Retour à l'accueil
12 octobre 1834 - Numéro 4
 

 




 
 
     

AVIS

AUX ABONNÉS DE L’ECHO DE LA FABRIQUE

et de lecho des travailleurs.

[1.1]La Tribune Prolétaire sera envoyée gratis à tous les Abonnés de l’Echo de la Fabrique et de 1’Echo des Travailleurs, pendant tout le temps non servi de leur abonnement à l’un ou à l’autre de ces journaux, à la charge par eux 1° de venir réclamer avant le 30 octobre courant ; 2° de payer un trimestre, qui prendra cours à l’expiration du précédent abonnement.

30  millions de prolétaires en france.

On a l’air de ne pas nous comprendre, lorsque nous parlons de l’exploitation de la majorité du peuple par une faible minorité, qui a le monopole des privilèges de la société sans en supporter les charges. On crie au scandale, lorsque nous affirmons qu’il n’y a, en réalité, rien de changé dans l’oppression du plus grand nombre par quelques-uns, et que les bourgeois et les prolétaires en 1834 sont absolument entr’eux dans les mêmes rapports que les nobles et les gens du tiers-état avant 89 : que les mêmes abus, les mêmes privilèges existent sous des noms différens ; qu’ils ont seulement été déplacés, et que ce déplacement les a rendus d’autant plus intolérables, que ceux-là, qui en profitent, n’ont pas le prestige de la naissance et la consécration du temps pour couvrir ce qu’ils ont d’odieux d’un vernis de légitimité.

Mais, où sont donc vos prolétaires ? nous répond-on avec un petit ton aigre-doux, qui déguise mal le dépit et l’embarras des hommes de la peur ; il n’y en a point en France ; tout le monde y est propriétaire. Il n’y a pas dans nos campagnes un seul homme laborieux qui ne possède au moins un coin de terre. Vos prolétaires ne sont que des paresseux, de la canaille, de la crapule, des chiffonniers, des forçats libérés, des vagabonds, comme dit fort poliment l’honorable M. Bugeaud1 et quelques autres de la même force. En déclamant contre l’égoïsme des bourgeois en faveur des prolétaires, vous prêchez la révolte, vous excitez au pillage, vous êtes en insurrection contre la propriété. Juste ciel ! anathème à vos doctrines, elles sont subversives de tout ordre social ; on voit, en les lisant, que vous n’appliquez l’expression de peuple qu’à la tourbe des grandes villes ; c’est là votre peuple unique, votre peuple par excellence. Votre popularité à laquelle vous tenez tant sera bientôt traînée dans la bouei.

Nos lecteurs n’attendent pas de nous que nous répondions à toutes ces sottises, à toutes ces calomnies ; à toutes ces turpitudes, que vont colportant de maison en maison certaines gens qui prennent sans doute pour des niais ceux à qui ils ont l’impudeur de les adresser. Mais nous devons, pour remplir la mission que nous nous sommes imposée, nous attacher surtout, dans le développement des doctrines [1.2]que nous avons entrepris de propager, à ne rien hasarder, à poser bien nettement les questions, et à faire voir la possibilité de trouver leur solution dans une réforme progressive, sans émeute ni violence. C’est par une discussion sérieuse, appuyée de preuves et de faits incontestables, que nous voulons démontrer l’exploitation du plus grand nombre par une minorité privilégiée, l’injustice et le danger d’un pareil état de choses, et la nécessité d’y apporter un prompt remède.

L’occasion nous est offerte d’autant plus belle que de jeunes économistes qui se sont livrés avec une ardeur infatigable à des recherches, des enquêtes, des examens sévères sur l’économie sociale, nous ont mis à même de profiter de leurs travaux. Tout récemment encore, l’un d’eux, qui enrichit les colonnes du National de ses excellens articles financiers, nous a fourni, en répondant à un discours que M. de Rambuteau2 avait lu à la chambre des députés, des documens précieux qui nous viendront merveilleusement en aide.

Disons d’abord que nous n’entendons point par prolétaire, le gueux, le mendiant, comme on affecte de le croire. Les prolétaires, pour nous, ce sont ces citoyens artistes, savans, industriels, médecins, avocats, ingénieurs, petits commerçans, artisans, ouvriers, commis, employés d’administration, tous hommes de travail, de science, de probité, de talent, qui ne trouvent dans l’organisation actuelle que peines et privations.

Niez-vous les effets déplorables et honteux de cet ordre de choses, que vous trouvez si admirable et que nous voulons changer ? jetez les yeux sur les renseignemens fournis par l’administration des finances elle-même ; voyez les résultats des rôles financiers de 1833. Près de 11 millions de cotes sont payées par cinq millions de propriétaires, quatre millions huit cent cinquante mille ne paient en impôt foncier que 136 fr. et au-dessous. Ces quatre millions huit cent cinquante mille propriétaires, chefs de famille, correspondent, d’après l’évaluation moyenne de 4 à 5 individus par famille, à 21 millions 825 mille individus : dix millions de français ne sont en aucune façon intéressés à la propriété foncière, soit par eux, soit par leur famille.

Voyez maintenant quelles sont les funestes conséquences de cet injuste système. La grande propriété, répartie entre cent cinquante mille familles, concentre dans ce cercle étroit tous les intérêts individuels qui s’opposent aux améliorations sociales, que l’intérêt bien entendu de 32 millions de français réclame impérieusement ; c’est elle qui a le monopole des lois, qui les discute, les applique, les exécute. Juge suprême, arbitre souverain de la répartition de l’impôt, elle ne demande directement au revenu net, qui est le sien, au revenu oisif, à celui qui est réalisé sur le produit de la terre en sus des bénéfices et des frais d’exploitation et qui s’élève à plus d’un milliard et demi, que 244 millions, (nous négligeons les fractions) et elle soutire indirectement 187 millions par les seuls impôts sur le sel, les boissons et les tabacs, qui pèsent presque exclusivement sur les classes laborieuses, sans compter l’impôt [2.1]immoral de la loterie, et tant d’autres que nous mentionnons pour mémoire. En sorte que le malheureux artisan, l’honnête père de famille, qui n’a que son salaire pour vivre, lui et les siens, est obligé de laisser prélever annuellement, par le fisc, sur le produit de son travail, déjà bien diminué par les maladies et les pertes de temps forcées, une somme de 26 fr. au moins, tandis que le propriétaire oisif ne verse au trésor par cent fr. de revenu net, de bénéfice sans travail, que 14 fr. 50 c. Et vous nommez cela de l’égalité devant la loi, de la justice distributive : et vous appelez cela, contribuer indistinctement dans la proportion de sa fortune aux charges de l’état ? Quel étrange abus des mots !

Ne serait-il pas plus juste de remplacer par une taxe proportionnelle au revenu foncier une capitation qui frappe indistinctement le riche et le pauvre, et celui-ci plus que celui-là ; de supprimer les impôts indirects, qui accablent les classes ouvrières, et de grever la contribution foncière d’une surtaxe légère, qui, en définitive ne serait onéreuse que pour les riches ; car les petits propriétaires eux-mêmes gagneraient à ce changement dans l’assiette de l’impôt, puisque la faible augmentation de 30 centimes additionnels par exemple, ajoutée à leur côte foncière serait bien inférieure au dégrèvement qu’ils obtiendraient par la suppression des impôts sur le sel, les boissons, les tabacs, qui coûtent annuellement à chaque famille de quatre à cinq individus (terme moyen quatre et demi) 25 fr. 87 c.


i. M. Bugeaud dans sa lettre au National.

Nous prions instamment nos abonnés de vouloir bien, s’ils ne sont pas servis exactement, nous en prévenir de suite.

D’UN REMÈDE PROPOSÉ PAR LE COURRIER DE LYON.

Il faut que les tisseurs quittent la ville de Lyon ; afin d’y conserver la fabrique ; voilà la conclusion d’un long article que le Courrier de Lyon a consacré à la question des salaires, dans son compte-rendu de l’exposition des produits des fabriques étrangères. A de telles paroles ne semble-t-il pas ouïr ces chirurgiens barbares et ignorans qui ne savent employer que le fer et le feu, sans daigner s’enquérir si la guérison ne pourrait être obtenue par des moyens plus doux.

Nous avons déjà traité la question de l’exportation de la fabrique d’étoffes de soie hors de la ville de Lyon, dans les numéros 15, 17 et 19 de l’Echo de la fabrique (année 1833) il serait fastidieux pour nos lecteurs, et pour nous de recommencer cette discussion. D’ailleurs elle serait oiseuse, nous avons à faire à des adversaires dont la majeure partie ne demande nullement à être convaincue ; et partant, eux et nous, de points diamétralement opposés pour arriver à un but totalement divergent, il est impossible que nous nous rencontrions dans la route. Si nous prenons la plume c’est moins pour convaincre des gens qui ne veulent pas l’être, encore moins pour rouvrir une discussion épuisée que pour éviter qu’on induise de notre silence un acquiescement quelconque à une doctrine erronée. C’est une protestation contre cette doctrine que nous consignons ici.

Nous ne dirons donc rien des désastres qui suivraient immédiatement la réussite du conseil insidieux que le Courrier de Lyon donne aux ouvriers. Diminution des loyers et par suite perte énorme sur la valeur des propriétés ; diminution de la consommation, et par suite perte également énorme sur la valeur des denrées et des marchandises de toute espèce, et par conséquent encore altération, disparition totale du crédit. Ce seraient là les maux immédiats produits par l’exportation de la fabrique. Bientôt Lyon descendrait du rang qu’elle occupe à celui d’une ville de troisième ordre. Peut-être ce malheur lui est-il réservé, l’histoire nous conserve le souvenir de cités jadis florissantes ! Aujourd’hui on cherche leurs ruines éparses dans les champs solitaires ; mais si nous ne pouvons prévoir une semblable catastrophe, nous devons comme citoyens, la déplorer et faire tout pour l’empêcher, ainsi qu’un bon fils fait tout pour retarder la mort de sa mère chérie. Nous avons déjà dit tout cela et avec de plus amples détails dans nos articles précités, auxquels nous renvoyons les lecteurs. Nous avons considéré encore cette exportation dans l’intérêt [2.2]de la France, dans celui des mœurs et dans celui de l’industrie. Nous ne nous répéterons pas. Il est vrai que nous avons été amenés à reconnaître, et c’est le seul point sur lequel nous sommes d’accord avec le Courrier de Lyon, qu’il est constant que l’ouvrier qui tisse des étoffes légères ne peut vivre en travaillant. Laissant de côté la question industrielle (nous nous en occuperons ailleurs) s’il serait possible d’élever ce salaire, nous nous bornions à chercher le remède et nous renvoyâmes les lecteurs à le trouver dans les articles raisonnés sur cette matière, du Précurseur, du National, de la Tribune . On connaît les motifs de notre discrétion : la politique nous est interdite et nous avons toujours eu soin de nous tenir dans la limite de nos droits. Nous aurons encore la même prudence.

Le Courrier de Lyon, revenant sur cette thèse et affectant de mettre en question ce qu’il comprend bien, nous dit avec une bonhomie apparente : si l’ouvrier ne peut pas vivre avec 4 sous, prix dont l’ouvrier de Zurich se contente, il faut qu’il aille chercher un lieu où les dépenses de la vie soient assez restreintes pour le lui permettre. Nous allons changer cette conclusion ; et nous dirons, qu’au lieu d’exiler cette classe, sous le prétexte qu’ici la vie lui est trop coûteuse, il faut, s’il est bien décidé qu’on ne puisse augmenter son salaire, diminuer ses charges, et rien n’est plus facile. Mais on le sent : et à quoi bon discuter ?

Derrière ce motif apparent, le Courrier de Lyon en a d’autres ; cette classe est nombreuse, elle inquiète, il faut la disséminer ; réunie, sa masse compacte, son indépendance en imposent ; divisée, chacun de ses membres sera livré pieds et poings liés à la cupidité, aux exigences tyranniques et l’exploitation du plus grand nombre par quelques-uns continuera de plus belle.

En face de ce résultat, qu’importe au Courrier de Lyon la perte d’une industrie, et les maux qui en découleront naturellement sur la cité et les autres classes d’habitans ! Pour nous, nous pensons que le remède serait pire que le mal ; nous ne voulons pas comme le Courrier, séparer la fabrique des fabricans. Nous savons bien encore que le beau idéal de la fabrique dans le système du Courrier, c’est l’agglomération de simples manouvriers sous la férule d’un contremaître vice-pacha. Nous n’adoptons ni l’une ni l’autre de ces combinaisons.

Sans doute il faut une amélioration à la classe ouvrière, mais nous ne chercherons jamais cette amélioration dans son émigration des lieux qui l’ont vu naître ; dans cet exil enfin qui nous rappelle trop comment les patriciens de l’antiquité se délivraient, en fondant des colonies lointaines, de la crainte que leur inspirait l’exubérance de la population prolétaire de ce temps-là. Nous ne la chercherons pas non plus dans son esclavage, lors même qu’un bien-être matériel apparent, en serait le fruit, ce fruit n’aurait aucune saveur pour nous. Nous avons horreur de la domesticité et du monopole. Anathème à ceux qui voudraient remplacer la glèbe agricole par la glèbe industrielle.

LE JOURNAL DU COMMERCE CONVERTI.

Eh ! voyez comme
Je me trompais !

Sur la foi du Précurseur, nous avions cru, et sans doute répété que le Journal du Commerce de Lyon, s’était livré corps et biens au ministère, et que ses inspirations s’élaboraient dans le cabinet de la préfecture ; plusieurs articles même depuis le changement de rédaction annoncé avec emphase, nous avaient confirmés dans cette idée. Nous devons reconnaître notre erreur et nous hâter de le dire, il n’est jamais trop tôt pour réparer une injustice. Le Journal du Commerce vient de proclamer son indépendance d’une manière neuve, originale. Il faut lui en savoir gré, car il y a du courage à se déclarer aussi franchement en faveur du droit d’association et de coalition, au moment même où le procureur du roi poursuit plusieurs chefs d’atelier, accusés de ce délit énorme… depuis quelque temps. Nous sommes étonnés qu’en ce moment même le Journal du Commerce ne soit pas saisi ; ses gérant, rédacteurs arrêtés, ou bien en liberté sous caution, puisqu’il est de jurisprudence qu’un homme vaut cinq cents francs, et que celui qui n’a pas 500 fr. disponibles, doit coucher en prison, apparemment pour avoir le temps de les gagner.

[3.1]Voici le fait honorable sur lequel nous appelons l’attention publique. Le Journal du Commerce dans son numéro de dimanche dernier, contient un article ainsi conçu :

soieries de lyon. – conseils aux fabricansi

Une des causes de la décadence de cette industrie nationale est le manque d’union entre ceux qui l’exploitent. L’égoïsme détruit la confiance qui devrait régner pleine et entière ; il empêche toute amélioration d’avoir lieu, chacun agit isolément, au hasard, sans direction, sans avoir de but fixe, si ce n’est celui de l’intérêt…

L’homme ne devient meilleur que par le contact obligé de ses semblables ; isolé il n’est capable de rien par lui-même ; en société il veut et peut de grandes choses. Le premier moyen c’est la cessation de l’esprit d’égoïsme et d’isolement dans lequel chacun se débat, etc.

Certes, voilà bien ce que nous pensons ; nous n’avons jamais dit autre chose, et ceux, qui fondèrent le mutuellisme, n’avaient pas d’autre but. D’ou vient, que l’on poursuit en ce moment même les chefs d’ateliers qui essayent, au dire de l’autorité, de le reconstituer ; et si par hasard le Journal du Commerce n’avait pas cessé d’être l’expression des sentimens de M. le préfet, que faudrait-il en conclure ? que c’est contre le gré du premier magistrat du département que le parquet veut faire exécuter la loi contre les associations, supposé qu’elle ait été enfreinte.

Après ce préambule digne d’éloges, le Journal du Commerce conseille aux fabricans de se réunir tous les deux mois en assemblée générale et tous les mois en assemblée particulière pour chaque genre de fabrication. Cette idée nous l’avions déjà émise en demandant l’établissement d’une bourse à l’usage, non-seulement des fabricans, mais des ouvriers de tout genre, pour servir de contrepoids à la bourse, dont les commerçans de toutes professions disposent seuls, ce qui établit en leur faveur un monopole odieux, puisque, par exemple, il leur est loisible de se réunir tous les jours à l’effet d’établir la hausse et la baisse sur le prix de la main-d’œuvre ce qui cependant nous paraît totalement identique. C’est avec plaisir que nous voyons cette idée reproduite par le Journal du Commerce. Comme on voit, il ne faut désespérer de rien. Nous traiterons plus amplement ce sujet, heureux de trouver un appui dans un collègue, en possession depuis si long-temps, de la faveur et de l’estime publique, et qu’on voyait avec peine passé dans les rangs des ennemis du peuple.


i. On appelle fabricans les ouvriers en soie, parce que ce sont eux qui fabriquent, et marchands-fabricans les négocians qui vendent les produits fabriqués.

AVIS SUR L’EXPOSITION
des produits des fabriques étrangères.

La chambre de Commerce a fait annoncer que cette exposition serait définitivement close mercredi prochain, 15 du courant.

Depuis le 6 de ce mois elle est ouverte, les lundi, mardi, mercredi et vendredi de 10 heures du matin à 2 heures de l’après-midi.

Nous voyons avec plaisir que la chambre de commerce s’est rendue, en ce qui touche la durée des séances, à l’observation que nous avions insérée dans notre premier numéro. S’il n’a pas été fait droit à notre demande, que l’ouverture eut lieu aussi les dimanches, il paraît que la chambre de Commerce a craint qu’on ne fit une visite de plaisir d’une exposition fondée dans un seul but d’utilité ; nous recevons la lettre suivante à ce sujet :

Au Rédacteur.

Lyon, 9 octobre 1834.

Monsieur ;

La chambre du commerce a fait droit aux nombreuses réclamations dont vous vous êtes rendu l’organe, et a consenti à ce que la fermeture de l’exposition publique des produits des fabriques étrangères, n’ait lieu qu’à deux heures, au lieu de midi. Mais elle n’a pas fait droit à votre demande que l’exposition fût ouverte le dimanche. Cependant la plupart des commis négocians et beaucoup de chefs d’atelier, ne peuvent disposer, dans la semaine, de leur temps, ils se trouveront par conséquent, privés de voir cette exposition. La chambre du commerce devrait donc proroger la clôture au premier novembre prochain, et admettre le public [3.2]les dimanche 19 et 26. Je vous soumets ces observations et vous prie d’en faire l’usage convenable.

J’ai l’honneur, etc.

didely

CONSEIL DES PRUD’HOMMES.

Séance du octobre 1834.

M. putinier, vice-président. Membres : MM. blanc, bourdon, chantre, cochet, jarnieux, labory, micoud, pellin, perret, roux, teissier, troubat, verrat.

Trente causes sont appelées, dont douze sur citation ; quatre ont été retirées du rôle, savoir : Deux sur citation et deux sur invitation. 3 jugemens par défaut ont été prononcés, dont 2 sur citation ; les autres causes ont été jugées contradictoirement, ou renvoyées en conciliation ou à une audience suivante. Du nombre de ces dernières, se trouve l’affaire Guigue, contre Coq, relative à l’indemnité d’un montage de métier de châles, indemnité déjà réglée et sur laquelle il paraîtrait que M. Roux, prud’homme négociant, voudrait revenir. Elle a été fixée à quinzaine. – Une autre affaire entre Ajac et Rosting, relative à une question de déroulage a été renvoyée à huitaine.

Les causes qui ont présenté de l’intérêt, sont les suivantes :

Le chef d’atelier qui ne peut représenter la disposition sur laquelle il prétend avoir monté un métier pour un négociant, a-t-il droit à l’indemnité lorsqu’un métier ne fabrique pas assez pour couvrir les frais de montage ? – Non.

Ainsi jugé, entre Pichon et Tholozan, Chavent et comp.

Dans cette cause, le sieur Tholozan s’est permis de dire au chef d’atelier : Vous en avez menti ! Il nous semble que M. le président qui a la police de l’audience, aurait dû le rappeler à l’ordre ; autrement cela autorise Pichon ou tout autre à se servir des mêmes expressions, et si le cas arrive, nous verrons quelle sera la conduite du président.

Les négocians ont-ils le droit de fixer des jours pour rendre les livrets qui leur sont confiés, en se fondant sur l’exemple de la caisse de prêt ? – Non.

Ainsi jugé, entre Sauvageot, fabricant, et Rivière négociant.

A défaut de convention écrite pour la durée de l’apprentissage, le conseil peut-il s’en rapporter au dire de l’une des parties même sans lui faire prêter serment ? – Oui. Ainsi jugé entre la veuve Million et la demoiselle Sublet, apprentie.

Lorsque par suite du décès de la femme du maître il n’y a plus que des jeunes gens dans l’atelier, une apprentie a-t-elle le droit de demander la résiliation de son engagement ? – Oui.

Si elle se trouve savoir travailler, doit-elle une indemnité ? – Oui.

Le conseil a-t-il le droit de fixer cette indemnité ? – Oui.

Ces trois questions résultent de la décision intervenue entre la demoiselle Barbier et le sieur Jacquemin. L’indemnité a été fixée à 50 fr., qui seront inscrits sur le livret que le sieur Jacquemin fera délivrer à la demoiselle Barbier, reconnue par lui en état de travailler.

L’aubergiste qui tient le livret d’un ouvrier, pour garantie de ce qui lui est dû, peut-il prendre en contravention le maître qui occupe cet ouvrier sans livret ? – Non.

Doit-il au contraire restituer le livret, sauf à se pourvoir en paiement de sa créance devant les juges compétens ? – Oui.

Ainsi jugé entre veuve Lot, Delorme et Magat.

Un fondeur qui occupe un apprenti ouvrier en soie, lequel n’a pas encore fini son temps, et par conséquent n’a pas de livret, est-il passible de dommages et intérêts envers le chef d’atelier ? – Oui.

Ainsi jugé entre Labory, fabricant, membre du conseili et Désiréii.


i. M. Labory siège toujours au conseil. Nous ignorons en vertu de quel titre. Il avait été désigné comme sortant lors du dernier roulement.
ii.  Le conseil des prud’hommes persiste dans sa jurisprudence ; cependant nous devons dire que les jugemens identiques qu’il a rendus au profit de Lyonnet, contre Charles, aubergiste ; de Masson, contre Manlius, cordier, ont été cassés par le tribunal de Commerce. En définitif les chefs d’atelier n’ont rien à gagner à cette insistance du conseil, puisqu’ils perdent leur procès en appel et sont par conséquent soumis à de grands frais. Nous examinerons cette question dans un prochain numéro.

prison de perrache.

[4.1]L’infortune qui devrait rapprocher les hommes, les aigrit très souvent au contraire et les éloigne au lieu de les porter à chercher des consolations dans un appui mutuel. C’est malheureusement ce qui était arrivé dans la prison de Perrache où tant de citoyens honorables, gémissent loin de leurs affaires et de leur famille, par suite des événemens d’avril. Nous avons le bonheur d’annoncer que ces dissentimens sont terminés. La commission dont nous avons fait connaître les membres dans notre dernier numéro, a donné sa démission ; l’ancienne commission a repris ses fonctions. Elle se compose des citoyens Beaune, Carrier, Jobely, Diano et Roussillac (Amédée).

Liste des Citoyens détenus préventivement à Lyon, à raison des événemens d’avril.

MM. Abeille, Aberjoux, Adam, Allemand, Arnaud, Baconnier, Balloffet, Bancaport, dlle Bartet, Bayard, Beaune, Bellin, Berard, Berthelier, Beuf, Bicon, Bille, Billy, Blanchon, Blaise, Blanc, Bourdon, Boyer, Brun, Bullet, Cachot, Carrier, Cathrin, Chapuis, Chardon, Charles, Charles (Simon), Charmy, Chauvel, Cheri, Cochet, Court, Darleande, Decœur, Defrance, Degly, Delorme, Derochetin, Desgarnier (Drigeard), Desiste, Despinasse, Diano, Dibier, Drevet, Duffet, Dugelay, Dumas, Durand, Escoffier, Favier, Fayard, Ferton, Frandon, Folliard aîné, Folliard cadet, Fontaine, Fournier, Fredière femme Ratignier, Gagnière, Garnet, Gauthier, Gayet, Gervaise, Gilles, Girard, Giraud, Gros, Gros (Antoine), dame Gros, femme Jomard, Guibaud, Heerr, Huguet, Jobely, Jollond, Jomard, Jourssaint, Lange, Laporte, Lasalle, Margot, Marher, Marignier, Marvaud, Mazille, Mazoyer, Mercier, Mercier (Claude), Meynier, Miciol, Millet, Minet, Mollard-Lefèvre, Mollon, Morlon, Moynat, Noir, Œuillet, Ollagnier, Paillaud, Paillaud (Jean), Paillet, Paul, Payrard (L’abbé), Petavy, Pichat, Pigeol, Poulard, Pradel, Raggio, Raison, Ramondety, Ratignier, Rabichon, Regnier, Reichsteiner, Rey, Rhenat, Ribollet, Rocaty, Roczinski, Rolland, Rousset, Roussillac (Amédée), Roux, Sabathier, Salliet, Séchand, Sibille, Tesseyre, Thion, Thivert, Tournier, Verpillat, Villard, Villermoz, Vincent, Vincent (Edouard), Vourpe. Total 143.

Nota. Nous donnerons dans un prochain Numéro, la liste des citoyens détenus dans la prison de Roanne, par suite des mêmes événemens.

UN PRÊTRE ET UNE JEUNE FILLE.

La Sentinelle des Pyrénées cite un trait affreux de lasciveté du desservant de la paroisse d’une des communes des Hautes-Pyrénées, qui a eu lieu le 14 août dernier.

Une jeune fille devait se marier quelques jours après ; elle alla suivant l’usage, se confesser à ce prêtre, dont l’immoralité avait été cachée jusque-là. Abusant de son ministère sacré, cet indigne lévite la renvoya au lendemain, et la jeune fille sans défiance fut fidèle au rendez-vous. Le prêtre luxurieux la fit entrer dans la sacristie, sous un prétexte ; et l’ayant fait mettre à genoux, lui releva les jupes [4.2]sur la tête, et la maintenant, avec force dans cette position, la flagella cruellement avec un martinet à larges et lourdes lanières. Honteuse d’un pareil supplice, la victime ne voulut d’abord rien dire, mais ayant ensuite avoué à ses parens ce qui s’était passé, plainte a été rendue. La Sentinelle1 ajoute que le parquet si prompt ordinairement à faire des poursuites oiseuses aurait gardé un coupable silence. Si cela est, la publicité donnée à ce fait par la presse vigilante sauvegarde de tous, forcera le ministère public à remplir son devoir et à livrer aux tribunaux le sacrilège tonsuré.

UNE PHRASE ROMANTIQUE.

« L’Allemagne est un bien beau pays s’écria l’un des deux jeunes gens nommés Prosper Magnan, à l’instant où il entrevit les maisons peintes d’Andernach, pressées comme des œufs dans un panier, mais séparées par des arbres, par des jardins et des fleurs, etc. »

Cette phrase, est extraite textuellement des nouveaux contes philosophiques, par BALZAC (t. 2, p. 194.)1. Que vous en semble lecteurs ! des maisons pressées comme des œufs dans un panier, et qui sont séparées par des arbres, etc. Nous ne saurions trop, dans un siècle où le goût de la lecture est si fortement prononcé et fait concevoir tant d’espérances pour l’émancipation de la classe prolétaire, prémunir cette classe encore ignorante des véritables beautés du langage, contre de telles aberrations, et recommander aux ouvriers, soit dans leurs discours, soit dans leurs écrits, un style simple et naïf ; ils peuvent voir, par la citation qui précède, combien un homme, même de génie, peut s’égarer à son insu lorsqu’il veut affecter un langage recherché et prétentieux.

LECTURES PROLÉTAIRES.

Hommes ! apprenez à ne pas même battre un animal et à ne point détruire l’insecte qui rampe à vos pieds, sans une raison suffisante, qui puisse vous justifier au tribunal de l’équité. d’erllach. Code du bonheur.

Comptez chacun de vos jours par des plaisirs, des amours, des trésors, des grandeurs, le dernier les accusera tous de vanité. bernardin st-pierre.

Des hommes assemblés les décrets sont suprêmes,
Ils peuvent annuler ce qu’ils ont fait eux-mêmes.
Le pacte social, ainsi recommencé,
Ne permet plus aux rois d’alléguer le passé.
Mme stael.

CANCANS.

La plus touchante harmonie continue de régner entre les autorités de Lyon ; de temps à autre le préfet casse les arrêtés du maire, mais qué que ça fait 

Par ordonnance de la mairie, il est défendu aux charretiers de tirer les yeux des citoyens. Il n’y a point encore d’ordonnance qui défende de leur jeter de la poudre aux yeux.

M. leroy vient de défendre toute espèce de chants ou tapages nocturnes. C’est pour mieux endormir les Lyonnais.

CONSULTATIONS GRATUITES,
sur toutes espèces d’affaires,
au bureau de la
tribune prolétaire
Tous les lundis de 1 à 3 heures.

BIBLIOTHÈQUE POPULAIRE,
120 Volumes à 30 centimes.
Cet important ouvrage est complètement terminé. Le dépôt est toujours chez M. FALCONNET, rue Tholozan, n. 6. – On peut s’adresser au bureau du journal. (5-1)

Notes (30  millions de prolétaires en france.)
1 Référence encore à Thomas-Robert Bugeaud (1784-1849) dont le nom était désormais associé aux massacres de la rue Transnonain.
2 Il s’agit  ici de Claude-Philibert Barthelot de Rambuteau (1781-1869).

Notes (UN PRÊTRE ET UNE JEUNE FILLE.)
1 La sentinelle des Pyrénées. Journal de Bayonne et de la péninsule, politique, commercial, littéraire et maritime, auparavant Sentinelle de Bayonne, publié depuis 1831

Notes (UNE PHRASE ROMANTIQUE. « L’ Allemagne est...)
1 Les Nouveaux contes philosophiques d’Honoré de Balzac, publiés à Paris en 1832.

 

 

Contrat Creative Commons

LODEL : Logiciel d'édition électronique