|
2 novembre 1834 - Numéro 7 |
|
|
|
|
|
exposition publique et gratuiteDES PRODUITS DES FABRIQUES ÉTRANGÈRES, au palais saint-pierre. Suite. – V. les nos 2, 3 et 5. [1.1]Sous les numéros 80 bis et 81 bis, sont exposés deux châles dits bagdad, c’est un genre de fabrication importé par les Grecs d’Orient en Allemagne, et qui n’est pas connu en France. Ces châles, fabriqués avec du poil de chèvre grossier et qui ressemble à de la grosse laine, sont entièrement brochés ; ils offrent par la multiplicité des dessins un travail considérable, et nous ne pensons pas que Lyon pourrait avoir intérêt à établir une concurrence sur cet article, à moins de l’imiter en substituant le lancé découpé au broché, et alors on pourrait obtenir de grands avantages. angleterre. Les étoffes de ce pays ont eu la plus large part dans l’exposition, elles comptent pour près de moitié. Sur 160 articles numérotés et que l’on peut porter à 180 (bon nombre ayant été répétés sous les mêmes numéros), l’Angleterre en a fourni 85 ; 73, seulement sont numérotés. On peut les diviser en au moins trente genres différens ; ils sont les produits de quatre villes manufacturières : Londres, Manchester, Macclesfield et Norwichi. La quantité des métiers à tisser les étoffes soie, ainsi que celles mélangées soie et coton, soie et laine, ne s’élevait, en 1823, qu’à 5,005 ; on en évalue maintenant le nombre à 24,000. La Grande-Bretagne possède encore des fabriques d’étoffes de soie à Derby, à Congleton, à Jarmouth ; en Ecosse, à Paislay et à Glasgow; Coventry ne fabrique que des rubans, c’est le St-Etienne de l’Angleterre. Aucun produit de ces dernières n’est exposé. Quoique l’exposition soit maintenant close, nous n’en continuerons pas moins de citer les numéros des étoffes dont nous allons analyser la fabrication. Nous pensons faciliter ainsi les recherches de ceux de nos lecteurs qui ont visité l’exposition et de ceux qui en été privés, en se reportant à la notice publiée par la chambre de commerce. Les numéros 82, 90 et 90 bis sont des florences, largeur de ½ aune, appelées sarsenet. Ils sont cotés depuis 2 fr. 71 cent. jusqu’à 2 fr. 91 cent. et ½ (tous les articles anglais sont sans escompte et ont été achetés de 5 à 7 %, plus élevés qu’en fabriques). Ces pièces sont bien fabriquées, elles sont plus belles que celles du même genre de Zurich ; et s’il y a une différence notable dans les prix, [1.2]elle existe aussi dans la largeur de l’étoffe ; celles de Zurich n’ont que de 15 à 16 pouces, tandis que le sarsenet a de 20 à 22 pouces. Il se fabrique, comme nous l’avons dit, très peu de cet article, et pourtant ce ne serait pas la concurrence que nous aurions à redouter, parce que nous pourrions établir au même prix des étoffes semblables. Les numéros 88 et 89 présentent des étoffes légères et brillantes, dites persian, elles sont fabriquées avec une chaîne, poil soie grège, la trame est cuite et la réduction faible, leur poil paraît être tout au plus de 10 gr. l’aune, leur apprêt est très fort. Une pièce blanche est cotée 1 fr. 59 cent. l’aune, la seconde rose est du prix de 1 fr. 99 cent. Ce genre est inconnu à Lyon ; il s’en fabrique quelque peu dans la Picardie. Les gros-de-naples unis n’offrent rien de remarquable ; en général ils sont chers. Les gros-de- naples façonnés sont des étoffes dont le goût est passé à Lyon depuis quelques années. Une pièce satin façonné, portant le numéro 87, est belle ; mais des connaisseurs ont cru reconnaître le dessin et la fabrique qui l’a exploité. C’est une copie exacte de nos articles, qui est très chère au prix de 8 fr. 76 cent. Viennent ensuite quatre pièces palmyriennes pour robes, ces étoffes sont imprimées sur ½ aune de large, elles sont cotées 2 fr. 97 cent. l’aune, et inscrites sous le numéro 99. Ces étoffes palmyriennes sont composées d’une chaîne coton, mêlé de quelques filets ou bandes soie et trame soie ; tout le mérite de l’article est dans l’impression. Sous le numéro 101, on a pu voir sept autres robes palmyriennes, en ¾ de large. Ces étoffes se composent, les unes, d’une chaîne poil grège, filets cuits et trame coton ; les autres d’une chaîne coton parsemée de bandes soie et trame soie, quelques-unes offrent des jolis dessins et des impressions bien traitées ; la robe est cotée au prix de 29 fr. 99 cent. Il y a trois ou quatre ans que deux ou trois maisons ont fait fabriquer quelques articles semblables, il ne s’en fabrique plus maintenant. Nous ne pensons pas que ce soit la concurrence qui ait tué ce genre, mais bien la mode. Le numéro 102 est une robe chalis, au prix de 53 fr. 73 cent., sans escompte. Cette étoffe se compose d’une chaîne poil grège à filets cuits, et d’une trame de la plus belle laine, sur laquelle des couleurs vives d’un dessin de bon goût rendent cette étoffe flatteuse, ce serait un modèle si la maison Dépoully et Godemard n’était pas en possession, depuis quelques années, de traiter ce genre dans toute sa perfection. Les numéros 103 et 104 nommés châles satin imprimés, sont ce que nous nommons crêpons, le plus élevé est coté 6 fr. 55 cent. C’est très cher. Le numéro 105 offre des mouchoirs, dits barrège, tramés [2.1]coton et quadrillés, cotés 21 fr. 87 cent. la douzaine. Les numéros 107, 108 et 109, mouchoirs soie, sont cotés depuis le prix de 31 fr. 87 cent. jusqu’à celui de 40 fr. 62 cent. la douzaine. Quelques-uns sont très bien, mais ils sont très chers. Sous le numéro 110, on a pu voir une douzaine de cravates noires, à 14 fr. 69 cent. la douzaine. Ce n’est pas cher, mais c’est n’est pas portable. La trame est cuite sur une chaîne : grège ; malgré l’apprêt cela s’éraille au toucher. Le numéro 111 est le même genre, un peu mieux conditionné, au prix de 19 fr. 37 cent. la douzaine. Les numéros 112 jusqu’à 115, sont des brillantines, dont le goût et les dessins sont des copies des articles qui se fabriquaient, il y a trois ans, à Lyon, dont les prix sont tous proportionnellement plus élevés que ceux de nos fabriques. Le numéro 116 offre plusieurs mouchoirs remarquables : les mouchoirs sont unis et tissés avec de la soie montée façon grenadine, chaîne et trame, dans une réduction d’environ 50 fils au pouce ; c’est une belle toile soie qui serait très propre à recevoir l’impression. Ils ont 28 pouces carré, et sont cotés 51 fr. 97 cent. la douzaine. Cet article, d’une exécution simple, pourrait être livré à la vente bien au-dessous de ce prix. Nous le recommandons aux fabricans de nouveautés ; car quoique ce genre ne soit pas inconnu à Lyon, il s’en est peu fabriqué. Le numéro 118 se compose de deux mouchoirs unis, 3/4, façon crêpe de Chine. La trame est de la soie montée, et le crêpage est produit par un coup de soie montée à retord et passé tous les quatre coups. Ces mouchoirs font un fort joli effet ; ils sont cotés 8 fr. 55 cent. pièce. Le numéro 119, improprement appelé crêpe de Chine, est un foulard façonné avec impression. Ce mouchoir est coté 13 fr. 12 cent. Sous le numéro 120, sont deux mouchoirs crêpe de Chine, très légers, l’impression est bonne ; ils sont cotés 20 fr. pièce. Les numéros 122 et 123, nous offrent deux jolis mouchoirs crêpe de Chine, brodés avec de la soie montée, l’un, brodé sur un seul coin, a coûté 18 fr. 22 cent. ; le second, dont la broderie est plus considérable, est porté au prix de 54 fr. 30 cent. C’est très cher. Nous devons dire que depuis quelque temps, il ne se fait presque rien à Lyon de ce genre. Sous le numéro 126 est une pièce de sept mouchoirs foulards imprimés, à 8 fr. 29 cent. Ce n’est pas cher, mais c’est de la drogue, comme l’on n’oserait pas en fabriquer ici. Que l’on se figure une maigre chaîne d’une grège très serrée, avec une trame coton filé fin ; malgré un fort apprêt, on ne peut toucher ces mouchoirs sans mettre la chaîne entièrement à découvert. Cet article peut nous donner une idée de la rouerie anglaise. Sous les numéros 127, 128, 129 et 130, figurent plusieurs pièces par sept mouchoirs foulards ; quelques-unes ont la chaîne en poil grège seulement. Les numéros 129 et 130 sont assez bien conditionnés, le dernier est porté au prix de 39 fr. 37 cent., ou 5 fr. 76 cent. le mouchoir. C’est, on en conviendra facilement, très cher. L’Angleterre fabrique aussi des crêpes crêpés, dont deux pièces sous les numéros 131 et 132 ; ¼ de paquet crêpe noir 4/4, est côté à 187 fr. 50 cent. le paquet. Sous le nom de crêpe lisse sont exposées des gazes à tour anglais, tissées avec du poil grège très fin, chaîne et trame. Cet article ne se fait pas ici ; mais il est bien compensé par la fabrication de notre crêpe lisse ordinaire. Il est vrai que les matières qui y sont employées reviennent par la préparation du moulinage à un prix plus élevé que le grège, qui ne reçoit aucune préparation ; mais enfin le crêpe lisse français est supérieur, par sa qualité, au crêpe lisse anglais. Les numéros 137 et 138 présentent des mouchoirs gaze, dit gaze de Paris, à 10 fr. 62 cent., et à 13 fr. 12 cent. la douzaine. Ces mouchoirs s’emploient pour voile ; Lyon a renoncé à la fabrication de cet article, qui se compose de poil grège, chaîne et trame. Les environs de [2.2]Paris et quelques fabriques de la Picardie sont en possession de ce genre de travail et en fournissent la consommation française et étrangère, et rivalisent ainsi avec l’Angleterre. Sous le nom de popelines françaises, les numéros 142 et 143 offrent une étoffe dont la chaîne poil grège, avec tour anglais, est tramée laine ; le prix de la pièce, de 23 aunes et demie, est de 78 fr. 12 cent., c’est un article qui ne se fabrique plus, et dont il s’en est fort peu fait. Le numéro 144 indique trois châles laine et soie, à 6 fr. 87 cent. La vérité est qu’il n’y a point de laine dans ces châles ; la chaîne est une trame de l’espèce de celle que l’on emploie pour les foulards ; la trame est un coton monté ; le dessin est du plus mauvais goût, c’est un vrai rossignol. Enfin, sous le nom de crêpe zêbra, châles imitation, figurent quelques mouchoirs 6/4, chaîne et soie, tramés coton ondé, il y en a de 12, 15 et 16 fr. 87 cent., c’est encore ce que nous nommons vulgairement crépons, article dont la vogue est passée. Il en est à peu près de même des châles, dit damas, cotés à 7 fr. 50 cent. la pièce. Nous ne parlerons pas des articles damas laine, pour meubles, attendu que ce n’est pas un article de fabrication locale, non plus que des gilets coton et laine, qui ne peuvent présenter aucun intérêt pour notre fabrique. Dans un prochain numéro, nous présenterons un résumé de l’exposition.
i. Je ne cite point Spitafield, lieu où sont rassemblés les tissus de soie. Ce n’est aujourd’hui qu’un quartier de l’immense capitale de l’ Angleterre.
Dans notre dernier N° à l’article Ruine des fabricans de châles, nous n’avons porté, suivant l’usage que 250 jours de travail. On nous fait observer que le conseil en fixant à 9,000 passés la journée moyenne, a eu égard non, comme nous le pensions, au plus ou moins d’habileté des ouvriers, mais aux fêtes et chômages, et que pour que notre calcul soit exact, il faut porter à 300 le nombre des jours ouvrables ; il en résulte une augmentation de 110 f., laquelle ne change rien en définitif au tableau que nous avons présenté de l’état de détresse de cette industrie. – On meurt de faim aussi bien avec un sou qu’avec deux liards.
Avant de traiter selon notre promesse la question des contraventions exercées par les chefs d’atelier contre les personnes étrangères à leur industrie et qui occupent des apprentis sortis de chez eux sans avoir satisfait aux conditions de leur apprentissage ou fait résilier leurs conventions, nous croyons convenable de mettre sous les yeux des lecteurs le texte même de l’un des jugemens rendus par le tribunal de commerce de Lyon, sur cette question. Ce jugement semblable à celui rendu entre Charles et Lyonnet, a trait à l’affaire de Manlius, fabricant, contre Masson, cordier. En fait : Masson avait été condamné par jugement des prud’hommes du 21 novembre 1833, à payer 150 fr. de dommages intérêts, à Manliusi, pour avoir occupé sans livret Claude Revis, son apprenti. Le tribunal de commerce, sentant l’importance de cette cause, la mit en délibéré et rendit, le 4 avril dernier, le jugement suivant : Vidant le délibéré ; Considérant que les conseils des prud’hommes sont des juridictions spéciales et exceptionnelles, dont la compétence de chacune d’elles doit être déterminée par qui l’a instituée, et le genre d’industrie représenté dans chaque conseil ; qu’il suffit pour s’en convaincre, de lire les différentes ordonnances instituant les conseils existans et les attributions spéciales et différentes qui leur sont données ; que l’article 11 du décret du 11 juin 1809, sainement interprété ne laisse aucun doute à cet égard. Considérant que le décret du 18 mars 1806, portant : établissement d’un conseil de prud’homme à Lyon, porte : article premier, que ce conseil sera composé de négocians fabricans et de chefs d’atelier ; qu’évidemment il s’agit ici de l’industrie pour la soie, dans toutes ses variétés et dépendances directes, et pour la chapellerie, deux branches qui étaient et sont encore les industries dominantes et principales de la localité. [3.1]Considérant que si les termes généraux employés dans ladite ordonnance pouvaient prêter à une interprétation plus large, l’application faite depuis l’institution des prud’hommes à Lyon, détermine suffisamment les limites qui ne doivent pas être dépassées. Considérant qu’en effet ces deux industries seules sont appelées à participer aux élections des conseils des prud’hommes et à en faire partie. Considérant que si la loi réglementaire, relative aux manufactures, fabriques et ateliers, porte dans son Titre III, article 2, que nul individu, employant des ouvriers, ne pourra recevoir un apprenti sans congé d’acquit, sous peine de dommages intérêts. Cette disposition n’est évidemment applicable qu’aux chefs d’atelier d’une même industrie, ou des industries similaires, pour empêcher qu’un concurrent, dans, le but de nuire, puisse impunément suborner un apprenti dont le travail, alors qu’il commence à être instruit, doit dédommager son maître des peines et soins qu’il lui a prodigués pour apprendre son état. Considérant que si un chef d’atelier en recevant un ouvrier compagnon pour l’occuper dans son industrie, ne peut ignorer qu’il a fait un apprentissage puisque la qualité qu’il prend le lui indique et lui impose l’obligation de se conformer aux lois et réglemens sur la matière sous les peines de droit, il ne peut en être de même à l’égard de toute personne étrangère à l’industrie qu’il professe, l’occupant par un travail mensuel, qui n’exige aucun apprentissage, puisque alors rien ne met à même celui qui le reçoit de savoir si cet ouvrier commet un délit dont pourtant il serait puni comme complice. Considérant dans l’espèce, que Masson est cordier, que cette profession ne le rend pas justiciable du conseil des prud’hommes de Lyon, qu’il soutient que Revis s’est présenté chez lui sans lui faire connaître qu’il fût apprenti ouvrier pour les étoffes de soie, qu’il lui a demandé à être employé dans sa corderie, comme simple manœuvre, que le contraire n’est pas établi et que dans tous les cas ces deux industries n’ont aucune analogie. Par ces motifs, le tribunal jugeant en dernier ressort, dit et prononce, qu’ayant égard à l’incompétence proposée, il a été mal jugé, bien appelé, émendant décharge Masson des condamnations contre lui prononcées ordonne que la cause et les parties sont renvoyées devant les juges qui en doivent connaître.
i. Manlius avait précédemment fait constater contravention chez son collègue Bertrand et l’avait abandonnée, regardant ledit Bertrand insolvable.
CONSEIL DES PRUD’HOMMES.
Séance du 30 octobre 1834. Président, M. riboud ; membres : MM. Berthaud, Bourdon, Chantre, Dumas, Fichet, Gaillard, Jarpieux, Joly, Labory, Micoud, Milleron, Teissier, Wuarin. Vingt-quatre causes sont appelées, dont huit sur citation. Sur les seize causes venant par invitation, trois ont été arrachées ; trois jugées par défaut ; et trois autres renvoyées à huitaine. Sur les huit affaires venant par citation, une a été arrachée, une autre jugée par défaut, trois renvoyées à huitaine, et une à quinzaine. Les causes suivantes ont présenté de 1’intérêt. L’apprenti graveur doit-il fournir ses outils, ou si le maître lui les a fournis, en payer le prix sur son travail, après sa tâche ? – Oui. Ainsi jugé entre Levy et Jourdain. Le fabricant qui, dans un espace de trois mois et demi, n’a fait que 100 aunes, tandis que ses confrères en ont fait 300, pendant le même laps de temps, peut-il réclamer l’indemnité pour montage de métiers, au négociant qui cesse de faire travailler ? – Non. La circonstance que la femme du fabricant était malade, peut-elle être admise comme excuse ? – Non. Ainsi jugé entre Jusserando et Morié et compe. L’apprenti qui est frappé par son maître, a-t-il droit de demander la résiliation, sans indemnité, de ses conventions ? – Oui. Cet apprenti peut-il se replacer autrement qu’en la même qualité ? – Non. Ainsi jugé entre demoiselle Blaise et veuve Plantin. [3.2]Nous avons reçu de M. l’agent comptable de la caisse de prêts, la lettre suivante : Lyon, le 29 octobre 1834. Monsieur, J’ai lu l’avis qui m’est donné dans votre N° du 26 courant. De quelque part qu’ils viennent, les bons avis ne doivent pas être méprisés ; mais je dois vous dire que si je ne pense pas avoir jamais, dans l’exercice de mes fonctions, montré la morgue bureaucratique dont on me fait un reproche, j’ose affirmer qu’il est entièrement contre mon caractère d’insulter au malheur. J’attends de votre impartialité que vous voudrez bien insérer la présente réclamation dans votre plus prochain numéro. J’ai l’honneur de vous saluer. valançon.
LE COURRIER DE LYON OU LE JOURNAL CROCHET. Plusieurs de nos lecteurs nous ayant demandé l’explication du cancan inséré à ce sujet dans notre dernier numéro, nous devons leur raconter l’histoire qui y donne lieu. A l’époque récente du procès des mutuellistes accusés d’avoir voulu reconstituer cette société, des bruits alarmans courraient dans notre ville et à l’extérieur. Le Courrier de Lyon annonça avec une énormissime terreur qu’on avait trouvé des crochets en différens endroits. Une enquête eut lieu de par la mairie, il fallait bien guérir le journal bien pensant de ses craintes vraies ou chimériques. Et savez-vous ce qu’il en advint de l’enquête ?… On découvrit qu’un pharmacien avait fait poser ces fameux crochets pour maintenir des cadres contenant l’annonce des remèdes de son officine. Qui fut penaud ? le Courrier de Lyon, il a humblement avoué sa mésaventure, mais le sobriquet ne lui en est pas moins resté.
Le citoyen Desgarnier, détenu préventivement depuis le mois d’avril, se trouve obligé de liquider son commerce pour faire honneur à ses affaires et de quitter son magasin au 1er janvier prochain. Il prévient ses concitoyens qu’il cédera ses marchandises à 10 pour % au-dessous du cours. Il compte sur le bon souvenir de ses pratiques et sur le patriotisme des Lyonnais. (Voyez les annonces.)
VOILA LA QUESTION. L’académie du Gard (Nîmes), vient de mettre au concours pour 1835, la question suivante : « Indiquer un système d’amélioration du sort des ouvriers, en discuter avec soin les avantages et les inconvéniens, et préparer un mode d’exécution facile ; en un mot, créer une théorie et en régler la pratique. » Prix : une médaille d’or de 300 fr. Les mémoires, doivent être envoyés franc de port, avant le 1er juillet 1835, à M. Nicot1, secrét. perp. Honneur à l’académie du Gard qui non contente de signaler le mal en cherche le remède. Elle a compris combien est vaine la science qui n’a pas un but d’utilité ; elle appelle la littérature au secours de la morale. Que tous les hommes éclairés et philanthropes se hâtent de répondre à son appel ; de ce concert généreux, du choc des opinions, naîtra, peut-être, la lumière. Le prix est modique ; mais qu’importe un peu plus, un peu moins d’or, une récompensé bien plus noble, bien plus grande attend le vainqueur. Heureux celui qui remportera le prix ! Il aura bien mérité de l’humanité : la société lui devra sa conservation, car elle est menacée d’une dissolution prochaine, si le problème de l’amélioration du sort de la classe prolétaire n’est enfin résolu. C’est d’une académie obscure jusqu’alors, celle de Dijon que sortit, il y a près d’un siècle, cette autre question, fameuse, qui fut le prélude par lequel le divin jean-jacques2 s’annonça au monde. C’est encore d’une académie de province que sort cette question vitale de notre siècle. Puisse un autre jean-jacques surgir, et marchant loin des sentiers battus, mériter par un triomphe éclatant, et [4.1]juste une palme immortelle. Le peuple reconnaissant lui élèvera une statue de cent coudées de haut ; son nom sera dans l’histoire. Heureux encore ceux qui approcheront du but sans l’atteindre ; si leurs efforts ne sont pas couronnés du succès, ils auront fait preuve de bonne volonté et acte de présence dans les rangs des amis du peuple.
MÉMORIAL HISTORIQUE.
EXTÉRIEUR. allemagne. – Les Paroles d’un Croyant, de l’abbé La Mennais, traduites par M. Boezne1, ont été tirées à 30,000 exemplaires. suisse. – Le pont construit sur la Sarine à Fribourg, par M. Chaley, dont nous avons parlé dans le dernier numéro, a 900 pieds de long et s’appuie sur des rochers séparés par un abîme de 167 pieds de profondeur. INTÉRIEUR. paris, 21 octobre. – Le général Fornier d’Albe2 est mort à l’âge de 65 ans ; il était né à Nîmes. Id. – Un duel a eu lieu à Clignancourt, entre MM. Victor Bohain3, ancien gérant du Figaro, fondateur de l’Europe Littéraire, et M. Capo de Feuillide, l’un des rédacteurs de la Tribune. Ce dernier a été dangereusement blessé ; on espère le sauver. 28 octobre. – La cour d’assises a condamné à 10 ans de réclusion, M. Waltebaut, prévenu d’avoir dans un duel sans témoin, tenté d’assassiner M. Lethuillier. avranches. – Le Mont-St-Michel a été incendié et détruit complètement dans la nuit du 22 octobre, par suite d’un accident : les détenus politiques ont fait tous leurs efforts pour l’éteindre. Un seul gardien a péri. Les prisonniers ont été dirigés sur la maison centrale de Beaulieu. douai. – M. Lenglet4, président de la cour royale de cette ville, est décédé le 24 octobre : il était né à Arras, en 1756. C’est lui qui au conseil des anciens, à l’époque du 18 brumaire, dit au général Bonaparte : « Tu violes la constitution. » rouen. – L’inauguration de la statue de Pierre Corneille, a eu lieu le 19 octobre, en présence des autorités, de M. Lebrun5, directeur de l’Académie française et des délégués de la commission des auteurs à Paris. M. Alexandre Dumas a prononcé un discours remarquable. A cette fête assistaient les membres de la famille de Corneille, savoir : Mlle Jeanne-Marie Corneille, Corneille P. Alexis, inspecteur de l’Académie de Rouen, Joseph-Michel Corneille, empl. des contributions indirectes, à Paris, et P. Xavier Corneille, conservateur du dépôt des livres au ministère de l’intérieur. lyon. – La sixième liste au monument Jacquard, a été publiée dimanche dernier ; elle porte le montant total à 6,878 fr. – Des médailles d’argent ont été délivrées le 11 septembre dernier, par le ministre de l’intérieur ; nous avons remarqué parmi ceux qui en ont obtenu, les citoyens François Bouvier, Favre et Antoine Boudin, de notre ville, qui ont sauvé au péril de leur vie des individus qui se noyaient les 19 mai, 26 juin et 3 juillet 1834. – Une quatrième salle d’asile pour les enfans pauvres, de 2 à [?] ans, vient d’être ouverte rue Buisson, n° 5.
THÉÂTRES.
– grand théâtre. Ce soir, concert vocal et instrumental, au bénéfice de Mme Vadé-Bibre ; outre cette dame, On entendra MM. Artot, Lhuillier, Gustave Blès, Luigini. – M. Cremont dirigera l’orchestre. gymnase. – Incessamment les premières représentations de Judith et Holopherne, vaudeville en deux actes, par Theaulon; et les Deux Borgnes, vaudeville en un acte, par Cognard frères1.
CHARADE. Une voyelle fait justement mon premier, Avec moi, cher lecteur, vous faites mon dernier Et quelquefois la peur vous fait mon entier.
APOLOGUE.
[4.2]Un homme avait acquis un petit jardin. Il consulta ses amis pour savoir à quel genre de culture il le destinerait. Il faut, lui dit l’un, le remplir d’asperges ; un autre préféra des fleurs ; un troisième blâma et combattit le goût des premiers et proposa d’y semer d’autres graines. Je vous aime tous, mes amis, répondit, le propriétaire ; mon terrain ne sera pas cultivé selon vôtre goût exclusif, mais il s’y trouvera un peu de ce que chacun de vous désire. N’est-ce pas le moyen de satisfaire tous les goûts ?
CONSULTATIONS GRATUITES, sur toutes espèces d’affaires, au bureau de la tribune prolétaire Tous les lundis de 1 à 3 heures. Nous prions instamment nos abonnés de vouloir bien, s’ils ne sont pas servis exactement, nous en prévenir de suite. A VENDRE. (10-1) Trois ourdissoirs, quai de Retz, n° 48, au 4me. BAZAR LYONNAIS. (9-1) Galerie de l’Argue, nos 70 et 72. Toute espèce d’objets de quincaillerie, bimbeloterie, etc., à 10 pour % au-dessous du cours, pour cause de cessation de commerce. (6-1) LE PÈRE LACHAISE ou recueil de 150 dessins, au trait des principaux monumens de ce cimetière, avec échelles de proportion ; ouvrage in-4°, Jésus dessiné, lithographié et publié par QUAGLIA, peintre anciennement attaché à l’imp. Joséphine, et dont les miniatures ont obtenu la médaille d’or à l’exposition du Louvre (année 1814), à Paris, chez Quaglia, rue de Harlay-du-Palais, N° 2. – On n’expédiera cet ouvrage que d’après une lettre affranchie, contenant un bon de la poste, ou mandat sur Paris. – Prix, expédié franco, 12 fr. Parmi ces Mausolées on distinguera ceux des maréchaux Masséna, prince d’Essling ; Davout, prince d’Eckmühl ; Suchet, duc d’Albufera ; Lefebvre, duc de Dantzig ; Kellermann, duc de Valmy ; Macdonald, duc de Tarente ; Pérignon; Sérurier ; Lauriston ; ceux du duc Décrès; du général Foy général ; Fabre de la Martillière ; le général Frère ; le comte de Valence comte ; le comte d’Aboville ; le marquis de La Place ; Volnay; Bourke; Cambacérès; Regnaud de St-Jean-d’Angély ; Caulaincourt; Camille Jordan; Lanjuinais; Labédoyère; Lallemand; Daru; le baron de Mousseau ; le baron Denon ; Bailly de Crussol-d’Uzès; de St-Simon ; Saulx-Tavannes ; Greffulhe; G. Monge ; Frochot; Bellart Bellart ; le comte de Sèze ; la duchesse de Mazarin ; la duchesse de Bassano ; la comtesse Demidoff ; la baronne Gourgaud ; madame Blanchard ; ceux d’Héloïse et Abélard ; Molière; Lafontaine ; l’abbé Dellile abbé ; Boufflers; les peintres, David ; Girodet ; Dupaty ; Isabey; ceux de Talma ; mademoiselle Rancourt ; Méhul; Béclard; Roussilhe; Panckoncke; Laffitte; Malleu; Perregaud; Vigier ; etc., etc. ANATHEME, par jules favre, avocat, Chez Babeuf, libraire, rue Saint-Dominique. BIBLIOTHÈQUE POPULAIRE, Cet important ouvrage est complètement terminé. Le dépôt est toujours chez M. FALCONNET, rue Tholozan, n° 6. – On peut s’adresser au bureau du journal. (5-2)
Notes (VOILA LA QUESTION. L’académie du Gard (...)
Jean-Baptiste Pierre Nicot ( -1864), secrétaire perpétuel de l’Académie du Gard. Référence ici à la question posée par l’Académie de Dijon en 1750, « Si le rétablissement des sciences et des arts a contribué à épurer les mœurs ». Le concours fut remporté par Jean-Jacques Rousseau qui publia l’année suivante son Discours sur la science et les arts.
Notes (MÉMORIAL HISTORIQUE.)
Paroles d’un Croyant avait été traduit en allemand en 1834 par Ludwig Börne (1786-1837). Mention ici de Gaspar-Hilarion Fornier d’Albe (1768-1834). Référence à Victor Bohain (1805-1856) et de Jean-Gabriel Cappot (dit Capo de Feuillide), 1800-1863. Il s’agit d’Etienne-Gery Lenglet (1757-1834). Il s’agit ici du poète et académicien Pierre-Antoine Lebrun (1785-1873).
Notes (THÉÂTRES.)
Mention des vaudevilles d’Emmanuel Théaulon (1787-1841) ainsi que de Hyppolite Cogniard (1807-1882) et Théodore Cogniard (1806-1872).
|
|
|
|
|
|