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CONSULTATIONS GRATUITES et amicales
[1.1]DEMAIN JEUDI, Et tous les lundi et jeudi de chaque semaine, de midi a deux heures, sur toutes espèces d’affaires, AU BUREAU DE L’ECHO DES TRAVAILLEURS.
ÉPHÉMÉRIDES LÉGISLATIVES. Chambre des députés. – 24 janvier. – M. Vatout lit une proposition relative aux chemins vicinaux. – M. Laffitte soumet de nouveau sa proposition sur le desséchement des marais, et M. Bavoux renouvelle la sienne sur le rétablissement du divorce. – M. Vatout présente le rapport de la commission chargée d’examiner les projets de loi tendant à accorder une pension aux veuves Jourdan, Daumesnil, Gérard et Decaen . Il propose l’adoption du projet de loi relatif à la veuve Jourdan, et conclut au rejet des trois autres. – M. Barthe, ministre de la justice, présente un projet de loi sur les crieurs publics, dont voici les dispositions : « Nul ne peut exercer cette profession sans en avoir obtenu la permission de l’autorité municipale qui pourra la refuser. La contravention sera punie de 6 jours à deux mois de prison. – Tout écrit de deux feuilles d’impression et au-dessous sera sujet au timbre. Toute contravention sera punie des peines et amendes portées dans l’art. 69 de la loi du … avril 1816. Le même ministre demande l’autorisation de poursuivre M. cabet , député, pour deux articles insérés dans le journal le Populaire, le 1er le 12 janvier, sous le titre de : La république dans la chambre ; et le second, le 19, intitulé : Des crimes des rois contre l’humanité. M. Larabit demande que le ministre de la guerre donne des explications sur les mesures prises relativement aux officiers d’artillerie arrêtés pour avoir refusé de recevoir dans leur corps des officiers de marine1. 25 janvier. – Rapport de la pétition de M. Vecchiarelli ; la chambre passe à l’ordre du jour malgré les efforts des députés Garnier-Pagès, Salverte, Odilon-Barrot. – Rapport de la pétition des Polonais du Hâvre. La chambre passe à l’ordre du jour malgré MM. Havin, Salverte, Grammont, Lafayette. – Elle passe aussi à l’ordre du jour sur les explications demandées au ministre de la guerre par M. Larabit appuyés de M. Demarcay2. Chambre des pairs. – 22 janvier. Le garde des sceaux présente un projet de loi pour harmoniser la législation avec l’édit de 1778, relatif à la répression des délits et des crimes commis par des Français dans les échelles du levant et États-barbaresques. – La proposition adoptée par l’autre chambre sur l’abolition des majorats est transmise. – On nomme la commission chargée d’examiner la proposition de M. Boyer sur les effets de la séparation de corps. – Le ministre de l’intérieur présente le projet de loi adopté par l’autre chambre relatif à l’organisation des conseils général et d’arrondissement de la Seine, et du conseil municipal de Paris. – La chambre passe à l’ordre du jour sur la pétition de M. Vernay-Girardet, tendant à faire abroger l’article de la loi qui a interdit le territoire français à la famille de napoléon. 25 janvier. La chambre fait déposer à sa bibliothèque un exemplaire d’un ouvrage de M. Martin St-Léon, contenant le résumé des dépenses de la ville de Paris, depuis 1797 jusqu’en 1830. – M. Portalis fait le rapport du projet de loi sur l’organisation du conseil-d’état, et conclut à son adoption. – Nomination de diverses commissions et rapport de pétitions.
Adresse des chefs d’ateliers et ouvriers passementiers de la fabrique de rubans de saint-étienne, AU ROI DES FRANÇAIS.i [1.2]Sire, dans le moment où votre majesté appelle les députés de la France à venir débattre les intérêts du pays, et où les ministres vont s’occuper de présenter des lois sur les coalitions et associations d’ouvriers qui se forment sur tous les points du royaume, nous chefs d’ateliers et ouvriers de la fabrique de rubans de Saint-Étienne, présumant que les rapports qui vous ont été faits sur l’état de notre manufacture ont pu être exagérés, et que l’on pourrait donner à l’association que nous avons formée un caractère politique, craignant que la vérité, qu’il est si utile qui est si utile que les rois connaissent, ne parvienne pas jusqu’à vous, nous avons cru pouvoir vous faire connaître, par l’organe de nos délégués, l’expression de nos sentimens, vous suppliant d’accueillir les observations que nous osons vous présenter sur les moyens d’améliorer le sort de la classe ouvrière. La ville de St-Étienne est une des plus importantes de la France, par ses fabriques d’armes de guerre et de chasse, et de quincaillerie ; par l’exploitation de ses mines de houilles, qui ont pris un grand développement ; par l’établissement de plusieurs chemins de fer, et enfin par sa fabrique de rubans qui est la première du monde dont nous faisons partie. Les rubans se fabriquent sur deux genres de métiers bien distincts, savoir : ceux à une seule pièce à la main, à la haute et basse-lisse, que la modicité de leur prix d’achat et la simplicité de leur mécanisme surtout de celui de basse-lisse a mis à la portée des habitans des campagnes des environs de St-Étienne : le nombre de ces métiers est d’environ 18,000. Des [2.1] commis parcourent à cheval les villages, ils remettent la chaîne et la trame des rubans aux ouvrières, et rapportent les pièces fabriquées. Les personnes qui se livrent à ce genre de fabrication, occupées une partie de l’année, à la culture des terres, ne sont pas dénuées de moyens d’existence, quand les travaux de la fabrique de rubans sont arrêtés. Le second genre de métiers qui est celui à plusieurs pièces, constitue la partie mécanique la plus importante et la plus active de la fabrique de rubans. Le plus, grand nombre de ces métiers se trouve à Saint-Étienne et à peu de distance de la ville. Ils sont appelés métiers à la barre, parce que le travail s’effectue au moyen d’une longue barre de bois, que l’ouvrier tient entre ses mains, et avec laquelle il imprime le mouvement aux diverses parties du métier qui opèrent le tissage : il est reconnu que ce métier est très fatigant pour l’ouvrier, qui est obligé de se tenir debout et courbé pendant tout le temps qu’il travaille. Son occupation devient encore plus pénible quand il a terminé le tissage, étant obligé de rester étendu sur son métier, n’ayant d’autre point d’appui que la poitrine ; il reste des jours entiers dans cette position, pour disposer et faire succéder de nouvelles chaînes à celles qu’il vient de tisser. Il y a environ 15 ans que la mécanique à la jacquard de Lyon, appliquée au métiers à la barre, a produit dans la fabrication des rubans une heureuse révolution, qui lui a permis d’obtenir toutes sortes de rubans façonnés ; le métier à la barre ne fabriquait, avant cette époque, que des ouvrages faciles, tels que taffetas, satins, galons, et quelques petits façonnés, au moyen d’un tambour, ou grand cylindre de bois, garni de touches disposées pour faire lever ou baisser les lisses du dessin que l’on voulait exécuter. Les métiers à la barre, employés par la fabrique de rubans de St-Étienne, s’élèvent à environ 5,500 ; le nombre de pièces de rubans que fabrique chaque métier est toujours proportionné à la largeur du ruban ; ils peuvent être répartis ainsi qu’il suit : nombre de métiers. terme moyen. prix. 200 m. velours doubles pièces, 30 pièces 1,000 fr. 800 m. taffetas et galons noir, 26 pièces 400 fr. 1 500 m. taffetas et satins unis, 20 pièces 500 fr. 500 m. façonnés à tambour, 14 pièces 800 fr. 2 500 m. jacquard, 12 pièces 1,200 fr. Ces 5,500 métiers représentent le travail de près de 100 mille métiers à la main, qui ne pourraient fabriquer qu’une seule pièce à la fois. Chaque métier met un peu plus d’un mois pour tisser un chargement, c’est-à-dire, l’assortiment de pièces d’un métier. La longueur de la chaîne, remise toute préparée par le fabricant, varie de 6, 8, à 12 douzaines d’aunes, suivant la largeur du ruban à fabriquer, vu que la petite largeur se tisse avec plus de célérité que la grande. Le prix de la façon est payé à l’ouvrier par douzaine d’aunes du ruban fabriqué. Les ateliers, dont le loyer est payé par le maître ouvrier, se composent de 2, 3, 4, et rarement 5 et 6 métiers ; le chef de la fabrique s’occupe du tissage, à moins qu’il n’ait qu’une fabrique de 2 métiers ; il est assez occupé pendant toute la journée à tenir les métiers en bon état, à leur procurer continuellement du travail, et à surveiller les détails minutieux et l’économie de la fabrication. Il donne le coucher et la soupe à ses ouvriers, supporte différens petits frais de chauffage, entretien des métiers et autres, et paie à l’ouvrier la moitié nette de la façon du tissage qu’il reçoit du fabricant : il est aisé de voir qu’il ne lui reste qu’une bien petite partie de cette autre moitié. (La suite au prochain numéro).
i. L’espace nous a manqué jusqu’à ce jour pour insérer, suivant notre promesse, l’ Adresse au roi des passementiers de St-Etienne. Nous n’avons pas besoin de dire que nous sommes loin de partager les espérances qui l’ont dictée, et surtout que nous désapprouvons les expressions peu civiques dont le rédacteur, M. Ph. hedde, conservateur du Musée de St-Etienne, homme cependant d’un grand talent, s’est servi ; nous sommes à cet égard complètement de l’avis de l’Echo de la Fabrique, mais nous ne l’imiterons pas jusqu’à sacrifier les choses bonnes que cette adresse contient à un vice de forme, quelque grave qu’il soit. Nous croirions manquer, en le faisant, à notre devoir de journaliste et à notre spécialité. Au reste, cette susceptibilité patriotique du gérant de l’Echo de la Fabrique nous a surpris. Lorsque ce gérant lui-même, simple chef d’atelier, chargé de représenter toute une population ouvrière, a terminé un mémoire aux ministres par les mots : « Votre très humble et obéissant serviteur », il n’a guère le droit de beaucoup s’offusquer que M. Hedde, fonctionnaire public, se soit oublié jusqu’à dire au roi : « Vos très humbles et obéissans sujets », en parlant des délégués de la Fabrique de St-Etienne. L’un vaut l’autre : le serviteur d’un ministre peut bien être le sujet d’un roi.
– On nous annonce que les deux dragons qui avaient insulté les compagnons ferrandiniers (v. n. 23), ont été condamnés à 10 jours de prison.
Tribunal de commerce de Lyon, Les notables commerçans sont convoqués pour le lundi 17 février, à dix heures du matin, à l’effet de nommer un président en remplacement de M. Bourbon, dont les fonctions sont expirées le 31 décembre dernier ; de 4 juges, en remplacement de MM. J. Bodin, Bruno Faure, [2.2]Léon Canot, et Lacombe, juges dont le dernier est démissionnaire, et de quatre juges suppléans, en remplacement de MM. Second, Vingtrinier, Mante aîné, et Victor Ranvier, ces deux derniers démissionnaires.
– Le tableau de Boissy-d’Anglas sera visible gratis depuis dix heures du matin jusqu’à 4 heures du soir, tous les jours, à l’Hôtel-de-Ville, jusqu’au 31 de ce mois.
Supposons deux familles, ayant chacune 4 ou 5 enfans ; la première jouit de 10 à 12 mille francs de revenu ; la seconde vit de son travail, et ne gagne par conséquent que 5 à 6 fr. par jour. La première aura sa maison de campagne, où elle passera 6 mois de l’année, et échappera par conséquent à six mois d’octroi : voila déjà 50 pour cent en faveur de la première, puisque la seconde passe ses 12 mois à la ville. Mais pendant les 6 mois que la famille riche passe à Lyon, les choses sont-elles égales ? Attendez et vous en jugerez : l’ouvrier, s’il a beaucoup d’ordre et d’économie, pourra acheter son vin par pièce, il le paiera 44 francs et acquittera un droit d’entrée de 22 francs, c’est-à-dire, de 50 pour cent de la valeur ; le riche boira du vin vieux qui lui coûtera cent francs, et paiera 22 francs d’entrée, c’est-à-dire, 22 pour cent de la valeur. L’ouvrier ne pourra faire manger à sa famille que de la viande de boucherie ou de la viande de porc : ces objets paient une forte taxe. Le riche mangera des volailles, du gibier, du poisson ; et la législature n’a pas voulu que ces objets payassent aucun droit !! Si l’ouvrier veut sortir de la ville, soit pour ses affaires, soit pour faire prendre l’air à sa famille, il montera dans une voiture publique et payera en sus du prix de la place une somme quelconque pour le fisc. Le riche passera dans sa voiture exempte de taxe. Si, en rentrant, la femme de l’ouvrier porte au bras un panier, ne fût-il pas plus gros que le poing, il sera impitoyablement ouvert et fouillé à la barrière ; le riche passera au même instant avec sa voiture chargée de paniers, et on ne lui demandera pas même s’il a quelque chose à déclarer. Nous ne prétendons pas dire ici que celui qui a une voiture à lui, fait nécessairement la fraude, mais nous pouvons demander pourquoi cette surabondance de vexations pour les uns et cette indulgence pour les autres ? Est-ce là ce qu’on appelle de la justice et de l’égalité devant la loi ? Nous pourrions pousser beaucoup plus loin nos comparaisons, mais à quoi bon, il n’y a pas un de nos lecteurs qui n’en sache autant que nous sur ce chapitre. Nous avons voulu démontrer que ceux qui trouvent le statu quo excellent ont d’excellentes raisons pour en agir ainsi. Ils savent fort bien qu’ils ne paient point à l’État ce qu’ils doivent ; et comme il faut nécessairement à celui-ci un énorme budget, si l’on prenait moins dans la poche du pauvre, il faudrait forcément qu’on puisât davantage dans la leur.
i. Ces réflexions sont extraites d’un article de M. Anselme Petetin, inséré dans le Précurseur (n° 2169, 21 décembre 1833) ; nous avons cru utile de les reproduire pour faire sentir de plus en plus combien la loi fiscale est injuste à l’égard de la classe laborieuse.
26 janvier 1834. Au Rédacteur. Monsieur, J’ai été provoqué par M. Labory, lors de la dernière réunion qui a eu lieu, pour remplacer M. Bernard en qualité de gérant de l’Echo de la Fabrique ; je n’ai pas voulu avoir de longues conversations avec lui, parce que M. Labory (on peut en juger par ses deux dernières lettres à l’Echo de la Fabrique) a un talent de parler tel, qu’on ne sait jamais ce qu’il veut dire. Il réalise le bon mot qu’on prête à M. Talleyrand : « La parole a été inventée pour dissimuler la pensée. » Je crois qu’on appelle ces gens d’un nom que certaine comédie de Molière a rendu honteusement célèbre ; je préfère donc écrire ce que je pense de M. Labory. Je l’accuse d’avoir profité de son influence sur ses collègues, due à une réputation qui lui était échue je ne sais comment, pour les engager dans une fausse voie, à commencer par la question de la libre défense, dans l’affaire Tiphaine, jusqu’à celle des titulaires [3.1]et suppléans, qui a amené la désorganisation du conseil des prud’hommes. Je profite de cette occasion pour rappeler à M. Labory qu’il n’a pas répondu à ma lettre insérée dans votre numéro 14 ; elle était cependant assez importante pour mériter un mot de réponse. Est-ce que M. Labory se croit tellement au-dessus de ses confrères, qu’il peut dédaigner de leur répondre ? Un tel excès de fatuité serait intolérable ; M. Labory doit y réfléchir. J’ai l’honneur, etc. EDOUARD.
Au rédacteur, Lyon , le 24 janvier 1834. Monsieur, Nous vous prions d’insérer dans le plus prochain numéro de votre feuille cette réponse à votre article du 23 janvier 1834, dans lequel vous rendez compte du jugement qui a condamné le sieur Chapeau ; les renseignemens qui vous ont été fournis étant bien loin de la vérité. Par convention passée entre, nous, le sieur Chapeau devait faire travailler 4 métiers pour nous jusqu’à ce qu’ils aient fait pour 8,000 fr. de façons ; il devait nous rendre des schals bien fabriqués ; il était dit que celui qui romprait la convention paierait à l’autre une indemnité de 800 f. Trois des métiers du sieur Chapeau étaient occupés par de bons ouvriers ; le quatrième l’était par un apprenti qui seul a donné lieu aux débats survenus entre nous. Long-temps nous avons pacifié la mauvaise fabrication de ce quatrième métier ; et chaque jour le sieur Chapeau nous faisait espérer que cela n’arriverait plus. Enfin, le sieur Chapeau nous a déclaré qu’il ne pouvait pas mieux faire ; qu’il garderait son apprenti sur ce métier, et que si cela ne nous convenait pas, il offrait de rompre nos conventions ; il prétendait pouvoir le faire sans que nous fussions en droit de réclamer l’indemnité stipulée dans la convention. Avant sa demande en résiliation au conseil, jamais le sieur Chapeau ne nous avait fait appeler comme vous le dites ; il en est de même, quant à ce qui vous en a été rapporté, de différentes ratures sur son livre, il n’en a pas une seule ; et il est pitoyable pour nous de lire ces choses qui sont de toute fausseté. Lorsque le sieur Chapeau a demandé la résiliation de nos conventions il s’est plaint des raccommodages que nous lui faisions payer ; nous avons prouvé qu’à cette époque il avait fait pour 2,500 fr. de façons, et qu’il n’avait eu que pour 3 fr. 50 c. de raccommodages. Nous avons voulu défendre notre droit. Nous n’avons point voulu profiter de l’indemnité de 800 f. que le sieur Chapeau avait été condamné à nous payer, nous l’avons gratifié de la moitié de cette somme, et nous lui avons déclaré ne garder les 400 fr. restans que pour les donner à des ouvriers qui nous monteraient des métiers en remplacement de ceux qu’il avait pour nous. C’est ce que nous avons déjà fait. Recevez, M. le rédacteur, nos salutations, GRILLET et TROTTON. Note du Rédacteur. – Notre impartialité nous faisait un devoir d’accueillir la lettre ci-dessus, et nous n’y manquerons jamais. Il est possible que nous ayons été induits en erreur sur les faits de la cause. Comme nous l’avons dit, l’exposé de ces faits nous a été remis par une personne en qui nous devons avoir confiance, et qui aurait sans doute été la première trompée par M. Chapeau ; c’est à ce dernier à répondre de l’exactitude de ses plaintes et à n’en faire que que de justes. Nous accueillerons sa réponse, étant parfaitement neutres dans le débat des intérêts individuels. Quant à la gratification faite à Chapeau par Grillet et Trotton, c’est encore un fait personnel à Chapeau et sur lequel il pourra s’expliquer. Mais si l’on nous demande notre opinion, nous dirons qu’en thèse générale, nous n’aimons pas les gratifications. Ce mot n’est pas dans le dictionnaire de l’égalité ; il a quelque chose qui choque, soit qu’on le prenne comme une censure de la chose jugée, soit qu’on le regarde comme un don. Au demeurant, la lettre de MM. Grillet et Trotton, ne détruit en rien notre article qui a pour but de prouver la nécessité de la libre défense ; car, même en adoptant en entier la version de ces messieurs qui peut être exacte, nous serons toujours fondés à conclure que la cause n’a été perdue au tribunal de commerce, que parce qu’elle n’a pas été plaidée au conseil des prud’hommes, et parce que l’on a inscrit dans ce jugement des conclusions telles que Chapeau, nous en sommes certains aujourd’hui, n’aurait jamais eu l’idée de prendre, s’il en avait connu les conséquences, et s’il avait été assisté de quelqu’un qui les lui eût fait connaître. Le blâme tout entier doit retomber, sur le conseil des prud’hommes.
Réflexions sur les forçats libérés. [3.2]Un suicide, accompli il y a quelques temps à Clermont-Ferrand, vient de témoigner encore hautement contre les vices de notre système pénitentiaire. Les exemples abondent pour prouver que notre pénalité, loin de tendre à guérir et à réformer le criminel, ne fait que l’enraciner de plus en plus dans ses penchans vicieux, ou bien le pousser, quand il a subi sa peine, au désespoir et au suicide. Samedi … un garde-champêtre, nommé Mingat, faisant sa tournée, vit dans le ravin de Bouai, près Clermont, le corps d’un homme qui s’était pendu à un jeune saule, et qui paraissait s’être servi du parapet d’un petit pont pour réaliser son projet. – Après s’être assuré que le suicidé ne pouvait pas être rappelé à la vie, il alla faire sa déclaration, et le cadavre fut enlevé dans la matinée. – Il fut reconnu pour être celui d’un homme originaire des environs de Nîmes, qui, ayant tué sa femme surprise, dit-on, par lui en flagrant délit, avait été condamné aux galères, et auquel on avait fait remise du restant de sa peine, après un séjour de 18 ans au bagne. Cet homme avait environ 70 ans ; on a trouvé près de lui sa canne et son chapeau, et, dans sa poche, la déclaration que sa mort ne devait être imputée qu’à lui-même. – Il s’était servi, pour se pendre, d’une corde neuve et savonnée avec soin : il paraît s’être tué entre 8 et 9 heures, car un cultivateur qui travaillait non loin du lieu où il a été trouvé, l’a vu passer à 8 heures et demie. Des renseignemens nous ont appris que ce vieillard, fixé ici depuis à peu près un an, était dans l’aisance, qu’il se conduisait bien, mais qu’il était tombé dans le chagrin depuis qu’on avait su la condamnation qu’il avait subie. – Il paraît qu’un agent de police ne se faisait pas faute de la révéler, et qu’il affecta même de lui demander un jour ses papiers au spectacle. Depuis ce moment, ce malheureux s’apercevait qu’on se retirait de lui, et la vie lui devint insupportable C’est là une cruauté qui n’est pas dans la loi. Quand un homme est placé sous la surveillance de la police, c’est un fait qui ne doit être connu que de ceux-là qui sont chargés de son exécution. – La loi prononce des peines, mais quand elles sont accomplies, la société n’a plus rien à demander à celui qui les a subies, sinon une conduite irréprochable, et pour cela elle lui doit comme à tous les hommes, aide protection et bienveillance. Ce qui doit distinguer surtout notre époque c’est une réforme morale qui ne peut s’effectuer avec le détestable principe qu’il faut repousser celui qui a failli. – Selon nous, il ne faut désespérer d’aucune nature d’homme, et c’est là, hâtons nous de le dire, ce qu’il y a de plus encourageant dans la noble tâche du progrès et de la réforme. – Si les crimes sont nombreux, ce n’est pas que l’homme soit méchant et vicieux par nature, c’est que la société actuelle ne vaut rien. Que cette société ne soit donc pas sans pitié pour ceux qui reviennent à elle ! Les condamnés qui ont subi leur peine peuvent rarement trouver du travail ; repoussés partout, ils n’ont souvent d’autre alternative que de retomber dans le crime pour retourner au bagne ; ou bien de se débarrasser de la vie. – Et pourtant, qu’on nous dise si un homme qui, après avoir commis une mauvaise action et passé de longues années dans le régime corrupteur des bagnes, aura résisté à cette corruption et viendra tenir une conduite aussi irréprochable que celle des hommes de bien, qu’on nous dise si celui-là mérite qu’on le repousse et qu’on le méprise ? Nous le disons sans hésitation, de même que l’humanité s’honore quand elle avertit et quand elle éclaire ceux qui s’acheminent vers le crime, elle s’avilit et se dégrade lorsqu’elle rejette impitoyablement ceux qu’une main compatissante ramènerait à la vertu. (trelat, réd. en chef du pat. du Puy-de-Dôme.)
Variétés.
Instruction publique. – Il y a d’inscrits à l’école de droit de Paris pour [4.1]en suivre les cours pendant l’année scolaire 1833-1834, 3,300 élèves ; à l’école de médecine, 2,101. On compte dans les cinq collèges royaux : 1° à Louis-le-Grand, 502 internes, 422 externes ; 2° à Henri IV , 360 internes, 580 externes ; 3° à St-Louis, 253 internes, 500 externes ; 4° à Charlemagne, 1 000 externes ; 5° à Bourbon, 850 externes. Deux collèges particuliers ont, savoir : 1° Stanislas, 500 internes ; 2° Rollin, 500 internes. Le total des jeunes gens qui reçoivent une haute instruction à Paris est de 10,670. Il y a à Paris 55 institutions de jeunes gens, 60 maîtres de pension, 117 maîtresses de pension, et 381 écoles. Jeux. – Le 31, dit 30 et 40, a été inventé en 1780, par un nommé Azon. Microscope. – Le docteur warwick vient d’inventer un microscope oxi-hydrogène, dont les avantages le rendent supérieur à ceux en usage. Pompes à incendies. – MM. Caillot et Schmidt, de Fribourg, viennent d’inventer des pompes qui peuvent, manœuvrées par deux hommes, lancer en une minute 80 pots d’eau à 70 pieds de distance horizontale, ou à 45 pieds de hauteur. Un simple robinet ouvert ou fermé en change complètement l’action et les rend aspirantes ou refoulantes, à volonté ; en sorte que l’on peut les emplir par le même mouvement qui sert à éjaculer le liquide. Un seul homme peut porter une de ces pompes sur le dos avec des bretelles. Potabilité de l’eau de la mer.– M. Sochet, ingénieur de marine, paraît avoir résolu ce problème. Le ministre de la marine a donné l’ordre de faire des expériences à ce sujet. Le même M. Sochet a déjà enrichi la marine de l’invention d’un four à pain qui n’emploie que du charbon de terre. . Statistique lyonnaise. – Le nombre des décès a été, en 1833 de 5,484.
considérations
sur les théâtres.
Ces réflexions sur la scène nous ont paru utiles pour servir d’introduction au compte-rendu que nous nous proposons de faire des théâtres de Lyon. Elles s’appliquent à ces derniers comme à ceux de la capitale. Autrefois la grande, la bonne comédie, était la satire vivante et impartiale des mœurs, des vices, des ridicules du jour. Sous Louis XIV, Louis XV, Louis XVI, Molière, Régnard, Voltaire, et quelques autres grands poètes, osaient critiquer et bafouer, en plein théâtre, et les seigneurs de la cour, et les maltotiers, et les faux dévots, et les médecins ignorans, et les pédantes, et les précieuses, et cette classe trop nombreuse de maris qui, à tort ou à raison, se plaignent toujours d’un malheur imaginaire. Alors cependant l’arbitraire et le bon plaisir du monarque était tout. Sa volonté seule faisait loi ; point de charte protectrice, point de journaux révélateurs des intrigues et du despotisme qui pesaient sur les auteurs ; mais c’est qu’ils étaient courageux ces auteurs, c’est qu’ils demandaient de la gloire, c’est que pour l’obtenir ils bravaient et la Bastille et les lettres de cachet. Loin de briguer les faveurs d’une coterie, et les applaudissemens de la cour et des ministres, ils ne voulaient que les suffrages du public. Sur la scène, ils attaquaient franchement et loyalement les abus, les préjugés de l’époque ; il arrachaient son masque à l’hypocrite, au tartuffe ; ils jetaient à la risée publique le bourgeois gentilhomme, l’avare, et ces marquis d’alors, si insolens, si fiers de leurs talons rouges. Ils combattaient leurs ennemis face à face, ils frappaient fort et juste, et pour prix de leur noble victoire ils ne demandaient qu’une couronne à la postérité. Plus tard et avec Beaumarchais, commença une ère nouvelle pour le théâtre. Avant lui, les tableaux scéniques étaient effrayans de vérités ; parfois on s’irritait de la crudité des couleurs ; mais le but moral, clairement expliqué, mais la fin de la pièce, toujours en harmonie avec la raison, calmait les consciences et les susceptibilités, Beaumarchais, plus hardi que ses prédécesseurs, vint d’une main audacieuse déchirer le voile qui couvrait les intrigues et les mœurs de la cour et de la ville. Sans respect pour les lois, les rangs, les usages, il fut le premier qui prit plaisir à rouler dans la boue du mépris tout ce qu’on estimait encore, non plus avec conviction, mais par suite d’habitude. Dans un seul ouvrage, il foula aux pieds, il frappa du fouet injurieux, du dédain et de l’insulte, la noblesse, la magistrature, la religion, le mariage et tous les sentimens qu’inspirent la nature ou la civilisation. [4.2]Le premier, il dégrada avec joie, avec délices, et se complut dans son œuvre de destruction ; on eût dit un médecin charmé de faire voir à la foule étonnée, les plaies honteuses du corps, social, puis, quand cette foule crie et demande des remèdes à tant de maux, lui sourire d’une manière satanique, et lui enlever tout espoir en secouant les lambeaux de ce cadavre gangrené. Peut-être cependant y avait-il encore un certain courage à reproduire sur la scène ces mœurs honteuses et révoltantes, cette corruption de tous les rangs qui amenait le mélange de toutes les classes et, les égalisant sous le niveau du libertinage, les plaçait toutes au même degré de dépravation ? En faisant la description de cette peste morale qui rongeait la société jusqu’au cœur, on pouvait espérer, par ce tableau effrayant, l’éclairer sur son sort ; on voulait plus encore, on voulait que la littérature dramatique servit d’auxiliaire à la politique et amenât un changement, un bouleversement total dans toutes les institutions. Cet espoir, ce désir étaient vertueux ou coupables ; mais enfin il avait un but, et les auteurs en s’efforçant de l’atteindre, couraient des dangers instantanés sans compter le jugement terrible des siècles à venir. (La suite au prochain Numéro.)
Nouvelles générales. paris. – Le numéro de la Tribune du 22 janvier a été saisi. C’est le 80e procès que ce patriotique journal aura à subir. – Le National de 1834 est encore appelé devant la cour de Paris pour violation de l’interdiction de rendre compte des débats judiciaires, prononcée contre l’ancien National. Ce qui étonne encore plus, c’est que l’assignation est donnée à M. Carrel, quoique ce numéro soit signé par M. L. P. Conseil, co-gérant. – La société Aide-toi, le ciel t’aidera, vient de publier le compte-rendu des sessions de 1832 et 1833. Extérieur. iles sandwich. – Une école de charité vient d’être fondée à Owhyhée. Cette ville va posséder une imprimerie et un journal. amérique. – La ville de Arica, dans le Pérou, a été détruite le 18 septembre dernier, par un tremblement de terre. 6 à 700 personnes ont perdu la vie ; 15 maisons seulement sont restées debout. La mer s’est élevée à plus de trente pieds de son niveau. afrique. – Les tribus d’arzew et de mostaganem, continuent d’être hostiles aux troupes françaises1. angleterre. – Le docteur Bowring a quitté Londres le 22 janvier, et vient à Paris pour y reprendre sa mission officielle.
Lyon.
La cause de M. Reverchon, a été renvoyée à aujourd’hui. – Hier, a eu lieu l’enterrement d’un compagnon ferrandinier. Plus de 1 000 personnes ont suivi ce convoi. Nous y avons remarqué avec plaisir plusieurs chefs d’atelier. – M. Boissieux fils a été nommé juge suppléant au tribunal civil de Lyon. – Une médaille d’or a été décernée par la société des sciences physiques, etc., de Paris, à M. Emile Mouchon, pharmacien à Lyon.
cancans.
D’après les calculs des almanachs de Paris et des départemens, il existe en France 1,700,843 médecins, et seulement 1,400,651 malades ; 1,900,403 avocats, et 998,000 causes à plaider. Si les 902,403 avocats oisifs ne tombent pas malades de chagrin, voila 300,192 médecins qui vont rester les bras croisés.
[7] M. lattier, fabricant de peignes à tisser, en tous genres, qui demeurait montée des Carmélites, en face la Barrière de Fer, demeure actuellement rue vieille-monnaie, n. 2, au 2e, du côté de la Grande Côte. – Il tient un assortiment complet de peignes neufs et de rencontre, et fait des échanges. (18) Chansons par le citoyen kauffman. La première livraison vient de paraître : prix 50 c. : En vente au bureau du journal.
Notes (ÉPHÉMÉRIDES LÉGISLATIVES. C hambre des...)
Il s’agit sans doute de Martin Laffitte (1773-1840), frère de Jacques et député de la Seine-Inférieure, ainsi que de Marie Denis Larabit (1792-1876). Sont notamment cités Edouard Léonor Havin (1755-1829) et le Marquis Alexandre Marie de Grammont (1766-1841).
Notes (Nouvelles générales. paris . – Le numéro...)
Les troupes françaises rencontraient alors en Algérie une forte résistance, menée par Abd El-Kader (1807-1883). Le sort des villes d’Arzew et de Mostaganem était au centre des accords de paix signés le 24 février 1834.
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