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8 février 1835 - Numéro 21
 
 

 



 
 
    

Il est assez dans l’usage de la maison Tocanier frères, de faire monter des métiers, sans que la façon de l’étoffe que ces métiers font, soit suffisante pour indemniser le chef d’atelier de ses frais de montage. Ces messieurs, pour se soustraire à l’indemnité que le conseil accorde dans cette circonstance, commencent par faire chômer huit ou quinze jours ; après ce temps ils déclarent au chef d’atelier qu’ils ne peuvent pas continuer son métier, et l’invitent à se placer ailleurs. Si ce dernier le démonte avant que tous les comptes soient réglés, lorsqu’il demande l’indemnité, ces messieurs offrent alors de donner de l’ouvrage, certains qu’ils sont que le chef d’atelier sera forcé de refuser et par conséquent de perdre ses droits.

C’est une affaire de ce genre qui a amené devant le conseil les sus-dénommés avec le sieur Murat, qui réclamait pour un montage, vu qu’il avait fait plus de frais qu’il n’avait fait de façon. Ces messieurs n’ont offert de donner une pièce, que lorsque le sieur Murat se trouvait dans l’impossibilité de l’accepter. 28 jours s’étaient écoulés depuis que le métier avait cessé de travailler. Le négociant voulait invoquer la prescription ; mais les membres qui étaient au conseil, voyant que le chef d’atelier était fondé dans ses réclamations, renvoyèrent les parties le surlendemain au [3.2]greffe, par-devant messieurs Troubat et Charnier, pour que l’indemnité fût réglée. Par un inconcevable oubli, le sieur Murat a été débouté de sa demande ; et cependant il était encore dans les délais, cependant il était certain que son métier n’a été démonté que sur l’assurance que les sieurs Tocanier avaient donnée de ne pouvoir le continuer.

Ce qui nous étonne le plus, c’est que ce soit le prud’homme qui ait le plus combattu l’odieuse prescription d’un mois, qui ait déclaré qu’attendu qu’il y avait 28 jours que le chef d’atelier n’avait plus de pièce, il n’avait pas droit à une indemnité. Telle n’avait pas été la pensée des membres qui décidèrent le renvoi en conciliation.

Alors, s’il fallait admettre cette décision comme un principe, il s’ensuivrait que la prescription pour les réclamations d’un chef d’atelier, lésé par un négociant, ne serait plus que d’un temps plus court encore que celui fixé par l’ancien conseil.

C’est une déplorable erreur ; elle ne doit pas faire loi ; le champ serait trop large pour la cupidité, il l’est déjà assez. Que cet avertissement ne soit pas perdu.

 

 

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