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28 décembre 1834 - Numéro 15
 

 




 
 
     

PROCÈS DE LA TRIBUNE PROLÉTAIRE.

[1.1]Sur les appels joints du ministère public et de notre gérant, l?affaire de la Tribune Prolétaire s?est présentée vendredi dernier devant la chambre de la cour connaissant des appels en matière de police correctionnelle, composée de MM. Reyre président, Gautier de Coutance, Genevois, Gras, Populus et Sauzet. M. Sauzet a lu avec beaucoup d?impartialité son rapport. M. Nadaud a fait son réquisitoire moins, a-t-il dit, pour élever la peine du gérant, que contre le principe adopté par les premiers juges que les journaux n?ayant pas de cautionnement, pouvaient donner des nouvelles dites politiquesi. ? M. Jules Favre, qui nous a habitués aux prestiges de son éloquence, s?est encore surpassé. La cour a renvoyé à lundi la prononciation de l?arrêt.


i. Nous avons protesté et nous protestons encore contre cette assimilation des faits historiques aux nouvelles.

ÉLECTIONS DES MEMBRES DU

CONSEIL DES PRUD?HOMMES.

(section de soierie).

Nous allions faire part à nos lecteurs de notre étonnement de ne pas voir afficher la convocation des électeurs de la fabrique, pour remplacer les membres du conseil dont les fonctions expirent au 1er janvier prochain, lorsque nous avons eu connaissance de l?ordonnance du 21 décembre rendue sur le rapport de M. Duchâtel, ministre du commerce, dont le texte suit.

Art. 1er. Il sera procédé pour l?année 1835 à une réélection générale des membres composant le conseil des prud?hommes de la ville de Lyon. (Sect. de la soierie)

Art. 2. Pour la première année, un tirage au sort fait en séance du conseil des prud?hommes par le président de ce conseil, indiquera les quatre sections des chefs d?ateliers qui nommeront des titulaires et celles qui nommeront des suppléans.

Dans les renouvellemens successifs en fin d?année, la section qui aura nommé un titulaire le remplacera par un suppléant et réciproquement.

Art. 3. Les élections qui seront faites dans le courant de l?année pour remplacer des membres sortans, par décès, démissions ou autres causes, ne conféreront au nouveau membre que les pouvoirs et la durée des fonctions du membre sortant.

Art. 4. L?ordre de sortie et de renouvellement des membres du conseil sera à l?avenir ainsi qu?il suit.

A la fin de 1835, dans la classe des marchands-fabricans, 2 titulaires et 1 suppléant ; dans celle des chefs d?atelier, 1 titulaire et 1 suppléant. A la fin de 1836, dans celle des marchands, 1 titulaire et 2 suppléans ; dans celle des chefs d?ateliers, 2 titulaires et 2 suppléans. A la fin de 1837, 2 titulaires et 1 suppléant pour les marchans-fabricans, et 1 titulaire et 1 suppléant pour les chefs d?ateliers.

Art. 5. Pour les deux premières années, un tirage au sort fait en séance du conseil des prud?hommes, désignera l?ordre de sortie des membres du conseil, suivant le nombre qui vient d?être fixé. Dans le tirage au sort de la 2e année, on ne fera pas concourir les membres renouvelés de la 1re année ; à compter de la 3e année cet ordre sera réglé par l?ancienneté.

Art. 6. Après chaque renouvellement annuel, l?ordre de service des suppléans des deux classes sera réglé par la voie du sort.

Art. 7. Les dispositions de nos ordonnances précédentes auxquelles il n?est point dérogé par la présente, conserveront leur plein et entier effet.

[1.2]Cette ordonnance est précédée d?un rapport dont nous extrayons les passages suivans, seuls importans.

A la suite des circonstances extraordinaires qui ont agité la ville de Lyon, les ordonnances royales des 15 janvier 1832 et 21 juin 1833, ont apporté diverses modifications à l?organisation du conseil des prud?hommes de cette ville.

Le tirage au sort des titulaires et des suppléans prescrit par la dernière de ces ordonnances a présenté dans la pratique des difficultés qu?il importe de faire disparaître.

AFFAIRE BOFFERDING CONTRE GELOT ET FERRIÈRE.

Quoique dans notre dernier n° nous ayons rendu compte de cette affaire, son importance bien sentie par le conseil des prud?hommes qui a tenu pour la juger une audience extraordinaire, nous engage à y revenir.

En avril 1833, Gelot et Ferrière engagèrent Bofferding à monter pour eux deux métiers de schals 6/4 au ¼. Comme cela occasionnait une dépense de près de 1 500 fr., Bofferding n?y consentit que sous la condition, d?une convention par laquelle on s?engagerait à occuper pendant deux ans lesdits deux métiers. Cette convention fut écrite par MM. Gelot et Ferrière et signée le 19 avril 1833. Il ne fut rien stipulé quant à la nature du travail, mais il est évident que l?intention des parties était de fabriquer des schals. Cette convention fut exécutée de bonne foi pendant long-temps, mais il paraît que la stagnation du commerce et principalement de l?article chale sur lequel nous avons appelé l?attention des lecteurs dans les numéros 5 et 6 du journal, a déterminé MM. Gelot et Ferrière à se soustraire à l?exécution d?une convention devenue onéreuse pour eux. Laissons parler M. Bofferding, voici un extrait de sa plaidoirie devant le conseil. Nous insisterions moins sur la libre défense si tous les chefs d?atelier pouvaient s?exprimer ainsi ; elle ne serait plus qu?une question de principes.

« Chacun sait, messieurs, que depuis plusieurs mois les affaires en général sont en souffrance. Or il est advenu que MM. Gelot et Ferrière comme leurs confrères l?ont senti, et l?un d?eux ici présent, me déclara il y a quelque temps que son intention était de me faire renoncer à la convention. J?attachais peu d?importance à cette menace tant qu?elle fut sans effet ; pourtant le résultat ne se fit pas attendre ; d?abord par des chômages de pièces, de dessin et de matières, puis par la baisse rapide des façons, baisse trop précipitée par rapport aux autres maisons. Enfin le mois dernier il m?a été remis une pièce de quatre schals seulement. je fis une observation à cet égard. M. Ferrière me répondit qu?il devait changer de dessin et faire chiner une pièce qu?il devait mettre le même soir à l?ourdissage, et que tout cela n?étant pas prêt c?était pour occuper le métier en attendant ; je le crus. Mais arrivé au dernier schal je prévins le commis de ces messieurs qui me dit qu?on y penserait, et le lendemain matin six courant le même commis vint à la maison me dire qu?il fallait faire des changemens afin de remplacer les schals par des écharpes. Surpris de cet avertissement insolite, je répondis par un refus, mais d?après sa proposition d?aller au magasin, je m?y rendis. Ces messieurs me parlèrent encore de leurs écharpes et je refusais. M. Ferrière alors avec un ton d?aigreur mêlé d?emportement me dit : vous n?aurez point de pièce, vous m?irez chercher un billet de prud?hommes pour paraître, et quand il devrait m?en coûter 50 écus je veux que vous fassiez des écharpes. Aussi nous sommes comparus le 8 par-devant MM. Joly, Milleron et Dufour qui, après avoir pris connaissance de la convention, ont, par l?organe de M. Joly, demandé à M. Ferrière si c?était pour des châles 6/4 au ¼ que ladite convention avait été stipulée : question à laquelle ce dernier a répondu affirmativement. Ensuite nous fumes renvoyés en conciliation par-devant deux membres du Conseil, MM. Roux et Verrat. »

[2.1]Le sieur Bofferding raconte ensuite la conciliation qui fut proposée, acceptée par lui, mais refusée par MM. Ferrière et Gelot.

Bofferding consentait à faire les changemens nécessaires moyennant : 1° le remboursement de ses frais, 2° l?indemnité de ses journées perdues. C?est en cet état que la cause s?est présentée à l?audience du 18 décembre.

Après avoir ouï les parties, le conseil a renvoyé pour prononcer le jugement au samedi 20 décembre.

La question à juger était donc celle-ci.

Le fabricant qui a monté un métier de chals 6/4 en 1/4, en vertu d?une convention exécutée ainsi pendant près de deux ans, peut-il être contraint, moyennant le remboursement des frais à faire et le payement de ses journées perdues, à substituer un autre article ? ? Oui

Le conseil a prononcé en ces termes.

« Considérant que suivant l?esprit de l?article 1134 du code civil, les conventions passées entre les parties doivent être exécutées de bonne foi.

« Considérant que d?après les conventions que MM. G. et F. ont passées avec M. B., ils se sont engagés à occuper pendant deux années 2 métiers au quart et à payer au cours.

Considérant que d?après l?article 1159 du même code, lorsque la rédaction d?une convention est ambiguë, elle doit être interprétée suivant les usages du lieu où elle a été passée.

« Considérant qu?il est reconnu par un temps immémorial que la fabrication des articles façonnés étant soumise au régime de la mode et de la consommation, il ne peut pas entrer dans la conviction du conseil que MM. G. et F. se soient engagés à faire fabriquer pendant le délai de 2 années le même genre de chales, dans la même dimension et du même dessin.

« Considérant que l?article châle long dit écharpe se fabrique dans le même système du métier dénommé métier au quart.

« Considérant que ce changement offre des dépenses et du temps perdu au sieur Bofferding, que dès-lors, les sieurs G. et F. doivent l?indemniser de ses frais.

« Considérant que lorsque les sieurs G. et F. ont offert au sieur Bofferding les prix des chales longs ou écharpes, ils n?ont point offert de l?indemniser des frais du montage des métiers, ce qui a amené les parties devant le conseil et occasionné un délai de 3 journées de travail perdues sur chacun des métiers ; que MM. G. et F. doivent être passibles de ce temps perdu. « Par ces motifs le conseil dit et prononce.

1° que MM. G. et F. sont autorisés à placer les pièces de châles longs sur les deux métiers.

2° que les frais de montage des métiers seront supportés par les sieurs G. et F.

3° que les 3 journées perdues sur les deux métiers seront réglées à la somme de 30 fr. pour toute indemnité.

4° que si G. et F. ne se mettent pas d?accord avec B. sur les frais de montage des métiers et le prix des façons, le conseil sera appelé à régler l?incident.

« Dans le cas où le sieur Bofferding ne se soumettrait pas aux décisions ci-dessus, il encoura la déchéance de l?exécution de la convention ci-dessus mentionnée pour le délai à expirer, les frais du présent compensé. »

Nous admettons que le conseil avait, dans l?intérêt de la fabrique lequel ne saurait être de forcer un négociant à faire fabriquer à perte, le droit d?interpréter la convention passée entre Gelot et Ferrière et Bofferding, surtout dans la position ou ce dernier s?était volontairement placé en offrant de faire les changemens moyennant le remboursement de ses frais et pertes de temps ; mais nous ne pensons pas qu?il aurait eu ce droit si Bofferding s?était borné à demander l?exécution de sa convention ou la résiliation avec indemnité. Dans ce dernier cas, le conseil aurait dû, à notre avis, condamner MM. Gelot et Ferrière à une indemnité équivalente au bénéfice présumé des deux métiers pendant le temps restant à courir. L?article 1162 du code civil est formel à cet égard et sert de corollaire à l?article 1159.

Nous ne voyons pas sur quoi le conseil s?est fondé pour compenser les dépens. Rien dans la cause ne paraît susceptible d?avoir attiré cette rigueur, sauf Bofferding, et le dispositif même du jugement ne dit rien qui puisse le faire préjuger. Cependant c?est dans les considérans qu?on doit trouver les motifs du prononcé.

Il nous reste une réflexion plus grave encore à émettre : c?est que ce jugement est susceptible d?être annulé, par la faute soit du président soit du greffier qui devraient, il nous semble, veiller davantage à la composition du conseil. Il est de principe, et cela est naturel, que les juges seuls qui ont assisté aux plaidoiries concourent à la prononciation du jugement et signent le plumitif. C?est donc avec surprise que nous avons vu M. Dumas qui avait siégé à l?audience du 18, remplacé à celle du 20 par M. Labory. Nous devons espérer que le conseil ne s?exposera plus à rendre ainsi des jugemens radicalement nuls.

BANQUIERS ET PROLÉTAIRES.

[2.2]Nous n?avions pas cru convenable d?appeler l?attention publique sur les poursuites dirigées contre la société Bonnard Charpine et Ce, aussitôt que, par une coïncidence fatale, le Courrier de Lyoni1 l?eût comme qui dirait dénoncée ; mais les autres journaux n?ayant pas imité notre silence, nous ajouterons aux détails connus (l?appel de ces messieurs devant le juge d?instruction, le 28 octobre dernier) un on-dit que nous verrions démentir avec plaisir. On assure que le Procureur du Roi exige pour cesser ses poursuites que la nomination des gérans soit irrévocable et que le nombre des actionnaires soit restreint. Si cette prétention est vraie, il en sera facilement fait justice lorsque le ministère public persistant à voir une violation de la loi contre les associations dans une tentative de quelques chefs d?atelier et compagnons d?améliorer leur sort par la réunion de leurs travaux, traduira devant le tribunal de police correctionnelle la maison Bonnard Charpine et Ce. Indépendamment des moyens de fait et de droit que leur avocat saura faire valoir, nous croyons utile d?appeler l?attention sur un fait qui se passe en ce moment à Marseille (Voyez n° 9 Mémorial historique). Une banque d?escompte vient de se former dans cette ville ; trois mille actions de 1 000 fr. chaque sont mises, et sans doute elles sont placées ; car il est vrai de dire qu?un grand nombre de citoyens ont 1 000 fr. disponibles plutôt que d?autres 25 fr. Nous n?avons pas appris que le ministère public de Marseille ait fait appeler les fondateurs de cette banque et leur ait proposé, soit l?immutabilité des gérans, soit la réduction du nombre des actionnaires sous peine d?être poursuivis en vertu de la dernière loi sur les associations. Pourquoi donc la maison Bonnard et C° a-t-elle été inquiétée ? Est-ce que la justice aurait deux poids et deux mesures ? Nous ne le pensons pas, et nul doute, il sera permis aux prolétaires lyonnais de suivre l?exemple des banquiers marseillais.


i. Le Courrier de Lyon en insérant l?acte de société de cette maison dans ses annonces conformément à la loi, appela sur elle l?attention de ses lecteurs ; la poursuite du parquet ne se fit pas attendre ; autant en est arrivé à la Tribune Prolétaire. Le Courrier de Lyon joue de malheur ! Nous profiterons de cette occasion pour dire un mot du monopole qu?exerce le journal Crochet. Dans la dernière session, une loi a été rendue sur la proposition de M. J. Lefèvre en vertu de laquelle tous les actes de société doivent être insérés dans un ou deux journaux dont le choix a été laissé au tribunal de commerce. Cette loi est très sage, et nous voudrions que toutes les insertions judiciaires (ventes par autorité de justice, ouvertures d?ordres, de distributions, etc.) soient obligatoires dans un journal. La faculté laissée au tribunal de commerce d?en désigner deux est vicieuse à notre avis. On sent combien serait plus facile la recherche des insertions judiciaires dans un journal spécial et ad hoc ; un autre avantage en résulterait ; les journaux politiques et littéraires ne seraient plus, en quelque sorte, maculés par cette introduction de matières hétérogènes ; ils vivraient de leur vie propres et se soutiendraient par eux-mêmes. A Lyon, les Petites Affiches étaient la feuille convenable pour les insertions, cependant le tribunal de commerce a désigné le Courrier de Lyon et par là lui a accordé un fonds de subvention assuré que ses fondateurs n?avaient pas prévu, et qu?il ne doit pas au mérite de sa rédaction. Les autres journaux par un sentiment naturel de convenance n?ont rien dit, mais le but louable de la loi de débarrasser les journaux de matières insipides pour ceux qu?elles n?intéressent pas directement, n?a pas été atteint ; un monopole a été créé, c?est à nous de nous élever contre. Espérons que le tribunal de commerce lorsqu?il sera appelé de nouveau à faire un choix, se souviendra de nos réflexions présentées dans l?intérêt général et adoptera les Petites Affiches pour l?insertion des actes de société. Le tribunal civil sera amené à en faire autant pour toutes les insertions judiciaires. MM. les avoués qui reçoivent gratis le Courrier de Lyon recevront à la place les Petites Affiches, et ils ne perdront pas au change ; bien au contraire.

Fidèles à notre mission de recueillir tout ce qui peut être utile à la classe prolétaire, nous empruntons à un journal l?avis suivant :

On demande quelques jeunes filles de 12 à 15 ans, pour leur apprendre un genre de peinture très facile, qui peut les mettre à même de gagner en peu de mois plus de trois francs par jour.

S?adresser au bureau de la Mosaïque, rue Royale, n. 14.

Nous apprenons que le conseil des Prud?hommes va s?adresser au ministre pour obtenir qu?à l?exemple des autres tribunaux, les jugemens soient signés par le président et le greffier seulement. Cela nous paraît juste et être un acheminement à une réforme bien plus importante, l?admission de la libre défense.

CONSEIL DES PRUD?HOMMES

Séance du 24 décembre 1834.

[3.1]Président M. Riboud, Membres : MM. Berthaud, Blanc, Bourdon, Cochet, Gaillard, Joly, Labory, Milleron, Perret, Roddet, Roux, Wuarin.

Vingt causes sont appelées dont 3 sur citation ; deux sont renvoyées à huitaine ; 5 arrachées, deux jugées par défaut, une par congé-défaut (le demandeur ne s?étant pas présenté.)

Le fabricant qui a- reçu le livret d?un compagnon, est-il tenu de l?occuper sous peine de l?indemniser ? Oui.

Ainsi jugé entre Goy et Bechet. Ce dernier a été condamné à payer 9 fr. d?indemnité à Goy.

L?apprenti qui ne finit pas son temps, est-il passible de l?indemnité stipulée dans la convention et ne peut-il se replacer que comme apprenti ? Oui.

Si une indemnité plus forte a été stipulée pour le cas où il voudrait racheter son temps, doit-on réserver les droits du chef d?atelier pour les exercer le cas échéant contre cet apprenti, travaillant plus tard comme maître ou compagnon sans avoir parachevé ailleurs son apprentissage ? Oui.

Ainsi jugé entre Colomb et Petelat.

Le fabricant qui déclare n?employer que comme apprentie une personne qui a été autorisée à se replacer en cette qualité peut-il être pris en contravention, lors même qu?il ne justifie pas autrement son allégation ? Non.

Doit-il être astreint à passer immédiatement avec ladite apprentie des conventions ? Oui.

Ainsi jugé entre Chevrol, Bernard et demoiselle Thion.

Le conseil a prononcé jugement dans l?affaire de Grimaud contre. Ce dernier a été condamné à payer 50 fr. d?indemnité pour montage d?un métier de châles, et dans celle d?Aillaud contre Besset et Bouchard (V. numéro 11) ; Aillaud a été débouté de sa demande.

Nous donnerons dans le prochain numéro le dispositif de ces deux jugemens et nous en ferons ainsi à l?avenir pour toutes les affaires qui nous paraîtront importantes. Nous ferons seulement observer ainsi que nous l?avons déjà fait ci-dessus, dans l?affaire Bofferding, que la prononciation du jugement doit avoir lieu en présence des juges qui ont assisté aux plaidoiries, et que le conseil paraît ignorer cette règle. Par exemple, l?affaire Aillaud, s?est présentée à l?audience du 27 novembre, elle fut plaidée et mise en délibéré. Nous voyons (et l?on commence à comprendre pourquoi nous donnons à chaque séance le nom des prud?hommes qui y assistent) que MM. Chantre, Dumas, Ferréol, Fichet, Jarnieux, Micoud, Putinier et Teissier qui ont entendu la défense des parties et dû concourir au jugement, n?ont pas assisté à sa prononciation et ont été remplacés, par MM. Blanc, Gaillard, Roddet, Roux et Wuarin, qui légalement parlant sont censés ignorer cette affaire, et n?ont pu en conscience s?occuper de la rédaction du jugement. Ce point est assez important pour que M. le président s?explique ; nous recevrons avec plaisir ses déclarations à cet égard.

A l?approche du jour de l?an, nous recommandons comme étrennes utiles et agréables la bibliothèque populaire dont nous avons parlé plusieurs fois. ? On peut se la procurer complète ou acheter séparément les volumes qui la composent chez M. Falconnet, correspondant, rue Tholozan, n. 6, ou au bureau du journal.

AVIS ESSENTIEL.

A compter du 1er janvier prochain, le prix du papier timbré pour billets à ordre, lettres de change, etc., est réduit à 25 centimes pour 500 fr. et au-dessous ; 50 cent. de 500 jusqu?à 1,000 fr. et ainsi de suite. Les billets qui seront souscrits postérieurement à ladite époque, sur papier libre, seront soumis à une amende de 12 p. 100 dont moitié à la charge du souscripteur et l?autre moitié à celle du premier endosseur, sans aucun recours. La totalité de l?amende sera perçue lors de la présentation des billets à la formalité du visa, qui doit procéder le protêt, sauf le recours dans la proportion ci-dessus, mais solidairement contre tous les endosseurs [3.2]au profit de celui qui en aura fait l?avance. Le minimum de l?amende est fixé à cinq francs. Le décime est supprimé.

A compter du même jour 1er janvier, les notaires ne jouiront plus de la faculté qu?ils avaient de ne faire timbrer les billets qu?en faisant enregistrer leurs actes de protêt. Ils devront le faire comme les huissiers, le lendemain de l?échéance, avant le protêt.

M. DUGAS-MONBEL.

Cet honorable citoyen, mort depuis peu de temps, a légué à St-Chamond, sa ville natale, 1° une somme inaliénable de dix mille francs pour premier fonds d?une caisse d?épargne ; 2° sa bibliothèque ; 3° une somme de huit mille francs dont l?intérêt servira à l?accroissement de cette bibliothèque, aux frais d?entretien et salaire du bibliothécaire.

Le député est oublié ; l?homme de lettres aura peine à conserver dans la postérité une place éminente ; mais le bon citoyen vivra toujours. Puisse son exemple être imité !

La 10e livraison de la REVUE RÉPUBLICAINE vient de paraître, et termine le 3e volume. Entr?autres articles d?un intérêt majeur nous avons remarqué les suivans sur les moyens de faire descendre la république dans l?atelier, par M. Martin Bernard1, ouvrier imprimeur. Le Musée de Madrid, par M. Louis Viardot2. Manuel d?économie politique, par J. F. J. Paulet. Nous ne saurions trop recommander à nos lecteurs cet important ouvrage. Le cabinet de lecture qui ne l?aurait pas ne saurait se dire assorti. On souscrit à Paris, rue du Croissant, n. 13 et chez tous les libraires des départemens.

ANECDOTE PROLÉTAIRE.

? Le 18 novembre dernier, un négociant de Crémieux, revenant de Morestel chez lui, perdit un porte-manteau qui contenait 6,000 fr. en espèces. Un ouvrier tailleur de pierres trouve le porte-manteau et le porte chez son père, ouvrier maçon à Cozance, commune de Trept. Le père de recommander à son fils et à son épouse, secret et discrétion : « Car, voyez-vous (ce sont ses expressions), celui qui a perdu cet argent ne manquera pas de faire des recherches ; quand nous connaîtrons le maître du porte-manteau par les indications qu?il donnera, alors, pour être braves comme mon père, comme mon grand-père, nous rendrons un argent qui ne nous appartient pas. » Deux jours suffirent pour découvrir le propriétaire du porte-manteau : j?ai été témoin, dit la personne qui raconte ce trait de probité, du plaisir qu?a éprouvé l?honnête paysan à rendre l?argent à M. T.... Je puis assurer que ce dernier n?en a pas éprouvé un plus vif à retrouver ses 6,000 fr. Enfin je pourrai dormir, disait le prolétaire, comme déchargé d?un pesant fardeau.

LECTURES PROLÉTAIRES.

Le tonnerre gronde rarement ; le soleil luit toujours. Que les rois se souviennent que maîtres d?ôter la vie il n?est pas en leur pouvoir de la rendre. hushang, roi de Perse.

On n?a point le droit de régénérer sa patrie d?une main faible et énervée. Curtius ne doit se précipiter dans l?abîme que quand il est sûr de le fermer. delisle desales. Ma république.1

Les malheureux ont toujours tort. Tort de l?être ; tort de le dire ; tort d?avoir besoin des autres et de ne pouvoir les servir. mirabeau. Lettres à Sophie 2.

C?est en vain que l?on se prépare par la lecture des livres au spectacle des usages et des m?urs des nations. Il y aura toujours loin de l?effet des récits sur l?esprit à celui des objets sur les sens. volney. Voyage de Syrie 3.

Le c?ur d?une mère est le chef-d??uvre de la nature. gretry. Essai sur la musique 4.

[4.1]Homme injuste, homme insensé ! Les dieux ont borné ta vie, borne donc aussi ton désespoir : n?est-tu pas sûr de mourir. pechmeja. Télèphe 5.

? M. gensoul, ancien Chirurgien-Major de l?Hôtel-Dieu de Lyon, vient d?obtenir de l?académie des sciences de Paris un prix de 5,000 fr. pour son ouvrage intitulé : mémoire sur quelques maladies graves des os de la mâchoire supérieure et inférieure, et sur les procédés des opérations qui sont propres à en opérer la guérison.

? M. legendre-hérald1 est chargé par la ville de l?exécution en marbre des bustes de deux Lyonnais célèbres ; l?un dans les arts, et l?autre dans le commerce : Philibert Delorme et de Pernon.

MÉMORIAL HISTORIQUE.

angleterre. Le parlement a été prorogé au 25 janvier prochain.

? Le nouveau ministère est composé dans le sens Tory ; les principaux membres sont sir Robert Peel aux finances, Goulburn à l?intérieur ; Baring, président du bureau de commerce, comte d?Aberden à la marine, Herries, à la guerre, sir Edouard Suyden lord chancelier d?Irlande, lord Lindhurt, à la justice, etc. le duc wellington est au ministère des affaires étrangères1.

portugal. 1er Décembre. ? Le mariage de Dona Maria avec le duc deLeuchtenberg fils d?Eugène Beauharnais Eugène, a eu lieu par procuration2.

suède. ? Le ministère, sauf un membre absent, vient d?être mis en accusation par les États pour avoir, dans une même session, présenté une seconde fois un projet de loi rejeté.

PARIS. 11 décembre. ? M. Villemain3 a été nommé secrétaire perpétuel de l?académie française.

Idem. Idem. ? Troubles à l?école polytechnique ; une partie des élèves sont consignés, l?origine de ces troubles est attribuée à la sévérité du colonel Thouvenel.

Idem. Idem. ? La Tribune a vidé son 102e procès ; son n° du 14 septembre avait été incriminé pour l?article : voyage du Roi à Compiègne, comme contenant offenses envers le Roi et provocation au mépris et à la haine du gouvernement. Dans cet article la Tribune accusait Louis-Philippe d?ingratitude envers Laffite, Dupont de l?Eure, de provocation au duel dans lequel Dulong a péri, etc. A l?audience, M. Ledru-Rollin a demandé l?audition de témoins pour établir ces faits, elle a été refusée par arrêt motivé sur ce que le Roi n?est pas un fonctionnaire ordinaire et qu?il est irresponsable. Malgré les efforts de cet avocat et de M. Germain Sarrut, rédacteur en chef, M. Hector Bichat, gérant, a été condamné à un an de prison et 6,000 fr. d?amende.

12 décembre. ? M. A. Rouen, gérant du National a été arrêté à 6 heures du matin, en vertu d?un jugement de la cour d?assises.

13. ? M. Rouen a été rendu à la liberté pour pouvoir vaquer à sa défense devant la chambre des Pairs, et M. Armand Carrel chargé de cette défense a aussi été mis en liberté. (V. n° 14, Ephé. Lég. Ch. des P.)

13 . ? M. Thiers prononce son discours de réception à l?académie française.

11. ? La première division de l?école polytechnique, composée de 145 élèves a été licenciée par ordonnance de ce jour. Les élèves se sont réunis et continuent leurs études sous les mêmes professeurs, dans l?amphithéâtre de M. Quesneville, rue du vieux Colombier.

15 décembre. M. Aubry Foucault, gérant de la Gazette de France a été condamné à trois mois de prison et 5 000 fr. d?amende, pour attaque envers le gouvernement, etc.

LYON. Mardi soir 26 compagnons dits Ferrandiniers ont été arrêtés.

Le gérant du Censeur a été condamné par défaut mercredi dernier à 2 mois de prison et 1 200 fr. d?amende.

[4.2]Le mot du dernier logogriphe est hiver, dans lequel on trouve hier.

Vers la fin du mois de septembre dernier Antoine Péchard est disparu du domicile de son père, le sieur Jean Péchard, cultivateur à Curis (Rhône).

Signalement : Agé de 26 ans ; ? taille d?un mètre, 70 centimètres, environ ; ? cheveux et sourcils châtains ; ? front élevé ; ? yeux roux-foncé ; ? nez moyen ; ? bouche moyenne ; ? barbe brune ; ? menton rond ; ? visage plein ; ? teint un peu coloré. ? Il a les jambes et les pieds gros ; ? sa physionomie démontre peu d?intelligence.

Vêtemens : Blouse bleue ; ? pantalon bleu en cordat ; ? gilet de toile également bleu ; ? chemise de toile marquée J. P. ; ? chapeau et souliers sans bas. Le tout en mauvais état.

Les personnes qui pourraient donner des renseignemens sur cet individu, sont priés de les adresser à la Préfecture du Rhône, division de la Police.

(16-1) Nouvelles mécaniques économiques pour dévider, trancaner et faire les cannettes, approuvées par la Chambre de Commerce et la société d?encouragement qui a décerné une médaille à l?inventeur, lequel les a encore perfectionnées et simplifiées. La grandeur de ces trois machines pour les trois opérations est la même que pour le dévidage seul. On peut, ensemble ou séparément, dévider 12 flottes et faire 12 cannettes à plusieurs bouts, avec arrêt quand un bout casse. Il y a économie de temps, d?emplacement et d?argent. Les simples cannetières font à la fois 20 cannettes à arrêt sur un seul rang et de différentes grandeurs sur un diamètre de trois pieds. Le système mécanique est très simple et remplace avantageusement dans les mécaniques à dévider de forme ronde l?ancien système qui était très compliqué. Cette simplicité est due au placement de plusieurs pièces et à l?emploi de plusieurs procédés mécaniques qui sont notamment un arbre avec lanterne et poulie placé directement au centre dans une position verticale et qui, par sa rotation donne le mouvement au reste du mécanisme. Il est le principal et premier moteur ce qui facilite la jonction du cannetage au dévidage. C?est pour l?avoir contrefait que MM. Jaud, Belly, Delaigue et Bailly ont été condamnés avec dommages-intérêts et défense de récidive. Le sieur David qui en est l?inventeur breveté voulant faire jouir la fabrique du fruit de son invention a mis ses mécaniques à un prix très modique. Les nombreuses ventes qu?il opère chaque jour avec sécurité pour les acheteurs, ce qui ne peut pas être de la part des contrefacteurs susnommés, lui garantissent que ses mécaniques sont appréciées. Le sieur David fait des échanges, revend les vieilles mécaniques.
S?adresser à M. david, mécanicien, place Croix-Paquet, ou dans ses ateliers rue du Commerce.

MÉDAILLE JACQUARD.
Cette médaille fruit de l?inspiration patriotique de M. Mouterde-Billion fils, se trouve chez l?auteur, rue de la Reine, n° 20 et chez M. Savy, libraire, quai des Célestins : prix 5 fr.

Théâtre des beautés et merveilles de la nature.
PASSAGE DE L?ARGUE ESCALIER G.
MM. CAUTRU père et fils donnent tous les Dimanche, Lundi et Jeudi une ou deux représentations variées de différens tours de physique et d?expériences électriques : voir l?affiche de chaque jour.
Prix 1 f. 60 c. 40 c. L?on est assis partout.

(6-5) LE PÈRE LACHAISE ou recueil de 150 dessins, au trait des principaux monumens de ce cimetière, avec échelles de proportion ; ouvrage in-4°, Jésus dessiné, lithographié et publié par QUAGLIA, peintre anciennement attaché à l?imp. Joséphine, et dont les miniatures ont obtenu la médaille d?or à l?exposition du Louvre (année 1814), à Paris, chez Quaglia, rue de Harlay-du-Palais,  2. ? On n?expédiera cet ouvrage que d?après une lettre affranchie, contenant un bon de la poste, ou mandat sur Paris. ? Prix, expédié franco, 12 fr.
Parmi ces Mausolées on distinguera ceux des maréchaux Masséna, prince d?Essling ; Davout, prince d?Eckmühl ; Suchet, duc d?Albufera ; Lefebvre, duc de Dantzig ; Kellermann, duc de Valmy ; Macdonald, duc de Tarente ; Pérignon; Sérurier ; Lauriston ; ceux du duc Décrès; du général Foy général ; Fabre de la Martillière ; le général Frère ; le comte de Valence comte ; le comte d?Aboville ; le marquis de La Place ; Volnay; Bourke; Cambacérès; Regnaud de St-Jean-d?Angély ; Caulaincourt; Camille Jordan; Lanjuinais; Labédoyère; Lallemand; Daru; le baron de Mousseau ; le baron Denon ; Bailly de Crussol-d?Uzès; de St-Simon ; Saulx-Tavannes ; Greffulhe; G. Monge ; Frochot; Bellart Bellart ; le comte de Sèze ; la duchesse de Mazarin ; la duchesse de Bassano ; la comtesse Demidoff ; la baronne Gourgaud ; madame Blanchard ; ceux d?Héloïse et Abélard ; Molière; Lafontaine ; l?abbé Dellile abbé ; Boufflers; les peintres, David ; Girodet ; Dupaty ; Isabey; ceux de Talma ; mademoiselle Rancourt ; Méhul; Béclard; Roussilhe; Panckoncke; Laffitte; Malleu; Perregaud; Vigier ; etc., etc.

BAZAR LYONNAIS.
(9-4) Galerie de l?Argue, nos 70 et 72. Toute espèce d?objets de quincaillerie, bijouterie, etc., à 10 pour % au-dessous du cours, pour cause de cessation de commerce.

Notes (BANQUIERS ET PROLÉTAIRES. [2.2] Nous n?avions...)
1 Probablement ici, Journal des annonces judiciaires du ressort du tribunal civil, affiches et avis divers de la ville de Lyon, publié depuis 1821.

Notes (La 10 e  livraison de la REVUE RÉPUBLICAINE...)
1 Martin Bernard (1808-1883), jeune ouvrier typographe et disciple de Pierre Leroux, qui avait participé aux grèves des imprimeurs de 1833, venait en effet de publier dans la Revue républicaine, mensuel qui parût d?avril 1834 à juin 1835 à Paris. Après une activité politique importante au sein des sociétés secrètes républicaines, Bernard fut représentant du peuple en 1848, puis député.
2 Louis Viardot (1800-1883), écrivain français.

Notes (LECTURES PROLÉTAIRES. Le tonnerre gronde...)
1 Jean-Baptiste Delisle de Sales (1739-1816), Ma République (1791).
2 Publiées initialement pendant la Révolution française, les Lettres à Sophie : écrites du donjon de Vincennes, venaient d?être rééditées.
3 Constantin François Chasseb?uf de La Giraudais, Comte Volney (1757-1827), philosophe et orientaliste, auteur en 1787 de Voyage en Syrie et en Egypte pendant les années 1783, 1784 et 1785.
4 André Ernest Modeste Grétry (1741-1813), compositeur français d?origine liégeoise, avait publié en 1789, Mémoires ou essai sur la musique.
5 Sans doute est-il question ici du Télephe, en XII livres du romancier français Jean de Pechméja (1741-1785), publié à Paris et Londres en 1784.

Notes (? M.  gensoul , ancien Chirurgien-Major de...)
1 Il s?agit du sculpteur français Jean-François Legendre-Hérald (1796-1851).

Notes (MÉMORIAL HISTORIQUE.)
1 Sont mentionnés ici les hommes d?Etat britanniques Robert Peel (1788-1850), Henry Goulburn (1784-1856), Alexander Baring (1774-1848), George Hamilton Gordon, Comte d?Aberdeen (1784-1860), John Charles Herries (1778-1855), John Singleton Copley, Baron Lyndhurst (1772-1863) et Arthur Wellesley de Wellington (1769-1852).
2 Il s?agit du mariage entre Marie II du Portugal (1819-1853) et Auguste de Leuchtenberg (1810-1835), petit-fils de Joséphine de Beauharnais.
3 Abel François Villemain (1790-1870), homme politique et critique littéraire.

 

 

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