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22 mars 1835 - Numéro 27
 

 




 
 
     

[1.1]MM. les souscripteurs dont l?abonnement est fini le 21 courant sont priés de le renouveler, s?ils ne veulent éprouver du retard dans l?envoi du journal.

LE TRAVAIL.

L?homme est né pour le travail, et cela est tellement vrai, que nous renfermons en nous-mêmes un principe actif qui nous porte à l?action. Dès que cette activité n?a pas d?objets qui l?alimentent, notre esprit devient inquiet, il s?agite, il se trouble, et se repliant sur lui-même faute d?un point d?appui fixe que lui procure le travail, il erre dans un vide affreux ; il oublie ses devoirs et va même jusqu?à se plonger avec une sorte de prédilection dans le cloaque du crime.

Le travail est l?ame de la nature ; c?est lui qui chaque jour fait briller à nos yeux ces beautés, ces chefs-d??uvre, ces nouveautés, qui nous enchantent. Le travail est la cause première de la félicité de l?artisan ; c?est par erreur que bien des personnes le regardent comme une peine qui nous prive jusque de notre repos sans nous accorder en échange aucune jouissance. Nous disons au contraire que c?est par le travail seul que l?homme peut jouir et que ses bienfaits s?étendent même jusqu?à la prospérité des nations.

L?activité fait la félicité du travailleur ; en effet, il chasse de son humble foyer, et les soucis, et les chagrins, et les privations qui sapent chaque jour la frèle existence de l?oisif. Envisagez cette famille pour laquelle le travail est un plaisir : dès le matin tout est en action ; chacun reprend avec gaîté la suite de ses occupations de la veille ; l?émulation brille dans tous les regards, et le moment du repos met seul une trève à leurs travaux. Des mets exquis ne sont point les stimulans qui les convient ; mais excités par le travail, leurs appétits savourent avec plaisir le potage de la sobriété ; une gaîté franche préside à la table qui est pour eux une récréation ; puis l?on reprend avec courage, et de nouvelles forces, son activité première. Ainsi se passe la semaine. Mais le dimanche on se livre avec plaisir aux douceurs du repos ; l?on va respirer l?air libre des champs ; l?on s?occupe de quelques ?uvres de philantropie ; ou dans une récréation amicale, l?on se délasse des fatigues de ses occupations en récréant ses esprits. Puis, lorsque la nuit semble nous convier au repos en étendant son voile sur la nature, le c?ur satisfait, plein d?ardeur pour le lendemain, l?on regagne son habitation. Ainsi s?écoule la vie du travailleur aujourd?hui. [1.2]Les malheurs, les maladies, les calamités publiques, malgré son extrême activité, semblent le condamner à des privations, à des ennuis qui accélèrent sa marche vers la tombe. Mais un jour viendra où l?industrie organisée lui permettra de lutter victorieusement contre sa misère, fruit des malheurs inséparables de la condition humaine.

Tandis que l?oisif, celui pour qui le travail est un supplice, enchaîne à jamais à sa suite la misère et la faim. Pour lui la nature est sans charmes, parce que son ?il morne et soucieux ne saurait les envisager ; la vie lui paraît sans jouissance, parce que sa position ne saurait lui permettre de s?en procurer une seule ; et pour aggraver ses maux, le remords vient encore ajouter à ses chagrins : enfer anticipé qui ne trouble jamais la paix de l?homme laborieux. Si les maux se déchaînent sur lui, si par une suite de fatalité il ne peut dompter le sort, son âme du moins est tranquille ; il ne saurait se reprocher ses peines, parce qu?il n?en a pas été l?artisan ; et confiant dans un avenir plus heureux, il s?endort dans les bras de l?espérance.

L?oisif, au contraire, ne peut supporter le présent, regrette le passé et désespère de l?avenir. Il ne voit que l?abîme que chaque jour il creuse sous ses pas ; son imagination s?égare, ses idées se faussent, et dans ce dédale de peines, au lieu de chercher dans le travail un remède à ses souffrances, sa nonchalance le porte à ouvrir son c?ur à l?inspiration du crime. Il envisage l?astuce, la perfidie, le larcin même comme uniques améliorations à sa destinée ; et c?est ce funeste espoir, c?est cette crédulité désolante qui peuple chaque jour les prisons et les bagnes. C?est en buvant à longs traits à la coupe empoisonnée de la paresse, que cette jeune personne a flétri la fleur de son printemps ; c?est après l?avoir épuisée jusqu?à la lie, que ce jeune homme égaré dans les détours du vice et du crime, y met le comble en portant atteinte à une vie qu?il aurait dû consacrer au bonheur de ses semblables.

Si le travail prévient les maux, préserve notre esprit de la perversité du crime, il répand aussi la prospérité sur tous les points de l?univers. Examinons les temps où s?illustrèrent les plus grands capitaines de l?antiquité, où brillèrent les plus éclatans génies et nous verrons que ce sont ceux où le travail était de tous les rangs comme de toutes les conditions ; où le général d?armée quittait sa charrue pour défendre les intérêts de la patrie, puis, lorsque par sa valeur il avait repoussé l?ennemi, lorsqu?après la victoire, couvert de lauriers, offrant aux dieux les dépouilles des vaincus, il rentrait dans ses foyers, c?était pour tracer [2.1]le sillon qui devait alimenter ceux que son bras venait de protéger. Nous verrons encore, que le travail seul est la cause de la prospérité des peuples, que c?est lui qui surmonte tous les obstacles, qui aplanit toutes les difficultés et qui est le germe de cette puissance à laquelle rien ne saurait résister. Si le travail est une source bienfaisante, qui fertilise de ses ondes la terre qu?elle arrose, l?oisiveté est un lac fangeux dont les exhalaisons fétides corrompent tout ce qui l?avoisine.

Mais si nous préconisons le travail, si nous avons démontré qu?il doit être le point de mire de l?humanité entière, et que de lui seul peut éclore cette félicité après laquelle nous soupirons tous ; nous repoussons vivement ce travail exténuant, ces longues veilles auxquelles sont obligés de se livrer les travailleurs pour satisfaire à des exigences égoïstes. C?est alors, qu?épuisés par un travail long et soutenu, privés de ce nécessaire qui entretient les organes dans un état de vigueur et de force, ils se voient avant l?âge au terme où leurs facultés physiques ne leur permettent plus, pour subvenir aux besoins de leur existence, que de recourir à la commisération de leurs semblables. Cette triste condition à laquelle les assujétit une exploitation anti-humaine, doit enfin cesser le jour où, obéissant à la loi sainte du progrès, le commerce et l?industrie régénérés laisseront à tous la libre faculté de jouir des immenses trésors que le travail produit.

Que le travailleur cesse d?être à la vue du plus grand nombre une machine vivante ; que l?ouvrier jouisse de toutes les prérogatives sociales ; que sa qualité de travailleur ne soit pas méconnue, qu?elle soit au contraire la cause de son élévation et un moyen de participer au bénéfice commun.

Souscription gratuite pour la fondation d?une vente sociale d?épiceries, devant commencer la réforme commerciale :

(Sixième liste.)

MM. Armand, 1 f. Hugenin, 1 f. C. L., 2 f. Ferrand, 1 f. 50 c. Veyret, 5 f. Escoffier, 2 f. Bavoux, 5 f., Barnoud, 5 f. Reverchon, 5 f. Brunet, 1 f. Lanteron, 1 f. 50 c. Ravet, l f. 50 c. A?, 10 f. Mlle Michel, 3 f. Mlle Sylvie Michel,1 f. Mme Souverain, 5 f. Mlle Bonny, 1 f. MM. Rousset, plieur, 1 f, Niele, 1 f. Nodet, 2 f. Chantre, 1 f. J., 5 f. F., 5 f. V. aîné, 5 f. Guillermier père, 1 f. Guillermier fils aîné, 1 f. Guillermier, Claude, 1 f. MMlles Guillermier, Victoire-Louise, 1 f, Guillermier, Benoîte, 1 f. MM. Billand, tourneur en cuivre, 1 f. Géneti, 1 f. Lambert, 1 f. Manzon, 50 c. Vollerd, 1 f. Bernard, St-Clair, 5 f. Millet, Louis, 1 f. Bigat, 2 f. Masset, 1 f. Besassier, 2 f. Milleron, 4 f. Delorme, 2 f. Geoffray, 3 f. Penet, 3 f. Boissier, cours d?Herbouville, 10 f. Mlle Martine, 3 f. MM Peillon, 2 f. Anselme, 2 f.
Total, 121 f.
Listes précédentes, 587 f. 45 c.
Total, 708 f. 45 c.

Errata. (Voir la 5e liste). Au lieu de Théodore Bermont, 20 c. lisez : Théodore Delmont, 20 f.

AUX NÉGOCIANS ET AUX CHEFS D?ATELIER.

Plusieurs chefs d?atelier nous ont porté plainte contre quelques maisons de fabrique, qui font usage de procédés peu délicats pour accroître leurs bénéfices. Nous nous contenterons de rapporter les faits sans citer les maisons, dans la persuasion où nous sommes, que faisant par ce procédé un appel à leur bonne foi, ils se feront un scrupule de continuer un trafic frauduleux qui, s?il était mis au grand jour, pourrait jeter une défaveur marquée sur leur réputation.

Pourtant, si notre voix n?était pas entendue ou qu?on nous soupçonnât de faiblesse, et que les méfaits de ces maisons continuassent, nous prévenons que nous les signalerons comme il est de notre devoir de le faire, attendu que leur conduite est non-seulement funeste aux chefs d?atelier, mais encore porte un préjudice immense aux fabricants probes et honnêtes qui rougiraient d?employer de pareils moyens. Voici les faits.

Il y a des fabricans qui, en donnant de l?ouvrage aux chefs d?atelier, se réservent le droit de ne point recevoir de tirelles et de ne pas donner 15 grammes pour la remplacer, et ne rougissent pas de porter leur volonté arbitraire comme accord réciproque sur [2.2]les livres. Pourtant, et nous l?avons déjà fait observeri, sur chaque pièce tissée, le fabricant doit au chef d?atelier, non plus une tirelle, c?est un usage qui s?est perdu, mais 15 grammes pour la remplacer.

Il est facile à concevoir que, lorsque de tels fabricans prennent une commission par concurrence avec un négociant qui alloue les 15 grammes, ils peuvent, si la commission est forte, la livrer à bien meilleur marché que leur concurrent, attendu que ces 15 grammes par pièce leur offrent un bénéfice auquel ne peut prétendre celui qui fait de la justice la base de ses opérations commerciales. Donc par ce fait, ils attaquent non-seulement la classe ouvrière, mais encore le commerce de la soierie en général.

D?autres font encore mieux ; d?abord comme les premiers ils ne veulent pas de tirelle et ne passent pas de bonification, mais encore ils se servent d?un autre moyen bien plus scandaleux pour faire à leurs confrères la plus rude concurrence, tout en ruinant l?ouvrier. Ils ont pour habitude de livrer très-rarement au chef d?atelier une pièce au sortir de l?ourdissage, et cela par une bonne raison, c?est qu?il faut la faire passer quelques heures dans le placard préparé à cet effet. En second lieu, ils ne donnent jamais la trame le même jour que la pièce, ce n?est que le lendemain et souvent le surlendemain qu?elle est confiée au chef d?atelier, attendu que d?ici là il pense qu?il a eu le temps de remonter son métier, et que dans un moment où les façons sont si peu payées, l?ouvrier calculant sur le temps perdu la mettra de suite au dévidage, et par-là même ne saurait s?apercevoir de la perte qu?elle est susceptible de faire. Perte d?autant plus assurée, que des chefs d?atelier qui avaient toujours été en avance lorsqu?ils travaillaient pour des maisons respectables, s?aperçurent que quoiqu?ils employassent les mêmes personnes qu?ils occupaient précédemment, ils ne pouvaient jamais balancer leurs comptes, et que non-seulement ils perdaient l?intégralité de leurs déchets, mais encore étaient obligés de payer de la soie à toutes les piècesii. Ces chefs d?atelier disons-nous, préférèrent alors suspendre le travail pendant un jour et s?assurer par eux-mêmes si la soie qu?ils avaient reçue n?était pas humide. Qu?est-il résulté de cet essai ? que la soie du jour au lendemain perdit jusqu?à 45 gram. sur 1 500 gr. qui avaient été donnés pour confectionner 60 aunes ! La soie fut alors reportée au magasin, et ces MM. eurent l?impudence de dire au chef d?atelier : ce n?est pas difficile que votre soie ait perdu, vous l?avez fait sécher, comme s?il était naturel et d?usage de recevoir de la soie humide ! L?on fut pourtant obligé de déduire les 45 grammes. Eh bien ! après cela, vous pensez que le chef d?atelier a dû être en avance ? pas du tout, comme la pièce avait été pliée de suite, et que sans doute elle avait subi la même préparation que la trame, en perdant tout son déchet, le chef d?atelier était encore en solde.

Ainsi donc, très facile à ces maisons déhontées d?établir une rude concurrence aux négocians honnêtes qui ne sauraient tremper leurs mains dans un pareil cloaque de rapine et de cupidité. Libre à eux de livrer les étoffes à des prix auxquels ceux qui méritent toute notre estime ne pourraient descendre sans éprouver une perte réelle. Libre à eux aussi d?accuser la classe ouvrière, et de lui jeter un ridicule et une défaveur pour couvrir en quelque sorte l?ignominie de leur conduite.

Mais il ne suffit pas de faire connaître les abus, il faut encore y trouver un remède ; car dans un tel état de choses, des maisons comme celles-là, non-seulement s?approprient les sueurs de leurs ouvriers, mais encore portent un préjudice incalculable sur l?avenir de notre fabrique.

Nous pensons donc que le conseil des prud?hommes qui, lorsqu?un élève a des griefs contre son chef d?atelier ou ce dernier contre son apprenti, délègue un de ses membres pour s?assurer des faits par une surveillance minutieuse, pourrait bien, et par analogie, charger un ou plusieurs de ses membres de faire une visite dans les magasins de ces fabricans, lorsque les chefs d?atelier, après avoir porté leur soie au greffe du conseil, l?avoir fait reconnaître et l?y avoir laissée un temps suffisant pour s?assurer de la perte, et qu?il serait reconnu qu?effectivement la soie était humide ; par là et après une mercuriale de M. le président, si le fait se renouvelait, en livrant à la publicité le nom et la conduite de tels hommes qui ne se font point de scrupule de grossir leur fortune, au détriment du malheureux qu?ils exploitent ; les chefs d?atelier ne pourraient-ils pas être autorisés à leur retirer la main-d??uvre, et la fabrique se verrait allégée du fardeau de toute ignominie.

Nous laissons aux fabricans et aux chefs d?atelier, à faire sur cette observation, toutes les réflexions que pourront leur suggérer leurs pertes réciproques, et la concurrence frauduleuse que de tels procédés alimentent.


i. Voir le n° 6.
ii. Il est à remarquer que lorsqu?un chef d?atelier travaille pour une maison probe et que de son côté il ménage les matières, il doit toujours avoir le 1/3 de son déchet, à moins que la pièce ne soit mauvaise ou que la trame soit inférieure.

SUITE DES ÉLECTIONS GÉNÉRALES DES PRUD?HOMMES.

[3.1]Quatrième section.

Votans, 101
M. Charnier a obtenu 98 voix.
Voix perdues, 3
Total, 101

M. Charnier ayant obtenu la majorité a été proclamé membre titulaire.

Cinquième section.

Votans, 108
M. Charles Bret a obtenu 58 voix.
M. Verjat, 34
M. Bourdon, 8
M. Pierre Bret, 2
Voix perdues 6
Total. 108

M. Charles Bret ayant obtenu la majorité, a été proclamé membre suppléant.

Dans son n° de dimanche dernier, la Tribune prolétaire a annoncé que toutes les sections avaient donné mandat aux prud?hommes chefs d?atelier d?exiger de leurs collègues négocians que la libre défense soit admise au conseil.

Amis de la vérité, nous devons dire que ce qu?a annoncé la Tribune prolétaire n?est pas exact. Nous nous étonnons que pouvant être informée tout aussi bien que nous, elle ait pu publier un fait qui pourrait être démenti par un grand nombre de chefs d?atelier, présens aux élections.

Les arrêts de l?opinion publique sont toujours sévères et irrévocables ; il faut les déplorer alors qu?ils sont dictés par l?erreur, et comme l?erreur dans laquelle aurait été mis le public par la feuille dont nous parlons, pourrait soulever des blâmes non mérités contre les membres du conseil des prud?hommes, nous nous faisons un devoir de déclarer qu?il n?y a eu qu?une section où les électeurs ont donné leurs suffrages conditionnellement, et encore le procès-verbal de l?élection ne mentionnant pas la condition imposée à l?élu, ce mandat n?a qu?une force morale sur la volonté du mandataire.

Dans quelques autres sections, des v?ux ont été exprimés pour que l?on sollicite la libre défense ; mais aucune condition n?a été imposée. Néanmoins les prud?hommes chefs d?atelier sauront sans doute faire leur devoir. Espérons que leurs efforts ne seront pas vains, et que la libre défense sera admise au conseil.

CONSEIL DES PRUD?HOMMES.

Audience du 19 mars.

présidence de m. ribout.

Sur 27 causes appelées, 3 ont été retirées, 7 ont été renvoyées à huitaine, et 6 ont fait défaut. Sur 3 causes qui devaient paraître sur citations, 2 ont été jugées par défaut.

Lorsqu?une apprentie par un mal d?yeux dont on ne peut prévoir le terme d?après la déposition du médecin du conseil, est incapable de travailler, les engagemens sont-ils résiliés ? ? Oui ; et une indemnité allouée au chef d?atelier.

Ainsi jugé entre Verzieu, chef d?atelier, et Vindri, apprentie.

Lorsqu?un chef d?atelier se permet de frapper son élève, les engagemens sont-ils résiliés ? ? Oui ; mais sans aucune indemnité pour le chef d?atelier. L?apprentie se placera ailleurs pour finir le temps fixé par les conventions.

Ainsi jugé entre Tissot, chef d?atelier, et Tholozan, apprentie.

Un apprenti engagé pour 18 mois, moyennant la somme de 200 fr., peut-il, son temps étant achevé, refuser de payer le prix de son apprentissage, sous le spécieux prétexte qu?il n?y en a pas eu d?établi et qu?il n?a pas été suffisamment enseigné ? ? Non : le conseil considérant que le sieur Sténer père ayant déjà fait le versement de la somme de 40 fr. entre les mains du sieur Augustin, chef d?atelier, a décidé que réellement un prix quelconque avait été alloué et que, puisque les parties n?étaient pas d?accord entre elles, il fixait le payement à la somme de 150 fr. qui sera [3.2]payée de suite ; les 40 fr. reçus seront déduits de la somme à percevoir.

M. Vidalin, maître teinturier, a fait paraître le sieur Cholton, son apprenti, qui sur l?exhibition d?un livret qu?il tenait de son frère, teinturier à Belleville, chez lequel il a demeuré 3 ans, prétendait se soustraire aux nouvelles conventions verbales qu?il avait passées avec M. Vidalin par l?entremise du contre-maître de ce dernier. Le conseil après avoir inspecté le livre d?entrée et de sortie des apprentis du sieur Vidalin et s?être persuadé du temps que ce dernier était dans l?habitude d?exiger de ses apprentis, a décidé que le sieur Cholton ferait trois ans d?apprentissage chez le sieur Vidalin, à dater du jour de son entrée dans ses ateliers et qu?il compterait à ce dernier la somme de 300 fr. à la fin du temps. Le conseil a décidé en outre que l?apprentissage que le sieur Cholton avait fait ne pouvant compter pour un apprentissage réel, vu que dans les petites villes les maîtres teinturiers ne s?occupent que de la teinture des chiffons, le livret dont il était porteur sera retenu au greffe jusqu?à la fin de ses nouvelles conventions.

M. Dépouilly a fait comparaître les sieurs Mellan, Pion et Bigot, chefs d?atelier, demeurant à quelques lieues de Lyon, tous trois détenteurs d?une pièce de mouchoirs zéphir depuis un an, et qui prétendent ne pouvoir les confectionner, attendu la mauvaise qualité de la soie. Deux de ces chefs d?atelier ont dépassé leurs métiers, et prétendaient avoir été autorisés à cet effet. Mais M. Dépouilly ayant dit ne pas avoir donné d?autorisation, vu que les pièces étaient faisables, puisque sur 100 qui ont été données à la même époque, les pièces seules de ces chefs d?atelier ont resté dans l?inexécution ; le conseil a décidé que, dimanche 22 courant, deux membres des prud?hommes se rendront sur les lieux pour expertiser les pièces ; que les chefs d?atelier qui ont dépassé leurs métiers seront tenus de les remettre d?ici là et d?avoir la tirelle faite lorsque l?on viendra pour procéder à l?inspection, afin qu?ils puissent, en faisant travailler devant eux, s?assurer de la possibilité ou de l?impossibilité de l?exécution.

Le sieur V. fait appeler MM. B. C. et L. pour réclamer la façon d?une coupe de peluche ; de plus, il réclamait le remboursement d?une somme qu?il a versée dans cette maison en qualité de commanditaire, le conseil a cru devoir renvoyer les parties par-devant le tribunal de commerce.

Nous pensons que le conseil aurait pu séparer les deux questions ; se déclarer incompétent en ce qui regardait les fonds versés dans la maison B. C. et L. ; mais ordonner le payement de la façon au sieur V., en exigeant toutefois que ce dernier rendît la coupe de peluche qu?il avait retenue en nantissement. Cet usage a été établi dans la cause de Berger contre Monet, et a été confirmé dans toutes celles semblables qui se sont présentées depuis.

A M. le Rédacteur de l?Indicateur,

Lyon, le 18 mars 1835.

Monsieur,

Permettez-moi d?emprunter la voie de votre journal pour faire connaître à mes confrères la conduite de M. Chavent (Tony), commis dans la maison Tholozan et Chavent.

Je fus hier au magasin pour rendre un échantillon et demander la trame dont j?avais besoin. M. Tony reçut mon échantillon, puis le remit dans la balance pour le peser avec la trame que je devais recevoir, alors je lui observai que le poids de cet échantillon ne devait pas être écrit à mon crédit. Son refus d?obtempérer à ma juste réclamation me transporta d?indignation, et je lui déclarai formellement qu?il ne m?exploiterait pas. Aussitôt M. Tony entre en fureur et m?administre un soufflet ; moi surpris d?un tel procédé, je lui dis : sortez, monsieur, et dehors je vous rendrai raison ! Mais M. Tony, au lieu de sortir, saisit une cheville de pièce. Comme je n?étais pas chez moi et que la résistance de ma part aurait pu me devenir funeste, je pris ma soie et me retirai.

Je vous laisse M. le rédacteur, faire vos réflexions sur la conduite si déplacée de ce commis de fabrique.

J?ai l?honneur d?être, etc.

J....

Une semblable conduite n?a pas besoin de commentaire ; mais nous profiterons de cette occasion pour dire [4.1]à nos lecteurs qu?il y a quelques mois un autre acte, non moins blamable que celui-ci, arriva dans la même maison, acte que nous crûmes qu?il n?était pas urgent de publier en pensant que ces messieurs n?en feraient pas une habitude. Il est donc de notre devoir d?après ce, de le mettre au grand jour : voici le fait. M. Pichon exigeait de ces messieurs l?argent qu?il avait gagné ; et après plusieurs voyage sans succès, on échangea quelques gros mots. M. Chavent lança quelques coups de poing comme un maître vogueur. Mais M. Pichon, moins patient que M. J., riposta et étouffait M. Chavent, lorsqu?il appela M. Tholozan à son secours. Celui-ci en fut quitte pour laver sa figure et requérir 5 ou 6 chefs d?atelier présens pour lui aider à chercher l?épingle de son jabot, perdue dans le fort de la lutte. Cependant M. Pichon fut payé quand même. Et en comptant ses écus, il disait : Quatre contre un, messieurs, et vous avez perdu en raison et en force.

Voilà, lecteurs, la manière dont quelques négocians traitent avec leurs ouvriers. Ne pourrait-on pas faire de cette maison le pendant de celle d?une autre qui jadis présenta un pistolet à un chef d?atelier qui demandait aux chefs un dessin.

LYON.

son avenir.

Ainsi que nous l?avons démontré, la grande industrie lyonnaise est en voie de progrès, et quoique quelques ouvriers aient jugé convenable de s?éloigner de la ville, il est certain que ce sera toujours vers elle qu?aboutiront les opérations les plus essentielles, comme l?achat des matières, la teinture, les apprêts, la vente des produits, les expéditions, les paiemens, etc., etc. L?émigration des ouvriers ne se reportera jamais que dans les articles de fabrication facile. Quant à ceux de haute consommation, comme l?uni riche et le façonné, elles seront toujours les parties essentielles de la ville de Lyon ; car, comme l?a prouvé l?exposition des soieries étrangères, leur concurrence les touche peu, et ne saurait forcer nos fabricans à diminuer les façons.

Il faut d?ailleurs, pour monter, organiser et tisser ces articles, dont les dispositions sont si variées et si variables, des ouvriers intelligens et expérimentés, qu?on ne saurait trouver dans la majeure partie de ceux qui ont quitté la ville ; outre cela, il est très-utile que les chefs d?atelier qui s?occupent de cette partie de la fabrique soient à la proximité des fabricans.

Tout nouvel article que Lyon ajoute à ses assortimens, augmente généralement les chances de vente de tous les autres, et tout article que Lyon perd, les diminue ; et c?est surtout, parce que Lyon est le centre des productions qui présentent le plus de variété dans les assortimens et dans ses moyens d?exécution que, malgré certains désavantages essentiels, elle a pu progresser comme ville manufacturière.

Mais l?industrie de la soie, quoiqu?elle soit immense, n?est pas la seule cause de la prospérité de notre ville ; et il est évident que, dans un avenir très-prochain, cette prospérité s?assièra sur des bases plus larges et plus solides.

Et d?abord, combien d?élémens de richesses dans sa situation, à laquelle nulle autre ville du monde, peut-être, ne saurait être comparée. La vallée du Rhône étant le passage naturel entre le Nord et le Midi de l?Europe, et la Méditerranée étant aussi la route la plus naturelle de l?Occident à l?Orient du monde, Lyon se trouve l?étape presqu?inévitable où viendront s?opérer les échanges, entre le Nord et le Midi, l?Orient et l?Occident. Ainsi, rien de ce qui se passe sur le globe, ne saurait lui être indifférent. Que la production et le bien-être se développent dans les steppes de la Russie, ou sur les rivages de l?Egypte et de l?Inde, le contre-coup s?en fera sentir chez nous, et il n?est plus de progrès auxquels nous ne soyons forcément associési.

[4.2]Bientôt se trouvera réalisé le plan qui a occupé les plus grands génies, depuis Alexandre de Lacédémone jusqu?à Napoléon, et Paris sera aussi près de Calcutta que de St-Pétersbourg. Alors la France pourra distribuer au Nord, les fruits du soleil de l?Inde, et à l?Orient, les fruits de la patiente industrie des populations du Nord. Alors Lyon deviendra l?un des entrepôts du commerce du monde.


i. Depuis grand nombre de siècles Lyon est une des premières villes du monde par son commerce et ses richesses. Des maisons florentines qui avaient fui les malheurs de leur patrie, vinrent se fixer à Lyon, comme le point central des opérations financières qu?elles voulaient établir, et contribuèrent beaucoup au développement de notre industrie. Ce fut dans une de ces maisons que le jeune Colbert, qui fut contrôleur-général des finances sous Louis XIV exerça la profession de commis de banque. Ce fut aux sollicitations de Colbert que la ville de Lyon dût la bienveillante protection du monarque, et dans la persuasion où il était du génie et de l?industrie de ses habitans, il employa des sommes immenses pour faire fleurir notre commerce. Ou évalue de 60 à 80 millions, l?argent employé à cet effet.

Notre affaire qui devait avoir lieu vendredi dernier par-devant la cour royale, a été renvoyée au 3 avril prochain.

AVIS.

Samedi 14 courant, entre midi et 2 heures, on a perdu un peigne de 30 portées en 11/24, portant le n° 856 de chez MM. Joly et Croizat. La personne qui l?a trouvé est priée de le rendre au bureau du journal.

On a trouvé, dans la rue Bodin, une carte d?un dessin de châle au ¼ ; elle porte le patron 1359. On peut la réclamer au bureau.

ANNONCES.

BAZAR LYONNAIS.

Le sieur Desgarnier, détenu politique, ci-devant au magasin n°s 70 et 72, maintenant à l?entre-sol, escalier I, galerie de l?Argue, continue à livrer à 10 p. 100 au-dessous du cours, tout espèce d?objets de quincaillerie, étant obligé de liquider son commerce. Il invite tous les citoyens lyonnais à profiter de cette occasion pour faire leurs emplettes.

ANTOINE CURVAT
Fabrique toutes sortes de cordes pour arcades, colets à crochet, lisage, enlaçage et tout ce qui concerne la fabrique de soieries ; à des prix modérés.
Rue de Cuires, à la Croix-Rousse.

A vendre, pour livrer toutes préparées, plusieurs mécaniques de rencontre à dévider, rondes, longues et rangs à marche de toutes grandeurs, et à un prix très-modéré.
S?adresser, place Croix-Paquet, à M. David, mécanicien inventeur breveté des nouveaux dévidages et canetages ; lequel change celles construites sur ses nouveaux procédés, avec les anciennes.

? A vendre, pour cause de départ, d?ici à la Saint-Jean, un atelier de 4 métiers unis tout travaillant, avec le mobilier.
S?adresser chez Mme Ve Buchalin, cours d?Herbouville, n° 35, au 1.er.

? A vendre, deux métiers de châle en 6/4 au 1/4.
S?adresser au bureau.

? A vendre, deux métiers de châle en 6/4 au 1/4 tout travaillant, mécanique en 2000.
S?adresser au bureau.

? On demande une fille à gage pour dévider et faire des canettes.
S?adresser à M. Martinon, grande place de la Croix-Rousse, n° 1, au 2.e.

 

 

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