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19 octobre 1834 - Numéro 5
 

 




 
 
     
exposition publique et gratuite

DES PRODUITS DES FABRIQUES ÉTRANGÈRES,

Au palais saint-pierre.

Suite. – V. les nos 2 et 3.

[1.1]Nous continuons notre revue des produits de la Prusse-Rhénane et de l’ancienne Prusse. Les articles d’Elberfeld et de Barmen, sont mélangés et imprimés. Ils sont tous de mauvais goût soit pour la fabrication soit pour l’impression. On ne saurait voir rien de plus cher que le n° 62, coté à 79 fr. 30 c. la 12e sans escompte. Le n° 60 comprend une 12e de foulards cotés 54 f. 50 c., sans escompte. Les foulards qu’on fabrique maintenant à Lyon sont préférables sous tous les rapports ; le n° 61 se compose d’une 12e mouchoirs soie façonnés, dits Brillantine ; ils sont absolument calqués sur ceux qui se fabriquaient à Lyon, il y a 4 ou 5 ans. Ils sont cotés 50 f. 40 c., toujours sans escompte. Tous ces différens mouchoirs sont vieux et très chers. Si l’on voulait fabriquer à Lyon de la mauvaise marchandise, il ne serait pas difficile de soutenir la concurrence et de livrer au-dessous de ce prix. Il est vrai que ces mouchoirs n’ont pas été achetés en fabrique mais à la foire de Leipsick. En définitif, et sauf les entraves que les douanes prussiennes peuvent apporter à l’introduction des mouchoirs fabriqués à Lyon, nous ne voyons pas comment Elberfeld et Barmen pourraient écouler leurs produits.

Voyons maintenant les articles de Berlin, Gleissen, Zullichau, Brandebourg et autres villes de l’ancienne Prusse. Une seule pièce, Gros-de-Berlin façonné, figure à l’exposition ; les autres articles sont des peluches pour chapeaux de différens genres et réductions.

Le Gros-de-Berlin façonné, n’est autre qu’une copie des nôtres, il est coté 4 f. 50 c. l’aune sans escompte. Nous ne pouvons en dire ni beaucoup de bien ni beaucoup de mal.

Les dix pièces de peluches cotés n° 64 à 73, sont dans les prix de 3 fr. 17 c. à 6 f. 60 c. sans escompte. Elles n’ont toutes que 21 pouces et demi à 22 de large. Celles de Lyon ont ordinairement 24 pouces. Les n° 64, 65, 69 et 70 ne passent pas 3 fr. 69 c., ils sont donc très bas comparativement aux nôtres ; mais si l’on considère le peu de soie employée pour la chaîne, environ 30 fils au pouce de poils d’une grosse soie dont la teinture est l’unique préparation, passés sur des fers très hauts, et la réduction qui est de 9 à 10 au pouce, on ne sera plus étonné de la différence des prix : si Lyon ne fabrique pas de semblables peluches c’est que les négocians ont désespéré d’en avoir le placement. Qu’est-ce donc qu’une concurrence qui ne porte pas sur les salaires, comme on le crie chaque jour par dessus les toits, mais bien sur l’infériorité des matières et de la fabrication.

Quelques pièces de peluches sont cependant un peu plus [1.2]réduites avec un poil de hauteur ordinaire, aussi les prix en sont-ils plus élevés et se rapprochent-ils davantage des nôtres. Elles sont cotées 4 fr. 75 c. et exposées sous le n° 67. Deux autres pièces dites peluches rases, sont assez belles et quoique inférieures à celles de nos fabriques, paraissent meilleur marché que les nôtres, car ce n’est qu’à mérite à peu près égal qu’une chose peut être meilleur marché qu’une autre. L’une d’entr’elles, n° 73 est fixée à 6 f.60 c. ; l’on doit remarquer d’abord la différence de largeur, environ deux pouces et demi, et ensuite l’aunage, car nous doutons que l’aune prussienne ait 120 centimètres. Nous sommes obligés de n’exprimer qu’un doute, la chambre du commerce ayant négligé de donner à cet égard une instruction précise, ce qu’elle réparera, sans doute, dans le compte-rendu de l’exposition, que probablement elle publiera pour couronner dignement son œuvre patriotique. En l’absence de ce document, il nous est impossible de préciser s’il y a réellement baisse réelle dans le prix.

C’est ici le lieu de consigner une observation sur la fabrication des peluches, à Lyon. L’on est parvenu par un procédé mécanique à tisser à la fois deux pièces de peluches, et l’on est dispensé, non-seulement, de passer des fers, mais encore de couper le poil. Ce mécanisme, que deux négocians auxquels il appartient, ont mis en activité, est susceptible d’améliorations, car tel qu’il est, il est trop pénible à mouvoir et plusieurs ouvriers ont été forcés de ne pas l’employer. Aussitôt que ces améliorations seront obtenues, nous croyons qu’il sera difficile à aucune fabrique étrangère de rivaliser avec celle de Lyon, pour cet article ; il ne sera pas besoin de réduire le prix de la main-d’œuvre, ce remède banal des négocians. En effet, par une comparaison qu’il est permis de faire, nous dirons que l’aune de peluche de Berlin, réduite à 10 fers ou passées au pouce, payée à un fr., est encore payée davantage que l’aune de peluche de Lyon, payée même trois francs, mais dont la réduction est de 26 à 27 fers au pouce, et dont le compte de chaîne est double.

Un coup d’œil maintenant sur les châles de Vienne (Autriche).

Le n° 74 est un châle 5/4 couleur mode, du prix de 16 fr. 12 c. sans escompte. Nous ferons remarquer que le lancé du dessin est entièrement coton, et que par conséquent les acheteurs en trouveront s’ils en veulent de ce genre, dans nos fabriques, tant qu’ils en voudront, à un prix au-dessous et avec des dessins de meilleur goût. Le n° 75, châle 5/4 fond vert, dit Thibet, coté au prix de 37 f. 34 c., nous paraît également d’un prix plus élevé que le cours actuel. La fabrication est soignée mais le dessin n’est pas flatteur. Si nous examinons encore les n° 76, 77, 78 également Thibet lancé 3/4 coton, le reste fantaisie, nous n’y voyons qu’une fabrication passable et de mauvais dessins mal découpés. Les prix sont tous cotés au-dessus de ceux de notre place. Voyons encore le n° 79, châle fond noir, coton et fantaisie, 4 lats et 4 fils au maillon ; ce châle passerait dans [2.1]nos fabriques pour un rossignol et on ne le vendrait certainement pas 52 fr. 92 c., prix auquel il est porté. Le n° 80 est un châle long, laine et lancé, coton aux trois quarts : c’est encore un rossignol coté 40 f. 74 c. Enfin le n° 81, le plus riche de tous, est un châle long noir, Thibet, monté 4 fils au maillon, lancé par trois lats coton et deux lais thibet. La fabrication est passable ; le prix est coté 129 fr. 7 c. sans escompte.

Faisons observer dès à présent que l’usage de la fabrique de Lyon étant d’accorder escompte de 12 % il est juste d’ajouter le montant de cet escompte aux produits des fabriques étrangères. Ainsi l’escompte sur ce dernier article étant ajouté, en porte le prix à 145 f. 7 c.

La chambre du commerce attribue la concurrence de Vienne sur l’article châle de laine à l’égard des fabriques de Lyon et de Nîmes, au bas prix des matières, qui permet de livrer à meilleur marché. Nous avons à nous rendre compte de ce fait qui nous paraît étrange. Le coton qui est la matière principale, n’est-il pas aussi bon marché à Lyon qu’à Vienne ? Lyon doit être mieux approvisionné en matières fantaisie, crestantin ; il n’y a que les laines dont Vienne puisse être fourni à un prix moins élevé, mais il entre fort peu de cette matière dans les châles ; et nous pouvons assurer que le prix de la façon y est plus élevé. C’est donc à une autre cause qu’à la concurrence autrichienne qu’il faut attribuer la stagnation de la fabrique lyonnaise, dans ce genre. Stagnation vraiment effrayante et nullement en rapport avec celle qui frappe les autres articles. Nous croyons trouver cette cause dans une exubérance de fabrication. Depuis deux ans, un grand nombre d’ouvriers manquant d’ouvrages sur d’autres genres se sont portés sur celui-ci, et l’ont encombré. La fabrication a surpassé la consommation, de là une réaction déplorable qui se fait sentir aujourd’hui.

(La suite au prochain numéro.)

sur notre dernier article.

LE JOURNAL DU COMMERCE CONVERTI.

Ce n’est pas sans raison que l’ancienne basoche avait pour maxime : Il faut lire jusque sous le tiret. C’est pour l’avoir oubliée que nous nous sommes trompés grossièrement, et par suite avons induit les lecteurs confians dans une bien grave erreur. Le Journal du Commerce n’est nullement converti ; et si nous en croyons certains rapports, il n’y songe même pas, il veut mourir dans l’impénitence finale. Bien grand a été notre désappointement et courte la joie que nous avions ressentie. Mais aussi nous étions bien imprudents de croire à une conversion tellement subite. Quoiqu’il en soit, la cause de notre erreur est celle-ci : la fabrique de Lyon se compose de diverses professions, notamment : commissionnaires, ceux qui achètent en gros et expédient à l’étranger ; marchands, ceux qui font fabriquer pour vendre en gros ou en détail, ; ceux-ci, en style légal, on les appelle marchands-fabricans ; et enfin fabricans, les chefs d’atelier qui, soit par eux-mêmes, soit par leurs compagnons, fabriquent les étoffes. Il semble qu’aucune équivoque n’est possible, et cependant ce monstre hermaphrodite, dont Boileau1 a dit avec juste raison :

Parlons des maux sans fin que ton sens de travers,
Source de toute erreur, sème dans l’univers.

L’équivoque est venue causer un énorme imbroglio. Le Journal du Commerce usant d’une figure de rhétorique qu’on appelle syncope (ce dont il aurait dû nous prévenir), s’est plu à appeler fabricans les marchans qui ne fabriquent rien ; comment pouvions-nous le comprendre ? Nous avons cru que c’était aux ouvriers en soie que s’adressaient ses conseils. Il n’en est malheureusement rien du tout. S’adresser à des prolétaires. Fi donc ! le Journal du Commerce ne se mésallie pas ainsi, et c’est tout simplement aux marchands-fabricans, comme si la bourse ne leur suffisait pas, qu’il donne le conseil de se réunir tous les mois en assemblée particulière ; tous les deux mois en assemblée générale, de se cotiser, etc. Nous l’aurions vu si nous avions lu jusqu’au bout ; car dans un dernier alinéa, le journal [2.2]bien pensant invite les marchands à admettre dans leurs réunions quelques chefs d’atelier ou fabricans, sans doute ceux qui seraient bien sages.

Maintenant que nous avons réparé notre erreur, et qu’il reste bien entendu que c’est en faveur du commerce et non pas du travail que le journal dont s’agit sollicite le droit de se réunir, de, s’associer, de se coaliser, mots à peu près synonymes dans le fait ; nous lui demanderons et à ceux auxquels il sert d’organe si la même faculté sera accordée aux ouvriers, si la loi sera égale pour tous ; répond-on, oui, nous n’avons plus rien à dire ; si au contraire on avait l’outrecuidance de répondre que l’on ne peut pas concéder à la classe ouvrière une faculté dont on trouve bon de gratifier une classe rivale, oh ! alors nous n’aurions pas d’expressions assez outrageantes pour qualifier un pareil dévergondage, pour flétrir de tels principes d’égoïsme. Nous attendrons la réponse du Journal du Commerce, et cette fois il n’y aura pas d’équivoque. Il est mis aujourd’hui en demeure d’expliquer quel a été son but dans la publication d’un article par lequel il conseille une coalition permanente aux négocians, dans le moment même où l’autorité recherche si quelques ouvriers ont enfreint une prescription légale pour jouir d’un droit naturel.

ARRESTATIONS PRÉVENTIVES.

Et quand sur la paille infecte du cachot, le prévenu a dévoré son avoir, on le jette sur le pavé, en le menaçant de nouvelles poursuites s’il s’avise de gémir.
Jules favre. Anathème.

Combien de fois nous sommes-nous élevés contre la barbarie des arrestations préventives ? Nous avons eu même l’honneur de soutenir une polémique avec M. Chégaray ; mais après nous avoir concédé que la prudence du magistrat devait amender le vice de la loi, nous n’avons pas appris que le chef du parquet de Lyon ait accepté cette maxime pour règle de conduite. Encore dernièrement, onze citoyens paisibles ont dû leur liberté provisoire, non pas à une vie irréprochable, non pas à la garantie de quelques citoyens connus, ou bien à leur parole d’honneur de se représenter devant la Justice, mais à la consignation de 500 fr. Car il résulte du code pénal que 500 fr. valent mieux qu’une conduite irréprochable, que la garantie d’un ou de plusieurs citoyens, que la parole d’honneur d’un homme. Citerons-nous encore les nombreux citoyens emprisonnés à raison des événemens d’avril, et qui ont recouvert leur liberté après une détention de 2, 3, 4, 5 mois ? on nous accuserait de faire un appel aux passions politiques. Eh bien, en dehors de toute question irritante, nous rappellerons seulement trois exemples, qui prouveront le danger, l’injustice des arrestations préventives.

Un nommé Verrier, marchand mercier à Meaux, est arrêté à Paris comme étant un autre Verrier, forçat libéré, en surveillance à Rheims; il est resté plusieurs mois en prison ; au grand jour de l’audience, il a été reconnu innocent.

Une femme, Leroy, avait volé : on arrête son homonyme, la dame Leroy, et après 15 jours de détention, on rend cette dernière à sa famille.

Une marchande de fleurs avait commis une contravention, punie par la loi de 16 fr. d’amende ; elle est arrêtée, et retenue 20 jours en prison.

Pendant ce temps, et indépendamment des angoisses de la prison, que sont devenues les affaires commerciales de ces individus ? Une ruine complète n’a-t-elle pas pu en être la suite ?… Plus tard, la calomnie ne s’emparera-t-elle pas de ces faits ? Et un long cri d’effroi ne sortirait pas de nos poitrines !

C’est là la justice de la France au 19e siècle. Eh ! dites-nous, si celle des Cafres et des Hurons ne la vaut pas.

Dites-nous, hommes impartiaux, où est en France la sûreté pour le prolétaire ; l’homme qu’aucune illustration [3.1]ne distingue assez pour empêcher qu’on le confonde avec un autre.

Dites-nous qui effacera cette tache indélébile qui va peser sur ces trois individus, et que la malveillance d’un ennemi saura bien exploiter ? Ceux qui les ont vu arrêter, l’un comme forçat libéré, l’autre comme voleuse, l’autre en plein marché peut-être, comment sauront-ils qu’ils étaient innocens ?

Eh ! pourquoi ces arrestations préventives ? De crainte qu’un coupable échappe. Que vous importe, magistrats ? l’exil n’est-il donc plus une peine et une peine grave ?

Imitez bien plus plutôt la sagesse romaine. Lorsque le soleil était couché, le Préteur ouvrait les portes de la ville, afin que les coupables qu’il avait condamnés pendant le jour pussent à la faveur des ombres de la nuit, s’éloigner en silence et chercher ailleurs des pénates hospitaliers.

Et si vous n’avez pas cette vertu sublime, imitez au moins la Convention.

La Convention, qu’il faut toujours citer lorsqu’on veut rappeler les hommes au culte de ce qui est vertueux, magnanime, rendit un décret pour indemniser les victimes des erreurs judiciaires.

Où est ce décret ? Fouillez dans vos archives ! il n’a pas été abrogé : l’humanité, la justice le réclament.

FAILLITE VOUTHIER.

Saint-Etienne est en émoi par suite de cette faillite qu’on dit être frauduleuse et qui fait une grande sensation à Paris et à Lyon. Au lieu d’accepter franchement les chances du commerce, les marchands rubaniers de St-Etienne, dont la majeure partie se trouve compromis, ont imaginé d’établir d’autres conditions de vente que celles suivies jusqu’à ce jour, et de se lier par une association en d’autres termes de former une coalitioni. Nous recevons à ce sujet la lettre suivante :

Saint-Etienne, le 12 octobre 1834.

Depuis la faillite du sieur Vouthier fils, à Paris, messieurs nos fabricans de Saint-Etienne cherchent un moyen d’éviter de pareilles pertes, ou du moins le moyen de ne pas être dupés si facilement ; les mêmes hommes qui ont étouffé le progrès dans les associations industrielles, les mêmes qui réclamaient, il y a six ou huit mois, une liberté illimitée en faveur du commerce, les mêmes, dis-je, qui ne trouvaient, sans la liberté, pas de commerce possible, viennent aujourd’hui faire par écrit acte d’association.

Je ne vous donnerai pas le texte du pacte conclu, colporté et signé, mais je dirai qu’il y a association formelle, que les signataires seuls seront admis à pouvoir faire le commerce de fabrique, que grâce aux articles dudit traité, le fabricant récalcitrant ne pourra acheter de la matière chez aucun marchand de soie, attendu que ces derniers ne vendront qu’aux signataires du pacte d’association.

Les courtiers se trouvent aussi compris dans cette société, et pourtant ce sont des hommes qui ont un caractère public. Le traité contient encore d’autres articles : il stipule entre les acheteurs et les vendeurs des modes nouveaux de crédit et d’agio ; les commissionnaires acheteurs sont mis hors de cause quant à leurs correspondans.

[3.2]Une commission de trois membres et un président veillera à l’exécution dudit traité, le contrevenant paiera mille francs d’amende, n’importe l’article auquel il ait contrevenu.

Agréez, etc.

D.


i. Toute la presse s’est occupée de cette faillite scandaleuse et de l’association projetée par les négocians de Saint-Etienne. Pour être justes, nous devons dire que le Courrier de Lyon s’est élevé aussi dans son numéro de mardi dernier contre une mesure qu’on ne peut désigner autrement que par le mot de coalition ; mais est-ce par un sentiment d’équité ou pour ne pas encourir le reproche de contradiction ; ou bien encore parce qu’il juge impossibles à exécuter les moyens que veulent employer les moteurs de la coalition ; à vrai dire, il n’a discuté que ce dernier chef ; il s’est attaché seulement à prouver l’impossibilité : il a laissé la question de droit de côté ; il réserve sans doute sa colère et appellera la vindicte du pouvoir si quelques ouvriers viennent un jour ou l’autre se réfugier dans une association quelconque et lui demander la protection dont leur misère a besoin trop souvent.

BAZAR DE BIENFAISANCE

pour les détenus politiques.

Ce bazar, où l’on recevra en don les objets les plus minimes, est ouvert, rue Lanterne n° 5, au 1er, M. Jules Séguin est nommé président de la commission, et M. Jules Favre, secrétaire.

La vente des objets déposés aura lieu, aux enchères, le 1er novembre prochain.

Si l’on peut dire en vérité que la fabrique de Lyon est généralement languissante, il faut ajouter que celle qui a pour objet les châles est anéantie. Voici l’état fidèle du produit d’un métier 6/4 au quart, qui est celui reconnu le plus avantageux. Nous prenons pour base la journée ; on pourra faire ensuite toutes les multiplications qu’on voudra. La journée moyenne est de neuf mille passées. Le mille qui était payé, il y a quelque temps, 80 cent., ne l’est plus aujourd’hui que 55 cent. Ainsi,

9 000 à 55 cent. font 4 fr. 90 c. ; la ½ revient au compagnon, sur laquelle il est obligé de payer la ½ du salaire de son lanceur, soit 40 c., il lui reste 2 fr. 05 c., et au chef d’atelier 2 fr. 45 c.

Sur cette somme il faut déduire 1° l’autre moitié du salaire du lanceur : 40 c.

2° Entretien, usure des harnais, un montage par an, tordage, pliage des pièces, le tout évalué par jour, au plus bas à :80 c.

3° Canetage : 50 c.

4° Couchage du compagnon, du lanceur, prix pour tremper la soupe du lanceur et à la canetière : 20 c.

Total : 1 f. 90 c.

Reste : 55 c.

Cinquante-cinq centimes par jour, pour chaque métier. Mais ce n’est pas tout, il faut bien que le chef d’atelier paye son loyer, à raison de cent francs par croisée et demie emplacement nécessaire par chaque métier ; Il faut bien qu’il se nourrisse et sa famille ; ajoutons encore le chauffage, l’éclairage et l’entretien.

Nous consacrerons un article spécial à ce sujet ; que les parties intéressées, qui auraient des documens, veuillent bien nous les communiquer de suite.

Nous avons reçu du spirituel anonyme que nos lecteurs connaissent sous le nom de Solitaire du Mont-Sauvage, une lettre que nous regrettons de ne pouvoir insérer faute d’espace. Cet honorable industriel s’élève avec raison contre le trafic immoral et ruineux pour la fabrique, qu’on appelle piquage d’once. Il  propose, pour le faire cesser, d’inviter les négocians à régler à toutes les pièces, les avances ou solde des matières, d’en porter le montant à raison de 6 fr. 50 c. les 100 grammes, au compte d’argent ; et cela sans employer certaines formes plus ou moins rebutantes et que les chefs d’atelier ne méritent pas, comme de dire qu’ils paient deux fois leur soie, etc.

Nous livrons ce moyen à l’appréciation du public, en attendant que nous nous occupions d’une manière plus spéciale de cette question qui a déjà été traitée par l’un de nous dans le numéro 41 de l’Echo de la Fabrique (5 août 1832).

MONT-DE-PIÉTÉ.

Samedi prochain, 25 du courant et jours suivans, à quatre heures du soir, aura lieu dans le local ordinaire, la vente des effets mobiliers engagés pendant le mois de septembre 1833, c’est-à-dire, depuis et compris le N° 59511, jusques et compris le N° 66151.

CONSEIL DES PRUD’HOMMES.

Séance du 16 octobre 1834.

[4.1]Vice-président, M. putinier. Membres : MM. Arragon, Berthaud, Bender, Bourdon, Chantre, Cochet, Ferreol, Fichet, Gaillard, Joly, Labory, Milleron, Perret, Troubat, Wuarin.

Vingt-deux causes sont appelées, dont huit sur citation, ; trois sont arrachées entr’autres celles de Gandollière contre Briollet et de Guigue contre Coq ; cinq autres sont jugées par défaut. L’affaire Grimaud contre Damiron et relative à l’indemnité due pour montage de métier au quart, est de nouveau renvoyée ; les parties seront prévenues du jour où le conseil prononcera son jugement.

Les causes qui ont présenté de l’intérêt sont les suivantes :

Le fabricant de mouchoirs Marabout a-t-il droit à 15 grammes de tirelles comme le fabricant d’étoffes de soie ? – Non.

Jugé entre Gally, fabricant, et Réginer Degouttière, négocians.

Les conventions écrites sur le livre du chef d’atelier, postérieurement à l’ouvrage donné, font-elles foi en justice ? – Non.

Jugé entre Ajac, négociant, et Rostaing, fabricant.

Ajac avait un métier de bordures lancées chez Rostaing, et ce dernier avait déjà fait plusieurs pièces à deux coups sur le lat. Lors de la dernière pièce on diminua le mille de 5 c. et on le porta à 40 c. au lieu de 45 c.. Rostaing accepta, mais plusieurs jours, après on ajouta qu’il ne serait point donné de trame sans que le fabricant ait placé un déroulage, Rostaing s’y refusa à moins d’augmenter le prix de façon.

Le conseil est-il compétent pour condamner un maître scieur-de-long à payer les journées de son ouvrier ? – Non.

Jugé entre Perrol et Duher.

Dans notre prochain numéro, nous ferons quelques réflexions sur l’affaire Vial contre André. Il suffit de dire aujourd’hui que le jugement rendu le 2 du courant a été confirmé et avec raison à notre avis, car la première règle de la justice est d’être égale pour tous, pour le négociant comme pour le fabricant, pour ce dernier comme pour ses compagnons.

ECOLE GRATUITE DE LA MARTINIÈRE.

Les cours s’ouvriront le 3 novembre prochain. (Nous en donnerons le détail dans le prochain N°).

Les candidats doivent se faire inscrire avant et jusqu’au 25 octobre, inclusivement, au secrétariat de l’école, rue des Augustins, lequel est ouvert tous les jours, à l’exception des jeudis et jours fériés, depuis dix heures du matin jusqu’à une heure après-midi.

Les anciens élèves sont tenus de renouveler leur inscription.

Les candidats doivent être domiciliés dans le département du Rhône, être âgé de 10 ans au moins, jouir d’une constitution saine, savoir lire, écrire, les quatre premières règles de l’arithmétique ; ils auront à produire 1° leur acte de naissance ; 2° un certificat de vaccine ou de petite vérole ; 3° un certificat de bonne conduite, délivré par le chef de l’école primaire, où ils auront reçu la première instruction ; 4° une demande adressée à M. le directeur, signée par leur père, mère, ou tuteur.

Le sieur jacquet Gustave est disparu le 27 septembre dernier, du domicile de sa mère, rue Grenette, N° 3, à Lyon.

Signalement. Agé de 12 ans ; cheveux châtain foncé ; yeux gris ; bouche moyenne ; un signe au côté droit du cou.

Vêtement. Pantalon noir en circassienne, raccommodé aux genoux ; bas noirs ; chemise de calicot, marquée J. G.

Adressez les renseignemens à la préfecture du Rhône, division de la police.

Les citoyens prévenus d’avoir voulu reconstituer l’association mutuelliste, ont été acquittés vendredi dernier, par le tribunal de police [4.2]correctionnelle de Lyon. Ils étaient défendus, savoir : Favier, Valentin, Dufour, autre Dufour, Goupillon, Guillot et Grand par M. Jules Favre ; Gourd, Dumas et Michel par M. Desprès ; et Roussy par M. Sériziat.

NOUVELLES.

– russie. Cet empire n’a qu’une manufacture d’armes, établie à Toula. Cette ville vient d’être brûlée par les ouvriers eux-mêmes, mécontens des traitemens auxquels ils étaient soumis.

– grèce. L’île de Samos, bloqués par les Turcs, s’est soumise le 9 septembre ; 120 familles ont émigré à Négrepont.

– PARIS. Le pourvoi du Précurseur contre l’arrêt de la cour d’assises qui le condamne à trois mois de prison, a été rejeté le 8 de ce mois.

M. Arnold Scheffer1, l’un des gérans du National de 1834, condamné à 10 mois de prison, s’est constitué prisonnier le 6 octobre. Des trois gérans qui avaient fondé ce journal, deux sont en prison, et le troisième (M. Conseil) s’est noyé sur la Seine, à Rouen, où il était allé pour soutenir un procès politique. Il a été remplacé par M. A. Rouen. Le hasard fait de singuliers rapprochemens de noms.

– M. Jecker (Antoine) 2, mécanicien distingué, fabricant d’instrumens d’optique et de marine, vient de mourir.

– Boïeldieu (Adrien)3, compositeur célèbre, est mort le 9 du courant, à Jarssi, près Grosbois: il était né à Rouen, le 16 décembre 1775. L’opéra a fait relâche en signe de deuil.

– Le numéro de la Tribune du 11 octobre, a été saisi. Ce journal en est à son 102e procès.

– Le numéro du National du 4 octobre, a été aussi saisi, à raison d’une lettre de M. Armand Carrel.

M. Dieudé, gérant de la Quotidienne, a été condamné le 11 octobre à un an de prison et à 5 000 fr. d’amende.

LYON. L’un des soldats qui avait tiré, sans motif, un coup de fusil sur les détenus de Perrache, a été condamné à 15 jours de prison… On ne parle pas de l’autre.

Elections municipales. Elles auront lieu les 26 octobre, 2 et 6 novembre prochains.

– Monument Jacquard. Le total de la souscription s’élève aujourd’hui à 5 333 fr.

théâtres. Après beaucoup de pourparlers, M. Singier avait été nommé directeur ; il en avait reçu avis par le télégraphe, et était arrivé de suite à Lyon. Cette conclusion paraissait définitive, et les artistes s’en félicitaient, ainsi que le public ; cependant tout a été rompu, et M. Martin, beau-frère de M. Lecomte, a été nommé directeur.

CHARADE.

Mon premier de l’année est une fraction,

Mon second de bien boire eut toujours le renom,

Mon tout a dans juillet de l’occupation.

AVIS A LA FABRIQUE.

(8-1) Le sieur David, mécanicien, place Croix-Paquet, voulant faire jouir la fabrique des avantages résultant de l’invention et du perfectionnement des mécaniques à dévider, et faire des canettes pour lesquelles il est breveté, vient de les établir à un prix très modéré. – Il fait des échanges et sert les acheteurs avec promptitude et sécurité pour eux. – Il construit aussi des mécaniques pour canettes seulement d’une très petite dimension, et il a pris un 4e brevet de perfectionnement.
Le sieur David prévient le public que toutes les mécaniques qui ne sortiraient pas de ses ateliers et qui seraient construites par les procédés par lui inventés ; (notamment l’arbre au centre comme premier moteur dans celles de forme ronde), seront confisquées et les contrefacteurs poursuivis, aussi qu’il l’a déjà fait à l’égard des sieurs Jaud, Belly, Deleigue et Bailly, et se propose de le faire contre quelques autres.

ANATHÈME
par jules favre, avocat,
Chez Babeuf, libraire, rue Saint-Dominique.

Notes (sur notre dernier article. LE JOURNAL DU...)
1 Tiré de la Satire XII du poète et critique  Nicolas Boileau-Despreaux (1636-1711).

Notes (NOUVELLES.)
1 Dirigé par Armand Carrel, Louis-Prosper Conseil et Arnold Scheffer (1795-1858), Le National de 1834 avait été lancé pour contourner l’interdiction faite au National, pour une durée de deux ans de rendre compte des débats judiciaires. Le National de 1834 fut toutefois immédiatement en procès.
2 François-Antoine Jecker (1765-1834) ingénieur et mécanicien français.
3 Référence au compositeur français François-Adrien Boieldieu (1775-1834).

 

 

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