypacie, fille de Théon, philosophe et mathématicien, naquit à Alexandrie vers la fin du 4me siècle. Elle eut pour maître Théon, son père, et fit de si grands progrès dans la philosophie, la géométrie, l?astronomie et les mathématiques, qu?elle passa pour la personne la plus savante de son temps. Elle tint la fameuse école d?Alexandrie, et l?on compte parmi ses disciples Synésius, de Cyrène, qui fut évêque. Hypacie a composé plusieurs traités de mathématiques qui sont perdus. Elle fut tuée au mois de mars 415 dans l?église d?Alexandrie, au milieu d?une émeute populaire ; etc.

AVIS.

Les parens sont embarrassés de réunir l?utile et l?agréable dans les cadeaux qu?ils destinent à de jeunes enfans d?un âge déjà raisonnable ; nous nous permettons de leur indiquer la Bibliothèque Populaire, dont M. Falconnet est le correspondant à Lyon.

On peut se la procurer sans augmentation de prix au bureau du journal.

Anecdote prolétaire.

Dans la soirée du 25 novembre 1831, Lyon au pouvoir des ouvriers avait repris un aspect tranquille. M. Acher, colonel d?une légion de la garde nationale, parcourait les rues et visitait les postes. Arrivé au Mont-de-Piété, il demande le commandant du poste : « C?est à lui que vous parlez, répond un homme aux formes herculéennes, à peine vêtu. ? Eh bien ! commandant, je viens vous rappeler l?importance du poste qui vous est confié ; c?est un dépôt sacré. ? Soyez tranquille, citoyen, j?y aurai l??il ; tous mes effets y sont. »

Jurisprudence.

Notices utiles à tous les citoyens.

[4.1]? La cour de cassation a décidé dans l?affaire de Delente1 que les crieurs publics avaient satisfait à la loi en déposant chez le commissaire de police un exemplaire des écrits qu?ils se proposaient de crier, et que le refus de visa de ce fonctionnaire ne pouvait les empêcher d?exercer leur profession.

? La cour de cassation a jugé, le 13 novembre, que l?action en partage intentée par un cohéritier contre le tiers détenteur de l?immeuble provenant de la succession, était non recevable si les autres cohéritiers n?avaient pas été appelés dans l?instance.

? La cour d?appel de Paris a décidé, le 18 novembre, que l?action en paiement de lettres de change causées valeur reçues comptant, mais qu?on prouvait avoir été souscrites pour la mise sociale, n?était pas du ressort de la juridiction consulaire, mais devait être soumise au tribunal arbitral.

? La cour royale de Paris a décidé, le 26 novembre dernier, dans l?affaire d?un nommé Jaunez-Sponville, que le concordat d?un débiteur failli n?était pas obligatoire pour les créanciers qui n?avaient été ni portés au bilan, ni appelés aux opérations de la faillite.

? Le tribunal de commerce de Paris a jugé qu?un maître de pension était un commerçant, et pouvait être déclaré en état de faillite.

? Idem a jugé, dans son audience du 12 novembre, qu?en matière de contrefaçon, le plaignant pouvait agir simultanément contre le débitant et le contrefacteur, et assigner devant le tribunal du domicile du premier.

? Idem de Paris a décidé, le 15 novembre, que le tiré, qui sur un mandat payable à plusieurs jours de vue, avait écrit le mot vu avec sa date et avait signé au bas, était tenu au paiement de cet effet, lors même qu?il prouvait n?avoir pas reçu les fonds et prétendait n?avoir écrit ce mot vu que pour faire courir les délais.

? Le tribunal civil de Paris a jugé que le maître d?un hôtel garni n?était pas responsable des effets mobiliers du locataire, tels que argent, bijoux, attendu qu?il ne pouvait répondre que de ce qui était confié à sa garde.

? Le tribunal civil de Charleville a décidé que le fils d?un étranger domicilié en France depuis longues années, né en France d?une mère française, et dont le père jouit de tous les droits attachés à la qualité de Français, est Français lui-même et doit être soumis à la loi du recrutement.

Nouvelles générales.

PARIS ? Un accident est arrivé le 26 décembre à la chambre des députés. Quelques minutes après la clôture, le lustre qui est d?une grande dimension est descendu avec force, a brisé les glaces de l?ouverture cintrée pratiquée pour son passage, et fait retomber dans la salle une grande quantité de tubes à quinquet et de cristaux. Il y avait une quinzaine de députés : personne n?a été blessé.

? La cour d?appel a, contrairement au jugement du tribunal de première instance, dont nous avons rendu compte, décidé que le supplément que la Tribune faisait paraître le dimanche était une nouvelle publication, et condamné M. Lionne, gérant, à un mois de prison et 200 francs d?amende. C?est le 88me procès que la Tribune a subi.

? La Gazette des Tribunaux du 25 décembre publie une protestation des porteurs des bons de Joseph, roi d?Espagne, contre l?arrêté du conseil d?état qui les a rejetés.

Me Pinard, l?un des avocats interdits dans le complot dit du 28 juillet, a, d?après sa déclaration de s?être pourvu en cassation, été admis à plaider le 26 décembre devant la cour d?appel de Paris. Les avocats présens à l?audience avaient déclaré qu?aucun d?eux ne remplacerait cet honorable avocat, si la cour refusait de l?entendre.

Académie française. ? M. Charles Nodier a été reçu le 26 décembre.

Ecole de médecine. ? Il y a eu quelque bruit, au cours de M. Orfila ; mais ils n?ont pas eu de suite.

? L?obélisque de Luxor est arrivé dans les eaux de la Seine, le 23 décembre. On va incessamment le décharger.

? Une polémique s?était engagée entre le National et le Constitutionnel. Ce dernier vient d?être abandonné par ses trois rédacteurs, MM. Bert, Stéphane Flachat et Léon Faucher1.

L?ordre des avocats a nommé une commission, composée de MM. Mauguin, Hennequin, Ph. Dupin, Delangle et Lavaux pour aviser à ce qu?il faut faire dans l?intérêt de MMes Pinard, Michel et Dupont2, que la cour d?assises a suspendus.

Lyon.

La souscription ouverte ou profit de M. Coquelin, menuisier, rue Basseville, victime de l?incendie arrivé dans la nuit du 12 au 13 octobre dernier, a produit 2 084 fr. 50 cent. (En voir le détail dans le Journal du Commerce de Lyon du 26 décembre, n. 1567).

La fille du sieur Ripecout, corroyeur, quai d?Orléans, enfant de 5 ans laissée seule il y a quelques jours dans une chambre où il y avait un poêle allumé, a été horriblement brûlée par les charbons avec lesquels elle avait cru pouvoir jouer ; elle est morte dans des [4.2]souffrances horribles. Avis aux parens qui laissent leurs enfans seuls. L?établissement des salles d?asile rend inexcusable leur conduite.

? On assure que le pont Niogret, dit pont Volant, a reçu une forte secousse par la crue des eaux, et menace ruine.

? La ville de Lyon est un vrai cloaque de boue.

? Le citoyen Tiphaine publie dans le Précurseur du 29 décembre, une lettre justificative ; nous nous hâtons d?en faire mention en attendant que nous puissions l?insérer.

anzin. ? Les ouvriers des mines d?Anzin sont rentrés le 18 décembre dans leurs ateliers qu?ils avaient quittés, le chef de service ayant voulu les obliger à porter la longueur des tiermes sur les montées de 20 à 25 mètres.

cognac. ? Une jeune fille tombée en léthargie a été enterrée comme morte. Les derniers devoirs venaient à peine de lui être rendus, qu?on a entendu des cris plaintifs. On a procédé à l?exhumation ; mais malgré tous les soins, elle est morte neuf heures après avoir été rapportée chez elle.

montbrison. ? Le citoyen Caussidière a été élargi aussitôt après son arrivée.

cancans.

Nous souhaitons au gérant de l?Echo de la Fabrique beaucoup d?articles tout faits et une collection d?idées, la seule chose qui lui manque ; plus, une lunette d?approche pour voir ce qui se passe, et un cornet pour entendre ce qui se dit.

A MM. Bernard et Martinon la croix d?honneur, qu?ils ont sollicitée pour leur belle conduite en Novembre.

Aux prud?hommes, un peu de ce que l?on dit qui court les rues et que beaucoup n?ont pas.

Aux ouvriers, d?autres prud?hommes.

Nous donnerons pour étrennes, à tous ceux qui viendront nous souhaiter la bonne année :

1° Un tableau représentant les ricanemens de M. Martinon, pour faire suite aux singeries que publie Aubert.

2° Un exemplaire de l?histoire pittoresque de la révolte des ouvriers, écrite par M. Bernard, pendant sa fuite au mois de Novembre 1831, avec cette épigraphe : « Mes camarades me cherchaient, j?étais à Montluel. » Cet ouvrage est enrichi de plusieurs estampes supérieurement gravées, entr?autres une qui représente M. Bernard au moment où il fait évader le général Ordonneau.

M. Labory, en lisant l?Echo de la Fabrique, s?est écrié : Tu quoque mi Brute ! (Toi aussi ma brute).

ANNONCES.

(N° 14). CODE des ouvriers ou recueil méthodique des lois et réglemens concernant les ouvriers, chefs-d?ateliers, contre-maîtres, compagnons et apprentis, avec notes explicatives par Me Malepeyre, avocat de Paris ;
Publié par la Société nationale pour l?émancipation intellectuelle.
Prix : 20 centimes.
A paris, au bureau central, rue des Moulins, n. 18.
A lyon, au bureau de la succursale, rue de la Préfecture, n. 5, et au bureau du journal.

(N° l5). DICTIONNAIRE FRANÇAIS,
Contenant 3,000 mots de plus que celui de l?Académie, extrait de la Bibliothèque Populaire.
6 volumes cartonnés en un seul, Prix : 2 f. 50 c.
Chez M. Falconnet, correspondant de la Bibliothèque Populaire, rue Tholozan , n. 6, ou au bureau du journal.

BIOGRAPHIE
des sages-femmes célèbres,
Par M. delacoux, D-M.
Cet ouvrage formera un beau volume in-4°, caractère cicéro, orné de 20 portraits, dessinés par Leclerc. Il sera composé de 10 livraisons, dont cinq ont déjà paru. Le prix pour l?ouvrage entier, est de 15 fr. ; chaque livraison vendue séparément 1 fr. 75 cent. A Lyon, chez M. Targe, libraire, rue Lafond. (8)

Notes (ÉPHÉMÉRIDES LÉGISLATIVES. [1.1] Chambre des...)
1 Sont mentionnés ici Charles Louis Chevalier Clément (1768-1857), le Marquis Joseph Marie Gras de Préville (1755-1849), André Marie Dupin (1783-1863), dit Dupin aîné, Charles Guillaume Etienne (1777-1845) et Antoine Odier (1766-1853).

Notes (M.  lefèvre , commissaire de police à...)
1 Déjà évoqué dans les numéros précédents, le préfet Gisquet  venait de prendre, à la fin de l?année 1833, un arrêté soumettant l?exercice des crieurs publics au contrôle de l?administration. Invalidé en première instance puis en appel, l?esprit de l?arrêté fut repris par la loi sur les crieurs publics du 16 février 1834.

Notes (Jurisprudence. Notices utiles à tous les...)
1 Ouvrier corroyeur et crieur du Bon Sens, il se trouve alors au centre d?un procès retentissant dont l?issue aboutira à la loi sur les crieurs de février 1834.

Notes (Nouvelles générales. PARIS ? Un accident...)
1 Il s?agit ici de Léonard Joseph Léon Faucher (1803-1854), économiste et publiciste français.
2 Il s?agit là des trois avocats qui ont assumé la défense des 27 républicains, dont Raspail, accusés de conspiration à la fin de l?année 1833. Voir, dans le numéro 54 de L?Echo de la fabrique, daté du 12 janvier 1834, l?article intitulé « Indice de révolution sociale ».

 

 

Contrat Creative Commons

LODEL : Logiciel d'édition électronique