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12 février 1832 - Numéro 16
 
 

 



 
 
    
ABUS DU MONTAGE DE MÉTIERS.1

(2me article.)

Nous allons exposer, comme nous l’avons dit dans notre précédent numéro, l’utilité des conventions entre le chef d’atelier et le négociant, toutes les fois que le premier est obligé d’acheter des harnais pour monter un genre d’étoffes nouveau. Ces conventions devraient être écrites sur le livret que le chef d’atelier garde par devers lui, et qui jusqu’à ce jour lui a été inutile. Là seraient spécifiés la durée de l’article, le prix et le montant de la façon de l’étoffe que le métier doit fabriquer, et dans le cas où le métier ne tisserait pas pour le montant consenti, on pourrait convenir qu’un défrayement de 10, 20 ou 30 pour cent, serait alloué au chef d’atelier selon la différence des sommes manquant au montant convenu ; l’on pourrait calculer ainsi : supposons que l’on ait acheté pour 100 fr. de harnais, qui après avoir servi quatre mois, ne valent plus que la somme de 50 fr.

Pour frais de montage : 20 fr.
Total : 70 fr.

Le métier devrait donc tisser pour 700 fr. ; ainsi, le 10 pour cent serait la base du défrayement, et dans le cas où le métier ne tisserait que pour 500 fr. de façons, le défrayement serait de 20 fr.

Dans le cas où le négociant ne pourrait s’engager à faire fabriquer que pour 400 fr., le prix de la façon devrait être portée au-dessus du cours, afin de couvrir les dépenses de l’ouvrier, et le défrayement pourrait être de 20 à 30 pour cent, lorsque les façons ne parviendraient pas à la somme convenue.

Je sais qu’une foule de questions s’élèveront à ce sujet, et que le négociant pourra accuser le chef d’atelier de lui causer des pertes s’il ne lui a pas fabriqué, dans le temps fixé pour la somme convenue entre eux, et voudrait lui refuser le défrayement, ce qui serait injuste, [3.2]car, lorsque le chef d’atelier, soit pour cause de maladie ou par manque d’ouvrier, ne peut rendre la fin des étoffes au jour fixé, il n’y a pas mauvaise foi ni subtilité de sa part, pas plus que de la part du négociant, lorsqu’il est pressé, et qu’il retarde l’ouvrier, en lui faisant attendre, et son dessin, sa pièce ou ses trames ; ainsi de part et d’autre il doit y avoir un mutuel sacrifice ou défrayement réciproque.

Un abus qui se rapporte au montage de métiers, qui devrait également cesser, et sur lequel quelques négocians spéculent en portant en compte d’argent des vieux peignes qui ont servi plusieurs années, et qui ne valent que 5 fr., au prix de 20 fr. comme s’ils étaient neufs, en obligeant les chefs d’ateliers de les garder à ce prix s’ils veulent avoir de l’ouvrage, abus auquel les chefs d’ateliers ne devraient plus consentir, puisque l’usage des premières maisons de Lyon est de prêter les peignes, et qu’ils se chargent d’en supporter les frais de réparation.

Je citerai à ce sujet un fait qui prouvera jusqu’où va la spéculation. Un marchand de métiers vendit à un négociant cinquante vieux peignes bien réparés, au prix de 3 fr. 50 cent. Le négociant les a tous vendus à ses ouvriers 7 fr., ayant bien soin d’en retenir le montant à la première pièce ; il est à remarquer que six mois après cette vente, qui était convenue au comptant, le marchand fut présenter sa facture, et le négociant voulait encore lui faire supporter un escompte de 6 pour cent, en disant que le comptant était un crédit d’un an, et que s’il ne voulait pas supporter cet escompte, il perdrait leur pratique. Ce que le marchand qui connaissait leur spéculation aima mieux.

Notes (ABUS DU MONTAGE DE MÉTIERS.)
1 L’auteur de ce texte est Joachim Falconnet d’après la Table de L’Echo de la Fabrique (numéros parus du 30 octobre 1831 au 30 décembre 1832).

 

 

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